Colloque international 24-26 février 2005 APPROPRIATION DU FRANÇAIS ET CONSTRUCTION DE CONNAISSANCES VIA LA SCOLARISATION EN SITUATION DIGLOSSIQUE Le français a un statut de langue officielle et/ou de langue d’enseignement dans plusieurs pays d’Afrique et de l’Océan indien. Il est en contact et parfois en concurrence avec d’autres langues autochtones ou internationales et n’est pas une langue première pour la majorité de la population. L’école maternelle ou l’école primaire sont bien souvent les seuls endroits où l’enfant est mis en contact avec le français. Dans ce contexte de diglossie, le système éducatif monolingue en français semble peu capable de rendre ces pays véritablement francophones. C’est ainsi que dans certains pays une scolarisation bilingue a été mise en place, afin de conforter et d’améliorer la présence du français et d’assurer une présence non conflictuelle des langues autochtones qui se montrent dynamiques. Ce colloque s’intéresse à la genèse du sujet bilingue francophone en situation diglossique, à travers la scolarisation en français et l’expérience langagière dans l’environnement en langues premières. Il vise à dégager, à partir des données concrètes du terrain, les conditions favorables à un bilinguisme fonctionnel pour les jeunes issus de l’école francophone. Il entend mener la réflexion sur l’appropriation du français et la dynamique du devenir bilingue chez les enfants scolarisés, selon quatre axes : 1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement bilingue des enfants Il s’agit en premier lieu de comprendre les processus en jeu dans l’apprentissage de la langue de scolarisation et de travail, dans un environnement bilingue français / langue autochtone. En comparant la réalisation par les enfants d’activités langagières précises en langue première et en français, on peut estimer les capacités communicatives déjà construites par les enfants dans leur langue d’usage, et l’appui que ces capacités peuvent offrir pour le développement des capacités langagières en français. En s’appuyant sur les processus d’apprentissage analysés et sur les caractéristiques spécifiques de ces situations d’acquisition et d’utilisation de la langue, on peut espérer dégager des modalités d’amélioration des démarches d’enseignement du français langue seconde et de l’ensemble des matières scolaires à travers elle. 2. L’enfant dans son contexte linguistique : entre l’école et le milieu social On étudiera l'insertion des enfants comme locuteurs dans un environnement plurilingue. Examiner les pratiques langagières quotidiennes des enfants élèves de l'école francophone peut contribuer à évaluer la fonctionnalité de leur plurilinguisme. Celles-ci peuvent être étudiées dans des environnements linguistiques spécifiques et situées dans leur dimension culturelle (caractéristiques discursives des différents types d'interaction, routines discursives, usage et niveaux d'emploi des langues, rencontre avec des variétés de la langue française 1 extérieures à celles de l'école, emploi de la langue autochtone à l'école, alternances codiques, etc.). Quel bi(pluri)linguisme fonctionnel pour les jeunes issus de l'école francophone? On tentera de cerner les compétences bilingues de ces enfants : dans quelle mesure le français, en tant que composante de leur répertoire verbal à côté d'un ou de plusieurs parlers autochtones, devient-il une langue de communication, et comment gèrent-ils les situations plurilingues ? 3. L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au monde de l’écrit L’école en tant qu’environnement langagier sera examiné selon trois perspectives : • L’exposition au français L2 de l’environnement scolaire et les occasions de communiquer à l’école : enquêter sur les situations didactiques et les activités de classe, pour la langue française et les autres matières, de façon à cerner comment l’école et la classe constituent un environnement écologique spécifique d’appropriation du français pour les enfants scolarisés. • La transmission et la construction de connaissances scolaires via la langue seconde : comment se résout la double tâche de construire des connaissances dans une langue qui est elle-même à acquérir ? Comment cette double tâche peut-elle être aménagée, de façon à potentialiser à la fois l’appropriation de la langue et le développement cognitif des enfants ? • Le statut de l’oral et de l’écrit dans l’apprentissage scolaire du français : quelles sont les conceptions de la littéracie à l’œuvre dans le système scolaire, et plus largement dans une société diglossique, et quelles en sont les implications pour faire des élèves des lecteursscripteurs autonomes ? 4. Les représentations de la langue, de l’école, des apprentissages Quelles sont les représentations du français, de l’enseignement et de l’apprentissage, chez les enfants, les parents, et les enseignants, et quelles en sont les implications ? Le rapport à la langue orale et à l’écrit, à l’école et au dehors, peut être scruté notamment par des questionnaires et entretiens de nature métalinguistique, sur les représentations de la langue française, de son apprentissage, de l’oral et de l’écrit, sur les habitudes de lecture et de fréquentation de médias francophones, etc. On abordera ici les notions de norme et d’écart à la norme du français : comment cerner le français de référence pour les enfants qui acquièrent cette langue via la scolarisation, et comprendre leurs positionnements, et ceux des éducateurs, face à ces normes ? L’un des objectifs de ce volet est aussi d’apporter des éléments de réponse à cette question en faisant le lien entre apprentissage, langues et cultures. La dimension culturelle joue un rôle clé, explicitement ou non, dans l’apprentissage des langues, dans l’enseignement, et aussi dans la formation des enseignants. Le comportement de l’apprenant, particulièrement en ce qui concerne le français, peut aussi dépendre de l’image de la langue dans le milieu familial et social, ainsi que des représentations que les adultes de son entourage – et parmi eux ses enseignants - entretiennent sur ce que c’est qu’apprendre et les missions de l’école. 2 Comité scientifique Thomas BEARTH, PR Université de Zürich (Suisse) Robert BOUCHARD, PR U. de Lyon 2 Jean-Pierre CAPRILE, DR CNRS, Paris Moussa DAFF, PR U. Cheik Anta Diop, Dakar (Sénégal) Alpha Mamadou DIALLO, Vice-recteur à la recherche, U. de Conakry (Guinée) Danièle FLAMENT, PR U. Paris-X Françoise GADET, PR U. Paris-X Gisèle HOLTZER, PR U. de Besançon Suzanne LAFAGE, PR ém. U. Paris 3 Denis LEGROS, PR IUFM de Créteil et U. Paris 8 Jacques MAURAIS, PR, Office Québecois pour la Langue Française, Montréal Colette NOYAU, PR U. Paris-X Louis-Martin ONGUENE-ESSONO, PR ENS de Yaoundé (Cameroun) Bernard PY, PR ém. U. de Neuchâtel (Suisse) Ambroise QUEFFELEC, PR U. Aix-en Provence Anne SALAZAR-ORVIG, PR U. Paris 3 Issa TAKASSI, PR U. de Lomé (Togo) Michèle VERDELHAN, PR IUFM et U. de Montpellier 3 Comité d’organisation Lamia ALLAL Vanessa ASSAYA Olivia BINGANGA Mayé DIOUF Guilhem FLORIGNY Françoise GADET Jorge GIACOBBE Maria KIHLSTEDT Hélia LISSAK Montserrat MARTINEZ Isabella Cam Ngoc NGUYEN LAM Colette NOYAU Hasung PARK Julie PEUVERGNE Celia PIRES PEREIRA Silvia ROMEO Maxime SOME Jia TAN Alexandra VRACIU 3 Jeudi 24 février 9h 9h30 10h-10h30 10h30-11h 11h-11h30 11h30-1200 12h-12h30 12h30-14h Accueil Ouverture du colloque Axe 1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement bilingue des enfants (1) Président de séance : Françoise GADET BITJAA KODY Zachée Denis, Cameroun Le développement bilingue (langue maternelle – français) des élèves du programme PROPELCA. TRÉFAULT Thierry, France L’enfant scolarisé en milieu rural bambarophone (Mali). L’entrée dans l’écriture en langue nationale et en français Pause Axe 2. L’enfant dans son contexte linguistique : entre l’école et le milieu social (1) Président de séance : Robert BEYOM SANOGO Mamadou Lamine, Burkina Faso Le bilinguisme de transfert dans un contexte diglossique :Les écoles bilingues de Tin – Tua (Fada Ngourma, Burkina Faso) SOMÉ Maxime (Burkina Faso + France) Analyse comparative des productions écrites des élèves : Éducation bilingue vs Éducation monolingue. Cas du Burkina Faso, l’éducation bilingue, une alternative au système éducatif de base ? Repas Axe 1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement bilingue des enfants (3) Président de séance : Rachid ARRAICHI KOUADIO N’GUESSAN Jérémie (Côte GBETO Souley Kossi (Togo) d’Ivoire) L’acquisition des énoncés complexes Apprendre le /et en français : en L1 (éwé) et en L2 (français) dans parcours du combattant de l’écolier les discours procéduraux et africain. explicatifs : comparaison acquisitionnelle et typologique. DIALLO Mamadou Saliou (Guinée) AMEGASHIE Komla (Togo) Rédaction française chez des élèves Etude de la compétence langagière pularophones de fin de primaire à des enfants scolarisés en contexte Conakry, Guinée : des compétences diglossique à travers la description en jeu. d’images. MALLAM GARBA Maman (Niger) BWANGA Zanzi Jean-Pierre (R. D. Congo) Un plurilinguisme sans bilinguisme : Les grammaires intériorisées du le parcours du combattant du Axe 2. L’enfant dans son contexte linguistique : entre l’école et le milieu social (2) Président de séance : Gil Dany RANDRIAMASITIANA 14h-14h30 14h30-15h 15h30-16h locuteur kanuri du Niger français en milieux multilingues à Lubumbashi: structures, stratégies et nature des différences 16h-16h30 Pause 4 16h30-17h 17h-17h30 17h30-18h Axe 1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement bilingue des enfants (4) Président de séance : Jérémie KOUADIO NGUESSAN BEDOU-JONDOH Edith (Togo) Acquisition des énoncés complexes par les élèves togolais du primaire et du secondaire en situation diglossique. FILLOL V., NOCUS I., SALAUN M., VERNAUDON J., Fr (France + Nouvelle Calédonie) <lue par Claire MOYSE> La prise en compte des langues maternelles kanak favorise-t-elle l’appropriation du français ? Bilan d’étape d’une expérimentation en Nouvelle-Calédonie. SIMARD Yves (France) L’école guinéenne et l’acquisition de la morphosyntaxe verbale du français Axe 2. L’enfant dans son contexte linguistique : entre l’école et le milieu social (3) Président de séance : Martine DREYFUS MASSOUMOU Omer (Congo-Brazza) Les usages linguistiques chez les élèves des cours préparatoires dans un quartier de Brazzaville : la place du français. DIOUF Mayé (Sénégal / France) Les interactions dans les pratiques langagières en classe à l’école de base au Togo : le couple question-réponse. CISSÉ Alilou (Togo) Etude comparée de la restitution de récit et de la reformulation narrative dans les établissements du Togo en CM2 et en 5ème Vendredi 25 février 9h-9h30 9h30-10h 10h-10h30 Axe 1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement bilingue des enfants (5, suite et fin) Président de séance : JeanPierre BWANGA AVOLONTO Aimé (Canada) Apprentissage enfantin vs adulte du français langue en milieu institutionnel (Bénin) Magali ITALIA (France) Construction des connaissances syntaxiques du français en situation diglossique (Gabon) AFOLA-AMEY Ufualè Christine (Togo) L’influence de la L1 sur la L2 dans le processus d’acquisition du lexique verbal des procès dans les récits oraux des élèves togolais 10h30-11h Axe 3. L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au monde écrit (1) Président de séance : Edith BEDOU-JONDOH BAGOUENDI-BAGERE Diane (Gabon /France) Attitudes des enfants face aux langues en présence à Libreville (Gabon) et conséquences sur la didactique du français DREYFUS Martine (France) Pratiques de classes en milieu non formel à Dakar et appropriation du français. TIRVASSEN Rada (Ile Maurice Aménagement linguistique et déficit de données empiriques : le cas de la scolarisation à Maurice Pause 5 11h-11h30 11h30-12h Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des apprentissages (1) Président de séance : Omer MASSOUMOU RUI Blandine (France Des enfants racontent : Entre oralité et scripturalité en contexte diglossique guinéen. BEYOM Robert (R. Centrafricaine) Le bilinguisme fonctionnel des élèves de Centrafrique Axe 3. L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au monde écrit (2) Président de séance : Alilou CISSE ARRAICHI Rachid (Maroc) Les représentations de la langue française chez l’élève marocain rural AYEVO Jean (Gabon) La déscolarisation dans la souspréfecture d‚Athiémé (1960-1999) ou L’échec de la méthode formelle d’enseignement du français PEUVERGNE Julie (France) Enseignants de Lomé (Togo), entre pratiques et représentations 12h-12h30 LE ROHELLEC Solange (France) Parler, lire, écrire en français : des outils de socialisation dans l’enseignement primaire à Madagascar. 12h30-14h Repas Axe 3. L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au monde de l’écrit (3, suite et fin) Président de séance : Mamadou Saliou DIALLO SAWADOGO François, LEGROS Denis & Emmanuelle MAITRE de PEMBROKE (Burkina Faso + France) Quelle place pour la langue maternelle mooré (L1) dans la construction et la production de connaissances via la langue française à l’école au Burkina Faso ? ONGUENE-ESSONO Louis-Martin (Cameroun) Compétence d’écriture en français chez les élèves bilingues et monolingues du Cameroun RANDRIAMASITIANA Gil Dany (Madagascar) Représentations contrastées du français dans l’enseignement primaire en contexte diglossique. Du façonnage sociolinguistique à la diversité des répertoires verbaux des apprenants. Cas de deux classes de base malgaches. 14 h. - 14h30 14 h 30-15 h. 15h-15h30 15h30-16h 16h-16h30 16h30-17h 17 h - 17 h 30 18 h. 30 – 22 h. Pause Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des apprentissages (2) Président de séance : Yves SIMARD Jacques BECUWE, France/Niger Les Ecoles de la Seconde Chance au Niger : Enseignement bilingue et contextualisation pédagogique dans un environnement monoculturel. BURSTON Monique, USA "Je suis obligée de mélanger les deux langues": Lycéens mélanésiens aux prises avec leur bilinguisme RANAIVO Velomihanta et Vololona RANDRIAMAROTSIMBA, Madagascar Des langues-cultures aux pratiques de classe en contexte diglossique : quelle cohérence ? L’exemple de Madagascar Soirée interculturelle 6 Samedi 26 février 9h30-10h 10h-10h30 10h30-11h 11h-11 h 30 11 h 30 -12h Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des apprentissages (3) Président de séance : François SAWADOGO DAFF Moussa, Sénégal Analyse des conséquences linguistico-didactiques de l’acquisition/apprentissage du français en milieu plurilingue sénégalais : cas des éléves de CM2 CORDIER Muriel, LEGROS Denis & MAITRE de PEMBROKE Emmanuelle, France Etude de l’effet du mode d’apprentissage : Formel (école) vs informel (Internet) sur le développement de la compréhension et de la production en langue seconde en situation de diglossie. Exemple du Togo. Pause Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des apprentissages (4, suite et fin) Président de séance : Maman MALLAM GARBA KUBE Sabine, Allemagne «On fait tout en français et on nous dit toujours d’apprendre le français. Mais quel français apprendre encore?» - Représentations du français et de son enseignement de lycéens abidjanais. HOAREAU Yann & D. LEGROS, France Effet de la langue maternelle (L1, créole de la Réunion) sur la compréhension de texte explicatif en langue seconde (L2) en situation diglossique. Rôle de la langue L1 dans l’activation de la Mémoire de Travail à Long Terme 12 h. –14 h 14h -15 h 30 h Buffet Rapports de synthèse des 4 ateliers thématiques et discussion Axe 1. Les étapes de l’acquisition du français et du développement bilingue des enfants Aimé AVOLONTO, Maria KIHLSTEDT Axe 2. L’enfant dans son contexte linguistique : entre l’école et le milieu social Zachée Denis BITJAA KODY, Monique BURSTON Axe 3. L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au monde de l’écrit Blandine RUI, Maxime SOMÉ Axe 4. Les représentations de la langue, de l’école, des apprentissages Jean-Pierre CAPRILE, Thierry TRÉFAULT Modérateur : Moussa DAFF 7 15h30-17h Table-ronde sur les orientations de l’éducation de base en situation diglossique et l’avenir de la francophonie africaine Présidence : Danielle LEEMAN (EDCC, Paris-X) Intervenants : Pierre JANIN (DGLFLF), Moussa DAFF (Dakar), Danielle LEEMAN (Paris-X), Denis LEGROS (Créteil et Paris-8), Louis-Martin ONGUENE-ESSONO (Yaoundé), Ambroise QUEFFELEC (Aix-en-Provence), Velomihanta RANAIVO (Antananarivo) Modérateur : Colette NOYAU 17h Clôture du colloque COMMUNICATION ACCEPTEE AYEWA Noël Kouassi (Côte d’Ivoire) Récit, influences culturelles et analyse des productions des apprenants ivoiriens. Pour une pédagogie fonctionnelle de la performance communicative en français langue seconde. COMMUNICATIONS AFFICHÉES ANCIAUX Frédéric, France (Antilles-Guyane) Pratiques langagières et pratiques sportives en situation de diglossie dans la Caraïbe. BURGAT Sandrine, France