Thème 1 : Quelques grandes questions que se posent les économistes
Chapitre 1: Qu’est-ce que l’économie ?
Objectifs :
Faire comprendre aux élèves pourquoi on parle bien d’une « science » économique et donc
leur faire intégrer la rigueur qui est attendue d’un élève en 1ere ES.
Un peu d’HPE : faire prendre conscience aux élèves que l’économie est une science vivante, pas de
consensus, mais des débats entre différents courants de pensée.
1. Economy vs economics
Terme polysémique. On peut trouver au moins 3 sens au mot « économie » :
-Economiser, faire des économies = épargner dans le vocabulaire économique
-Etre un acteur de l’économie. Par exemple un patron de PME, un salarié…
-Faire de l’économie = être économiste ou essayer de l’être
On va s’intéresser ici essentiellement aux deux dernières définitions : faire de l’économie et être un
acteur de l’économie.
En anglais, il existe deux mots distincts pour désigner les deux sens du mot « économie » qui nous
intéressent :
-economy désigne la sphère réelle de l’économie qui englobe:
L’économie comme pratique : (Grec oikonomia = administration d’un foyer) -> activité humaine qui
consiste en la production, distribution, échange, consommation de biens et de services. On
s’intéresse ici aux acteurs de l’économie. Vous avez un rapport quasi quotidien avec cette economy,
par exemple quand vous allez chercher votre croissant chez le boulanger (consommation), travaillez
pendant l’été (production), mettez l’argent gagné sur votre compte épargne à la banque (épargne) …
L’economy, c’est aussi, la situation économique d’un pays : croissance, inflation, chômage … -> ici
aussi rapport quasi quotidien car on en entend parler tous les jours à la TV ou dans les journaux.
-economics désigne l’étude des économies existantes, de ce qu’on a appelé la sphère réelle. C’est
donc une discipline. On peut parler de sciences économiques.
Dans le cadre du cours de SES, on abordera ces deux aspects de l’ « économie » : on s’intéressera à
la fois à la théorie économique, certaines parties du cours seront donc assez techniques et pourront
parfois sembler éloignées du réel mais on s’intéressera aussi à l’économie concrète, réelle qui nous
entoure de manière scientifique et donc en abordant des concepts, définitions qui permettent de
penser la dette, l’inflation, le chômage, la production, la croissance, la crise, etc.
Eventuellement : Exercice : Dire si ces propositions relèvent de l’économie comme pratique ou de
l’économie comme science :
1) Monique suit attentivement l’actualité de la bourse pour placer son argent. -> pratique
2) L’INSEE réalise chaque trimestre une « Enquête emploi » afin de déterminer le nombre de
chômeurs en France. -> Science économique : une enquête statistique + suggère de définir ce
qu’est un chômeur en amont, donc poser des critères.
3) Elie, professeur de SES, décide de placer ses économies sur son Plan Epargne Logement
plutôt que sur son livret A car celui-ci rémunère mieux. -> pratique
4) Jean-Pierre, patron d’une petite PME, regrette de ne pas pouvoir embaucher de salariés
supplémentaires car les charges sociales sont trop élevées. -> pratique
5) John-Maynard montre que baisser les salaires ne permet pas de faire baisser le chômage car
la baisse des salaires entraine une baisse de la consommation des ménages et donc une
baisse de la demande adressée aux entreprises. -> science : analyse de mécanismes.
Cette distinction entre économie comme pratique et économie comme science est souvent la
cause de tensions ou d’une incompréhension entre les acteurs de l’économie (les entreprises, les
ménages, les salariés, vous, moi) et les économistes. Ainsi, On reproche régulièrement aux
économistes et aux professeurs de SES en particulier de ne rien connaître et de ne rien comprendre
à l’économie. Ce discours provient souvent des chefs d’entreprise qui accusent notamment les profs
de SES de ne pas connaître le fonctionnement d’une entreprise (débat sur les sujets de Bac en SES
critiqués par le MEDEF).
Est-ce vrai et que répondre ?
Tout d’abord, ces reproches montrent une confusion entre économie et sciences économiques.
Etant donné que tous les individus sont, à leur niveau, acteurs de l’économie et que chacun est en
relation constante avec l’économie réelle (par la consommation, le travail, l’épargne, l’emprunt, le
prêt, l’embauche de salariés éventuellement), tout le monde est capable d’observer, de
commenter et de porter un jugement sur le fonctionnement de l’économie. C’est ce que fait un
consommateur qui trouve que « tout augmente » ou un patron qui considère qu’il paie trop de
« charges sociales ».
