Colloque international - Colette NOYAU

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Colloque international
24-26 février 2005
APPROPRIATION DU FRANÇAIS
ET CONSTRUCTION DE CONNAISSANCES
VIA LA SCOLARISATION EN SITUATION DIGLOSSIQUE
Le français a un statut de langue officielle et/ou de langue d’enseignement dans plusieurs pays
d’Afrique et de l’Océan indien. Il est en contact et parfois en concurrence avec d’autres
langues autochtones ou internationales et n’est pas une langue première pour la majorité de la
population. L’école maternelle ou l’école primaire sont bien souvent les seuls endroits où
l’enfant est mis en contact avec le français.
Dans ce contexte de diglossie, le système éducatif monolingue en français semble peu capable
de rendre ces pays véritablement francophones. C’est ainsi que dans certains pays une
scolarisation bilingue a été mise en place, afin de conforter et d’améliorer la présence du
français et d’assurer une présence non conflictuelle des langues autochtones qui se montrent
dynamiques.
Ce colloque s’intéresse à la genèse du sujet bilingue francophone en situation diglossique, à
travers la scolarisation en français et l’expérience langagière dans l’environnement en langues
premières. Il vise à dégager, à partir des données concrètes du terrain, les conditions
favorables à un bilinguisme fonctionnel pour les jeunes issus de l’école francophone. Il entend
mener la réflexion sur l’appropriation du français et la dynamique du devenir bilingue chez
les enfants scolarisés, selon quatre axes :
1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement bilingue des enfants
Il s’agit en premier lieu de comprendre les processus en jeu dans l’apprentissage de la langue
de scolarisation et de travail, dans un environnement bilingue français / langue autochtone. En
comparant la réalisation par les enfants d’activités langagières précises en langue première et
en français, on peut estimer les capacités communicatives déjà construites par les enfants dans
leur langue d’usage, et l’appui que ces capacités peuvent offrir pour le développement des
capacités langagières en français.
En s’appuyant sur les processus d’apprentissage analysés et sur les caractéristiques
spécifiques de ces situations d’acquisition et d’utilisation de la langue, on peut espérer
dégager des modalités d’amélioration des démarches d’enseignement du français langue
seconde et de l’ensemble des matières scolaires à travers elle.
2. L’enfant dans son contexte linguistique : entre l’école et le milieu social
On étudiera l'insertion des enfants comme locuteurs dans un environnement plurilingue.
Examiner les pratiques langagières quotidiennes des enfants élèves de l'école francophone
peut contribuer à évaluer la fonctionnalité de leur plurilinguisme. Celles-ci peuvent être
étudiées dans des environnements linguistiques spécifiques et situées dans leur dimension
culturelle (caractéristiques discursives des différents types d'interaction, routines discursives,
usage et niveaux d'emploi des langues, rencontre avec des variétés de la langue française
1
extérieures à celles de l'école, emploi de la langue autochtone à l'école, alternances codiques,
etc.).
Quel bi(pluri)linguisme fonctionnel pour les jeunes issus de l'école francophone? On tentera
de cerner les compétences bilingues de ces enfants : dans quelle mesure le français, en tant
que composante de leur répertoire verbal à côté d'un ou de plusieurs parlers autochtones,
devient-il une langue de communication, et comment gèrent-ils les situations plurilingues ?
3. L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au monde de l’écrit
L’école en tant qu’environnement langagier sera examiné selon trois perspectives :
• L’exposition au français L2 de l’environnement scolaire et les occasions de communiquer à
l’école : enquêter sur les situations didactiques et les activités de classe, pour la langue
française et les autres matières, de façon à cerner comment l’école et la classe constituent un
environnement écologique spécifique d’appropriation du français pour les enfants scolarisés.
• La transmission et la construction de connaissances scolaires via la langue seconde :
comment se résout la double tâche de construire des connaissances dans une langue qui est
elle-même à acquérir ? Comment cette double tâche peut-elle être aménagée, de façon à
potentialiser à la fois l’appropriation de la langue et le développement cognitif des enfants ?
• Le statut de l’oral et de l’écrit dans l’apprentissage scolaire du français : quelles sont les
conceptions de la littéracie à l’œuvre dans le système scolaire, et plus largement dans une
société diglossique, et quelles en sont les implications pour faire des élèves des lecteursscripteurs autonomes ?
4. Les représentations de la langue, de l’école, des apprentissages
Quelles sont les représentations du français, de l’enseignement et de l’apprentissage, chez les
enfants, les parents, et les enseignants, et quelles en sont les implications ?
Le rapport à la langue orale et à l’écrit, à l’école et au dehors, peut être scruté notamment par
des questionnaires et entretiens de nature métalinguistique, sur les représentations de la langue
française, de son apprentissage, de l’oral et de l’écrit, sur les habitudes de lecture et de
fréquentation de médias francophones, etc. On abordera ici les notions de norme et d’écart à
la norme du français : comment cerner le français de référence pour les enfants qui acquièrent
cette langue via la scolarisation, et comprendre leurs positionnements, et ceux des éducateurs,
face à ces normes ?
L’un des objectifs de ce volet est aussi d’apporter des éléments de réponse à cette question en
faisant le lien entre apprentissage, langues et cultures. La dimension culturelle joue un rôle
clé, explicitement ou non, dans l’apprentissage des langues, dans l’enseignement, et aussi
dans la formation des enseignants. Le comportement de l’apprenant, particulièrement en ce
qui concerne le français, peut aussi dépendre de l’image de la langue dans le milieu familial et
social, ainsi que des représentations que les adultes de son entourage – et parmi eux ses
enseignants - entretiennent sur ce que c’est qu’apprendre et les missions de l’école.
2
Comité scientifique
Thomas BEARTH, PR Université de Zürich (Suisse)
Robert BOUCHARD, PR U. de Lyon 2
Jean-Pierre CAPRILE, DR CNRS, Paris
Moussa DAFF, PR U. Cheik Anta Diop, Dakar (Sénégal)
Alpha Mamadou DIALLO, Vice-recteur à la recherche, U. de Conakry (Guinée)
Danièle FLAMENT, PR U. Paris-X
Françoise GADET, PR U. Paris-X
Gisèle HOLTZER, PR U. de Besançon
Suzanne LAFAGE, PR ém. U. Paris 3
Denis LEGROS, PR IUFM de Créteil et U. Paris 8
Jacques MAURAIS, PR, Office Québecois pour la Langue Française, Montréal
Colette NOYAU, PR U. Paris-X
Louis-Martin ONGUENE-ESSONO, PR ENS de Yaoundé (Cameroun)
Bernard PY, PR ém. U. de Neuchâtel (Suisse)
Ambroise QUEFFELEC, PR U. Aix-en Provence
Anne SALAZAR-ORVIG, PR U. Paris 3
Issa TAKASSI, PR U. de Lomé (Togo)
Michèle VERDELHAN, PR IUFM et U. de Montpellier 3
Comité d’organisation
Lamia ALLAL
Vanessa ASSAYA
Olivia BINGANGA
Mayé DIOUF
Guilhem FLORIGNY
Françoise GADET
Jorge GIACOBBE
Maria KIHLSTEDT
Hélia LISSAK
Montserrat MARTINEZ
Isabella Cam Ngoc NGUYEN LAM
Colette NOYAU
Hasung PARK
Julie PEUVERGNE
Celia PIRES PEREIRA
Silvia ROMEO
Maxime SOME
Jia TAN
Alexandra VRACIU
3
Jeudi 24 février
9h
9h30
10h-10h30
10h30-11h
11h-11h30
11h30-1200
12h-12h30
12h30-14h
Accueil
Ouverture du colloque
Axe 1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement
bilingue des enfants (1)
Président de séance : Françoise GADET
BITJAA KODY Zachée Denis, Cameroun
Le développement bilingue (langue maternelle – français) des élèves du
programme PROPELCA.
TRÉFAULT Thierry, France
L’enfant scolarisé en milieu rural bambarophone (Mali). L’entrée dans
l’écriture en langue nationale et en français
Pause
Axe 2. L’enfant dans son contexte linguistique : entre l’école et le
milieu social (1)
Président de séance : Robert BEYOM
SANOGO Mamadou Lamine, Burkina Faso
Le bilinguisme de transfert dans un contexte diglossique :Les écoles bilingues
de Tin – Tua (Fada Ngourma, Burkina Faso)
SOMÉ Maxime (Burkina Faso + France)
Analyse comparative des productions écrites des élèves : Éducation bilingue
vs Éducation monolingue. Cas du Burkina Faso, l’éducation bilingue, une
alternative au système éducatif de base ?
Repas
Axe 1. Les étapes de
l’acquisition du français et du
développement bilingue des
enfants (3)
Président de séance : Rachid
ARRAICHI
KOUADIO N’GUESSAN Jérémie (Côte
GBETO Souley Kossi (Togo)
d’Ivoire)
L’acquisition des énoncés complexes
Apprendre le /et en français :
en L1 (éwé) et en L2 (français) dans
parcours du combattant de l’écolier
les discours procéduraux et
africain.
explicatifs : comparaison
acquisitionnelle et typologique.
DIALLO Mamadou Saliou (Guinée)
AMEGASHIE Komla (Togo)
Rédaction française chez des élèves
Etude de la compétence langagière
pularophones de fin de primaire à
des enfants scolarisés en contexte
Conakry, Guinée : des compétences
diglossique à travers la description
en jeu.
d’images.
MALLAM GARBA Maman (Niger)
BWANGA Zanzi Jean-Pierre (R. D.
Congo)
Un plurilinguisme sans bilinguisme :
Les grammaires intériorisées du
le parcours du combattant du
Axe 2. L’enfant dans son
contexte linguistique : entre
l’école et le milieu social (2)
Président de séance : Gil Dany
RANDRIAMASITIANA
14h-14h30
14h30-15h
15h30-16h
locuteur kanuri du Niger
français en milieux multilingues à
Lubumbashi: structures, stratégies et
nature des différences
16h-16h30
Pause
4
16h30-17h
17h-17h30
17h30-18h
Axe 1. Les étapes de
l’acquisition du français et du
développement bilingue des
enfants (4)
Président de séance : Jérémie
KOUADIO NGUESSAN
BEDOU-JONDOH Edith (Togo)
Acquisition des énoncés complexes
par les élèves togolais du primaire et
du secondaire en situation
diglossique.
FILLOL V., NOCUS I., SALAUN M.,
VERNAUDON J., Fr (France +
Nouvelle Calédonie) <lue par Claire
MOYSE>
La prise en compte des langues
maternelles kanak favorise-t-elle
l’appropriation du français ? Bilan
d’étape d’une expérimentation en
Nouvelle-Calédonie.
SIMARD Yves (France)
L’école guinéenne et l’acquisition de
la morphosyntaxe verbale du français
Axe 2. L’enfant dans son
contexte linguistique : entre
l’école et le milieu social (3)
Président de séance : Martine
DREYFUS
MASSOUMOU Omer (Congo-Brazza)
Les usages linguistiques chez les
élèves des cours préparatoires dans
un quartier de Brazzaville : la place
du français.
DIOUF Mayé (Sénégal / France)
Les interactions dans les
pratiques langagières en classe à
l’école de base au Togo : le
couple question-réponse.
CISSÉ Alilou (Togo)
Etude comparée de la restitution
de récit et de la reformulation
narrative dans les établissements
du Togo en CM2 et en 5ème
Vendredi 25 février
9h-9h30
9h30-10h
10h-10h30
Axe 1. Les étapes de
l’acquisition du français et du
développement bilingue des
enfants (5, suite et fin)
Président de séance : JeanPierre BWANGA
AVOLONTO Aimé (Canada)
Apprentissage enfantin vs adulte du
français langue en milieu
institutionnel (Bénin)
Magali ITALIA (France)
Construction des connaissances
syntaxiques du français en situation
diglossique (Gabon)
AFOLA-AMEY Ufualè Christine
(Togo)
L’influence de la L1 sur la L2 dans le
processus d’acquisition du lexique
verbal des procès dans les récits
oraux des élèves togolais
10h30-11h
Axe 3. L’école et les langues en
présence, leurs usages, l’accès au
monde écrit (1)
Président de séance : Edith
BEDOU-JONDOH
BAGOUENDI-BAGERE Diane (Gabon
/France)
Attitudes des enfants face aux langues
en présence à Libreville (Gabon) et
conséquences sur la didactique du
français
DREYFUS Martine (France)
Pratiques de classes en milieu non
formel à Dakar et appropriation du
français.
TIRVASSEN Rada (Ile Maurice
Aménagement linguistique et déficit de
données empiriques : le cas de la
scolarisation à Maurice
Pause
5
11h-11h30
11h30-12h
Axe 4. Les représentations de
la langue, de l’école, des
apprentissages (1)
Président de séance : Omer
MASSOUMOU
RUI Blandine (France
Des enfants racontent : Entre
oralité et scripturalité en contexte
diglossique guinéen.
BEYOM Robert (R. Centrafricaine)
Le bilinguisme fonctionnel des
élèves de Centrafrique
Axe 3. L’école et les langues en
présence, leurs usages, l’accès au
monde écrit (2)
Président de séance : Alilou
CISSE
ARRAICHI Rachid (Maroc)
Les représentations de la langue
française chez l’élève marocain rural
AYEVO Jean (Gabon)
La déscolarisation dans la souspréfecture d‚Athiémé (1960-1999) ou
L’échec de la méthode formelle
d’enseignement du français
PEUVERGNE Julie (France)
Enseignants de Lomé (Togo), entre
pratiques et représentations
12h-12h30
LE ROHELLEC Solange (France)
Parler, lire, écrire en français : des
outils de socialisation dans
l’enseignement primaire à
Madagascar.
12h30-14h
Repas
Axe 3. L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au
monde de l’écrit (3, suite et fin)
Président de séance : Mamadou Saliou DIALLO
SAWADOGO François, LEGROS Denis & Emmanuelle MAITRE de PEMBROKE
(Burkina Faso + France)
Quelle place pour la langue maternelle mooré (L1) dans la construction et la
production de connaissances via la langue française à l’école au Burkina
Faso ?
ONGUENE-ESSONO Louis-Martin (Cameroun)
Compétence d’écriture en français chez les élèves bilingues et monolingues
du Cameroun
RANDRIAMASITIANA Gil Dany (Madagascar)
Représentations contrastées du français dans l’enseignement primaire en
contexte diglossique. Du façonnage sociolinguistique à la diversité des
répertoires verbaux des apprenants. Cas de deux classes de base malgaches.
14 h. - 14h30
14 h 30-15 h.
15h-15h30
15h30-16h
16h-16h30
16h30-17h
17 h - 17 h 30
18 h. 30 – 22 h.
Pause
Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des
apprentissages (2)
Président de séance : Yves SIMARD
Jacques BECUWE, France/Niger
Les Ecoles de la Seconde Chance au Niger : Enseignement bilingue et
contextualisation pédagogique dans un environnement monoculturel.
BURSTON Monique, USA
"Je suis obligée de mélanger les deux langues": Lycéens mélanésiens aux
prises avec leur bilinguisme
RANAIVO Velomihanta et Vololona RANDRIAMAROTSIMBA, Madagascar
Des langues-cultures aux pratiques de classe en contexte diglossique : quelle
cohérence ? L’exemple de Madagascar
Soirée interculturelle
6
Samedi 26 février
9h30-10h
10h-10h30
10h30-11h
11h-11 h 30
11 h 30 -12h
Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des
apprentissages (3)
Président de séance : François SAWADOGO
DAFF Moussa, Sénégal
Analyse des conséquences linguistico-didactiques de
l’acquisition/apprentissage du français en milieu plurilingue sénégalais : cas
des éléves de CM2
CORDIER Muriel, LEGROS Denis & MAITRE de PEMBROKE Emmanuelle,
France
Etude de l’effet du mode d’apprentissage : Formel (école) vs informel
(Internet) sur le développement de la compréhension et de la production en
langue seconde en situation de diglossie. Exemple du Togo.
Pause
Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des
apprentissages (4, suite et fin)
Président de séance : Maman MALLAM GARBA
KUBE Sabine, Allemagne
«On fait tout en français et on nous dit toujours d’apprendre le français.
Mais quel français apprendre encore?» - Représentations du français et de
son enseignement de lycéens abidjanais.
HOAREAU Yann & D. LEGROS, France
Effet de la langue maternelle (L1, créole de la Réunion) sur la
compréhension de texte explicatif en langue seconde (L2) en situation
diglossique. Rôle de la langue L1 dans l’activation de la Mémoire de Travail
à Long Terme
12 h. –14 h
14h -15 h 30 h
Buffet
Rapports de synthèse des 4 ateliers thématiques et discussion
Axe 1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement
bilingue des enfants
Aimé AVOLONTO, Maria KIHLSTEDT
Axe 2. L’enfant dans son contexte linguistique : entre l’école et le
milieu social
Zachée Denis BITJAA KODY, Monique BURSTON
Axe 3. L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au
monde de l’écrit
Blandine RUI, Maxime SOMÉ
Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des
apprentissages
Jean-Pierre CAPRILE, Thierry TRÉFAULT
Modérateur : Moussa DAFF
7
15h30-17h
Table-ronde sur les orientations de l’éducation de base
en situation diglossique et l’avenir de la francophonie
africaine
Présidence : Danielle LEEMAN (EDCC, Paris-X)
Intervenants :
Pierre JANIN (DGLFLF), Moussa DAFF (Dakar), Danielle LEEMAN (Paris-X),
Denis LEGROS (Créteil et Paris-8), Louis-Martin ONGUENE-ESSONO
(Yaoundé), Ambroise QUEFFELEC (Aix-en-Provence), Velomihanta RANAIVO
(Antananarivo)
Modérateur : Colette NOYAU
17h
Clôture du colloque
COMMUNICATION ACCEPTEE
AYEWA Noël Kouassi (Côte d’Ivoire)
Récit, influences culturelles et analyse des productions des apprenants ivoiriens. Pour une pédagogie
fonctionnelle de la performance communicative en français langue seconde.