La personne sourde et le bilinguisme LSF/ français écrit. Comment accéder à l’écrit du français quand on est locuteur de la langue des signes ? Guilhem FLORIGNY, France Représentations des langues à travers la référence aux entités dans l’appropriation du français par des enfants créolophones mauriciens 8 AFOLA-AMEY Ufualè Christine: L’influence de la L1 sur la L2 dans le processus d’acquisition du lexique verbal de procès dans les récits oraux des élèves togolais. L’acquisition et le développement de la langue première ou seconde ne peuvent se faire sans le lexique verbal. Pour cela, le locuteur ou l’apprenant élabore des stratégies spécifiques propres à chaque langue pour faciliter son acquisition. En effet, selon Slobin (1991), certains traits typologiques des langues influencent le locuteur au moment de la conceptualisation et de la formulation du message. A ce niveau, le locuteur ou l’apprenant en L2 s’appuie sur ces traits typologiques pour atteindre sa visée communicative même avec un lexique verbal pauvre. Ainsi, au cours des phases développementales d’acquisition des langues, plus le stock du lexique de désignation des procès est peu fourni, plus l’apprenant ou le locuteur recourt à la L1. Dans ce travail, nous montrons comment la langue gin-mina (L1) (famille de langue kwa du Togo) de par la structure complexe de son lexique verbal [cas des constructions verbales sérielles (Boler-Richard, 1978) ; (Bédou, 1980) ; (Afola, 2002) ] permet aux élèves togolais de construire des récits cohérents en français (L2 même avec un lexique verbal peu riche). En effet, ils s’appuient sur les schèmes de lexicalisation (Talmy, 1985,1991) de procès de leur langue (L1) pour produire le lexique verbal de procès en L2. A partir des récits d’images [support « Chat et Oisillons » de Hickmann & Hendricks (19951998)] collectés en gin-mina et français au niveau des classes de CM2 et 5e dans le cadre du projet CORUS/AUF cognitique), nous analysons et comparons la nature de cette influence au niveau de l'organisation globale et dans les structures discursives des récits dans les deux types de langue et aux deux paliers d’acquisition. Cette analyse et comparaison tiennent compte, plus précisément, au plan conceptuel, du degré de l'organisation globale des événements suivant les langues et les deux paliers d’acquisition. A ce niveau, nous répartissons les différents récits en énoncés et en propositions dans la trame discursive dans le but d'étudier et de comparer les types et la nature des procès Noyau ( 2001) représentés par chaque locuteur. Au plan linguistique nous analysons le traitement lexical des procès dans les deux plans discursifs. A ce niveau, nous étudions la structure lexicale du lexique de désignation de procès (Boler-Richard, 1978) ; (Bédou, 1980) ; (Afola, 2002) pour comparer le degré de spécification sémantique des procès de même que les choix de granularité temporelle (Noyau & Paprocka 2000) opérés par les différents locuteurs dans le but d'analyser la nature du lexique verbal de désignation de procès Viberg, (1998, 2002) composant les procès de stratégies utilisées en L1 par les apprenants pour atteindre leur visée communicative en L2. 9 AMEGASHIE Komla : Etude de la compétence linguistique des enfants scolarisés en contexte diglossique à travers les descriptions d’images. Notre travail vise à décrire l’utilisation de deux langues en contexte diglossique dans le genre descriptif notamment la description d’image. En effet, le Togo est un pays où existent et cohabitent aux côtés du français (L2) un ensemble de parlers locaux dont l’éwé ou éwégbe (L1). « L’appropriation de la langue française dans cet environnement s’effectue majoritairement à travers la scolarisation, par et pour des activités langagières et dans des interactions concrètes. La situation linguistique des enfants que nous étudions est complexe, puisque, comme pour la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, ils grandissent au sein d’un environnement qui ne sera pas celui de leur langue de scolarisation et, pour la plupart d’entre eux, la première vraie rencontre avec le français se fait lors de leur entrée à l’école primaire. La situation linguistique étudiée se caractérise par une expérience fortement asymétrique du français et de la (des) langue (s) première (s) » (NOYAU, 2001) Cette étude qui s’inscrit dans le cadre du Projet multilatéral CORUS/AUF/Cognitique intitulé « Appropriation du français langue d’enseignement et de scolarisation en situation diglossique » vise à montrer à partir des descriptions d’image produites par les élèves (10) des CP (7/8 ans) en éwé (L1) et en français (L2) comment ces enfants gèrent leur compétence linguistique dans cet environnement bilingue. Nous utilisons pour l’analyse des données obtenues au cours de l’enquête transversale réalisée au Togo en milieu scolaire. Ces données orales sont transcrites en énoncés et propositions selon Berman & Slobin (1995) Une comparaison des deux productions orales en L1 et L2 nous permettra d’analyser le contexte diglossique des enfants. 10 ANCIAUX Frédéric : Pratiques langagières et Pratiques sportives en situation de diglossie dans la Caraïbe Dans la Caraïbe, l’emploi de deux langues au statut inégal est courant dans les situations de communication, et de fait, la population est généralement bilingue français/créole. Dans ce contexte diglossique, le présent travail s’est intéressé aux usages et aux effets des langues au cours des pratiques physiques et sportives en Guadeloupe et en Haïti. Le problème soulevé concerne plus particulièrement l’emploi de la langue vernaculaire et de la langue officielle au sein des situations de communication en sport. Quelles sont les adaptations langagières et linguistiques de l’intervenant en Guadeloupe face aux spécificités des apprenants et des situations de communications rencontrées? Comment les langues sont-elles utilisées par les apprenants au sein des pratiques d’activités physiques et sportives ? Cette étude de type exploratoire et ethnométhodologique s’est appuyée sur la théorie de l’action située. Nous avons examiné les pratiques langagières des intervenants et des apprenants au cours des pratiques physiques et sportives en Guadeloupe et en HaÏti. Puis nous avons passé des entretiens avec des enseignants d’EPS et des entraîneurs sportifs en vue de décrire et de comprendre l’usage et les effets des langues dans leurs pratiques. L’ensemble des entretiens a été analysé à l’aide d’une méthode d’analyse du discours et d’un logiciel informatique d’Analyse de Données Textuelles. Cette méthode a permis d’extraire des entretiens des types d’actes de discours, un vocabulaire spécifique, des structures signifiantes et des mondes lexicaux au sein des réponses données par les intervenants et les pratiquants interrogés. L’analyse des résultats montre, d’une part, que les enseignants rationalisent leurs réponses, tandis que les entraîneurs font part des normes et des principes auxquels ils croient. D’autre part, la langue créole apparaît comme un moyen de communication réel, ponctuel et efficace au cours des pratiques physiques et sportives en Guadeloupe. Son emploi dépend principalement des caractéristiques des enfants, de la situation. Il permet de résoudre des problèmes de compréhension, de rétablir la discipline, de faire de l’humour, d’augmenter la motivation ou l’attention, d’exprimer des émotions ou des images. Chez les apprenants, le créole apparaît surtout lorsqu’il s’agit d’exprimer ses sentiments et ses émotions. A noter également que certains enfants traduisent en créole à leurs camarades créolophones les consignes données en français. Ainsi, la langue vernaculaire apparaît au côté de la langue officielle dans la relation éducative dans les apprentissages moteurs aux Antilles françaises. En outre, les pratiques sportives s’avèrent également constituer un espace dans l’école où le français peut être appris par et avec le corps. En Haïti, plus particulièrement, l’EPS permet à certains enfants d’apprendre et d’entendre le français. En conclusion, cette recherche s’est intéressée à la genèse du sujet bilingue français/créole en situation de diglossie dans la Caraïbe, à travers ses pratiques sportives et ses expériences langagières. Elle vise à repérer les conditions sociolinguistiques favorables à l’apprentissage d’habiletés motrices afin de proposer des pistes de réflexion concernant l’enseignement de l’éducation physique et sportive en milieu diglossique. Elle propose également de concevoir cette discipline scolaire comme un moyen d’appropriation de la langue française à des enfants créolophones. 