Ces discours sur l’économie par les acteurs de l’économie ne sont pas des discours scientifiques,
qui s’appuient sur la science économique car ce sont des discours subjectifs, qui ne tiennent
compte que d’une réalité : la leur = une vision partielle. Le premier travail de l’économiste est
d’aller au-delà de ces perceptions communes et d’établir des faits et des connaissances rigoureux
et objectifs.
Prenons l’exemple, d’un chef d’entreprise qui explique qu’il serait facile de réduire le chômage, il
suffirait de baisser les « charges sociales » cad des prélèvements effectués sur le travail pour
financier le système de santé et de retraite. Mais le chef d’entreprise qui est un acteur de l’économie
a une vision de l’économie souvent partielle Cette diminution des cotisations sociales, si elle pourrait
effectivement avoir un effet positif sur l’emploi, comme le prétendent les chefs d’entreprise, aurait
un effet désastreux sur le système de santé et le régime des retraites financé par ces mêmes
cotisations sociales. L’économiste, celui qui fait de la science économique, doit donc mesurer les
gains sur l’emploi d’une telle réforme mais aussi les effets négatifs que cette réforme peut
engendrer, effets négatifs ignorés par ces chefs d’entreprise qui ne voient qu’une partie de la réalité :
la leur.
(Autre exemple : les consommateurs, qui sont des acteurs de l’économie,perçoivent depuis le
passage à l’euro une hausse régulière et importante des prix. Pourtant, si l’on observe une hausse
des prix des produits de consommation courante comme l’alimentation, elle est plus que compensée
par la baisse des prix d’autres produits tels que les produits à haute technologique. Résultat : selon
l’Insee, il n’y a pas ou très peu d’inflation (hausse généralisée du niveau des prix) depuis 2 ans (moins
de 2%/an) alors que les ménages perçoivent le contraire.)
Cela explique que les discussions sont parfois compliquées et tendues entre les acteurs de
l’économie et les spécialistes, les théoriciens, qui ne se placent pas au même niveau et qui ont
souvent une vision plus générale, large, des phénomènes. Cela ne veut pas dire que la vision des
chefs d’entreprise et des acteurs de l’économie en général, est fausse mais cela signifie que cette
vision n’est que partielle.
Ensuite, la connaissance des réalités de l’entreprise n’est pas l’objectif des sciences économiques.
Les SES n’ont pas pour objectif direct de former des salariés et des chefs d’entreprise (eceonomy).
L’objectif des SES est de donner des clés pour comprendre le fonctionnement et l’actualité du monde
économique et social (economics). Un médecin n’est pas formé à être malade, il est formé à
comprendre le fonctionnement du corps humain pour soigner des maladies. Idem pour l’économiste
il n’est pas formé pour être un acteur de l’éco mais observateur objectif.
On a donc vu qu’il fallait distinguer le fait d’étudier les sciences économiques (economics) du fait de
faire partie de l’économie « réelle » (economy) mais cette séparation entre la science économique
et l’économie réelle peut parfois être artificielle pour deux raisons.
1/ Tout d’abord, la théorie économique a des conséquences très concrètes sur le fonctionnement
de nos économies. En effet, les politiques économiques mises en place par les gouvernements, les
institutions européennes et internationales s’appuient sur la théorie économique. Ainsi, la politique
de la BCE, de la Commission européenne et du FMI à l’égard de la Grèce s’appuie sur les travaux
d’économistes qui montraient qu’une politique de rigueur était indispensable au vu de
l’endettement du pays. Savez-vous ce qu’est une politique de rigueur ? Politique de rigueur =
politique de baisse des dépenses publiques et/ou d’augmentation des recettes fiscales et donc
impôts (=PO). Concrètement, cela s’est traduit en Grèce par des licenciements massifs de
fonctionnaires, des coupes dans les retraites et les salaires, le report de l’âge légal de départ à la
retraite à 67 ans, la baisse du SMIC, la réduction des remboursement de médicaments, la hausse de
divers PO (TVA, taxes sur l’essence, le diesel et l’alcool), la vente d’entreprises d’Etat (eau, gaz,
pétrole, jeux).