COMMUNICATIONS AFFICHÉES
ANCIAUX Frédéric, France (Antilles-Guyane)
Pratiques langagières et pratiques sportives en situation de diglossie dans la Caraïbe.
BURGAT Sandrine, France
La personne sourde et le bilinguisme LSF/ français écrit. Comment accéder à l’écrit du français quand
on est locuteur de la langue des signes ?
Guilhem FLORIGNY, France
Représentations des langues à travers la référence aux entités dans l’appropriation du français par des
enfants créolophones mauriciens
8
AFOLA-AMEY Ufualè Christine:
L’influence de la L1 sur la L2 dans le processus d’acquisition du lexique verbal de procès
dans les récits oraux des élèves togolais.
L’acquisition et le développement de la langue première ou seconde ne peuvent se faire sans
le lexique verbal. Pour cela, le locuteur ou l’apprenant élabore des stratégies spécifiques
propres à chaque langue pour faciliter son acquisition. En effet, selon Slobin (1991), certains
traits typologiques des langues influencent le locuteur au moment de la conceptualisation et
de la formulation du message. A ce niveau, le locuteur ou l’apprenant en L2 s’appuie sur ces
traits typologiques pour atteindre sa visée communicative même avec un lexique verbal
pauvre. Ainsi, au cours des phases développementales d’acquisition des langues, plus le stock
du lexique de désignation des procès est peu fourni, plus l’apprenant ou le locuteur recourt à
la L1.
Dans ce travail, nous montrons comment la langue gin-mina (L1) (famille de langue kwa du
Togo) de par la structure complexe de son lexique verbal [cas des constructions verbales
sérielles (Boler-Richard, 1978) ; (Bédou, 1980) ; (Afola, 2002) ] permet aux élèves togolais
de construire des récits cohérents en français (L2 même avec un lexique verbal peu riche). En
effet, ils s’appuient sur les schèmes de lexicalisation (Talmy, 1985,1991) de procès de leur
langue (L1) pour produire le lexique verbal de procès en L2.
A partir des récits d’images [support « Chat et Oisillons » de Hickmann & Hendricks (19951998)] collectés en gin-mina et français au niveau des classes de CM2 et 5e dans le cadre du
projet CORUS/AUF cognitique), nous analysons et comparons la nature de cette influence au
niveau de l'organisation globale et dans les structures discursives des récits dans les deux
types de langue et aux deux paliers d’acquisition.
Cette analyse et comparaison tiennent compte, plus précisément, au plan conceptuel, du degré
de l'organisation globale des événements suivant les langues et les deux paliers d’acquisition.
A ce niveau, nous répartissons les différents récits en énoncés et en propositions dans la trame
discursive dans le but d'étudier et de comparer les types et la nature des procès Noyau ( 2001)
représentés par chaque locuteur.
Au plan linguistique nous analysons le traitement lexical des procès dans les deux plans
discursifs. A ce niveau, nous étudions la structure lexicale du lexique de désignation de procès
(Boler-Richard, 1978) ; (Bédou, 1980) ; (Afola, 2002) pour comparer le degré de
spécification sémantique des procès de même que les choix de granularité temporelle (Noyau
& Paprocka 2000) opérés par les différents locuteurs dans le but d'analyser la nature du
lexique verbal de désignation de procès Viberg, (1998, 2002) composant les procès de
stratégies utilisées en L1 par les apprenants pour atteindre leur visée communicative en L2.
9
AMEGASHIE Komla :
Etude de la compétence linguistique des enfants scolarisés en contexte diglossique à travers
les descriptions d’images.
Notre travail vise à décrire l’utilisation de deux langues en contexte diglossique dans le genre
descriptif notamment la description d’image. En effet, le Togo est un pays où existent et
cohabitent aux côtés du français (L2) un ensemble de parlers locaux dont l’éwé ou éwégbe
(L1).
« L’appropriation de la langue française dans cet environnement s’effectue majoritairement à
travers la scolarisation, par et pour des activités langagières et dans des interactions concrètes.
La situation linguistique des enfants que nous étudions est complexe, puisque, comme pour la
plupart des pays d’Afrique subsaharienne, ils grandissent au sein d’un environnement qui ne
sera pas celui de leur langue de scolarisation et, pour la plupart d’entre eux, la première vraie
rencontre avec le français se fait lors de leur entrée à l’école primaire. La situation
linguistique étudiée se caractérise par une expérience fortement asymétrique du français et de
la (des) langue (s) première (s) » (NOYAU, 2001)
Cette étude qui s’inscrit dans le cadre du Projet multilatéral CORUS/AUF/Cognitique intitulé
« Appropriation du français langue d’enseignement et de scolarisation en situation
diglossique » vise à montrer à partir des descriptions d’image produites par les élèves (10) des
CP (7/8 ans) en éwé (L1) et en français (L2) comment ces enfants gèrent leur compétence
linguistique dans cet environnement bilingue.
Nous utilisons pour l’analyse des données obtenues au cours de l’enquête transversale réalisée
au Togo en milieu scolaire. Ces données orales sont transcrites en énoncés et propositions
selon Berman & Slobin (1995)
Une comparaison des deux productions orales en L1 et L2 nous permettra d’analyser le
contexte diglossique des enfants.
10
ANCIAUX Frédéric :
Pratiques langagières et Pratiques sportives en situation de diglossie dans la Caraïbe
Dans la Caraïbe, l’emploi de deux langues au statut inégal est courant dans les situations de
communication, et de fait, la population est généralement bilingue français/créole. Dans ce
contexte diglossique, le présent travail s’est intéressé aux usages et aux effets des langues au
cours des pratiques physiques et sportives en Guadeloupe et en Haïti. Le problème soulevé
concerne plus particulièrement l’emploi de la langue vernaculaire et de la langue officielle au
sein des situations de communication en sport. Quelles sont les adaptations langagières et
linguistiques de l’intervenant en Guadeloupe face aux spécificités des apprenants et des
situations de communications rencontrées? Comment les langues sont-elles utilisées par les
apprenants au sein des pratiques d’activités physiques et sportives ?
Cette étude de type exploratoire et ethnométhodologique s’est appuyée sur la théorie de
l’action située. Nous avons examiné les pratiques langagières des intervenants et des
apprenants au cours des pratiques physiques et sportives en Guadeloupe et en HaÏti. Puis nous
avons passé des entretiens avec des enseignants d’EPS et des entraîneurs sportifs en vue de
décrire et de comprendre l’usage et les effets des langues dans leurs pratiques. L’ensemble des
entretiens a été analysé à l’aide d’une méthode d’analyse du discours et d’un logiciel
informatique d’Analyse de Données Textuelles. Cette méthode a permis d’extraire des
entretiens des types d’actes de discours, un vocabulaire spécifique, des structures signifiantes
et des mondes lexicaux au sein des réponses données par les intervenants et les pratiquants
interrogés. L’analyse des résultats montre, d’une part, que les enseignants rationalisent leurs
réponses, tandis que les entraîneurs font part des normes et des principes auxquels ils croient.
D’autre part, la langue créole apparaît comme un moyen de communication réel, ponctuel et
efficace au cours des pratiques physiques et sportives en Guadeloupe. Son emploi dépend
principalement des caractéristiques des enfants, de la situation. Il permet de résoudre des
problèmes de compréhension, de rétablir la discipline, de faire de l’humour, d’augmenter la
motivation ou l’attention, d’exprimer des émotions ou des images. Chez les apprenants, le
créole apparaît surtout lorsqu’il s’agit d’exprimer ses sentiments et ses émotions. A noter
également que certains enfants traduisent en créole à leurs camarades créolophones les
consignes données en français. Ainsi, la langue vernaculaire apparaît au côté de la langue
officielle dans la relation éducative dans les apprentissages moteurs aux Antilles françaises.
En outre, les pratiques sportives s’avèrent également constituer un espace dans l’école où le
français peut être appris par et avec le corps. En Haïti, plus particulièrement, l’EPS permet à
certains enfants d’apprendre et d’entendre le français.
En conclusion, cette recherche s’est intéressée à la genèse du sujet bilingue français/créole en
situation de diglossie dans la Caraïbe, à travers ses pratiques sportives et ses expériences
langagières. Elle vise à repérer les conditions sociolinguistiques favorables à l’apprentissage
d’habiletés motrices afin de proposer des pistes de réflexion concernant l’enseignement de
l’éducation physique et sportive en milieu diglossique. Elle propose également de concevoir
cette discipline scolaire comme un moyen d’appropriation de la langue française à des enfants
créolophones.
11
ARRAICHI Rachid :
Les représentations de la langue française chez l’élève marocain rural.
Nous nous intéressons tout particulièrement aux représentations qu’ont les élèves marocains
ruraux de la langue française et des autres variétés linguistiques en usage sur le marché
scolaire (l’arabe standard, l’anglais et l’espagnol) et le marché extra-scolaire (l’amazighe et
l’arabe dialectal). Il nous a été impossible de contourner les représentations linguistiques dans
une étude qui voulait montrer l’importance des facteurs sociolinguistiques dans le processus
d’enseignement/apprentissage de la langue française.
En effet, nous avons établi empiriquement le fait que l’élève rural éprouve d’énormes
difficultés à appréhender la langue française et que ces difficultés prennent naissance dès le
premier contact avec cette langue à l’école primaire et s’amplifient tout au long du cursus
scolaire. Nous avons aussi réussi à expliquer ce problème par l’écart saillant qui existe entre
la culture scolaire que porte notamment le français et la culture que véhiculent les variétés
linguistiques sociales, l’amazighe en l’espèce : il est pratiquement impossible , pour un élève
rural, d’apprendre une langue dont l’enseignement est fondé entièrement sur l’approche
maximaliste de la communication qui nécessite un usage intensif de la langue dans des
situations réelles. Pour le cas du Maroc, où le français investit surtout les champs de
production symbolique et matérielle liés à la modernité, ceux qui utilisent cet idiome de
manière fréquente dans des situations réelles de communication sont, de loin, les personnes
qui, de par leur condition sociale très favorable, entretiennent un rapport étroit avec la vie
moderne et le modèle culturel qu’elle implique. Le monde rural demeure pour l’heure le
bastion de la tradition et, donc, les possibilités d’usage effectif du français y sont
manifestement réduites.
Il est cependant un fait important à souligner : les difficultés éprouvées en matière de
français sont paradoxalement corrélatives de représentations positives de cette langue et,
inversement et dangereusement, de représentations négatives des idiomes sociaux. Plus, les
langues scolaires et les langues sociales véhiculant, nous l’avons précisé, des modèles
culturels contrastés, il s’ensuit une consécration/valorisation de celui porté par les premières
et une stigmatisation/dévalorisation de celui relatif aux secondes.. L’élève rural, ayant
intériorisé l’importance du français dans la réussite scolaire et sociale, manifeste une très
forte motivation pour son apprentissage et exprime à travers les représentations qu’il s’en fait
un attachement inconditionnel au modèle culturel moderne. Il est donc impensable que les
difficultés qu’il éprouve en la matière soient le fait, comme d’aucuns ne cessent de le
répéter, du manque de motivation ou de représentations négatives à propos du français. Les
résultats recueillis à ce niveau remettent en question le rôle déterminant des facteurs
psychologiques ( les motivations ) ou psychosociologiques ( les représentations ) dans la
genèse et l’évolution des difficultés scolaires en matière de français. Ils consolident, par
contre, la thèse de l’importance du facteur sociolinguistique.
Nous souhaiterions exposer les résultats de notre investigation sur la population rurale ceux
notamment concernant les représentations linguistiques. Ces résultats, il faudrait maintenant
le préciser, ont été obtenus dans le cadre d’une recherche de doctorat en sociolinguistique,
que nous avons effectuée en milieu rural marocain, plus précisément dans la commune rurale
de Bni Tadjit de la province de Figuig ( sud-est du Maroc ), auprès de 179 lycéens par
l’application d'un échantillonnage aléatoire systématique.
12
Les difficultés cuisantes éprouvées par les élèves ruraux en matière de français, au cycle
secondaire notamment, ont été repérées, quant à leur nature et leur ampleur, dans les copies
d’examen que nous avons pu aisément recueillir auprès des enseignants, du fait que nous
même faisions partie du corps enseignant le français au secondaire à Bni Tadjit pendant cinq
ans. L’activité que nous avons ciblée était la production écrite pour les raisons que, d’une
part, c’est une activité dont les difficultés s’annoncent déjà tout au début du cursus scolaire de
l’élève et qui vont progressant pour culminer au secondaire et, de l’autre, il s’agit d’une
activité qui devient hautement sélective au secondaire et, partant, détermine, dans une large
mesure, la réussite scolaire de l’élève en la matière.
Pour vérifier si l’élève utilise oui ou non le français à l’extérieur de l’enceinte scolaire et
identifier, par là même, les types d’usage et les situations respectives, nous avons eu recours
au questionnaire. Cependant, pour voir si la variable usage détermine significativement la
réussite scolaire en matière de français, il a fallu examiner les moyennes recueillies par les
sujets enquêtés et ce par la consultation systématique de leurs dossiers scolaires. La mise en
rapport des moyennes obtenues, dont la fiabilité a été testée par des indices statistiques
appropriés ( l’écart- type et le coefficient de dispersion ), avec la variable usage nous a
renseigné sur le degré d’importance de l’usage dans l’appréhension du français à l’école.
Cela n’était pas suffisant, nous devions nécessairement examiner les représentations
linguistiques que le questionnaire, comme il a été le cas pour les usages et les motivations,
nous a permis d’évaluer pour, d’une part, éliminer, sinon de relativiser l’hypothèse que la
faiblesse notable en français serait au fondement de représentations négatives et vice-versa et,
de l’autre, faire voir que l’école réussit quand même à légitimer aux yeux des élèves certaines
variétés linguistiques, le français en l’occurrence, et le modèle culturel qu’elles portent.
Pour pouvoir se permettre de parler de deux modèles culturels différents, celui de l’école et
celui de la société, il a fallu prouver l’existence effective de cette différence. Nous avons, de
ce fait, appliqué l’analyse de contenu aux manuels scolaires des élèves et aux
Recommandations Pédagogiques destinées au corps enseignant pour la caractérisation du
modèle culturel scolaire, et nous avons mis à profit, outre les informations recueillies par le
questionnaire, les remarques qui nous ont permis de faire, d’un côté, la pratique objective de
la classe dans le milieu en question et, de l’autre, le contact direct des élèves ruraux en
contexte naturel, et ce pour la caractérisation du modèle culturel social.
La question des représentations linguistiques sera donc abordée dans le cadre d’une
problématique sur les difficultés d’enseignement/apprentissage de la langue française en
contexte rural ; elle impliquera nécessairement d’autres questions également importantes, à
savoir celle des usages et celle des motivations.. Notre démarche ne sera pas exclusivement
descriptive : nous tenterons d’expliquer l’origine de ces représentations et nous proposerons
des solutions pratiques pour l’harmonisation des langues-cultures scolaires avec les languescultures sociales. C’est cette harmonisation, soulignons-le, qui permettra à l’élève de corriger
ses représentations linguistiques.
13
AVOLONTO Aimé :
Apprentissage enfantin vs adulte du français langue seconde en milieu institutionnel
La recherche dont nous présentons ici les résultats partiels repose sur l’étude longitudinale et
interlinguale d'un groupe d'apprenantes présentant un profil particulier. Il s'agit d'un groupe de
femmes béninoises de la région centre du pays, âgées entre 22 et 38 ans ayant grandi dans un
environnement où elles ont appris plusieurs langues «maternelles» et qui semblent avoir
atteint, malgré leur apprentissage du français à l'âge adulte, un niveau de compétence très
élevé. À travers un projet-pilote, ces femmes ont été inscrites dans un centre d'éducation pour
adultes spécialement conçu pour elles. Au bout de quatre années d’une scolarisation
entièrement en français, elles ont presque toutes réussi (14 d'entre elles sur 16) le test national
de français auquel elles étaient soumises face à des écoliers du primaire qui, eux, ont eu une
scolarité régulière de six ans. De plus, elles ont réussi cet examen avec de meilleurs résultats
que le groupe des scolarisés du primaire.
L’une des préoccupations des linguistes qui s’intéressent à l’acquisition d’une langue seconde
(L2) est de déterminer la place de la grammaire universelle (GU) dans le processus
d’apprentissage (White 2003). Quel est le schème linguistico-cognitif avec lequel l’adulte qui
apprend une nouvelle langue aborde son apprentissage ? Peut-on établir un parallèle entre les
dispositions mentales d’un enfant qui apprend sa langue maternelle et celles de l’adulte qui
acquiert une nouvelle langue ? Jusqu’à quel point la langue maternelle d’un individu
influence-t-elle son apprentissage d’une nouvelle langue ? Voilà autant de questions que se
posent les chercheurs.
Deux courants de pensée existent face à ces questions. Pour des chercheurs comme Schwartz
et Sprouse (1996), etc., l’apprentissage d’une L2 commence par la représentation
grammaticale que l’apprenant s’est déjà bâtie à partir de sa langue première (L1). Pour
d’autres par contre comme Epstein et al. (1998), etc., le point de départ du nouvel
apprentissage est la GU dans son caractère défectif, c’est-à-dire sans aucune influence directe
de la L1 de l’apprenant.
Si les défenseurs du premier courant de pensée ont raison, il faudra alors déterminer laquelle
des L1 d’un apprenant multilingue depuis son enfance joue ce rôle de grammaire de départ.
Quant au second courant de pensée, il faudra que ses défenseurs puissent répondre à
l’observation d’auteurs comme Müller & Hulk (2001) à l’effet qu’il existe une influence
interlinguale évidente lorsqu’on apprend une langue à l’âge adulte.
L’observation des productions langagières des véritables débutantes du centre permet
nettement de dégager deux groupes, justifiant ainsi l’hypothèse de la langue forte versus la
langue faible de Genessee (1989). La sélection lexicale dans la langue cible semble se baser
entièrement sur la L1 forte. Quant à la flexion verbale, elle met en évidence un système
hybride. Le marquage du genre enfin établit une différenciation entre les animés et les
inanimés.