11 ARRAICHI Rachid : Les représentations de la langue française chez l’élève marocain rural. Nous nous intéressons tout particulièrement aux représentations qu’ont les élèves marocains ruraux de la langue française et des autres variétés linguistiques en usage sur le marché scolaire (l’arabe standard, l’anglais et l’espagnol) et le marché extra-scolaire (l’amazighe et l’arabe dialectal). Il nous a été impossible de contourner les représentations linguistiques dans une étude qui voulait montrer l’importance des facteurs sociolinguistiques dans le processus d’enseignement/apprentissage de la langue française. En effet, nous avons établi empiriquement le fait que l’élève rural éprouve d’énormes difficultés à appréhender la langue française et que ces difficultés prennent naissance dès le premier contact avec cette langue à l’école primaire et s’amplifient tout au long du cursus scolaire. Nous avons aussi réussi à expliquer ce problème par l’écart saillant qui existe entre la culture scolaire que porte notamment le français et la culture que véhiculent les variétés linguistiques sociales, l’amazighe en l’espèce : il est pratiquement impossible , pour un élève rural, d’apprendre une langue dont l’enseignement est fondé entièrement sur l’approche maximaliste de la communication qui nécessite un usage intensif de la langue dans des situations réelles. Pour le cas du Maroc, où le français investit surtout les champs de production symbolique et matérielle liés à la modernité, ceux qui utilisent cet idiome de manière fréquente dans des situations réelles de communication sont, de loin, les personnes qui, de par leur condition sociale très favorable, entretiennent un rapport étroit avec la vie moderne et le modèle culturel qu’elle implique. Le monde rural demeure pour l’heure le bastion de la tradition et, donc, les possibilités d’usage effectif du français y sont manifestement réduites. Il est cependant un fait important à souligner : les difficultés éprouvées en matière de français sont paradoxalement corrélatives de représentations positives de cette langue et, inversement et dangereusement, de représentations négatives des idiomes sociaux. Plus, les langues scolaires et les langues sociales véhiculant, nous l’avons précisé, des modèles culturels contrastés, il s’ensuit une consécration/valorisation de celui porté par les premières et une stigmatisation/dévalorisation de celui relatif aux secondes.. L’élève rural, ayant intériorisé l’importance du français dans la réussite scolaire et sociale, manifeste une très forte motivation pour son apprentissage et exprime à travers les représentations qu’il s’en fait un attachement inconditionnel au modèle culturel moderne. Il est donc impensable que les difficultés qu’il éprouve en la matière soient le fait, comme d’aucuns ne cessent de le répéter, du manque de motivation ou de représentations négatives à propos du français. Les résultats recueillis à ce niveau remettent en question le rôle déterminant des facteurs psychologiques ( les motivations ) ou psychosociologiques ( les représentations ) dans la genèse et l’évolution des difficultés scolaires en matière de français. Ils consolident, par contre, la thèse de l’importance du facteur sociolinguistique. Nous souhaiterions exposer les résultats de notre investigation sur la population rurale ceux notamment concernant les représentations linguistiques. Ces résultats, il faudrait maintenant le préciser, ont été obtenus dans le cadre d’une recherche de doctorat en sociolinguistique, que nous avons effectuée en milieu rural marocain, plus précisément dans la commune rurale de Bni Tadjit de la province de Figuig ( sud-est du Maroc ), auprès de 179 lycéens par l’application d'un échantillonnage aléatoire systématique. 12 Les difficultés cuisantes éprouvées par les élèves ruraux en matière de français, au cycle secondaire notamment, ont été repérées, quant à leur nature et leur ampleur, dans les copies d’examen que nous avons pu aisément recueillir auprès des enseignants, du fait que nous même faisions partie du corps enseignant le français au secondaire à Bni Tadjit pendant cinq ans. L’activité que nous avons ciblée était la production écrite pour les raisons que, d’une part, c’est une activité dont les difficultés s’annoncent déjà tout au début du cursus scolaire de l’élève et qui vont progressant pour culminer au secondaire et, de l’autre, il s’agit d’une activité qui devient hautement sélective au secondaire et, partant, détermine, dans une large mesure, la réussite scolaire de l’élève en la matière. Pour vérifier si l’élève utilise oui ou non le français à l’extérieur de l’enceinte scolaire et identifier, par là même, les types d’usage et les situations respectives, nous avons eu recours au questionnaire. Cependant, pour voir si la variable usage détermine significativement la réussite scolaire en matière de français, il a fallu examiner les moyennes recueillies par les sujets enquêtés et ce par la consultation systématique de leurs dossiers scolaires. La mise en rapport des moyennes obtenues, dont la fiabilité a été testée par des indices statistiques appropriés ( l’écart- type et le coefficient de dispersion ), avec la variable usage nous a renseigné sur le degré d’importance de l’usage dans l’appréhension du français à l’école. Cela n’était pas suffisant, nous devions nécessairement examiner les représentations linguistiques que le questionnaire, comme il a été le cas pour les usages et les motivations, nous a permis d’évaluer pour, d’une part, éliminer, sinon de relativiser l’hypothèse que la faiblesse notable en français serait au fondement de représentations négatives et vice-versa et, de l’autre, faire voir que l’école réussit quand même à légitimer aux yeux des élèves certaines variétés linguistiques, le français en l’occurrence, et le modèle culturel qu’elles portent. Pour pouvoir se permettre de parler de deux modèles culturels différents, celui de l’école et celui de la société, il a fallu prouver l’existence effective de cette différence. Nous avons, de ce fait, appliqué l’analyse de contenu aux manuels scolaires des élèves et aux Recommandations Pédagogiques destinées au corps enseignant pour la caractérisation du modèle culturel scolaire, et nous avons mis à profit, outre les informations recueillies par le questionnaire, les remarques qui nous ont permis de faire, d’un côté, la pratique objective de la classe dans le milieu en question et, de l’autre, le contact direct des élèves ruraux en contexte naturel, et ce pour la caractérisation du modèle culturel social. La question des représentations linguistiques sera donc abordée dans le cadre d’une problématique sur les difficultés d’enseignement/apprentissage de la langue française en contexte rural ; elle impliquera nécessairement d’autres questions également importantes, à savoir celle des usages et celle des motivations.. Notre démarche ne sera pas exclusivement descriptive : nous tenterons d’expliquer l’origine de ces représentations et nous proposerons des solutions pratiques pour l’harmonisation des langues-cultures scolaires avec les languescultures sociales. C’est cette harmonisation, soulignons-le, qui permettra à l’élève de corriger ses représentations linguistiques. 