Mais, il y a quelques mois (janvier 2013), des économistes du FMI ont publié un article dans lequel ils
font état d’une erreur d’estimation dans leurs travaux précédents, erreur qui les a conduit à sous-
estimer les conséquences néfastes pour l’économie elle-même d’une politique de rigueur, en termes
de baisse de la consommation essentiellement. Pol de rigueur = baisse des dépenses publiques ou
hausse des PO =>baisse de la consommation => baisse de la production => chômage et baisse de la
consommation qui entretient la baisse de la production… On reviendra -dessus dans le courant de
l’année.
2/De l’autre côté, l’économie réelle fait évoluer la théorie économique et la recherche en
économie. Par exemple, la crise économique actuelle dont les origines remontent à 2007 a conduit à
une remise en cause partielle de la théorie économique qui ne disposait pas des outils pour penser,
prévoir et résoudre une crise de ce type et de cette ampleur : « crise de l’économie, crise de la
science économique ? »
2. Un peu d’histoire de la pensée économique
A quand remonte la science économiste et comment la science économique a-t-elle évoluée ?
Passage obligé mais assez rapide sur les grands courants de la pensée économique. C’est nécessaire
pour :
- Comprendre que l’économie n’est pas une science consensuelle : il existe des débats
entre économistes. Une blague d’économistes dit que les économistes ne sont jamais
d’accord entre eux.
- Ce n’est pas une science figée : il y a des évolutions, des « révolutions », des remises en
causes de certaines théories, qui parfois reviennent sur le devant de la scène.
- On ne peut pas comprendre comment raisonnent les économistes aujourd’hui si on ne
fait pas d’HPE.
Les premiers « vrais » économistes : les économistes classiques : le plus célèbre d’entre eux Adam
SMITH (La richesse des nations 1776). Autres auteurs : David Ricardo (Anglais) et Thomas Malthus
(Anglais) :
- Objets d’études communs : quelle est la source de la valeur ? quels facteurs régissent la
croissance économique. Etudie la production, la répartition et l’échange des richesses.
- Des économistes libéraux (même si à relativiser pour Smith) : défendent la liberté
individuelle, la propriété privée. Pense que l’Etat doit intervenir le moins possible et
laisser faire le marché. -> partisans du « laissez-faire ».
- Méthode : débuts de la formalisation et du savoir scientifique.
Les économistes néoclassiques : à partir des années 1870s, on parle d’une « révolution
néoclassique », avec des auteurs qui vont renouveler la pensée des classiques (d’où le terme de
« neo » classiques). Trois auteurs principaux : Léon Walras (français), Karl Menger (autrichien) et
Stanley Jevons (anglais).
- Continuité avec les classiques : des libéraux, défenseurs de la liberté individuelle et de la
propriété privée. Vont encore plus loin dans la critique de l’intervention de l’Etat.
- Rupture sur l’objet de la science économique : devient la science des choix rationnels.
- Rupture méthodologique : approche microéconomique (étudient les comportements
individuels plutôt que les grandeurs macroéconomiques) + formalisation mathématique
très poussée.
La pensée NC va être la pensée dominante en économie jusque les années 1930s et la « révolution
keynésienne »
La révolution keynésienne : John Maynard Keynes, économiste anglais 1930s. Développe une
nouvelle théorie économique, en partant de la critique des NC.
- Critique la théorie NC
- Invente la macroéconomique.
- Réhabilite le rôle de l’Etat dans l’économie : l’Etat doit intervenir pour relancer la
croissance et lutter contre le chômage.
Jusque dans les années 1975, les idées keynésiennes sont acceptées et largement appliquées par les
différents gouvernements.
Depuis la fin des années 1970s : retour des néoclassiques. La théorie keynésienne va être mise à mal
car les politiques économiques n’arrivent plus à relancer la croissance et réduire le chômage. On voit
un retour en force de la pensée néoclassique, libérale. Avec notamment les monétaristes et Milton
Friedman.
Aujourd’hui la théorie NC est la théorie dominante en économique, on les appelle les économistes
orthodoxes (= la majorité), la théorie standard. Ce qui ne veut pas dire que tous les économistes sont
NC attention, il existe encore des keynésiens et même des marxistes mais ils sont marginalisés.
Exercice : à quel courant de pensée peut-on relier ces affirmations ?
-Pour sortir de la crise économique, il faut que l’Etat mène une politique de relance budgétaire
(hausse des dépenses publiques ou réductions d’impôts).
-Les aides sociales issues de la redistribution des revenus mise en place par l’Etat désincitent les
individus à travailler.
-Le chômage s’explique par un SMIC trop élevé.