14
AYEVO Jean Yaovi :
La déscolarisation dans la sous-Préfecture d’Athiémé -actuelle Mairie d’Athiémé- (19601999) ou échec de la méthode formelle d’enseignement du français.
Notre communication présentera brièvement les insuffisances de l’enseignement du français
de chaque réforme du système éducatif au Bénin - dans la Mairie d’Athiémé, l’une des
régions les plus déshéritées du Bénin, et montrera surtout les avantages de la méthode utilisée
par le collège d’encadreurs des jeunes déscolarisés. Nous pouvons retenir en substance que :
-l’élaboration des fiches pédagogiques prenait en compte l’éducation traditionnelle pour
aboutir à celle formelle. Cela signifie que la fiche considère les activités de l’enfant dès son
réveil le matin jusqu'au soir : les images d’une femme portant un bébé au dos, d’un homme
sur un palmier en train de dénicher un régime, d’un homme avec un poquet en main en train
de semer du maïs, d’une jeune fille portant une calebasse remplie d’eau sur la tête, d’un
enfant en train d’étaler sa natte suscitaient un engouement particulier chez les apprenants. Un
apprenant comparait la lettre “r” (écrite avec un petit rond) à sa mère courbée qui ramasse les
amandes de palme. Le plus intéressant demeure le débat engagé par l’encadreur au début de
chaque séance sur un événement (l’insécurité, l’adultère, partage d’héritages, le lévirat) qui
s’est déroulé la veille dans le milieu ou révélé par les medias. A l’issue de chaque débat, des
conseils liés au Droit, à l’environnement, à l’hygiène, aux maladies sexuellement transmissibles, étaient souvent prodigués aux apprenants. Cette technique permettait de déboucher sur
les cours de civisme, de biologie de façon subtile. Au cours des échanges, l’activité
pédagogique était animée par les apprenants. Chacun d’eux voulait souvent donner son point
de vue. La séquence des débats était une excellente synthèse des autres disciplines enseignées.
-les cours de grammaire, d’orthographe, de vocabulaire étaient enseignés en tenant compte
des thèmes des débats organisés au début de chaque séance. Le procédé de l’enseignement de
la grammaire était différent de celui de la méthode formelle. L’enseignement était bâti le plus
souvent sur les productions personnelles des apprenants au cours des débats.
-L’évaluation se faisait uniquement sur une activité pédagogique donnée. A titre d’exemple,
“l’accord du verbe avec son sujet” peut constituer l’objectif à atteindre pour un devoir de
“dictée”. Les autres fautes ne sont pas comptées. Or, dans la méthode formelle, l’évaluation
ne permet pas du tout de reconnaître les apprenants qui fournissent un effort, puisque les notes
sont attribuées par rapport à un certain nombre de fautes (la barre) : celui qui fait 70 fautes,
obtient la note 00/20 avec celui qui en a fait 10. Aussi, plus tard, celui qui avait 70 fautes et en
a 12 tandis que celui avait 10 fautes et en fait 60 après, auront tous deux la note 00/20. Cela
décourage beaucoup les apprenants. Ils préfèrent négliger complètement le français. Notre
communication présentera des cas pratiques de la méthode de l’Organisation Internationale
pour l’Instruction des Pauvres (O.I.I.P).
-l’expression orale se faisait aussi bien par les débats que par les chansons, la poésie théâtralisée; le cours de vocabulaire veillait sur la correction phonétique car certains phonèmes du
français ne se trouvaient pas dans leurs langues nationales; le cours de conjugaison était aussi
différent : les pronoms de la conjugaison étaient identifiés lors des dialogues au cours des
débats sur l’actualité.
Le cours le plus intéressant était celui dénommé “diversité culturelle”. A titre d’exemple, doiton enseigner à l’apprenant africain “prendre une douche; aller sous la douche” ou “se laver à
la douche” ? Car, pour l’Africain résidant au village, la douche représente “un enclos où se
trouve un canari rempli d’eau avec un bol dont on se sert pour se laver”. Or la conception
française veut que la douche soit un “jet d’eau qui arrose le corps”. Ce cours servait à
enseigner les expressions imagées aux apprenants. Eu égard à tout ce qui précède, peut-on
baptiser cette méthode “Méthode Pédagogique Ciblée” ?
15
AYEWA Noël Kouassi :
Recit, influences culturelles et analyse des productions des apprenants ivoiriens pour une
pedagogie fonctionnelle de la performance communicative en français langue seconde.
Le dépouillement de l’enquête, que nous avons eu à mener auprès de 166 écoliers de la région
d’Abidjan (dans un village attié, un quartier huppé d’Abidjan et un quartier semi-urbain), a
révélé des influences culturelles et linguistiques chez ces écoliers, tout comme l’exploitation
pédagogique du corpus nous a indiqué la façon la plus rationnelle de traiter les productions
des apprenants du français en situation diglossique afin que l’apprentissage soit efficace,
optimalisé. Nos objectifs pour cette enquête étaient d’évaluer l’activité langagière chez des
écoliers ivoiriens apprenant le français au moyen de la même méthode d’enseignement mais
issus de milieux sociologiques différents, d’une part et d’autre part de traiter autrement que
leurs enseignants les productions langagières afin de pouvoir apporter à leurs auteurs la
meilleure aide pédagogique qui leur faciliterait l’acquisition correcte du français pour une
communication parfaite dans cette langue, langue officielle de la Côte d’Ivoire. Il a été donc
demandé à ces écoliers de produire un récit à partir d’un support iconographique, “les
Oisillons”.
Les productions des écoliers du village africain et du quartier semi-urbain ont subi des
influences culturelles et linguistiques ivoiriennes : ces écoliers ont de la peine à composer un
récit cohérent tant il est vrai qu’ils décrivent les six images du support isolément, sans aucun
lien grammatical ni logique entre elles ; sur ces images, les actions simultanées sont manifestes mais ces relations échappent totalement à ces écoliers : il est donc difficile de parler d’un
récit chez eux. D’autre part, ils composent leurs ‘’récits’’ selon le modèle du conte ivoirien ou
africain : ils introduisent leurs récits par “Il était un fois”; également dans leurs récits, les
noms des personnages animaux sont humanisés, et la fin du récit est annoncée de façon abrupte comme par exemple: “C’est [ici] la fin de l’histoire”. Outre les influences culturelles, leurs
copies charrient des influences linguistiques qui se manifestent sous la forme d’interférences
phonétiques, morphologiques, lexicales et syntaxiques.
Les écoliers de Cocody, qui ont le français pour langue maternelle, produisent un récit
dans lequel les entités sont d’abord présentées avant d’être reprises par des anaphores, tel
l’article défini, le pronom personnel sujet ou le pronom relatif [qui, dont]. Ils utilisent des
connecteurs logiques et emploient correctement les temps verbaux français, en l’occurrence
l’imparfait et le passé simple. Contrairement à leurs condisciples du premier groupe, leurs
textes en français sont lisibles, et donc parfaitement compréhensibles. Toutefois, on relève
chez eux des influences culturelles étrangères dans la mesure où les noms des personnages du
récit sont des noms d’animaux inconnus en Côte d’Ivoire, tels le guépard, le loup qui sont des
animaux qu’ils ont certainement découvert à travers la lecture des livres de maison.
Indépendamment de la qualité langagière de la production de l’écolier, nous avons
traité celle-ci en recherchant à chaque fois la cause de l’erreur commise par l’apprenant avant
d’en proposer une correction efficace car pertinente, dans le souci de faire produire à l’avenir
à l’apprenant des énoncés français corrects. Cette démarche n’est pas habituelle chez nos
enseignants qui se contentent de souligner les fautes à l’encre rouge, mettent une note à la
copie de l’apprenant afin de pouvoir classer celui-ci parmi les bons ou mauvais élèves de la
classe et de pouvoir décider de son passage ou non en classe supérieure à la fin de l’année
scolaire. Les apprenants fortement exposés à la langue d’apprentissage ont de bien meilleures
productions langagières en langue seconde par rapport à ceux qui le sont moins. Toutefois
l’apprentissage en milieu diglossique devrait s’appuyer sur une pratique pédagogique qui aide
l’apprenant à améliorer sa production langagière et à mieux structurer sa pensée afin de
pouvoir communiquer aisément dans la langue seconde.
16
BAGOUENDI-BAGERE Diane :
Attitudes des enfants face aux langues en présence à Libreville
( Gabon) et conséquences sur la didactique du français
Libreville, capitale du Gabon est une ville cosmopolite par la diversité de sa population (70%)
des gabonais et 30% des étrangers issus de l’immigration africaine. Ce pôle d’attraction
entraîne des brassages humain et culturel importants et génère un espace social spécifique par
les nouvelles identités urbaines des locuteurs mais aussi par les comportements qui s’y
développent et tout particulièrement par les attitudes linguistiques spécifiques.
Partagée entre le français, langue officielle et les langues ethniques réservées au domaine
privé, la situation gabonaise présente des éléments de convergence mais aussi d’originalité par
rapport aux autres pays africains. Nous viserons ici à faire ressortir la spécificité du milieu
librevillois à travers les représentations des langues que se font les jeunes scolarisés et les
conséquences éventuelles sur l’apprentissage du français, unique langue d’enseignement.
Notre analyse se fonde sur un corpus d’interviews réalisées en 2002 pour notre thèse et sur un
questionnaire distribué à près de 400 collégiens. L’étude des représentations associées à la
langue française et aux langues ethniques et la pratique réelle des divers idiomes en contact
permettent-elles de prévoir un avenir pour ces deux types de langues dans un enseignement
qui prendrait mieux en compte le bilinguisme ou le plurilinguisme réel ?
L’acquisition de plus en plus fréquente du français dans un cadre informel préscolaire
(famille, quartier) appelle à une révision des modes d’enseignement du français que nous nous
efforcerons d’envisager ici dans une perspective dynamique prenant davantage en compte le
substrat linguistique.
17
BECUWE Jacques :
Les Classes de la seconde chance au Niger :
Enseignement bilingue et contextualisation pédagogique
Devant la situation de régression que connaît actuellement l’école nigérienne, la Coopération
Française et le Ministère nigérien de l’Education ont engagé une réflexion sur une école
"centre de ressources" sous l’égide et au service des communautés en initiant – à titre
expérimental – les écoles de la seconde chance.
Cette école doit garder les éléments essentiels de l'école classique : formation à l'écriture, à la
lecture, au calcul, aux sciences de la vie et de la terre ainsi qu'à l'instruction civique et morale.
Elle doit aussi offrir la possibilité de poursuivre ses études au delà du Certificat, mais elle doit
intégrer les données essentielles de ce qui représente les potentialités et le devenir du village
et du pays dans un contexte ou seuls l'agriculture et l'élevage constituent le devenir
économique proche et doivent permettre l'autosuffisance alimentaire.
L'école de la seconde chance est une école qui a l'ambition, tout en restant en accord avec les
principes républicains de l'école traditionnelle, de proposer une démarche innovante :
 Intégrer l'école à son environnement c'est à dire lier les apprentissages des élèves et la vie
de la communauté par une communication réelle et des actions concrètes qui les
enrichissent mutuellement,
 Considérer les apprenants comme les futurs citoyens actifs de leur communauté,
Cette innovation doit permettre de :
 augmenter considérablement le taux brut de scolarisation au niveau régional et national ;
 bâtir une approche pédagogique novatrice de qualité ;
 provoquer une réflexion sur la durée du cycle de base I ;
 provoquer une réflexion autour de l'enseignant agent de développement ;
 étendre l’expérience à d’autres villages, à d’autres régions du Niger en cas de réussite de
l’expérience.
Les enseignants sont capables de :
 bâtir des modules de formation autour des compétences à atteindre pour les enfants,
 repérer et exploiter des supports d'activité dans l'environnement immédiat des enfants,
 s’intégrer à la vie de la communauté,
 permettre aux enfants d’établir et d’entretenir, autour des activités de la "classe" un réseau
fonctionnel de communication entre eux et les membres de la communauté,
C'est pourquoi la formation des enseignants se veut participative. Elle consistera à outiller
ces derniers en leur donnant l’opportunité de prendre part activement à la conception des
modules d'apprentissages des élèves dont ils auront la charge.
L’approche à utiliser se veut une approche de questionnement qui réponde aux attentes de la
communauté et aux besoins du pays.
L’expérience a 2 ans : le langage en est un acteur central, quel bilan peut-on en tirer ?
18
BEDOU-JONDOH Edith :
Acquisition des énoncés complexes par les élèves togolais du primaire et du secondaire en
situation diglossique.
Les élèves togolais sont confrontés à l’apprentissage du français dans un milieu souvent
plurilingue. A son entrée à l’école maternelle à l’age d’environ 4 ans, l’enfant commence
l’apprentissage du français avec la langue maternelle (Gengbé/Ewé en zone urbaine). Au
cours des années, la langue maternelle n’est plus utilisée en classe et devient un sujet comme
l’anglais ou l’histoire au secondaire.
Selon Chomsky (1965) avec la théorie DAL et Klein (1989) sur l’acquisition de la Langue 2,
l’acquisition d’une langue se fait par étape, allant des constructions simples de l’enfant à bas
age à des constructions plus complexes de l’age de 10 ans à l’age adulte. Dans Noyau et
Paprocka (2000) a également été développé le concept de ‘condensation’ exprimant cette
même idée d’acquisition de constructions de plus en plus complexes avec l’age, aussi bien en
L1 qu’en L2.
Notre étude porte sur l’analyse de productions narratives, récit sur images d’enfant, en age
moyenne de scolarisation de 7 ans à 15 ans, des niveaux CP, CE, CM, 5e et 3e (10 élèves par
niveau) en milieu urbain et tiendra compte des différentes formes d’énoncés et de propositions
tels que présentés dans ALLAL, ANANE, SENEMAUD et NOYAU (2002), où sont
développés les notions d’énoncés simples et complexes, ces derniers comportant des
propositions paratactiques et hypotactiques.
De notre analyse, comparant l’acquisition de ces énoncés en L1 (Gengbé, une langue Kwa) et
en L2 (Français) il ressort qu’effectivement l’acquisition se fait de façon progressive avec
l’age et qu’elle se fait plus tôt en L1 qu’en L2 pour atteindre le même degré de complexité à
un age ultérieur.
19
BEYOM Robert :
Le bilinguisme fonctionnel des élèves de Centrafrique
La République Centrafricaine a deux langues officielles qui sont: le français et le sango. Ce
bilinguisme est déséquilibré dans la mesure où seul le français joue pleinement ce rôle. En
effet, qu'il s'agisse des textes administratifs, de la justice ou du système éducatif, le français
demeure l'unique langue de travail des agents de l'Etat. Depuis l'époque coloniale,
l'enseignement a toujours été fait en français même si des décisions relatives à l'insertion du
sango dans le système éducatif centrafricain et des tentatives de leur application ont émaillé
l'histoire de ce système.
Dans le cadre de ce colloque, nous vérifierons si ce monoliguisme qui caractérise le système
éducatif centrafricain garantit l'appropriation du français au bout de six ans de scolarisation.
Cette communication qui s'inscrit dans l'axe 3 du colloque: L'école et les langues en présence,
leurs usages, l'accès au monde de l'écrit est fondée sur le modèle d'évaluation des compétences linguistiques en français dans l'espace francophone initié par l'Institut d'Etudes Créoles et Francophones en 1995. Nous avons monté un corpus bilingue (écrit et oral) des
productions langagières des élèves de la classe de CM2 de l'école Galabadja, située dans le 8è
arrondissement de la ville de Bangui. Ces élèves racontent en français et en sango l'histoire
présentée par des images. Le dépouillement du corpus français et l'analyse des données nous
ont permis de relever les écarts phonétiques (par exemple la confusion entre ã et õ dans une
merre qui crie on levant la main au lieu de une femme qui crie en levant la main), morphologique (par exemple l'utilisation de eux en lieu et place de elles dans les femmes causaient
entre eux), syntaxique (par exemple l'un se trouve a un pistolet et un calachicope / l'un porte
un pistolet et l'autre une kalachnikov) . Nous avons aussi observé des particularités lexicales
et des phénomènes d'interférence linguistique: notre madame dans En observant.cette évenement notre madame est affolé signifie notre maîtresse. Nous pensons que ces écarts et ces
particularités peuvent s'expliquer par la précarité de l'enseignement des leçons de la langue
française inscrites au programme du fondamental 1. En principe, un élève qui finit une bonne
scolarité du fondamental 1 est capable de distinguer les différents homophones, or dans notre
corpus, les problèmes orthographiques de nos enquêtés viennent de l'homophonie (Exemple:
l'un de ses bandi au lieu de l'un de ces bandits; il y avait deux élèves qui son à l'intérieure au
lieu de il y avait deux élèves qui sont à l'intérieur). Egalement, les problèmes de la
morphologie nominale (genre et nombre) et verbale ( flexion verbale) doivent disparaître ou
du moins être réduits à la fin de ce cycle, ce qui n'est pas le cas.
Le corpus sango, limité à l'oral (l'écriture du sango n'étant pas maîtrisée par les enquêtés),
nous permet d'évaluer la compréhension des images par les élèves. En effet, le contenu
sémantique du corpus nous autorise à dire que la compétence linguistique en français de ces
élèves est aléatoire. En fait, les récits en sango restituent l'événement présenté par les images
alors que leur version française est presque incompréhensible. Nous avons alors conclu que
ces élèves comprennent la situation mais les difficultés qu'ils rencontrent au niveau lexical et
grammatical ne leur permettent pas de raconter fidèlement en français ledit événement.