13 AVOLONTO Aimé : Apprentissage enfantin vs adulte du français langue seconde en milieu institutionnel La recherche dont nous présentons ici les résultats partiels repose sur l’étude longitudinale et interlinguale d'un groupe d'apprenantes présentant un profil particulier. Il s'agit d'un groupe de femmes béninoises de la région centre du pays, âgées entre 22 et 38 ans ayant grandi dans un environnement où elles ont appris plusieurs langues «maternelles» et qui semblent avoir atteint, malgré leur apprentissage du français à l'âge adulte, un niveau de compétence très élevé. À travers un projet-pilote, ces femmes ont été inscrites dans un centre d'éducation pour adultes spécialement conçu pour elles. Au bout de quatre années d’une scolarisation entièrement en français, elles ont presque toutes réussi (14 d'entre elles sur 16) le test national de français auquel elles étaient soumises face à des écoliers du primaire qui, eux, ont eu une scolarité régulière de six ans. De plus, elles ont réussi cet examen avec de meilleurs résultats que le groupe des scolarisés du primaire. L’une des préoccupations des linguistes qui s’intéressent à l’acquisition d’une langue seconde (L2) est de déterminer la place de la grammaire universelle (GU) dans le processus d’apprentissage (White 2003). Quel est le schème linguistico-cognitif avec lequel l’adulte qui apprend une nouvelle langue aborde son apprentissage ? Peut-on établir un parallèle entre les dispositions mentales d’un enfant qui apprend sa langue maternelle et celles de l’adulte qui acquiert une nouvelle langue ? Jusqu’à quel point la langue maternelle d’un individu influence-t-elle son apprentissage d’une nouvelle langue ? Voilà autant de questions que se posent les chercheurs. Deux courants de pensée existent face à ces questions. Pour des chercheurs comme Schwartz et Sprouse (1996), etc., l’apprentissage d’une L2 commence par la représentation grammaticale que l’apprenant s’est déjà bâtie à partir de sa langue première (L1). Pour d’autres par contre comme Epstein et al. (1998), etc., le point de départ du nouvel apprentissage est la GU dans son caractère défectif, c’est-à-dire sans aucune influence directe de la L1 de l’apprenant. Si les défenseurs du premier courant de pensée ont raison, il faudra alors déterminer laquelle des L1 d’un apprenant multilingue depuis son enfance joue ce rôle de grammaire de départ. Quant au second courant de pensée, il faudra que ses défenseurs puissent répondre à l’observation d’auteurs comme Müller & Hulk (2001) à l’effet qu’il existe une influence interlinguale évidente lorsqu’on apprend une langue à l’âge adulte. L’observation des productions langagières des véritables débutantes du centre permet nettement de dégager deux groupes, justifiant ainsi l’hypothèse de la langue forte versus la langue faible de Genessee (1989). La sélection lexicale dans la langue cible semble se baser entièrement sur la L1 forte. Quant à la flexion verbale, elle met en évidence un système hybride. Le marquage du genre enfin établit une différenciation entre les animés et les inanimés. 14 AYEVO Jean Yaovi : La déscolarisation dans la sous-Préfecture d’Athiémé -actuelle Mairie d’Athiémé- (19601999) ou échec de la méthode formelle d’enseignement du français. Notre communication présentera brièvement les insuffisances de l’enseignement du français de chaque réforme du système éducatif au Bénin - dans la Mairie d’Athiémé, l’une des régions les plus déshéritées du Bénin, et montrera surtout les avantages de la méthode utilisée par le collège d’encadreurs des jeunes déscolarisés. Nous pouvons retenir en substance que : -l’élaboration des fiches pédagogiques prenait en compte l’éducation traditionnelle pour aboutir à celle formelle. Cela signifie que la fiche considère les activités de l’enfant dès son réveil le matin jusqu'au soir : les images d’une femme portant un bébé au dos, d’un homme sur un palmier en train de dénicher un régime, d’un homme avec un poquet en main en train de semer du maïs, d’une jeune fille portant une calebasse remplie d’eau sur la tête, d’un enfant en train d’étaler sa natte suscitaient un engouement particulier chez les apprenants. Un apprenant comparait la lettre “r” (écrite avec un petit rond) à sa mère courbée qui ramasse les amandes de palme. Le plus intéressant demeure le débat engagé par l’encadreur au début de chaque séance sur un événement (l’insécurité, l’adultère, partage d’héritages, le lévirat) qui s’est déroulé la veille dans le milieu ou révélé par les medias. A l’issue de chaque débat, des conseils liés au Droit, à l’environnement, à l’hygiène, aux maladies sexuellement transmissibles, étaient souvent prodigués aux apprenants. Cette technique permettait de déboucher sur les cours de civisme, de biologie de façon subtile. Au cours des échanges, l’activité pédagogique était animée par les apprenants. Chacun d’eux voulait souvent donner son point de vue. La séquence des débats était une excellente synthèse des autres disciplines enseignées. -les cours de grammaire, d’orthographe, de vocabulaire étaient enseignés en tenant compte des thèmes des débats organisés au début de chaque séance. Le procédé de l’enseignement de la grammaire était différent de celui de la méthode formelle. L’enseignement était bâti le plus souvent sur les productions personnelles des apprenants au cours des débats. -L’évaluation se faisait uniquement sur une activité pédagogique donnée. A titre d’exemple, “l’accord du verbe avec son sujet” peut constituer l’objectif à atteindre pour un devoir de “dictée”. Les autres fautes ne sont pas comptées. Or, dans la méthode formelle, l’évaluation ne permet pas du tout de reconnaître les apprenants qui fournissent un effort, puisque les notes sont attribuées par rapport à un certain nombre de fautes (la barre) : celui qui fait 70 fautes, obtient la note 00/20 avec celui qui en a fait 10. Aussi, plus tard, celui qui avait 70 fautes et en a 12 tandis que celui avait 10 fautes et en fait 60 après, auront tous deux la note 00/20. Cela décourage beaucoup les apprenants. Ils préfèrent négliger complètement le français. Notre communication présentera des cas pratiques de la méthode de l’Organisation Internationale pour l’Instruction des Pauvres (O.I.I.P). -l’expression orale se faisait aussi bien par les débats que par les chansons, la poésie théâtralisée; le cours de vocabulaire veillait sur la correction phonétique car certains phonèmes du français ne se trouvaient pas dans leurs langues nationales; le cours de conjugaison était aussi différent : les pronoms de la conjugaison étaient identifiés lors des dialogues au cours des débats sur l’actualité. Le cours le plus intéressant était celui dénommé “diversité culturelle”. A titre d’exemple, doiton enseigner à l’apprenant africain “prendre une douche; aller sous la douche” ou “se laver à la douche” ? Car, pour l’Africain résidant au village, la douche représente “un enclos où se trouve un canari rempli d’eau avec un bol dont on se sert pour se laver”. Or la conception française veut que la douche soit un “jet d’eau qui arrose le corps”. Ce cours servait à enseigner les expressions imagées aux apprenants. Eu égard à tout ce qui précède, peut-on baptiser cette méthode “Méthode Pédagogique Ciblée” ? 15 AYEWA Noël Kouassi : Recit, influences culturelles et analyse des productions des apprenants ivoiriens pour une pedagogie fonctionnelle de la performance communicative en français langue seconde. Le dépouillement de l’enquête, que nous avons eu à mener auprès de 166 écoliers de la région d’Abidjan (dans un village attié, un quartier huppé d’Abidjan et un quartier semi-urbain), a révélé des influences culturelles et linguistiques chez ces écoliers, tout comme l’exploitation pédagogique du corpus nous a indiqué la façon la plus rationnelle de traiter les productions des apprenants du français en situation diglossique afin que l’apprentissage soit efficace, optimalisé. Nos objectifs pour cette enquête étaient d’évaluer l’activité langagière chez des écoliers ivoiriens apprenant le français au moyen de la même méthode d’enseignement mais issus de milieux sociologiques différents, d’une part et d’autre part de traiter autrement que leurs enseignants les productions langagières afin de pouvoir apporter à leurs auteurs la meilleure aide pédagogique qui leur faciliterait l’acquisition correcte du français pour une communication parfaite dans cette langue, langue officielle de la Côte d’Ivoire. Il a été donc demandé à ces écoliers de produire un récit à partir d’un support iconographique, “les Oisillons”. Les productions des écoliers du village africain et du quartier semi-urbain ont subi des influences culturelles et linguistiques ivoiriennes : ces écoliers ont de la peine à composer un récit cohérent tant il est vrai qu’ils décrivent les six images du support isolément, sans aucun lien grammatical ni logique entre elles ; sur ces images, les actions simultanées sont manifestes mais ces relations échappent totalement à ces écoliers : il est donc difficile de parler d’un récit chez eux. D’autre part, ils composent leurs ‘’récits’’ selon le modèle du conte ivoirien ou africain : ils introduisent leurs récits par “Il était un fois”; également dans leurs récits, les noms des personnages animaux sont humanisés, et la fin du récit est annoncée de façon abrupte comme par exemple: “C’est [ici] la fin de l’histoire”. Outre les