3. Micro ou macro ?
En économie, on distingue traditionnellement deux approches, deux manières d’étudier les
phénomènes économiques : la micro et la macro.
Partir du doc. 3 Belin : Questions micro ou macro ?
1. Formulez les questions manquantes.
-Quelle est la part du RDB des Français qui est consommée ?
-Pourquoi une entreprise décide-t-elle d’investir ?
3. Quel est le niveau d’analyse de la macroéconomie et celui de la microéconomie ?
Nous avons vu que la microéconomie est liée à la théorie néoclassique. Comme son nom l’indique, la
micro s’intéresse au petit. En économie, le petit c’est l’individu, l’agent économique. La micro
s’intéresse ainsi aux comportements des individus dans différentes circonstances (et en partant du
principe que les ressources sont limitées). On peut donc définir l’approche micro comme l’analyse
de phénomènes économiques menée à l’échelle des acteurs économiques individuels. On s’intéresse
ainsi aux décisions d’un consommateur ou d’un producteur, éventuellement d’une entreprise. Les
individus sont étudiés de manière isolée, on ne prend pas en compte le fait que le choix d’un individu
peut dépendre de celui des autres et de la société ou du groupe social dans lequel il vit. La
microéconomie ne s’intéresse pas à la société dans laquelle les individus agissent et font leurs choix.
A l’inverse, la macroéconomie s’intéresse au grand et non pas au petit. On ne s’intéresse pas aux
comportements d’individus isolés mais à des phénomènes économiques comme la croissance, le
chômage à l’échelle d’une nation (par exemple la France). La macroéconomie est l'approche
théorique qui étudie l'économie à travers les relations existant entre les grands agrégats
économiques, le revenu, l'investissement, la consommation, le taux de chômage, l'inflation, etc. La
macroéconomie constitue l'outil essentiel d'analyse des politiques économiques des États ou des
organisations internationales. J. M Keynes est considéré comme le re fondateur de la
macroéconomie.
D’autres exemples à classer :
1. Une entreprise décide d'investir c'est-à-dire d'acquérir du capital fixe. (micro)
2. L'investissement en France a augmenté. (macro)
3. Tony, vu sa contrainte budgétaire décide d'acheter un DVD en plus. (micro)
4. La consommation totale de DVD dans la zone euro a augmenté de 5% ce mois-ci. (macro)
Doc. 3 p. 31 Hatier : Un ensemble n’est-il que la somme de ses parties ?
1. En quoi l’approche macro diffère-t-elle de l’approche micro ?
CF définitions précédentes. Pour les économistes néoclassiques qui font de la micro, analyser le
comportement d’un individu est censé permettre de comprendre le fonctionnement de l’économie
toute entière : l’économie dans son ensemble est vue comme la somme des parties.
A l’inverse, la macro repose sur l’idée qu’un ensemble n’est pas réductible à la somme de ses
composantes et ne peut donc pas être compris qu’en référence aux comportements individuels :
problème du no bridge.
2. Précisez le sens du passage souligné.
C’est le problème du no bridge souligné par les économistes qui font de la macro. En l’occurrence,
le « sophisme de composition consiste à croire que ce qui est vrai à l’échelle microéconomique
l’est nécessairement à l’échelle macroéconomique. D’où lexemple de l’épargne : cest un
comportement individuel dont on peut penser quil est collectivement vertueux (le financement des
investissements en sera grandement facilité) mais dont la généralisation peut engendrer une
épargne macroéconomique trop importante et, ce faisant, s’avérer vicieuse l’échelle de la nation
tout entière, cet excès d’épargne ne peut quinhiber le sir d’investir car, sauf si les exportations
augmentent suffisamment, il influe négativement sur les débouches de lappareil productif). Autre
exemple, keynesien : si la baisse des salaires est profitable pour une entreprise (baisse des couts),
une baisse généralisée des salaires va freiner la croissance (baisse de la demande).
Idem pour l’abstention : à titre individuel, le fait de ne pas voter peut sembler inutile, « une goute
d’eau » qui ne changera rien au résultat mais si ce comportement est généralisé : BIM 21 avril 2002.
Transition : Dans le prochain chapitre, on va faire de la microéconomie, on va s’intéresser aux
individus, à la manière dont ils font des choix. Ce prochain chapitre relève des sciences économiques,
de la théorisation, de la conceptualisation de l’économie et non pas de l’économie « réelle » :
economics. On s’intéressa à la manière dont les sciences économiques décrivent le comportement
des agents économiques.
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