En attendant d'élargir cette enquête au niveau national, nous pouvons déduire des éléments
dont nous disposons actuellement que l'utilisation du français comme seul médium d'enseignement s'avère insuffisant pour garantir la compétence linguistique en cette langue. Certes,
l'enseignement précaire du programme contribue largement à l'altération de cette appropriation, mais nous pensons que la non insertion du sango dans le système éducatif centrafricain
explique aussi cette carence. L'extension de l'enquête au niveau des élèves du fondamental 2
fait apparaître les mêmes problèmes et donc nous permet d'observer que la base de l'appropriation du français, qui en Centrafrique passe par l'apprentissage, se situe au niveau du fondamental 1. Il est donc important de surveiller cette phase et d'y mettre un accent particulier.
20
BITJAA KODY Zachée Denis:
Le développement bilingue (langue maternelle–français) des élèves issus du programme
PROPELCA.
Le Cameroun évolue à deux, voire à trois vitesses en matière d'acquisition des langues locales
et des langues officielles. Selon que l'enfant grandit en zone rurale ou en zone urbaine, il est
plongé dans un bain linguistique majoritaire en langue locale ou en français. En zone urbaine,
le français langue officielle, langue véhiculaire et langue d'intégration aux villes
camerounaises, prévaut dans toutes les situations de communication publique, scolaire et
familiale au point qu'il est devenu la langue maternelle ou langue de première socialisation
pour plus de 50% de jeunes Camerounais nés dans la ville de Yaoundé après 1985 (cf. Bitjaa
Kody, 2000, 2001, 2004). On ne saurait parler de diglossie pour cette première catégorie de
jeunes ayant le français comme seule et unique langue de communication. Les 50% restants
des enfants urbains comprennent et parlent les langues de leurs parents à des degrés de
compétence divers.
En zone rurale par contre, les langues identitaires locales sont acquises comme premières
langues par les enfants. Le français conserve ici son statut de langue officielle car l'enfant
l'apprend essentiellement dans le cadre scolaire et l'utilise uniquement dans les situations
formelles. On assiste ainsi à une véritable diglossie ou répartition des fonctions sociales entre
le français et les langues locales.
C'est dans ce contexte que l'Université de Yaoundé a lancé en 1981 le Projet de Recherche
Opérationnelle Pour l'Enseignement des Langues au Cameroun (PROPELCA), dont l'un des
volets vise l'enseignement bilingue (langue maternelle-français) dans les premières classes de
l'enseignement primaire. Si le programme semble mieux adapté au milieu rural, il a aussi été
testé en situation urbaine à Douala et Yaoundé. Les enfants ayant suivi ce programme ont
appris à lire et à écrire d'abord une langue camerounaise avant de passer à la lecture et à
l'écriture du français.
En l'absence d'une évaluation scientifique à grande échelle des niveaux d'appropriation du
français et des langues locales atteints par les enfants issus de cette expérience, dans cette
communication située dans l'axe 1 du colloque, nous présentons les résultats d'une enquête
sociolinguistique sur un échantillon réduit menée sous une approche empirico-inductive en
milieu urbain auprès de jeunes scolarisés âgés de 9 à 12 ans. La moitié des enfants interrogés
a suivi un enseignement bilingue français-langue maternelle dans les classes initiales du cycle
primaire à travers le programme PROPELCA. L'autre moitié que nous considérons comme un
groupe témoin a suivi un cursus primaire monolingue en français.
L'objectif de l'étude est d'évaluer, à travers des tests linguistiques spécifiques, la maîtrise orale
et écrite du français et de la langue maternelle dans chaque groupe. À niveau d'étude égal
après le cycle primaire, quel est le niveau d'acquisition atteint par l'un et l'autre groupe dans
chaque langue? Conformément à l'une des présomptions théoriques du programme bilingue
langue maternelle-français, les enfants urbains qui sont passés par ce programme parlent-ils et
écrivent-ils mieux les deux langues que leurs camarades ayant suivi un programme ordinaire
en français?
Une comparaison de productions orales en langue duala et de productions écrites en langue
française (dictée, rédaction) des élèves de 6ème au Collège Libermann à Douala révèlera les
performances de l'un et l'autre groupe.
21
BURGAT Sandrine :
La personne sourde et le bilinguisme LSF/ français écrit. Comment accéder à l’écrit du
français quand on est locuteur de la langue des signes ?
Aujourd’hui en France, les personnes sourdes locutrices de la langue des signes française
(LSF) vivent dans un contexte diglossique. La LSF représente une minorité sourde incluse à
une minorité entendante dont la seule langue officielle, nationale, institutionnelle est le
français.
Les sourds sont sans cesse en contact avec leurs deux langues : la langue des signes qui est
leur langue de communication : la langue à laquelle est rattachée leur culture et d’autre part, la
langue française : langue de la communauté linguistique majoritaire.
A ce jour, la langue des signes française et les langues des signes en général n’ont pas
d’écriture. L’enfant sourd français, qui apprend à écrire, se voit donc contraint d’apprendre à
écrire dans une langue qui lui est étrangère puisque sa langue d’acquisition du langage est la
langue des signes. Or, actuellement en France, la majorité des enfants sourds- alors même
qu’ils sont sourds- apprennent à lire et à écrire par des pédagogies dites « oralistes ». Elles
passent par la démutisation des Sourds et l’apprentissage de la lecture labiale.
Comme le montrent les données historiques et le fort taux d’illettrisme qui touche la
population sourde (80 % des personnes sourdes sont illettrées), le système d’éducation oraliste
est inefficace. L’éducation bilingue semble être le seul moyen d’accès au français écrit pour
les enfants sourds. Il est sans aucun doute la voie pour prévenir l’illettrisme sourd.
Comme l’indique la loi Fabius, le bilinguisme est un droit de l’enfant sourd. Or, aujourd’hui
en France, il y a peu d’écoles bilingues et encore moins de pédagogies pensées pour être
adaptées à l’enfant sourd et a sa spécificité de locuteur bilingue : LSF (langue1) / français
écrit ( langue 2).
Dans cette communication, nous nous poserons la question suivante: Comment l’utilisation de
la langue des signes, langue 1 des enfants sourds, peut permettre leur apprentissage du
français écrit comme langue 2.
Pour répondre à cette question, nous définirons le terme de « bilinguisme sourd », ses
différentes acceptions, et nous brosserons un rapide panorama de ce qu’est l’éducation
bilingue des sourds en France. Nous montrerons, tout d’abord de manière théorique, pourquoi
la LSF peut et doit tenir un rôle dans l’apprentissage du français écrit.
Puis, nous présenterons un corpus de 3 situations de classes mettant en jeu les deux langues
auxquelles l’enfant sourd est confronté quotidiennement. Ce corpus nous permettra de
montrer comment grâce à des interactions en langue des signes, l’enfant sourd peut faire son
entrée dans l’écrit. Nous verrons en particulier que les interactions en LSF autour de l’écrit, la
lecture en LSF de livres écrits en français peuvent permettre à l’enfant d’acquérir certains
savoirs sur l’écrit du français et de développer son intuition de l’écrit.
22
BURSTON Monique:
"Je suis obligée de mélanger les deux langues" :
Lycéens mélanésiens aux prises avec leur bilinguisme
En Nouvelle-Calédonie, le français est langue officielle et langue d'enseignement. Il est en
contact avec 28 langues autochotones, sans compter les langues des immigrés wallisiens,
polynésiens et vietnamiens. Cette situation lui est favorable, puisqu'il assume un rôle de
langue véhiculaire, sans que personne n'y fasse d'objection, même les indépendantistes.
Cependant, il représente pour de nombreux enfants mélanésiens (ceux qui nous intéresseront
ici) et immigrants, une langue seconde –une réalité souvent mal comprise des enseignants,
qui sont majoritairement 'caldoches' ou 'métros' et ont été préparés dans leur formation
pédagogique à l'enseignement du français langue maternelle ou à l'enseignement de leur
discipline via le français langue maternelle. Récemment, l'article 215 de la loi organique
(1999) qui a suivi l'Accord de Nouméa a reconnu les langues kanak (= mélanésiennes, ciaprès LK) comme "langues d'enseignement et de culture", ouvrant ainsi la voie à la
possibilité d'un enseignement bilingue français-LK. En pratique, l'application de la loi
rencontre/rencontrera évidemment de nombreux obstacles : manque d'outils pédagogiques
appropiés, pénurie de maîtres, multilinguisme du Territoire (quelles LK enseigner?), etc.
L'espoir est là pourtant que la mise en place d'un système d'enseignement bilingue (2001)
contribuera peut-être à résorber un échec scolaire qui atteint actuellement des proportions
dramatiques.
C'est dans ce contexte que je présenterai et discuterai les résultats (partiels) d'une enquête
menée auprès de jeunes Mélanésiens de trois établissements du Territoire. Ils ont répondu à
un questionnaire concernant leurs attitudes envers les langues qu'ils pratiquent et/ou étudient à
l'école, et l'utilisation qu'ils font de ces langues dans leur vie quotidienne. Je me limiterai ici
aux élèves du lycée Antoine Kela, situé à Poindimié, dans la Province Nord. Ce choix aura
l'avantage de mettre en lumière la complexité de la situation linguistique dans laquelle on
s'attend à ce que les jeunes Kanak s'approprient le français, puisque 18 langues vernaculaires
différentes ont été déclarées comme langues maternelles par les 42 sujets interrogés. Le
questionnaire comprend cinq parties:
1) des données sociolinguistiques sur les individus (âge, sexe, langues parlées en famille et
étudiées à l'école, auto-évaluation de leur bilinguisme par les sujets) ;
2) des questions concernant les LK, le français, mais aussi l'anglais, étant donné son rôle de
langue internationale et l'insertion géographique de la Nouvelle-Calédonie dans un PacifiqueSud anglophone ;
3) des questions sur l'utilisation des langues, liée au lieu où se produit l'acte de parole
(maison, tribu, bourg de Poindimié, lycée) ;
4) des questions sur l'utilisation des langues, liée à l'interlocuteur et au type d'acte de parole;
5) une section "Remarques et commentaires" où les élèves parlent de leurs craintes et de leurs
espoirs pour la préservation de leurs racines et de leurs langues minoritaires, ainsi que de leurs
difficultés diverses à maîtriser le français, langue qu'ils reconnaissent pourtant nécessaire et
qu'ils ne renient pas.
Mon analyse et ma discussion des résultats de l'enquête s'orienteront selon deux des axes de
réflexion proposés pour le colloque : 'L'enfant dans son milieu social' et 'Les représentations
de la langue, de l'école, des apprentissages'.
23
BWANGA Zanzi Jean-Pierre :
Les grammaires intériorisées du français en milieux multilingues à Lubumbashi. : Structures,
stratégies et nature des différences.
Cette étude part des productions écrites d’élèves de quarante classes de Lubumbashi où se
pratique l’apprentissage systématique de la grammaire. Elle se propose, à la suite de SP
Corder (1971), JY. Dommergues (1973), Besse H. et Porquier M. (1984), de mettre en
exergue les règles développées par les apprenants pour s’approprier la construction de la
phrase et des constituant immédiats de celle-ci, et par là, montrer que les Grammaires
intériorisée du français <GRIF en sigle>, loin d’être les résultats d’une mauvaise transposition
(Halté JF 1995), sont plutôt le reflet des difficultés qu’ils éprouvent lors de l’appropriation de
la langue cible.
A ce niveau, en effet, les élèves développent deux règles, à savoir l’omission et la redondance.
La première est une règle qui consiste à « omettre » lors de la production écrite des énoncés
des parties du discours constitutives nécessaires de la phrase comme le verbe, l’article, la
conjonction, l’adverbe, la préposition, les pronoms, les noms assumant les fonctions
grammaticales du sujet, complément d’objet direct et complément circonstanciel. La seconde
règle est celle qui consiste en usage, par amalgame, des termes ou propositions
fonctionnellement, naturellement ou étymologiquement analogue, lesquels termes ou
propositions sont de trop dans l’énoncé et gênent l’élégance de celui-ci ainsi que son
intelligence.
L’analyse linguistique des règles des GRIF du niveau phrastique signale que leur origine est à
la fois de la langue première (le kiswahili) et de la langue cible (le français) dans la mesure où
ces règles se manifestent dans le fonctionnement de ces deux langues.
S’agissant des GRIF en question, il s’observe au niveau du syntagme nominal- sujet, la
tendance à l’omission de l’emploi nécessaire d’article, à la réduction optionnelle du SN, ou à
la duplication de celui- ci en syntagme nominal- nominal et en syntagme nominalpronominal. Au niveau du syntagme verbal, on note l’omission des verbes, des adverbes,
notamment celui de la négation, omission également du pronom personnel et du complément
d’objet direct. Au niveau du syntagme prépositionnel, c’est la réduction optionnelle du
syntagme prépositionnel, l’omission également du pronom personnel, du complément d’objet
indirect. Dans l’usage des phrases juxtaposées, coordonnées, ou subordonnées, il se signale la
non maîtrise de ces constituants immédiats de la phrase, ce qui donne lieu au pléonasme de
sens ou à la redondance ambiguë.
Considérant la structuration de ces règles que nous avons nommées omission et redondance,
et leur systématicité forte au début d’apprentissage (classes ABCD) et faible à la suite (classes
EFGH), il y a lieu d’affirmer qu’elles sont les reflets des difficultés éprouvées par les élèves
pour la construction de la phrase simple et complexe. De là, il y a lieu, dans l’avenir,
d’amener les élèves, lors de l’apprentissage et enseignement de la phrase, à maîtriser son
fonctionnement. Quant à la progression de cet enseignement, nous proposons deux étapes :
celle consistant à atténuer d’abord les difficultés des élèves à la base des règles de GRIF au
niveau phrastique, et celle visant ensuite à enrichir la connaissance d’emploi judicieux de la
phrase.
24
CISSE Alilou S. :
Etude comparée de la restitution de récit et de la reformulation narrative dans les
établissements du Togo
La communication dont je présente ici le résumé s’inscrit dans le projet de recherche
« Dynamique et appropriation du français en situation diglossique ».
Elle porte sur les restitutions orales du récit de “l’enfant terrible’’ effectuées dans les classes
de 5e et de CM2 dans les établissements du Togo.
Cette communication cherche à comprendre comment les élèves de niveau différent procèdent
pour le rappel des récits entendus et à décrire les stratégies discursives qu’ils utilisent pour
reformuler à leur manière le récit oral. En situation d’apprentissage, le récit oral comme le
récit écrit, constitue une activité fondamentale des programmes togolais de français dans les
établissements. Il s’agit pour nous d’analyser les données orales recueillies et de les comparer
pour confirmer ou infirmer notre hypothèse de départ à savoir que “le niveau atteint par les
élèves en langue seconde détermine leur capacité dans la restitution et la reformulation
narrative.’’
Les résultats de cette analyse doivent permettre de dégager des avenues didactiques pour
l’enseignement du récit dans les établissements.
25
CORDIER Muriel, LEGROS Denis & Emmanuelle MAITRE de PEMBROKE:
Etude de l’effet du mode d’apprentissage : Formel (école) vs informel (Internet) sur le
développement de la compréhension et de la production en langue seconde en situation de
diglossie. Exemple du Togo.
Les élèves togolais découvrent et apprennent la langue française en entrant à l’école. C’est
pour eux une langue à apprendre et une langue pour apprendre peu présente dans leur
quotidien. Des travaux sur la compréhension de textes en français langue seconde menés à
Lomé en CM1 et 5ème ont montré que dès la classe de 5ème, dans une tâche de rappel écrit d’un
conte, les élèves sont capables de traiter les informations directement en français (langue
seconde). Le recours à la relecture du conte en langue maternelle (L1) comme aide au rappel
écrit en langue seconde n’est efficace que pour les CM1 (Cordier, Legros, Maître de
Pembroke, & Noyau, 2003 ; Cordier, Legros, Noyau, & Khalis, 2003). Pourtant d’autres
travaux montrent qu’en classe de troisième, les élèves maîtrisent encore mal la
compréhension, la production et la construction de connaissances en langue seconde (Noyau,
& Cissé, 2001).
Partant de ce constat, nous avons analysé et comparé les compétences en lecture et production
en français langue seconde de deux groupes de jeunes de Lomé : un premier groupe (G1) de
21 jeunes gens togolais qui ont quitté l’école depuis plus de deux ans et fréquentent un
cybercafé et un second groupe (G2) de 43 élèves de troisième d’un collège privé. Deux tâches
sont proposées : une tâche de production d’un texte explicatif sur les trois états de l’eau sur la
planète, puis une tâche de lecture et de réécriture d’un texte expérimental sur le même sujet
présenté comme le texte d’un élève à corriger. Les élèves du groupe G1 effectuent leurs
tâches sur ordinateur, les élèves du groupe G2 travaillent dans la condition papier/crayon.
Dans la première tâche, les internautes du Groupe G1 produisent plus d’informations
pertinentes, c’est-à-dire en rapport avec le topic et inscrites dans une chaîne causale que les
collégiens du groupe G2 qui eux produisent plus d’informations non ou peu pertinentes. De
plus, ils produisent plus d’informations appartenant à la macrostructure et donc indispensables
à la compréhension et à la construction d’un résumé du texte que les élèves du groupe G2. On
peut supposer que la fréquentation d’Internet oblige les élèves à réfléchir davantage sur le
contenu du texte à transmettre et donc à hiérarchiser et à sélectionner les informations.
Dans la seconde tâche, très scolaire, et impliquant un grand nombre d’opérations cognitives
(lecture, compréhension, planification, réécriture), les résultats des groupes G1 et G2 ne sont
pas significativement différents. Cependant, les collégiens effectuent plus de corrections que
les internautes et les internautes opèrent plus de suppressions que les collégiens. Ces résultats
vont dans le sens de l’hypothèse selon laquelle une tâche trop scolaire ne permet pas aux
internautes de mettre en valeur leurs compétences spécifiques en communication écrite. Mais
ils indiquent aussi que la fréquentation d’Internet en dehors de tout cadre d’apprentissage
formel ne permet pas au scripteur de gérer des tâches multiples et cognitivement lourdes.