influences culturelles, leurs copies charrient des influences linguistiques qui se manifestent sous la forme d’interférences phonétiques, morphologiques, lexicales et syntaxiques. Les écoliers de Cocody, qui ont le français pour langue maternelle, produisent un récit dans lequel les entités sont d’abord présentées avant d’être reprises par des anaphores, tel l’article défini, le pronom personnel sujet ou le pronom relatif [qui, dont]. Ils utilisent des connecteurs logiques et emploient correctement les temps verbaux français, en l’occurrence l’imparfait et le passé simple. Contrairement à leurs condisciples du premier groupe, leurs textes en français sont lisibles, et donc parfaitement compréhensibles. Toutefois, on relève chez eux des influences culturelles étrangères dans la mesure où les noms des personnages du récit sont des noms d’animaux inconnus en Côte d’Ivoire, tels le guépard, le loup qui sont des animaux qu’ils ont certainement découvert à travers la lecture des livres de maison. Indépendamment de la qualité langagière de la production de l’écolier, nous avons traité celle-ci en recherchant à chaque fois la cause de l’erreur commise par l’apprenant avant d’en proposer une correction efficace car pertinente, dans le souci de faire produire à l’avenir à l’apprenant des énoncés français corrects. Cette démarche n’est pas habituelle chez nos enseignants qui se contentent de souligner les fautes à l’encre rouge, mettent une note à la copie de l’apprenant afin de pouvoir classer celui-ci parmi les bons ou mauvais élèves de la classe et de pouvoir décider de son passage ou non en classe supérieure à la fin de l’année scolaire. Les apprenants fortement exposés à la langue d’apprentissage ont de bien meilleures productions langagières en langue seconde par rapport à ceux qui le sont moins. Toutefois l’apprentissage en milieu diglossique devrait s’appuyer sur une pratique pédagogique qui aide l’apprenant à améliorer sa production langagière et à mieux structurer sa pensée afin de pouvoir communiquer aisément dans la langue seconde. 16 BAGOUENDI-BAGERE Diane : Attitudes des enfants face aux langues en présence à Libreville ( Gabon) et conséquences sur la didactique du français Libreville, capitale du Gabon est une ville cosmopolite par la diversité de sa population (70%) des gabonais et 30% des étrangers issus de l’immigration africaine. Ce pôle d’attraction entraîne des brassages humain et culturel importants et génère un espace social spécifique par les nouvelles identités urbaines des locuteurs mais aussi par les comportements qui s’y développent et tout particulièrement par les attitudes linguistiques spécifiques. Partagée entre le français, langue officielle et les langues ethniques réservées au domaine privé, la situation gabonaise présente des éléments de convergence mais aussi d’originalité par rapport aux autres pays africains. Nous viserons ici à faire ressortir la spécificité du milieu librevillois à travers les représentations des langues que se font les jeunes scolarisés et les conséquences éventuelles sur l’apprentissage du français, unique langue d’enseignement. Notre analyse se fonde sur un corpus d’interviews réalisées en 2002 pour notre thèse et sur un questionnaire distribué à près de 400 collégiens. L’étude des représentations associées à la langue française et aux langues ethniques et la pratique réelle des divers idiomes en contact permettent-elles de prévoir un avenir pour ces deux types de langues dans un enseignement qui prendrait mieux en compte le bilinguisme ou le plurilinguisme réel ? L’acquisition de plus en plus fréquente du français dans un cadre informel préscolaire (famille, quartier) appelle à une révision des modes d’enseignement du français que nous nous efforcerons d’envisager ici dans une perspective dynamique prenant davantage en compte le substrat linguistique. 17 BECUWE Jacques : Les Classes de la seconde chance au Niger : Enseignement bilingue et contextualisation pédagogique Devant la situation de régression que connaît actuellement l’école nigérienne, la Coopération Française et le Ministère nigérien de l’Education ont engagé une réflexion sur une école "centre de ressources" sous l’égide et au service des communautés en initiant – à titre expérimental – les écoles de la seconde chance. Cette école doit garder les éléments essentiels de l'école classique : formation à l'écriture, à la lecture, au calcul, aux sciences de la vie et de la terre ainsi qu'à l'instruction civique et morale. Elle doit aussi offrir la possibilité de poursuivre ses études au delà du Certificat, mais elle doit intégrer les données essentielles de ce qui représente les potentialités et le devenir du village et du pays dans un contexte ou seuls l'agriculture et l'élevage constituent le devenir économique proche et doivent permettre l'autosuffisance alimentaire. L'école de la seconde chance est une école qui a l'ambition, tout en restant en accord avec les principes républicains de l'école traditionnelle, de proposer une démarche innovante : Intégrer l'école à son environnement c'est à dire lier les apprentissages des élèves et la vie de la communauté par une communication réelle et des actions concrètes qui les enrichissent mutuellement, Considérer les apprenants comme les futurs citoyens actifs de leur communauté, Cette innovation doit permettre de : augmenter considérablement le taux brut de scolarisation au niveau régional et national ; bâtir une approche pédagogique novatrice de qualité ; provoquer une réflexion sur la durée du cycle de base I ; provoquer une réflexion autour de l'enseignant agent de développement ; étendre l’expérience à d’autres villages, à d’autres régions du Niger en cas de réussite de l’expérience. Les enseignants sont capables de : bâtir des modules de formation autour des compétences à atteindre pour les enfants, repérer et exploiter des supports d'activité dans l'environnement immédiat des enfants, s’intégrer à la vie de la communauté, permettre aux enfants d’établir et d’entretenir, autour des activités de la "classe" un réseau fonctionnel de communication entre eux et les membres de la communauté, C'est pourquoi la formation des enseignants se veut participative. Elle consistera à outiller ces derniers en leur donnant l’opportunité de prendre part activement à la conception des modules d'apprentissages des élèves dont ils auront la charge. L’approche à utiliser se veut une approche de questionnement qui réponde aux attentes de la communauté et aux besoins du pays. L’expérience a 2 ans : le langage en est un acteur central, quel bilan peut-on en tirer ? 18 BEDOU-JONDOH Edith : Acquisition des énoncés complexes par les élèves togolais du primaire et du secondaire en situation diglossique. Les élèves togolais sont confrontés à l’apprentissage du français dans un milieu souvent plurilingue. A son entrée à l’école maternelle à l’age d’environ 4 ans, l’enfant commence l’apprentissage du français avec la langue maternelle (Gengbé/Ewé en zone urbaine). Au cours des années, la langue maternelle n’est plus utilisée en classe et devient un sujet comme l’anglais ou l’histoire au secondaire. Selon Chomsky (1965) avec la théorie DAL et Klein (1989) sur l’acquisition de la Langue 2, l’acquisition d’une langue se fait par étape, allant des constructions simples de l’enfant à bas age à des constructions plus complexes de l’age de 10 ans à l’age adulte. Dans Noyau et Paprocka (2000) a également été développé le concept de ‘condensation’ exprimant cette même idée d’acquisition de constructions de plus en plus complexes avec l’age, aussi bien en L1 qu’en L2. Notre étude porte sur l’analyse de productions narratives, récit sur images d’enfant, en age moyenne de scolarisation de 7 ans à 15 ans, des niveaux CP, CE, CM, 5e et 3e (10 élèves par niveau) en milieu urbain et tiendra compte des différentes formes d’énoncés et de propositions tels que présentés dans ALLAL, ANANE, SENEMAUD et NOYAU (2002), où sont développés les notions d’énoncés simples et complexes, ces derniers comportant des propositions paratactiques et hypotactiques. De notre analyse, comparant l’acquisition de ces énoncés en L1 (Gengbé, une langue Kwa) et en L2 (Français) il ressort qu’effectivement l’acquisition se fait de façon progressive avec l’age et qu’elle se fait plus tôt en L1 qu’en L2 pour atteindre le même degré de complexité à un age ultérieur. 