D’autres expérimentations nécessaires pour explorer ces directions nouvelles dans le domaine
de la recherche et de la didactique de l’apprentissage en L2 en situation de diglossie seront
menées dans le cadre du projet Numéral du programme TCAN/CNRS.
26
DAFF Moussa :
Analyse des conséquences linguistico-didactiques de l’acquisition/apprentissage du français
en milieu plurilingue sénégalais : cas des éléves de CM2.
Les pédagogues d’hier ont toujours analysé les écarts des apprenants de français comme des
fautes dont la remédiation unique est la proposition d’une correction par rapport à la norme
scolaire. La démarche intralinguistique était en partie utilisée. Maintenant, de plus en plus, les
didacticiens d’aujourd’hui interrogent à la fois l’intralinguistique et l’interlinguistique pour
mieux comprendre les comportements langagiers des apprenants. L’environnement
plurilingue influence forcèment l’acquisition du français dans un espace officiellement
momolingue. Au Sénégal, le wolof, véhiculaire national, en rencontrant le français dans la rue
et à la l’école primaire fait porter sur les productions des apprenants des traces de contagion
réciproque.
Le relevé des productions « fautives » par rapport au français scolaire tel qu’il est
recommandé par l’institution révèle le caractère récurrent des mécanismes de déviations mis
en place par les élèves du primaire en situation d’acqusition/apprentissage. Ces déviations et
écarts d’interlangue sont à analyser comme faisant partie du processus d’acquisition du
français en situation diglossique. Leur analyse linguistico-didactique apportera un éclairage
sur les modes de fonctionnement cognitif des apprenants bilingues toujours désireux de bien
s’approprier le français.
27
DIALLO Mamadou Saliou :
Rédaction française chez des élèves pularophones de fin de primaire à Conakry, Guinée : des
compétences en jeu.
La présente communication a pour objet une analyse des compétences langagières et
rédactionnelles en français d’élèves guinéens de langue maternelle pular (peul). L’analyse
portera plus exactement sur un corpus constitué de copies de rédaction d’élèves de fin de
primaire à Conakry.
Ce corpus est recueilli dans le cadre d’un projet de recherche international (2003 et 2004)
regroupant l’Université de Conakry et l’Université de Franche-Comté à Besançon, sur appui
financier de l’Agence universitaire de la Francophonie. Intitulé « Rôle de l’école comme
milieu de dynamique des langues, comme lieu de contact des langues, comme milieu
d’appropriation culturelle », ce projet a permis de collecter d’importantes données
sociolinguistiques brutes en rapport avec l’école et les pratiques langagières des élèves dans
leurs différents milieux d’évolution (l’école, la famille et l’environnement social).
A partir d’une microanalyse d’un corpus constitué d’une cinquantaine de copies de rédaction,
j’espère pouvoir dégager les caractéristiques discursives des différents types d’interactions
énonciatives observables dans les rédactions, dont la visée fonctionnelle de la consigne était
de faire produire un texte narratif épistolaire portant sur un fait divers imaginaire.
La microanalyse sera réalisée à partir d’un éclairage théorique unifié prenant en compte les
modèles théoriques et les approches acquisitionnels de Klein W (1989), de Giacobbé J (1992)
et de Noyau C. La démarche d’analyse de C. Noyau par domaines référentiels sera empruntée
dans cette communication pour examiner les productions écrites des élèves pularophones de
fin de primaire à Conakry. Trois domaines référentiels seront ainsi retenus conformément à
l’approche utilisée par Colette Noyau : la référence aux entités, la référence aux événements
et leur placement dans le temps, et les stratégies développées par les élèves pour la
structuration des éléments textuels de leur production (v. documentation de l’atelier de
formation en sociolinguistique et dynamique des langues lors des Journées de formation de
Ouagadougou, juin 2004). Au niveau de ces références, une attention particulière sera
accordée aux constructions des formes lexicales à travers leur représentation graphique
visuelle et leur encodage sémantique, à l’usage des éléments de co-référence (noms, pronoms,
détermination nominale, …) et à l’emploi des verbes en rapport avec la fonctionnalité
discursive prédominante.
Les caractéristiques langagières dominantes dans les différentes expressions écrites seront
mises en parallèle avec celles d’ordre sociolinguistique des élèves en vue de voir dans quelle
mesure la langue cible des élèves (ici, le français) serait porteuse d’influences de la langue
source (le pular). Les catégories socioculturelles caractéristiques de l’environnement familial
de l’élève (langues en usage en famille, intégration des biens culturels dans la vie de l’élève
comme l’usage des livres en famille) seront mises en rapport avec les indices de compétence
fonctionnelle en français avérés dans les productions écrites des enquêtés, pour essayer de
déterminer si ces paramètres extrascolaires ont un quelconque lien significatif avec les
capacités d’appropriation de la langue cible, la langue seconde et langue scolaire.
La communication devrait déboucher sur des propositions d’aménagement didactique visant à
aider l’enseignant de français dans ce contexte à capitaliser les acquis langagiers et
rédactionnels des élèves pour les aider à mieux se repérer dans cet univers langagier confus où
« oral » et « écrit » semblent former un véritable tourbillon langagier dans lequel ces enfants
de situation culturelle souvent modeste se trouvent égarés à des degrés divers.
28
DIOUF Mayé Mboul :
Les interactions dans les pratiques langagières en classe à l’école de base au Togo : le
couple question-réponse.
En tant que langue officielle de la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne, le français est
parfois la seule langue en usage dans l’administration, la vie publique mais aussi dans le
processus de scolarisation. Par conséquent, l’apprentissage a le plus souvent lieu dans le
milieu institutionnel à savoir l’école qui est le seul endroit sinon l’endroit privilégié où
s’effectue le contact entre les jeunes africains et la langue.
En dehors de l’enceinte institutionnelle et de ses règles, c’est-à-dire dans la vie quotidienne ou
intime, le français s’efface au profit des langues du milieu. Il apparaît dès lors que son
acquisition s’effectue entièrement à l’école où, en même temps qu’il s’acquiert, il sert de
véhicule à toutes les connaissances scolaires, autrement dit, à enseigner les autres matières.
C’est donc cette double tâche que doit accomplir la langue qui suscite l’intérêt que nous
portons à la classe comme environnement écologique en général et, aux interactions maître /
élèves en particulier.
Pour ce faire, nous nous focaliserons sur le couple "question-réponse" dans une perspective
d’analyser leur nature, leur forme, leur fonction, mais aussi leur distribution et leur rôle dans
le processus global de l’apprentissage. Nous partirons d’études empiriques sur l’acte de
question et les échanges interactionnels dont les contenus seront examinés en rapport avec des
données contextuelles.
29
DREYFUS Martine :
Pratiques de classes, interactions et appropriation du français en milieu formel et non formel
à Dakar.
Notre communication renvoie aux axes 3 et 4 de l’appel à communication : « L’école et les
langues en présence, leurs usages, l’accès au monde de l’écrit », « Les représentations de
la langue, de l’école, des apprentissages », elle s’appuie sur des observations d’interactions
en classe, des recueils de productions d’élèves et des entretiens auprès d’enseignants dans des
écoles traditionnelles et des écoles alternatives (écoles de base) des quartiers périphériques de
Dakar (Sénégal, niveaux observés CP et CM). Les corpus analysés proviennent d’une
recherche inscrite dans le cadre d’une ARP du réseau « Sociolinguistique et dynamique des
langues » de l’AUF intitulée « Dynamiques sociolinguistiques (scolaires et extrascolaires) de
l’apprentissage et de l’usage du français dans un cadre bi- ou plurilingue » (C. Juillard, M.
Dreyfus, D. Morsly, A. Napon, N. Thiam). Un des thèmes de la recherche traitait de l’école,
comme lieu du contact des personnes et des langues, et notamment de la classe, comme
espace d’interactions sociales particulières.
Le premier axe de la recherche concernait le parcours des instituteurs (trices), et formateurs
(trices) du primaire : qui sont-ils ? Quelle est l’incidence de leurs parcours (stratégies
d’acquisition, lieux et circonstances de l’emploi des langues en contact, représentations vis à
vis des langues, etc.) sur la norme qu’ils veulent transmettre ainsi que sur leur(s) usage(s)
dans le cours de leur pratique professionnelle ?
- Le second axe étudiait les stratégies d’enseignement des maîtres et des formateurs d’après
l’observation de leurs pratiques pédagogiques en classe et d’après l’analyse des déclarations
faites lors d’entretiens d’explicitation.
- Le troisième traitait du recours aux langues locales (ou aux langues d’origine) dans la classe
et hors de la classe. On a pu ainsi spécifier la nature des contacts de langues, leur fonction et
la représentation qu’en ont les usagers. La fonction de l’alternance des langues en classe a été
ainsi appréciée, tant pour les maîtres qui l’utilisent que pour leurs élèves. L’exploitation
pédagogique du bilinguisme se révèle variable, compte tenu de la diversité des situations et
des parcours des maîtres ou encore des types d’enseignement
Les diverses enquêtes et recueils de données nous ont permis de mettre en relation plusieurs
types d’informations : le répertoire et la biographie linguistiques des enseignants ; les
représentations de la langue à enseigner et de la langue des élèves ; les modèles linguistiques,
discursifs et langagiers et les pratiques observées en classe et à l’école.
A partir de l’analyse des corpus produits par la recherche, notamment ceux concernant des
interactions en classe, portant sur l’apprentissage de l’écrit (lecture/écriture), nous étudierons,
dans le cadre de cette communication, les conditions d’appropriation/apprentissage du
français dans un contexte diglossique et les représentations de l’écrit associées à ces pratiques.
L’apprentissage de l’écrit suppose (entre autres) que soient nettement différenciés dans les
modèles langagiers et linguistiques proposés aux élèves langue orale et langue écrite, et que
les supports textuels/discursifs soient diversifiés (cf. Fayol, 1996, Giasson, 2001) Qu’en est-il
dans les pratiques effectives ? Corollairement, nous étudierons la prise en compte - ou la non
prise en compte- des langues- cultures d’origine des élèves (usages et aspects fonctionnels de
l’alternance de langues dans l’apprentissage du français, rituels communicatifs). On sait que
dans l’approche communicative et ses avatars, qui ont fortement marqué l’apprentissage des
30
langues étrangères ou secondes ces dernières années, le recours à la (ou aux) langue(s)
source(s), langues premières des apprenants, est généralement exclu, de même que les
pratiques de comparaison inter – langues (analyses contrastives). Il s’agit pour l’enseignant
d’utiliser uniquement la langue d’apprentissage, langue cible, dans la classe et d’en exclure
tout autre. De même, dans les recherches portant sur l’acquisition des langues secondes, Py
(1997) rappelle combien la ou les langues maternelles ont longtemps occupé une place
« ambiguë », par exemple les notions de transferts ou d’interférences linguistiques ont
souvent été accompagnées de connotations négatives par rapport à l’acquisition ou à
l’apprentissage des langues et les travaux de recherche sur l’interlangue des apprenants ont
souvent gommé l’influence de la langue première au profit d’universaux d’acquisition. Ce
n’est qu’assez récemment, dans le cadre des recherches sur le bilinguisme et sur l’acquisition
des langues dans des sociétés plurilingues, que ces notions ont été ré-interrogées et, en partie,
réintroduites dans la didactiques des langues.
31
FILLOL Véronique, NOCUS Isabelle, SALAUN Marie & Jacques VERNAUDON :
La prise en compte des langues maternelles kanak favorise-t-elle l’appropriation du
français ? Bilan d’étape d’une expérimentation en Nouvelle-Calédonie.
Si le français en Nouvelle-calédonie est langue officielle, langue véhiculaire et seule langue
de scolarisation, son enseignement à l’école primaire reste l’une des principales
préoccupations des enseignants, puisque de nombreux élèves (sur la Grande-Terre et aux Îles
Loyautés) commencent leur apprentissage/acquisition du français en découvrant l’école. Dans
le même temps, le français progresse dans la sphère familiale au détriment de la transmission
des langues maternelles, en particulier en milieu urbain. On pourrait penser naïvement que
cette progression du français va dans le sens d’une plus grande réussite des élèves océaniens.
Loin s’en faut ! Une thèse récente montre au contraire que certains adolescents vivent une
double insécurité linguistique, voire un mal-être identitaire et une réelle exclusion sociale : ils
survalorisent leur langue maternelle ou d’origine, alors qu’ils ne la parlent pas, et se
construisent une langue identitaire (français dit « kayafou » ou français « mélangé ») en
refusant de parler le français « standard » de peur d’être assimilé à un « Blanc ». Ainsi, même
si le français est accepté comme langue véhiculaire, ils en parlent comme d’une langue
« obligée » et développent des formes de résistance plus ou moins conscientes à son
apprentissage dans un contexte où la pratique de l’institution scolaire privilégie la « norme »
sur le sens ou la communication.
La plupart des recherches en matière d’acquisition du langage laisse entendre que, dans une
situation plurilingue et diglossique, la double valorisation des langues maternelles et de la
langue principale de scolarisation favorise la réussite scolaire, et que l’enseignement bilingue
précoce, loin d’être une source d’interférences, permet le développement d’un bilinguisme et
d’un biculturalisme additifs.
Fort de ces présupposés théoriques, le laboratoire Transcultures de l’Université de la
Nouvelle-Calédonie assure, depuis février 2002 et à la demande du gouvernement de la
Nouvelle-Calédonie, l’organisation et le suivi scientifique d’une expérimentation pour
l’introduction des langues et de la culture kanak à l’école primaire publique. En 2004, huit
enseignants-stagiaires, locuteurs d’une langue kanak, dispensent un enseignement de/en
langue kanak (drehu, nengone, ajië, xârâcùù) dans dix écoles primaires du premier degré,
répartis sur les trois provinces. Un dispositif d’évaluation externe, comprenant deux axes
complémentaires, permet d’apprécier l’impact de cet enseignement.
L’axe psycholinguistique mesure les effets de ce dispositif sur l’évolution des compétences
langagières des élèves, tant dans la langue maternelle qu’en français, leur attitude face à leur
langue maternelle et au français, et leur niveau d’estime de soi. L’axe sociolinguistique
permet de rendre compte de ce qui se joue hors de la classe de langue, dans l’équipe
pédagogique, dans les familles et dans la communauté au sens large.
Nous souhaiterions présenter dans cette communication les premiers résultats de cette
expérimentation, en reprenant les deux perspectives évoquées ci-dessus, à savoir :
l’intérêt de la prise en compte de la langue maternelle de l’enfant pour son
développement psychologique et langagier (par conséquent, pour une meilleure intégration et
réussite scolaire). Y a-t-il des transferts observables au niveau des apprentissages entre la
première langue et le français langue seconde ?
et d’un point de vue sociolinguistique, en quoi la prise en compte des langues
maternelles à l’école peut-elle modifier les représentations sur les langues, et en particulier les
représentations sur le français ? L’enseignement des langues maternelles permet-il un
rapprochement des familles et de l’école ?
32
FLORIGNY Guilhem:
Représentations des langues à travers la référence aux entités dans l’appropriation du
français par des enfants créolophones mauriciens
L’objectif de cette communication sera de présenter certains résultats de notre mémoire de
DEA intitulé “Variations dans l’appropriation du français par des enfants créolophones
mauriciens : référence aux entités”, résultats d’une enquête de terrain menée en mars 2004 à
l’Ile Maurice. Cette enquête consistait à faire raconter une courte histoire à partir d’images par
des enfants de 6 ans et 8 ans respectivement aussi bien en français qu’en kreol mauricien. Il
nous fallait ensuite contraster ces différents récits, tant entre les langues qu’entre les deux
groupes d’âge, dans la référence aux entités, que nous avons divisé entre la référence aux
personnages à proprement parler et la référence relationnelle, marquée par les rapports de
possession et/ou d’appartenance.
Il nous semble indispensable de présenter dans un premier temps la réalité sociolinguistique
de l’Ile Maurice, c’est-à-dire, les liens entre langues, culture et religion, ainsi que les rôles et
représentations hiérarchiques des langues tels qu’ils sont véhiculés à l’Ile Maurice (ex : le
kreol mauricien : langue ou patois ? l’opposition entre langue orale/écrite représentée par le
couple kreol/français). Nous parlerons brièvement du système éducatif mauricien, surtout en
ce qui concerne les problèmes de bilinguisme, de l’importance de l’oral et de l’écrit dans
l’enseignement tant dans le déroulement des classes que dans celui des examens. Enfin, il
nous semble utile de définir la méthodologie que nous avons utilisée aussi bien dans la
collecte du corpus (tâche à accomplir par les enfants, consignes aux enquêteurs pour obtenir
un corpus adéquat, etc.) que dans l’analyse proprement dite (cadre théorique pour l’analyse de
récit).
Nous nous attacherons enfin à présenter certains des résultats obtenus, à savoir l’analyse de
certaines expressions servant tant dans la référence aux entités que dans la référence
relationnelle. Nous montrerons, en nous appuyant principalement sur deux ou trois récits en
français et en kreol mauricien issus de notre corpus, ce que ces moyens référentiels peuvent
nous apprendre de la conception des langues pour ces enfants d’un point de vue socio-psycholinguistique. Par ailleurs, l’analyse d’expressions référentielles nous permettra de montrer que
certaines notions (ex : le genre et le nombre) et structures (ex : pour exprimer le démonstratif
ou la structure du complément du nom en français) qui peuvent paraître évidentes pour un
locuteur natif de français ne le sont pas forcément pour un enfant créolophone mauricien.
Nous tenterons de montrer cela ou, au moins, de lancer des pistes de réflexions en prenant en
compte l’apparente proximité entre ces deux langues, essentiellement due au fait que la
plupart des items du lexique kreol sont issus du français.
33
GBETO Souley Kossi :
L’acquisition des énoncés complexes en L1 (éwé) et en L2 (français) dans les discours
procéduraux et explicatifs : comparaison acquisitionnelle et typologique.
Cette communication aborde la question de l’acquisition des connecteurs dans la structuration
de ces discours en L1 (éwé), en L2 (français) et s’attache à analyser le rôle joué par les
connecteurs dans l’élaboration verbale des discours procéduraux notamment les règles de jeu
et les recettes de cuisine.
En effet, une bonne capacité discursive demande la maîtrise des mécanismes linguistiques qui
permettent d’intégrer plusieurs propositions entre elles en vue de la construction d’énoncés
complexes. ( Bocaz, 1989). Dans cette optique, les connecteurs sont des outils permettant de
relier des prédications de procès entre elles et en une structure globale.
Des recherches ont montré que les connecteurs étaient acquis chez les enfants plus
tardivement que la morphologie verbale. Parmi ces connecteurs les conjonctions de
subordination sont encore plus tardives puisqu’elles supposent qu’il y ait combinaison des
phrases.
Nous étudions les énoncés complexes dans les discours procéduraux et explicatifs produits
par les élèves en situation de diglossie de notre corpus répartis en trois tranches d’âge : CP
(6ans), CM (10 ans), et 3e (16ans) en éwé (L1), en français (L2). Nous observons le
développement de la construction des énoncés complexes dans les discours procéduraux
oraux en gengbé et en français pour examiner les points suivants :
Quelle trajectoire développementale les élèves togolais en situation de diglossie suivent –ils
dans l’acquisition des énoncés complexes dans les deux langues typologiquement
différentes ?
Y a-t-il une spécificité dans la structure des énoncés complexes produits par ces élèves en
situation de diglossie gengbé – français. Nous ferons une comparaison typologique des
énoncés complexes en L1 et en L2 de manière à dégager la spécificité acquisitionnelle des
élèves de notre corpus. Nous interprétons les résultats de nos analyses en nous fondant sur la
notion de condensation (Noyau 1977,1999), une notion conceptuelle qui peut se manifester
par différents procédés linguistiques selon chaque langue. Nous nous appuyons sur les
données orales de discours procéduraux et explicatifs enregistrés et transcrits dans le cadre de
l’enquête transversale en cours au Togo, en milieu scolaire.
Cette étude s’inscrit dans le cadre du projet multilatéral et interdisciplinaire CORUS / AUF /
Cognitique « Appropriation du français langue de scolarisation en situation diglossique ».
34
HOAREAU Yann-Vigile et Denis LEGROS :
Effet de la langue maternelle (L1, Créole) sur la compréhension de texte explicatif en langue
seconde (L2) en situation diglossique. Rôle de la langue L1 dans l’activation de la Mémoire
de Travail à Long Terme.
Les recherches sur l’apprentissage en situation de bilinguisme, de diglossie ou en contexte
multiculturel ont montré l’importance de facteurs tels que l’oralité et la prise en compte des
connaissances culturelles de l’apprenant (Brewer, 1985 ; Kintsch & Greeno, 1978 ; Mistry,
1993). Dans le même temps, les recherches sur les processus cognitifs sous-jacents à ces
phénomènes de construction de connaissances en milieu bilingue (Singual, 2002 ; Verhoaven,
1994) n’ont jusqu’alors pas su proposer d’explications se rattachant aux modèles classiques
de la compréhension du langage (Kinstch, 1998).
L’objectif de ce travail est de montrer qu’une lecture fine du modèle Construction-Intégration
(Kintsch, 1998) permet une compréhension des mécanismes de construction de connaissances
en contexte bilingue. Nous montrerons que les conditions d’activation de la Mémoire de
Travail à Long Terme (Kintsch & Ericsson, 1995), qui est un élément central du modèle de
Kinstch (1998), varie du fait de facteurs contextuels (relation entre les connaissances liée à
culture de l’élève et les connaissances véhiculées par le texte) et de la langue (L1 vs L2).
Notre expérimentation a concerné cinq classes de CM2 de Saint-Joseph et Saint-Philippe de
l’île de la Réunion. Nous avons fait lire aux sujets un texte se rapportant au thème du
dérèglement climatique (dont les effets sont bien connus par les enfants Réunionnais). Nous
avons par la suite proposé des aides orales à la compréhension du texte en créole (L1) pour le
groupe 1 et en français (L2) pour le groupe 2. Nous avons fait lire le texte sans aide à la
compréhension pour notre groupe contrôle ( groupe 3). Nous avons analysé la production des
élèves des trois groupes en tâche de rappel libre via une analyse prédicative (Kintsch, 1974).
Les résultats que nous avons recueillis nous permettent de conclure à un effet significatif de la
langue L1 (créole) sur l’activation des connaissances et la production d’inférences lors de la
lecture d’un texte en L2 (français).
Notre travail montre qu’il est possible d’appliquer le modèle Construction-Intégration pour
comprendre les mécanismes de construction de connaissances en contexte bilingue ou
diglossique. Cela a pour conséquence de proposer la situation de diglossie comme lieu de
reformulation de questionnements liés aux modèles de la compréhension du langage en
psychologie cognitive.
35
ITALIA Magali :
Construction des connaissances syntaxiques du français en situation diglossique
Le français, bien que langue d’enseignement car unique langue officielle et véhiculaire du
Gabon, se heurte à la résistance du Fang, seul vernaculaire présent dans la province rurale du
nord du pays, le Woleu-Ntem, où la plupart des enfants n’ont pas le français comme langue
maternelle.
Ainsi l’appropriation du français se fait principalement à travers la scolarisation, dans un
système éducatif monolingue.
En raison de cette situation diglossique, et parfois d’insécurité linguistique, besoin est de
définir les constructions des connaissances du français, et ses différentes étapes, afin de mieux
appréhender son apprentissage. Cela revient à délimiter les séquences successives d’un
énoncé pour rationaliser leur identification et leur description, puis à déterminer l’élaboration
de chacune de ces séquences en étudiant les degrés divers de complexité de leurs unités
syntaxiques, à partir de l’analyse en grille élaborée par le GARS. Les corpus étudiés,
composés d’enregistrements de français parlé et produits par huit locuteurs, répartis en deux
groupes distincts, classés selon des variables d’âge et d’années de scolarité, mais possédant la
même langue de substrat, sont transcrits selon le modèle du GARS. Chacun des locuteurs est
enregistré lors d’un long monologue qui ne subit alors aucune interaction dialogique.
A travers la comparaison de ces corpus oraux, l’objectif est de déterminer, grâce à l’étude des
dispositifs tels que l’extraction et les tournures pseudo-clivées, en quoi les différences de
mécanismes d’apprentissage du français (pour les uns, absence de scolarité et acquisition de la
langue seconde en milieu informel au contact de francophones, et, pour les autres, scolarité
jusqu’en troisième, c’est-à-dire apprentissage guidé en milieu formel) ont des conséquences
sur la syntaxe utilisée.
La prise en considération et la reconnaissance de cette syntaxe pourra améliorer
l’apprentissage du français en milieu diglossique et éviter le conflit latent entre le français
parlé et le français tel qu’il est décrit dans les manuels scolaires.
36
KOUADIO N’GUESSAN Jérémie :
Apprendre le /et en français : parcours du combattant de l’écolier africain.
Apprendre le français et apprendre en français (langue seconde ou quasi étrangère), des petits
enfants africains l’ont fait depuis des générations avec plus ou moins de succès. Les
optimistes pencheront pour le « plus ». Ce faisant, ils se référeront sans doute à la période de
l’immédiate post-indépendance ou même à celle d’avant. L’école en ces périodes-là était
caractérisée par a) la présence de maîtres à la compétence pédagogique éprouvée par
l’exigeante et contraignante doctrine coloniale, b) des élèves particulièrement motivés, c) des
classes aux effectifs réduits. Toutes choses qui, combinées au caractère répétitif de la
pédagogie d’alors, ont pu masquer en partie les difficultés liées à l’apprentissage d’une
nouvelle langue, vecteur de savoirs nouveaux. Ils pourront à loisir égrener pêle-mêle les noms
de grands hommes de lettres que l’école africaine a produits et montrer qu’aujourd’hui
l’Afrique francophone compte des millions de cadres de haut niveau aux compétences
comparables à leurs homologues d’ailleurs. Mais des questions demeurent. Et c’est là où les
moins optimistes ou simplement les plus réalistes mettront en avant les limites de ce
« succès ». L’école africaine est en crise, et les systèmes éducatifs au sud du Sahara sont les
moins productifs au monde.
Les causes de cette situation sont nombreuses et, parmi celles-là, la question de la langue
d’enseignement/apprentissage n’est pas la moindre. Et il semble que dans aucun pays de cette
aire géographique l’on n’ait réussi à régler l’épineux problème du rapport entre le français et
les activités cognitives, dans des classes composées en grande partie par des enfants
alloglottes.
Ce rapport français-activités cognitives constituera la trame principale de cette
communication, qui s’appuiera sur des enquêtes dans des classes de CP en Côte d’Ivoire.
Nous poserons également la question de savoir si les déficiences constatées à ce niveau ne
proviendraient pas du fossé qui se creuse de plus en plus entre la variété de français (normé)
que l’école essaie de faire acquérir et d’autres variétés véhiculaires plus dynamiques parlées
par toutes les couches de la société. La situation ivoirienne est de ce point de vue exemplaire.
Enfin, comme il y a eu ici, comme ailleurs, quelques essais d’utilisation des langues
nationales dans les premières années de scolarisation dans le but de pallier justement les
difficultés nées de ce rapport, nous rendrons compte également de ces expériences pour en
faire ressortir les limites.
37
KUBE Sabine :
« On fait tout en français et on nous dit toujours d’apprendre le français. Mais quel français
apprendre encore ?» - Représentations du français et de son enseignement de lycéens
abidjanais.
Connaître les représentations que les élèves africains dans un système scolaire basée
uniquement sur le français ont de cette langue s’avère décisif pour deux raisons. Ces
représentations influencent d’une part l’apprentissage par les élèves à la fois de la langue
française mais aussi du savoir scolaire véhiculé par elle. Elles sont d’autre part d’excellents
indicateurs des déficiences de l’actuel système scolaire en Afrique francophone et des
méthodes d’enseignement du français en particulier.
Nous essayons, dans la présente communication, d’expliciter cette thèse en nous basant sur les
résultats d’une enquête menée par questionnaire et entretien de nature métalinguistique en
2002 dans trois lycées abidjanais avec des élèves de 15 à 22 ans (de la Troisième à la
Terminale).
Le français joue un rôle important dans l’univers linguistique abidjanais, non seulement en
tant que langue officielle mais aussi comme langue véhiculaire pour la majorité de la
population urbaine. Le français est désormais pour les élèves la langue qu’ils utilisent le plus.
Cette évolution du français a conduit à sa différentiation. Plusieurs normes du français
coexistent aujourd’hui dans la pratique linguistique des élèves et dans leur environnement
linguistique. Cette coexistence s’avère particulièrement conflictuelle à l’école où l’écart entre
le français parlé en dehors de l’école (et souvent déjà en son sein !) et celui enseigné par les
professeur et servant de référence pour les examens est évident. L’important taux d’échec au
baccalauréat n’est que le signe extérieur des problèmes linguistiques des élèves provoqués par
l’enseignement du français. Dans un tel contexte, étudier les représentations du français et de
l’enseignement chez les élèves devient particulièrement important.
Après quelques remarques préliminaires sur les caractéristiques de la situation linguistique
vécue par les lycéens abidjanais et leur principaux problèmes linguistiques à l’école, nous
montrerons, dans un premier temps, les représentations du français chez les élèves interviewés
en mettant l’accent sur le jeu très complexe des différentes variétés de cette langue
actuellement présentes en Côte d’Ivoire et en concurrence dans le quotidien linguistique des
élèves. Un deuxième point essayera de démontrer à quel point ces représentations sont
influencées par celles des professeurs et surtout leurs méthodes d’enseignement. Nous nous
appuyerons sur les propos des élèves mais aussi sur nos propres observations en classe, nos
participations aux conseils de classe, aux réunions des professeurs et sur des discussions avec
différents professeurs, éducateurs et inspecteurs au Ministère de l’éducation. Nous allons
conclure notre communication en ouvrant quelques pistes à suivre pour une réforme des
méthodes de l’enseignement du français en Côte d’Ivoire et en Afrique francophone en
général.
38
LE ROHELLEC Solange :
Parler, lire, écrire en français : des outils de socialisation dans l’enseignement primaire à
Madagascar
Langue officielle et langue d’enseignement avec le Malgache, le français a le statut d’une
langue étrangère de « fait » depuis son retour en 1992 dans les programmes officiels de l’école
primaire. Pour faciliter les interactions verbales en classe, l’enseignant a recours à sa langue
maternelle, c’est-à-dire un malgache dialectal oral qui est en général le même pour ses élèves,
pratique majeure pour la plupart de ces enfants, au détriment des langues d’enseignement.
Alors que la langue française devrait assurer la fonction culturelle et éducative des écoliers
malgaches, constat doit être fait que ce n’est pas réellement le cas, vu la pauvreté du capital
langagier des enseignants ; celle-ci s’explique par une faible maîtrise du français qui est une
des conséquences de la malgachisation, par un niveau académique proche d’un brevet des
collèges dévalorisé, et d’une formation professionnelle tronquée ou inexistante. C’est pourquoi
la question de la socialisation de l’enfant dans ces conditions doit être posée.
Nous proposons d’analyser différentes pratiques didactiques et pédagogiques d’enseignants du
primaire à Madagascar en visualisant des séquences où les élèves sont en situation d’oral, de
lecture et d’écriture. Nous démontrerons ainsi les impacts irréversibles sur la maîtrise de
savoirs fondamentaux comme la lecture et l’écriture. En effet, les choix linguistiques de ces
enseignants avancent des préférences didactiques fondées sur leurs propres représentations,
savoirs et savoir-faire en corrélation avec leur compétence linguistique lacunaire. Ainsi, la
répétition de mots ou groupes de mots isolés, décontextualisés, en marge de tout aspect social
et culturel, n’a-t-il aucun sens pour l’élève incapable de fixer le vocabulaire de base. Cette
situation peut s’expliquer, d’une part, par des difficultés à l’oral qui persistent depuis le début
de l’apprentissage sans aucune correction et ajustage d’une année sur l’autre et qui se
répercutent à l’écrit et, d’autre part, par l’absence d’un bain linguistique dans une continuité
scolaire qui ne favorise pas l’usage du français. Par ailleurs, si l’oral semble « acceptable »
dans certaines classes, l’écrit est loin de l’être : de nombreuses difficultés surgissent et nous
verrons que les élèves se heurtent aux problèmes liés à la structuration et au découpage même
d’un mot, tombant inévitablement dans le piège associatif phonie/graphie. Aussi nous
interrogerons-nous sur les raisons de cette situation. Nous ne pouvons certes pas en attribuer la
seule responsabilité aux élèves car ils ne font que reproduire le modèle du maître ; ils sont
simplement les garants de sa continuité.
Pour rendre compte des phénomènes étudiés, nous ferons référence à des séquences vidéo
attestées puisque nous avons pratiqué une méthodologie de terrain enregistrant des situations
pédagogiques telles qu’elles se déroulaient en contexte scolaire. Nous avons privilégié le
milieu provincial de différentes régions de Madagascar car il représente la grande majorité des
écoliers malgaches. Nous suivrons le cheminement classique de l’appropriation d’une langue
en situation oral/écrit. Notre démarche d’observation s’est orientée vers des séquences de
classe présentant tour à tour des élèves en situation de non intégration.
39
MALLAM GARBA Maman :
Un plurilinguisme sans bilinguisme :
le parcours du combattant du locuteur kanuri du Niger
Les expériences et recherches sur l’enseignement bilingue en Afrique semblent se focaliser
sur la coexistence, pacifique ou conflictuelle, dans le système éducatif formel, de la langue
maternelle de l’enfant et de la langue officielle qui est généralement d’essence exogène. Les
cas des plurilinguismes, souvent complexes mais fort instructifs, auxquels sont confrontés de
nombreux enfants africains, dans leur parcours vers la vie active passent à travers les mailles
de la problématique bilingue. La situation des enfants kanuri du Niger est, à cet égard,
emblématique. De la cellule familiale à la vie professionnelle en passant par l’Ecole, c’est un
véritable parcours de combattant, au sens militaire du terme mais parsemé d’embûches
linguistiques et langagières, qu’ils entament. Un enfant kanuri qui arrive à effectuer des
études supérieures est confronté à plus d’une dizaine de langues et variétés de langues
différentes. Comment s’en sort-il ?
Cette étude porte sur une série des recherches menées, à des périodes différentes, en 1993 et
en 1997, dans des écoles bilingues francais-kanuri auprès des élèves, des enseignant(e)s,
parents d’élèves et des responsables pédagogiques et administratifs. Dans un premier temps,
elle marque le parcours langagier de l’enfant kanuri, le nombre de langues et variétés de
langue qu’il s’approprie, et dans un second, elle dégage les avantages que l’on peut tirer des
stratégies développées par cet enfant pour la mise en œuvre d’un enseignement bilingue
efficace, qui prend en compte les besoins de l’enfant et ceux de sa communauté. Quelles
interactions peut-il y avoir entre le plurilinguisme in vivo des communautés et le
plurilinguisme in vitro des instances scolaires ? Telle est la question à laquelle, nous tenterons
d’apporter une réponse à partir des faits et suivant la voix des personnes directement
concernées. Les corpus à traiter proviennent des entretiens menés auprès des différents acteurs
de l’éducation et de l’observation des cours en classes.
40
MASSOUMOU Omer :
Les usages linguistiques chez les élèves des cours préparatoires dans un quartier de
Brazzaville : la place du français
Une enquête menée dans le quartier de la poudrière a montré le caractère très hétérogène des
usages linguistiques chez les personnes adultes. Ces adultes sont de parents d’élèves qui
déterminent les pratiques linguistiques de leurs enfants.
Les élèves en début de scolarisation (6 et 7 ans) qui, fréquentent les deux écoles primaires de
ce quartier, ne manquent pas d’exprimer la diversité en fonction de leurs origines ethniques.