19 BEYOM Robert : Le bilinguisme fonctionnel des élèves de Centrafrique La République Centrafricaine a deux langues officielles qui sont: le français et le sango. Ce bilinguisme est déséquilibré dans la mesure où seul le français joue pleinement ce rôle. En effet, qu'il s'agisse des textes administratifs, de la justice ou du système éducatif, le français demeure l'unique langue de travail des agents de l'Etat. Depuis l'époque coloniale, l'enseignement a toujours été fait en français même si des décisions relatives à l'insertion du sango dans le système éducatif centrafricain et des tentatives de leur application ont émaillé l'histoire de ce système. Dans le cadre de ce colloque, nous vérifierons si ce monoliguisme qui caractérise le système éducatif centrafricain garantit l'appropriation du français au bout de six ans de scolarisation. Cette communication qui s'inscrit dans l'axe 3 du colloque: L'école et les langues en présence, leurs usages, l'accès au monde de l'écrit est fondée sur le modèle d'évaluation des compétences linguistiques en français dans l'espace francophone initié par l'Institut d'Etudes Créoles et Francophones en 1995. Nous avons monté un corpus bilingue (écrit et oral) des productions langagières des élèves de la classe de CM2 de l'école Galabadja, située dans le 8è arrondissement de la ville de Bangui. Ces élèves racontent en français et en sango l'histoire présentée par des images. Le dépouillement du corpus français et l'analyse des données nous ont permis de relever les écarts phonétiques (par exemple la confusion entre ã et õ dans une merre qui crie on levant la main au lieu de une femme qui crie en levant la main), morphologique (par exemple l'utilisation de eux en lieu et place de elles dans les femmes causaient entre eux), syntaxique (par exemple l'un se trouve a un pistolet et un calachicope / l'un porte un pistolet et l'autre une kalachnikov) . Nous avons aussi observé des particularités lexicales et des phénomènes d'interférence linguistique: notre madame dans En observant.cette évenement notre madame est affolé signifie notre maîtresse. Nous pensons que ces écarts et ces particularités peuvent s'expliquer par la précarité de l'enseignement des leçons de la langue française inscrites au programme du fondamental 1. En principe, un élève qui finit une bonne scolarité du fondamental 1 est capable de distinguer les différents homophones, or dans notre corpus, les problèmes orthographiques de nos enquêtés viennent de l'homophonie (Exemple: l'un de ses bandi au lieu de l'un de ces bandits; il y avait deux élèves qui son à l'intérieure au lieu de il y avait deux élèves qui sont à l'intérieur). Egalement, les problèmes de la morphologie nominale (genre et nombre) et verbale ( flexion verbale) doivent disparaître ou du moins être réduits à la fin de ce cycle, ce qui n'est pas le cas. Le corpus sango, limité à l'oral (l'écriture du sango n'étant pas maîtrisée par les enquêtés), nous permet d'évaluer la compréhension des images par les élèves. En effet, le contenu sémantique du corpus nous autorise à dire que la compétence linguistique en français de ces élèves est aléatoire. En fait, les récits en sango restituent l'événement présenté par les images alors que leur version française est presque incompréhensible. Nous avons alors conclu que ces élèves comprennent la situation mais les difficultés qu'ils rencontrent au niveau lexical et grammatical ne leur permettent pas de raconter fidèlement en français ledit événement. En attendant d'élargir cette enquête au niveau national, nous pouvons déduire des éléments dont nous disposons actuellement que l'utilisation du français comme seul médium d'enseignement s'avère insuffisant pour garantir la compétence linguistique en cette langue. Certes, l'enseignement précaire du programme contribue largement à l'altération de cette appropriation, mais nous pensons que la non insertion du sango dans le système éducatif centrafricain explique aussi cette carence. L'extension de l'enquête au niveau des élèves du fondamental 2 fait apparaître les mêmes problèmes et donc nous permet d'observer que la base de l'appropriation du français, qui en Centrafrique passe par l'apprentissage, se situe au niveau du fondamental 1. Il est donc important de surveiller cette phase et d'y mettre un accent particulier. 20 BITJAA KODY Zachée Denis: Le développement bilingue (langue maternelle–français) des élèves issus du programme PROPELCA. Le Cameroun évolue à deux, voire à trois vitesses en matière d'acquisition des langues locales et des langues officielles. Selon que l'enfant grandit en zone rurale ou en zone urbaine, il est plongé dans un bain linguistique majoritaire en langue locale ou en français. En zone urbaine, le français langue officielle, langue véhiculaire et langue d'intégration aux villes camerounaises, prévaut dans toutes les situations de communication publique, scolaire et familiale au point qu'il est devenu la langue maternelle ou langue de première socialisation pour plus de 50% de jeunes Camerounais nés dans la ville de Yaoundé après 1985 (cf. Bitjaa Kody, 2000, 2001, 2004). On ne saurait parler de diglossie pour cette première catégorie de jeunes ayant le français comme seule et unique langue de communication. Les 50% restants des enfants urbains comprennent et parlent les langues de leurs parents à des degrés de compétence divers. En zone rurale par contre, les langues identitaires locales sont acquises comme premières langues par les enfants. Le français conserve ici son statut de langue officielle car l'enfant l'apprend essentiellement dans le cadre scolaire et l'utilise uniquement dans les situations formelles. On assiste ainsi à une véritable diglossie ou répartition des fonctions sociales entre le français et les langues locales. C'est dans ce contexte que l'Université de Yaoundé a lancé en 1981 le Projet de Recherche Opérationnelle Pour l'Enseignement des Langues au Cameroun (PROPELCA), dont l'un des volets vise l'enseignement bilingue (langue maternelle-français) dans les premières classes de l'enseignement primaire. Si le programme semble mieux adapté au milieu rural, il a aussi été testé en situation urbaine à Douala et Yaoundé. Les enfants ayant suivi ce programme ont appris à lire et à écrire d'abord une langue camerounaise avant de passer à la lecture et à l'écriture du français. En l'absence d'une évaluation scientifique à grande échelle des niveaux d'appropriation du français et des langues locales atteints par les enfants issus de cette expérience, dans cette communication située dans l'axe 1 du colloque, nous présentons les résultats d'une enquête sociolinguistique sur un échantillon réduit menée sous une approche empirico-inductive en milieu urbain auprès de jeunes scolarisés âgés de 9 à 12 ans. La moitié des enfants interrogés a suivi un enseignement bilingue français-langue maternelle dans les classes initiales du cycle primaire à travers le programme PROPELCA. L'autre moitié que nous considérons comme un groupe témoin a suivi un cursus primaire monolingue en français. L'objectif de l'étude est d'évaluer, à travers des tests linguistiques spécifiques, la maîtrise orale et écrite du français et de la langue maternelle dans chaque groupe. À niveau d'étude égal après le cycle primaire, quel est le niveau d'acquisition atteint par l'un et l'autre groupe dans chaque langue? Conformément à l'une des présomptions théoriques du programme bilingue langue maternelle-français, les enfants urbains qui sont passés par ce programme parlent-ils et écrivent-ils mieux les deux langues que leurs camarades ayant suivi un programme ordinaire en français? Une comparaison de productions orales en langue duala et de productions écrites en langue française (dictée, rédaction) des élèves de 6ème au Collège Libermann à Douala révèlera les performances de l'un et l'autre groupe. 