La notoire pluralité des langues (français, kituba, lingala, lari, mbembé, ndondo, kamba,
hangala, kuni, pounou, vili, etc.) dans ce quartier fonctionne de façon variable au niveau
social mais le cadre scolaire, par son monolinguisme, instaure une uniformisation linguistique
vécue différemment par les jeunes acteurs. La consolidation ou l’acquisition des
connaissances du français chez ces élèves obéissent à des stratégies ou à des paramètres
complexes. Nous envisageons la description des usages linguistiques et des compétences
communicationnelles pour permettre une définition des tendances linguistiques existantes. La
gestion du bilinguisme ou du multilinguisme restera un aspect intéressant à étudier surtout à
partir des interférences générées dans la pratique du français.
41
ONGUENE ESSONO Louis Martin
Compétence d’écriture en français chez les élèves bilingues et monolingues du Cameroun
Le Cameroun, célèbre par sa mosaïque linguistique, compte près de 250 langues
différentes. Le français et l’anglais, langues officielles, servent à la scolarisation selon la zone
linguistique considérée.
En abordant les problèmes de l’acquisition/apprentissage et de l’enseignement du
français en zone francophone, on observe que l’appropriation du français signifie la
réinvention pure et simple de cette langue, le lexique, la structuration, la pragmatique et la
(morpho) syntaxe du français subissant l’assaut de la cohabitation du français et des langues
locales.
Je me propose, dans cette communication, d’examiner les productions écrites en français
des élèves de 4ème de plusieurs établissements publics et privés de quelques villes et villages
du Cameroun sous le prisme de l’utilisation du pronom relatif. Près de 300 occurrences ont
été recueillies, transcrites, puis analysées pour montrer que les langues locales, rattachées
pour la plupart à l’espace bantu, et bien que non homogènes, ne connaissent qu’un seul relatif,
lequel se rend en français par la forme que, rencontrée dans 88% de cas. Si la forme qui est
parfois bien utilisée (25%), on a l’impression que, malgré leur niveau d’étude en français, les
élèves continuent de transposer en français les structures de leur langue.
L’intérêt de la communication vient du fait que les apprenants proviennent à 40% des
zones rurales où le français est L2, et à 60 % des zones urbaines où le français est leur seule
LM. Mais les erreurs commises par les deux groupes sont strictement identiques et révèlent
que les élèves monolingues de la ville conservent le substrat des langues locales comme chez
les bilingues des villages.
L’approche longitudinale est proposée, afin de permettre d’évaluer l’évolution dans
l’acquisition du français. Cette méthodologie consiste à suivre les apprenants tout au long de
leur apprentissage. Les sujets ont été observés depuis la classe de 6ème , et leurs productions
analysées, pour permettre de conclure sur la progression ou non de l’apprentissage et de
l’acquisition du pronom relatif en L2.
Si la didactisation du concept de relatif s’avère ardue, même pour les enseignants
formés, il demeure difficile de déceler les obstacles cognitifs qui bloquent les élèves pour
intérioriser les structures et les mécanismes du pronom relatif français.
L’existence d’un seul relatif dans la L1 peut expliquer ce blocage, même si les élèves
monolingues des zones urbaines produisent exactement les mêmes erreurs. Cette récurrence
des erreurs vient appuyer l’hypothèse que le français camerounais n’a pas atteint encore le
statut de langue maternelle, puisqu’il est constamment entaché du substrat de la L1 que ne
parlent même plus les enfants.
L’enseignement de cette notion entraîne une surnorme ( ?) aboutissant à des solécismes.
On analysera par exemple les occurrences du type
1a 1b1c1d1e1f-
Mon père où j’habite chez lui, me commissionnè quand je veu étudié.
j’ai fui ché mon noncle donc la maison est à situé à Godon
Les jans venait dans la maison doux le corps de mon père est poser.
Je vous ferez la description d’un homme que j’avai décidé de rendre visite
j’ai rencontré les camarades que j’écris sous vent.
Le cahier que je travaillait sur ça est finit. Mon père a dix donc j’arrache les
feuilles alors.
42
PEUVERGNE Julie
(provisoire) Enseignants de Lomé (Togo), entre pratiques et représentations.
Notre travail se place sous l’égide du projet Corus-AUF « Appropriation du français et
construction de connaissances via la scolarisation en situation diglossique au Togo », dans sa
dimension sociolinguistique, à savoir décrire l’environnement dans lequel émerge le français
langue seconde. Nous nous intéressons donc au milieu des enseignants.
Nous nous proposons d’exposer ici les principaux concepts théoriques sur lesquels nous
nous sommes basée, en nous appuyant sur deux études pour les illustrer. L’école étant bien
souvent le premier et unique lieu de contact avec le français, les enseignants, en particulier les
instituteurs, tiennent le rôle de locuteurs autorisés pour leurs élèves. Leur parler fait alors
office de référence : la variété de référence se définit comme un ensemble de traits sur
lesquels porte l’attention normative. Mais ces enseignants ont acquis le français de la même
façon que leurs élèves. De plus, les formations souvent lacunaires laissent à penser que leur
parler est perméable à une norme endogène.
Une première étude portant sur la description de la structure du groupe verbal dans le
parler des enseignants (en primaire et collège) lors de leurs cours nous permettra de mettre à
jour certaines manifestations de cette norme endogène, susceptibles de pénétrer la variété de
référence en construction chez les enfants.
Nous aborderons les représentations du français, ainsi que celle du métier
d’enseignant, sur la base d’entretiens semi-dirigés auprès d’instituteurs de Lomé. Nous
intéresserons entre autre à la conscience de la norme, du rôle de locuteur autorisé, à la place
accordée aux langues premières, et à l’insécurité linguistique de ces enseignants.
L’enseignant, locuteur autorisé, contribue à l’élaboration du français de référence, tout
en étant sensible à une norme endogène en extension. Il est également un acteur social, tiraillé
entre les exigences administratives et la demande en matière d’éducation et d’apprentissage,
pris entre deux langues. Nous espérons esquisser un "portrait sociolinguistique" des locuteurs
autorisés.
43
RANAIVO Velomihanta et Vololona RANDRIAMAROTSIMBA :
Des langues-cultures aux pratiques de classe en contexte diglossique : quelle cohérence ?
L’exemple de Madagascar.
Une des causes majeures de l’échec du bilinguisme provient du manque de cohérence entre
les différents éléments et niveaux du système éducatif malgache depuis les représentations et
les croyances sociales ou doxa jusqu’aux pratiques de classe en passant par les lois
d’orientation, les politiques linguistiques et éducatives sans oublier les dispositifs et outils
didactiques mis en œuvre.
La présente communication se donne principalement comme objectif l’analyse des ruptures
entre les lois d’orientation successives d’une part et ces lois d’orientation et la réalité du
terrain d’autre part. Ces ruptures engendrent divers dysfonctionnements dont il convient de
mettre en lumière les mécanismes et les impacts car elles affectent la maîtrise concomitante
des deux outils linguistiques en présence dans le champ scolaire : le malgache avec ses
variantes dialectales et le français.
Ces phénomènes sont mis en exergue à travers la présentation d’un corpus constitué par le
biais de mémoires de fin d’études d’étudiants en formation initiale (futurs professeurs de
lycée) ainsi qu’en formation des encadreurs de l’éducation (conseillers pédagogiques de
collège) à l’Ecole Normale Supérieure d’Antananarivo. Ces travaux se fondent sur des
enquêtes effectuées par les preneurs de formation dans ces différents cadres auprès des
parents d’élèves, des élèves et des enseignants du primaire et du collège (enseignement
fondamental). Sur la base de ces investigations complémentaires (entretiens, questionnaires et
observations de classe menés dans des établissements de la capitale et des provinces), les
analyses menées permettent de dégager un état des lieux de la maîtrise du français comme un
des principaux outils de prise en charge cognitive et de pointer les problèmes à prendre en
considération pour renforcer la construction des compétences : manque de motivation pour
une langue entachée de perceptions plutôt négatives, ambiguité du statut pédagogique du
français oscillant entre langue étrangère et langue seconde, difficultés d’application des textes
officiels qui se limitent souvent à des considérations vagues et qui laissent surtout trans
paraître une absence de véritable politique linguistique, pratiques scolaires en butte à des
problèmes de formation ainsi qu’à des manuels et/ou méthodes inadéquats.
Fondée sur une approche systémique, cette étude intègre différents domaines de référence :
linguistique, sociolinguistique, anthropologique et didactique. Outre la contribution à une
meilleure connaissance de terrain, ainsi qu’à des prises de décision éclairées, l’une des
principales finalités de cette recherche est de parvenir également à une présentation critique et
synthétique des travaux sur l’apprentissage/enseignement du et en français à Madagascar au
cycle concerné pendant la décennie écoulée.
44
RANDRIAMASITIANA Gil Dany:
Représentations contrastées du français dans l’enseignement primaire en contexte
diglossique. Du façonnage sociolinguistique à la diversité des répertoires verbaux des
apprenants. Cas de deux classes de base malgaches.
En partant du postulat que les représentations ont à la fois un ancrage socio-historique et
idéologique, axiologique et normatif et un soubassement social individualisé, d’une part, et en
s’appuyant sur une approche systémique, d’autre part, cette contribution tente d’étudier dans
quelle mesure il existe une inter-relation entre les représentations contrastées du français par
les entités impliquées dans le secteur éducatif, le moule sociolinguistique des apprenants du
niveau primaire, et les répertoires verbaux de ceux-ci.
L’étude comparative menée au sein de deux classes primaires (publique et privée) cherche, à
l’aide de trois instruments d’analyse (les questionnaires, les entretiens, les dessins et les
supports graphiques), à examiner que les fluctuations du statut des langues partenaires (L1, le
malgache, L2, le français) ont largement modelé aussi bien les pratiques d’enseignement que
les perceptions contrastées des acteurs du système éducatif, notamment des apprenants, des
parents et des enseignants. L’effet psychosocial du prêt-à-penser et du prêt-à-enseigner est
patent. La diversité du moule sociolinguistique et communicationnel des apprenants entraîne
une variété de leurs répertoires verbaux.
En fait, le français, médium d’enseignement et instrument efficace pour l’insertion socioprofessionnelle, détient, en tant que langue additionnelle du malgache officiel, une légitimité
linguistique. Les normes prescriptives (véhiculées essentiellement par l’apprentissage formel
dans les écoles primaires et les usages institutionnalisés) et les normes évaluatives (découlant
principalement des attitudes positives des acteurs susmentionnés vis-à-vis de l’ouverture biplurilingue) renforcent en partie l’acquisition du français de référence.
45
RUI Blandine
Des enfants racontent : Entre oralité et scripturalité en contexte diglossique guinéen.
Le travail qui sera présenté s’inscrit à l'intérieur de l'action de recherche "Incidences du
multilinguisme sur les compétences en français des élèves guinéens en fin de cycle primaire"
financée par l'Agence Universitaire de la Francophonie (programme 2002- 2004) et menée
en réseau par les universités de Conakry (Guinée), de Franche-Comté (Canada), de Provence
(Canada) et de Montréal (Canada).
Je me propose d’interroger de manière croisée les caractéristiques textuelles, discursives,
interactionnelles, culturelles des mises en récit individuelles orales et écrites de huit écoliers
guinéens de Conakry en fin de scolarité primaire. Autrement dit, c’est l’analyse, (sous forme
d’études de cas) des relations entre compétences narratives orales et écrites en français de
chacun de ces sujets plurilingues qui nous intéressera. Les récits oraux et écrits analysés et
mis en relation ont été produits en situations expérimentales assimilées assez fortement par les
enfants à des situations scolaires.
Le propos sera fondamentalement didactique. En, effet, je fais l’hypothèse que les résultats
d’analyse, bien que non représentatifs et non généralisables, peuvent être plus que de simples
indicateurs pour une étude ultérieure plus quantitative sur corpus vaste. Ce sont, à mon sens,
déjà des éléments de réflexion intéressants pour contribuer à bâtir, en contexte multilingue
guinéen, une didactique des langues intégrée et intégrative, fondée notamment sur un principe
de continuité entre oralité et scripturalité.
46
SANOGO Mamadou Lamine :
Le bilinguisme de transfert dans un contexte diglossique :
Les écoles bilingues de Tin-Tua (Fada Ngourma, Burkina Faso)
L’une des expériences de l’enseignement bilingue les plus anciennes au Burkina Faso, le
programme PAG (Programme d’Alphabétisation dans le Gulmu) a enregistré de très bons
résultats scolaires en présentant ses élèves aux examens officiels en français. Pourtant, cette
scolarisation qui a commencé en langue nationale gulmance dans la plupart des centres a été
confrontée à d’énormes difficultés, comme la perception péjorative des langues
d’enseignement des deux premières années et le manque de matériel didactique en langue
africaine. Aujourd’hui, sans doute, l’un des pionniers dans son domaine, le PAG excelle
surtout par son programme d’enseignement du français au néo-alphabétisés, à telle enseigne
que son expérience fait l’objet d’analyse en vue de sa généralisation. Il existe bien d’autres
programmes d’enseignement du français aux néo-alphabétisés en langue nationale au Burkina
Faso. La présentation de ces différents programmes a fait l’objet d’une communication aux
journées scientifiques du Libreville en mars 2003.
Nous nous proposons de présenter l’expérience du PAG, en nous fondant sur ses fondements
scientifiques, ses acquis et ses difficultés. Appelée méthode TIN-TUA, cette expérience
d’enseignement du français à partir des acquis en langue nationale repose surtout sur la
maîtrise d’un français fonctionnel, un français oral. Cependant, elle a changé la vie de
nombreux adolescents, et mérite de faire l’objet de recherches approfondies, pour éviter des
dérives qui pourraient survenir du fait de sa généralisation. Les partisans d’une généralisation
systématique de l’enseignement bilingue au Burkina Faso n’ont sans doute pas tenu compte
de tout l’environnement de ces écoles (maîtres bien formés, motivations diverses, cantines
scolaires, …). Si la scolarisation du tout en français a montré ses limites, une généralisation
de l’expérience bilingue ne nécessite-elle pas une étude appropriée ?
47
SAWADOGO François, LEGROS Denis & Emmanuelle MAITRE de PEMBROKE :
Quelle place pour la langue maternelle Mooré (L1) dans la construction et la production de
connaissance via la langue française (L2) à l’école au Burkina Faso ?
Le rôle et la place des langues maternelles dans les situations d’enseignement diglossique,
notamment les systèmes d’enseignement francophone d’Afrique comme c’est le cas au
Burkina Faso, suscitent beaucoup d’interrogations quant à l’acquisition de la langue L2 et son
instrumentalisation (Noyau & Cissé (2001, à paraître). Fondée sur le cadre théorique de la
sémantique cognitive et le paradigme expérimental de l’analyse en système, la présente
recherche, menée au Burkina Faso autour d’une tâche de la vie quotidienne “ comment faire
chauffer l’eau ”, étudie l’effet de l’utilisation du mooré langue maternelle (L1) sur l’activation
des connaissances et leur verbalisation en français (L2).
Nous situant dans le champ de la sémantique cognitive (Jamet, Legros & Pudelko, 2004),
nous considérons que les représentations langagières des objets et des procédures sont
déterminées par les représentations sémantiques dont elles dépendent. Nous avons étudié
l’acquisition et la construction des connaissances sur une procédure en utilisant comme
matériaux les productions verbales des sujets. Nous avons analysé la procédure “ comment
faire chauffer l’eau ” comme un système avec ses sous systèmes, en fonction des buts et des
sous buts du sujet (Legros, Baudet, & Denhière, 1994).
L’expérimentation menée avec 104 élèves du primaire de niveau CM1 de la ville de
Ouagadougou a consisté en l’activation de connaissances à l’oral dans deux conditions
expérimentales L1 vs L2 suivie d’une production verbale écrite en L2. L’analyse comparative
des productions écrites des deux groupes expérimentaux montre que les verbalisations orales
en L1 sur une tâche de la vie quotidienne ont un effet positif sur l’activation de connaissances
et la production écrite sur la dite tâche en L2.
Les résultats apportent des arguments forts à la réflexion didactique, notamment par rapport
aux effets sur l’apprentissage en situation de bilinguisme à l’école. La langue maternelle
n’interfère pas de manière négative dans l’acquisition et la construction de connaissance en
langue seconde comme on a pu l’avancer. Au contraire si elle est valorisée et bien utilisée
dans la relation pédagogique, elle permet une activation des connaissances construites dans le
contexte culturel et linguistique de l’élève et donc une meilleure et plus efficace structuration
des représentations sémantiques (Legros, Maître de Pembroke, & Acuna, 2004). Ce qui a un
effet facilitateur sur l’acquisition de la langue seconde et la production de connaissances dans
cette langue L2.
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SIMARD Yves :
L’école guinéenne et l’acquisition de la morphosyntaxe du français oral
Nos travaux actuels portent sur les variations morphosyntaxiques qu’a pu connaître le français
depuis le XVIIè siècle lorsque s’il s’est retrouvé coupé de la norme centrale ou en situation de
langues en contact.
Ces recherches sont centrées sur l’évolution ou la variation des formes verbales telle qu’elle
se manifeste dans les français à norme endogène, dans les parlers véhiculaires, principalement
en Afrique, ainsi que dans ce qu’il est convenu d’appeler des créoles. Comme au plan
morphosyntaxique les changements se situent principalement aux niveaux de la délimitation
de l’unité lexicale verbale – valence et rection -, des marqueurs de conjugaison – personne,
temps, auxiliaires aspecto-temporels -, et des pronoms clitiques compléments, l’analyse porte
donc en priorité sur ces quelques points.
Dans le cadre de cette recherche, nous avons comparé les formes verbales relevées dans des
productions orales de jeunes locuteurs de Conakry peu ou pas scolarisés avec celles d’élèves
du primaire et du collège. La thématique de ce colloque étant l’appropriation du français et la
construction des connaissances via la scolarisation en situation diglossique, il nous semble
tout à fait pertinent d’y présenter les résultats de cette étude particulière puisqu’elle permet de
voir ce que l’école a appris à ces enfants à l’oral.
Avec les résultats obtenus par cette comparaison de productions d’élèves et de jeunes
locuteurs peu ou pas scolarisés, nous tenterons de dégager le statut de l’oral dans
l’apprentissage scolaire du français en Guinée. Nous pensons pouvoir étendre le constat à
l’ensemble de la Guinée car l’échantillon analysé ne comporte pas seulement des élèves de
Conakry mais aussi des élèves habitant d’autres régions de ce pays.
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SOMÉ Maxime :
Analyse comparative des productions écrites des élèves : Éducation bilingue Vs Éducation
monolingue. Cas du Burkina Faso, l’éducation bilingue, une alternative au système éducatif
de base ?
Le constat est accablant dans l’Afrique francophone notamment au Sud du Sahara. Le
système éducatif n’arrive pas à scolariser l’ensemble des enfants en âge de l’être. Une
quarantaine d’années après les indépendances, une enquête réalisée par la CONFEMEN en
1991 confirme l’échec de la francisation de la société et du système éducatif. Cette enquête
montre que 96% des enfants scolarisés parlent le français avec leur maître en classe. Dans la
cour de récréation, seulement 48% parlent le français avec le maître ou avec leurs camarades.
En dehors de l’école, 28% parlent le français entre eux et seulement 20% emploient le
français avec le père et 10% avec la mère.
Contre toute attente, à la fin des années 90, les États ont mis en place des « Programmes
Décennaux d’Education de Base » caractérisés par le « tout en français ». Ces nouveaux
programmes ambitionnent de scolariser entre 60 à 70% des enfants en 10 ans et d’alphabétiser
40% des adultes. Toutefois on peut déjà s’interroger sur les conditions de mise en place de ces
programmes. Les premières observations permettent malheureusement de prévoir que la
précipitation de la mise en place de ces programmes va générer les germes de leur futur échec.
Dans des communications ou publications précédentes, nous avons montré les avantages
socio-économiques, culturelles et psychologiques de la mise en place d’une éducation
bilingue : langue africaine/français. D’une façon empirique on avait anticipé sur les
acquisitions et l’appropriation du français par les jeunes apprenants.
PROTOCOLE :
À partir des données du terrain ( sur les 13 régions du pays en zone rurale) en 2003 et 2004,
nous proposons aujourd’hui, une analyse comparative des productions écrites des élèves de
5ème année d’école bilingue (CM2) avec des celles des élèves de 6ème année d’école
monolingue (CM2).
- corpus proposé pour la production écrite : les oisillons
- analyse des récits
- ANALYSE MACRO-STRUCTURALE
- structure du récit en phases et en épisodes narratifs
- trame narrative/arrière plan
2) ANALYSE MICRO-SEMANTIQUE
- référence aux personnages (participants au procès)
- référenciation temporelle
- structure relationnelle du texte
L’actuel système éducatif monolingue dans les pays africains propose une scolarisation des
enfants à partir de 7 ans. Mais en réalité l’élite scolarise sa progéniture dès l’âge de 5 à 6 ans.
Nul ne peut nier que le contexte familial est très déterminant dans cette situation. Ces enfants
vivent dans un environnement familial où le français est déjà une réalité linguistique.
Toutefois, tout ceci nous montre l’incapacité du système à scolariser l’ensemble des enfants
du pays. Dans un système d’éducation bilingue, chaque enfant du pays – de toute origine
sociale et de tout milieu de vie- pourrait être scolarisé dès l’âge de 6 ans dans sa langue
première les deux premières années de sa scolarisation.
50
L’actuel système éducatif propose un enseignement de base sur trois cycles en six ans.
L’ensemble de l’école primaire porte théoriquement sur six ans, mais la réalité est autrement
plus triste, car nous avons beaucoup d’abandons scolaires et de redoublements. Le choix de
maintenir la scolarité du primaire sur une période de six ans était justifié par le fait que le
français était enseigné comme une langue maternelle, or tous les pédagogues sont conscients
que le français n’est pas une langue maternelle, cela explique cette prolongation d’une année.
Nous connaissons, tous, la situation de l’enseignement du français actuellement en Afrique et
celle du système éducatif. Par conséquent, il y a une nécessité de repenser tout l’ensemble, car
le système éducatif actuel n’a pas éradiqué réellement l’illettrisme dans les pays africains.
L’analyse des données recueillies sur le terrain montre de manière non empirique que
l’éducation bilingue est une alternative au système éducatif de base en Afrique. Les Facultés
des Lettres et Sciences humaines, les écoles normales et les écoles normales supérieures sous
l’impulsion des autorités devraient-elle mettre des formations sur la didactique du français et
des langues africaines.
C’est la situation qui nous impose de proposer un aménagement du système éducatif. Un tel
aménagement linguistique permettrait de mettre en place une éducation bilingue dans
l’enseignement primaire. Il présenterait également plusieurs avantages, notamment d’ordre
psycho-pédagogique, didactique, économique…
51
TIRVASSEN Rada :
Pratiques langagières et représentations sociolinguistiques en milieu scolaire mauricien.
L’apport de la sociolinguistique à la compréhension de l’école dans sa dimension linguistique
est indéniable. De la démystification de la norme scolaire à l’aménagement linguistique en
passant par les notions de compétence de communication, de sécurité/insécurité linguistique , etc., la
sociolinguistique a contribué à une compréhension plus fine de la question du langage en
milieu scolaire. On peut toutefois penser que la légitimité du discours sociolinguistique sur
l’école se trouverait renforcée si ses travaux s’inscrivaient dans deux démarches précises. Il
lui faudrait d’abord offrir un réel statut de locuteur (doté de représentations sociolinguistiques) à l’enfant-apprenant, en particulier lors de la phase de son entrée dans le
bilinguisme, étape incontournable pour la grande majorité des enfants des pays du sud.
Ensuite, sur le plan théorique, il lui est nécessaire d’interroger ses concepts les plus féconds
pour évaluer leur adéquation au contexte scolaire. C’est en tout cas les préoccupations que
nous nous sommes données dans le cadre de cette communication.
Sur le plan empirique, cette communication rendra compte de deux types d’enquêtes que nous
menons. Le premier portera sur l’entrée dans le bilinguisme d’enfants ayant le créole comme
première langue et qui sont scolarisés dans des écoles maternelles où le français est la langue
de scolarisation. Il s’agira, pour reprendre les termes de l’appel à communications,
d’observer les pratiques langagières d’enfants élèves (créolophones) dans des écoles
francophones afin de dégager les types d’interactions dans lesquels ils sont impliqués, tant en
situation formelle que hors la salle de classe, où les contraintes sont différentes, avant que
l’on analyse quelques-unes des caractéristiques morpho-syntaxiques et lexicales de leurs
productions en français. Par ailleurs nous menons des enquêtes sur les représentations des
principaux acteurs concernés par le système éducatif mauricien, afin de déterminer les
significations que les acteurs de l’école se construisent d’elle (dans sa dimension
linguistique), et surtout de vérifier si les enfants (en début de scolarisation) ont déjà développé
des phénomènes de représentations sociolinguistiques. Si tel est le cas, il faudrait alors se
demander s’ils se construisent les mêmes significations que leurs parents.
On peut toutefois penser que, tant pour la recherche que pour d’éventuelles applications
concrètes, la démarche qui consiste à observer les pratiques langagières d’enfants entrant dans
le bilinguisme, et la tentative de faire émerger les représentations, ne peuvent être
intéressantes que si l’on esquisse une conceptualisation des données brutes recueillies. Une
première approche pourrait nous amener à nous poser la question de l’adéquation du concept
de diglossie, et de ses limites, pour rendre compte de la gestion des langues dans
l’environnement scolaire, tant par l’institution que par les deux catégories d’acteurs que sont
les enseignants et les enfants-apprenants. On sait que ce concept est fréquemment associé
avec l’école dans les pays qui ont connu la colonisation. Un exemple parmi d’autres est la
caractérisation de l’école comme le lieu qui cristallise la diglossie (R. Chaudenson : 1983).
Pour en revenir aux objectifs de notre communication, nous sommes en effet d’avis qu’il est
nécessaire non seulement de dégager les aspects majeurs qui caractérisent les représentations
sociolinguistiques des acteurs de l’école, de tenter d’établir un lien entre elles et la réalité
sociale, mais aussi de déterminer l’aire de conceptualisation de la diglossie (quand on
l’applique à l’école) ainsi que ses limites.
52
TRÉFAULT Thierry :
L’enfants scolarisé en milieu rural bambarophone (Mali). L’entrée dans l’écriture en langue
nationale et en français.
Le corpus qui nourrit cette communication est composé d’observations in situ de nombreux
moments de classe menés dans les écoles bilingues rurales de la région de Ségou (Mali), de
tests d’élèves scolarisés, de jeunes et d’adultes alphabétisés, ainsi que d’entretiens de parents
d’élèves et d’enseignants. Ces travaux ont été réalisés entre 1996 et 1998 dans le cadre d’une
thèse de doctorat, et ont depuis été réactualisés par de fréquents séjours dans le même milieu
(2001 et 2004 principalement), et par une recherche actuellement en cours avec l’équipe
DIDAXIS de Montpellier.
Le matériau empirique est composé :
de tests d’écriture inventée (au sens où l’entendent Emilia Ferreiro ou Jacques
Fijalkow) en langue nationale, ici le bambara ; ces tests ont été menés en 1997 auprès
d’échantillons représentatifs d’élèves, et de classes entières de 3ème année dans cinq écoles
bilingues rurales du Mali,
de test de lecture et de production d’écrits dans les classes de 5 ème et 6ème années des
mêmes écoles.
Les résultats des tests de 3ème année montrent qu’au moment où les élèves abordent
l’apprentissage de la lecture en français, les compétences acquises en bambara sont loin d’être
suffisantes pour assurer le passage à la langue seconde. Si les correspondances graphie/phonie
sont maîtrisées, il n’en est pas de même pour la compréhension du principe alphabétique, des
liens entre l’oral et l’écrit et de l’utilité sociale de la lecture.
Les tests complémentaires dans les classes supérieures tendent à révéler l’existence de seuils
(au sens des « Thresholds » définis par James Cummins) en deçà desquels l’entrée dans la
langue seconde peut se révéler très précaire. Si les « compétences académiques », et
notamment les capacités métalinguistiques, conditions d’un bilinguisme « additif », ne sont
pas suffisamment développées, le passage au français est problématique.
Dans les classes de 3ème année, un grand nombre d’élève (en proportion variable suivant les
écoles) ne parvient pas à faire le lien entre le laborieux exercice de récitation qui tient lieu
d’apprentissage de la lecture et la logique de l’écrit, en tant que mode nouveau et différent de
transmission des messages. Ils risquent à la fois de ne pas accéder à la lecture en langue
seconde, et aussi de perdre leur aptitude à lire la langue maternelle. En 6ème année, on trouve
une faible proportion d’élèves lecteurs en français, et ayant conservé l’aptitude à lire en
bambara, même en l’absence de pratique pendant plusieurs années.
Les compétences métalinguistiques, en tant que capacité réflexive sur la langue première
orale, sont développées dans l’éducation traditionnelle par les paroles rituelles ou les jeux de
parole : les devinettes, les proverbes, les contes et les salutations développant respectivement
la métaphore, l’ellipse, l’inférence, la structure narrative et les capacités communicatives.
Mais ce type d’échanges linguistiques en langue nationale n’est en général ni repris ni
valorisé par l’école bilingue, même si la « pédagogie convergente », modèle préconisé
actuellement, leur accorde une certaine place.
Aussi, les nouveaux curricula proposent d’autres « convergences » pour la didactique de la
lecture/écriture, partant de l’étude contrastive des langues avec une didactique de la langue
nationale préparant (au niveau grammatical et lexical) à l’enseignement du français. Elle
devrait aboutir à un meilleur développement des compétences bilingues pour les enfants
scolarisés.
53
VERDELHAN Michèle :
L’enfant, le langage et la classe : étude de cas au Mali
Le Mali présente une situation intéressante en matière d’étude de la scolarisation en français.
Pays de l’ex-champ colonial français, les apprentissages scolaires étaient mis en place en
français dès l’entrée à l’école. Des expériences dites de pédagogie convergente, mêlant
rénovation méthodologique et introduction d’apprentissages en langue nationale ont été
menées depuis plus de 20 ans. Une réforme éducative de grande ampleur a étendu récemment
à tout le pays l’entrée en scolarisation par les langues nationales.
L’étude présentée ici converge avec un programme de recherche sur la relation entre
enseignement du français et des langues nationales au Mali.
Le corpus utilisé pour cette communication consiste principalement en en observations de
classes de langage, de maths et de français, dans des écoles de Bamako et alentours, en
octobre 2002 et avril 2003. Un corpus secondaire est fait d’enregistrements d’entretiens avec
des élèves-maîtres de deux IFM, en février 2004.
Dans les observations de classe, on s’intéressera aux comportements langagiers des élèves, à
la relation qu’ils manifestent vis-à-vis du savoir scolaire et de la manière dont s’établit le
rapport au maître et à ce qu’il enseigne. On mettra ces observations en relation avec la
méthodologie adoptée dans chaque cas. On cherchera ainsi à répondre à quelques questions :
quelles occasions les élèves ont-ils de parler en français en classe ? A quelles productions
linguistiques sont-ils incités et avec quel résultat ? Ont-ils des comportements langagiers
différents en classe de bamanankan et en classe de français ? Si, oui, en quoi ? Est-ce lié à la
manière dont l’enseignant procède dans son enseignement ? Y a-t-il d’ailleurs différence
méthodologique entre la classe faite en bamanakan et celle de français ? Peut-on enseigner la
langue 2 comme la langue 1 ? La « convergence » prônée par la théorie ne trouve-t-elle pas là
une de ses limites ?
Pour expliquer le comportement langagier des enfants, ne faut-il pas aussi s’intéresser au
rapport que les maîtres entretiennent avec le langage et les langues ? Le corpus IFM donne
des indications sur la représentation que se font les futurs enseignants de leur rapport aux
langues qu’ils devront enseigner, français ou langues nationales. Ce rapport est complexe,
variable selon les personnes, leurs origines, leur formation. Les degrés d’implication dans
l’enseignement des langues nationales sont également très variables et traduisent des stades
très divers en matière de maîtrise de ces langues.
Ce sont en fait les relations entre les performances langagières des élèves, la méthodologie
employée par les maîtres et le positionnement des enseignants par rapport aux langues à
enseigner qui sont ici objets d’attention. En l’état actuel du travail, on ne cherchera pas à tirer
de conclusions trop fermes de ce croisement d’observations, mais plutôt de nouveaux
questionnements sur quelques facteurs de réussite scolaire en langue seconde dans un
environnement diglossique.
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INDEX
NOM DES COMMUNICANTS
AFOLA-AMEY
Ufualè Christine
AMEGASHIE Komla
ANCIAUX Frédéric
ARRAICHI Rachid
AVOLONTO Aimé
AYEVO Jean Yaovi
AYEWA Noël Kouassi
BAGOUENDI-BAGERE Diane
BECUWE Jacques
BEDOU-JONDOH Edith
BEYOM Robert
BITJAA KODY Zachée Denis
BURGAT Sandrine
BURSTON Monique
COURRIEL
[email protected]
kanmt6@voilà.fr
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
BWANGA Zanzi Jean-Pierre
[email protected]
CISSE Alilou S.
CORDIER Muriel
DAFF Moussa
DIALLO Mamadou Saliou
DIOUF Mayé Mboul
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
martine.dreyfus@
montpellier.iufm.fr
[email protected]
[email protected]
[email protected]
yann-vigile.hoareau@
laposte.net
[email protected]
DREYFUS Martine
FILLOL Véronique
FLORIGNY Guilhem
GBETO Souley Kossi
HOAREAU Yann
ITALIA Magali
KOUADIO N’GUESSAN
Jérémie
KUBE Sabine
LE ROHELLEC Solange
LEGROS Denis
MAITRE DE PEMBROKE
Emmanuelle
MALLAM GARBA Maman
MASSOUMOU Omer
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
55
UNIVERSITE
Lomé, Togo
Lomé, Togo
Antilles-Guyane
Casablanca, Maroc
York, Toronto
Libreville, Gabon
Cocody, Abidjan
Provence
Pau
Lomé, Togo
Bangui, Centrafrique
Yaoundé, Cameroun
Paris VIII
Philadelphia, USA
Lumumbashi,
Congo RDC
Lomé, Togo
Paris VIII
Dakar, Sénégal
Conakry, Guinée
Paris X
IUFM Montpellier
Nouvelle-Calédonie
Paris X
Lomé, Togo
Paris VIII
Provence
Abidjan, Côte
d’Ivoire
Leipzig, Allemagne
Montpellier 3
Paris VIII
Paris VIII
Niamey, Niger
Brazzaville, Congo
NOCUS Isabelle
ONGUENE ESSONO
Louis Martin
PEUVERGNE Julie
[email protected]
RANAIVO Velomihanta
[email protected]
RANDRIAMAROTSIMBA
Vololona
RANDRIAMASITIANA
Gil Dany
RUI Blandine
SALAUN Marie
SANOGO Mamadou Lamine
SAWADOGO François
SIMARD Yves
SOMÉ Maxime
TIRVASSEN Rada
TRÉFAULT Thierry
VERDELHAN Michèle
VERNAUDON Jacques
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
marie.salaun@
paris5.sorbonne.fr
Nantes
Yaoundé, Cameroun
Paris X
Antananarive,
Madagascar
Antananarive,
Madagascar
Antananarive,
Madagascar
Franche-Comté
Paris V
Ouagadougou,
Burkina Faso
Ouagadougou,
[email protected]
Burkina Faso
[email protected]
Franche-Comté
[email protected]
Paris X
[email protected]
MIE, Ile Maurice
[email protected]
Montpellier 3
[email protected] Montpellier 3
[email protected]
Nouvelle-Calédonie
[email protected]
56
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