21 BURGAT Sandrine : La personne sourde et le bilinguisme LSF/ français écrit. Comment accéder à l’écrit du français quand on est locuteur de la langue des signes ? Aujourd’hui en France, les personnes sourdes locutrices de la langue des signes française (LSF) vivent dans un contexte diglossique. La LSF représente une minorité sourde incluse à une minorité entendante dont la seule langue officielle, nationale, institutionnelle est le français. Les sourds sont sans cesse en contact avec leurs deux langues : la langue des signes qui est leur langue de communication : la langue à laquelle est rattachée leur culture et d’autre part, la langue française : langue de la communauté linguistique majoritaire. A ce jour, la langue des signes française et les langues des signes en général n’ont pas d’écriture. L’enfant sourd français, qui apprend à écrire, se voit donc contraint d’apprendre à écrire dans une langue qui lui est étrangère puisque sa langue d’acquisition du langage est la langue des signes. Or, actuellement en France, la majorité des enfants sourds- alors même qu’ils sont sourds- apprennent à lire et à écrire par des pédagogies dites « oralistes ». Elles passent par la démutisation des Sourds et l’apprentissage de la lecture labiale. Comme le montrent les données historiques et le fort taux d’illettrisme qui touche la population sourde (80 % des personnes sourdes sont illettrées), le système d’éducation oraliste est inefficace. L’éducation bilingue semble être le seul moyen d’accès au français écrit pour les enfants sourds. Il est sans aucun doute la voie pour prévenir l’illettrisme sourd. Comme l’indique la loi Fabius, le bilinguisme est un droit de l’enfant sourd. Or, aujourd’hui en France, il y a peu d’écoles bilingues et encore moins de pédagogies pensées pour être adaptées à l’enfant sourd et a sa spécificité de locuteur bilingue : LSF (langue1) / français écrit ( langue 2). Dans cette communication, nous nous poserons la question suivante: Comment l’utilisation de la langue des signes, langue 1 des enfants sourds, peut permettre leur apprentissage du français écrit comme langue 2. Pour répondre à cette question, nous définirons le terme de « bilinguisme sourd », ses différentes acceptions, et nous brosserons un rapide panorama de ce qu’est l’éducation bilingue des sourds en France. Nous montrerons, tout d’abord de manière théorique, pourquoi la LSF peut et doit tenir un rôle dans l’apprentissage du français écrit. Puis, nous présenterons un corpus de 3 situations de classes mettant en jeu les deux langues auxquelles l’enfant sourd est confronté quotidiennement. Ce corpus nous permettra de montrer comment grâce à des interactions en langue des signes, l’enfant sourd peut faire son entrée dans l’écrit. Nous verrons en particulier que les interactions en LSF autour de l’écrit, la lecture en LSF de livres écrits en français peuvent permettre à l’enfant d’acquérir certains savoirs sur l’écrit du français et de développer son intuition de l’écrit. 22 BURSTON Monique: "Je suis obligée de mélanger les deux langues" : Lycéens mélanésiens aux prises avec leur bilinguisme En Nouvelle-Calédonie, le français est langue officielle et langue d'enseignement. Il est en contact avec 28 langues autochotones, sans compter les langues des immigrés wallisiens, polynésiens et vietnamiens. Cette situation lui est favorable, puisqu'il assume un rôle de langue véhiculaire, sans que personne n'y fasse d'objection, même les indépendantistes. Cependant, il représente pour de nombreux enfants mélanésiens (ceux qui nous intéresseront ici) et immigrants, une langue seconde –une réalité souvent mal comprise des enseignants, qui sont majoritairement 'caldoches' ou 'métros' et ont été préparés dans leur formation pédagogique à l'enseignement du français langue maternelle ou à l'enseignement de leur discipline via le français langue maternelle. Récemment, l'article 215 de la loi organique (1999) qui a suivi l'Accord de Nouméa a reconnu les langues kanak (= mélanésiennes, ciaprès LK) comme "langues d'enseignement et de culture", ouvrant ainsi la voie à la possibilité d'un enseignement bilingue français-LK. En pratique, l'application de la loi rencontre/rencontrera évidemment de nombreux obstacles : manque d'outils pédagogiques appropiés, pénurie de maîtres, multilinguisme du Territoire (quelles LK enseigner?), etc. L'espoir est là pourtant que la mise en place d'un système d'enseignement bilingue (2001) contribuera peut-être à résorber un échec scolaire qui atteint actuellement des proportions dramatiques. C'est dans ce contexte que je présenterai et discuterai les résultats (partiels) d'une enquête menée auprès de jeunes Mélanésiens de trois établissements du Territoire. Ils ont répondu à un questionnaire concernant leurs attitudes envers les langues qu'ils pratiquent et/ou étudient à l'école, et l'utilisation qu'ils font de ces langues dans leur vie quotidienne. Je me limiterai ici aux élèves du lycée Antoine Kela, situé à Poindimié, dans la Province Nord. Ce choix aura l'avantage de mettre en lumière la complexité de la situation linguistique dans laquelle on s'attend à ce que les jeunes Kanak s'approprient le français, puisque 18 langues vernaculaires différentes ont été déclarées comme langues maternelles par les 42 sujets interrogés. Le questionnaire comprend cinq parties: 1) des données sociolinguistiques sur les individus (âge, sexe, langues parlées en famille et étudiées à l'école, auto-évaluation de leur bilinguisme par les sujets) ; 2) des questions concernant les LK, le français, mais aussi l'anglais, étant donné son rôle de langue internationale et l'insertion géographique de la Nouvelle-Calédonie dans un PacifiqueSud anglophone ; 3) des questions sur l'utilisation des langues, liée au lieu où se produit l'acte de parole (maison, tribu, bourg de Poindimié, lycée) ; 4) des questions sur l'utilisation des langues, liée à l'interlocuteur et au type d'acte de parole; 5) une section "Remarques et commentaires" où les élèves parlent de leurs craintes et de leurs espoirs pour la préservation de leurs racines et de leurs langues minoritaires, ainsi que de leurs difficultés diverses à maîtriser le français, langue qu'ils reconnaissent pourtant nécessaire et qu'ils ne renient pas. Mon analyse et ma discussion des résultats de l'enquête s'orienteront selon deux des axes de réflexion proposés pour le colloque : 'L'enfant dans son milieu social' et 'Les représentations de la langue, de l'école, des apprentissages'. 23 BWANGA Zanzi Jean-Pierre : Les grammaires intériorisées du français en milieux multilingues à Lubumbashi. : Structures, stratégies et nature des différences. Cette étude part des productions écrites d’élèves de quarante classes de Lubumbashi où se pratique l’apprentissage systématique de la grammaire. Elle se propose, à la suite de SP Corder (1971), JY. Dommergues (1973), Besse H. et Porquier M. (1984), de mettre en exergue les règles développées par les apprenants pour s’approprier la construction de la phrase et des constituant immédiats de celle-ci, et par là, montrer que les Grammaires intériorisée du français <GRIF en sigle>, loin d’être les résultats d’une mauvaise transposition (Halté JF 1995), sont plutôt le reflet des difficultés qu’ils éprouvent lors de l’appropriation de la langue cible. A ce niveau, en effet, les élèves développent deux règles, à savoir l’omission et la redondance. La première est une règle qui consiste à « omettre » lors de la production écrite des énoncés des parties du discours constitutives nécessaires de la phrase comme le verbe, l’article, la conjonction, l’adverbe, la préposition, les pronoms, les noms assumant les fonctions grammaticales du sujet, complément d’objet direct et complément circonstanciel. La seconde règle est celle qui consiste en usage, par amalgame, des termes ou propositions fonctionnellement, naturellement ou étymologiquement analogue, lesquels termes ou propositions sont de trop dans l’énoncé et gênent l’élégance de celui-ci ainsi que son intelligence. L’analyse linguistique des règles des GRIF du niveau phrastique signale que leur origine est à la fois de la langue première (le kiswahili) et de la langue cible (le français) dans la mesure où ces règles se manifestent dans le fonctionnement de ces deux langues. S’agissant des GRIF en question, il s’observe au niveau du syntagme nominal- sujet, la tendance à l’omission de l’emploi nécessaire d’article, à la réduction optionnelle du SN, ou à la duplication de celui- ci en syntagme nominal- nominal et en syntagme nominalpronominal. Au niveau du syntagme verbal, on note l’omission des verbes, des adverbes, notamment celui de la négation, omission également du pronom personnel et du complément d’objet direct. Au niveau du syntagme prépositionnel, c’est la réduction optionnelle du syntagme prépositionnel, l’omission également du pronom personnel, du complément d’objet indirect. Dans l’usage des phrases juxtaposées, coordonnées, ou subordonnées, il se signale la non maîtrise de ces constituants immédiats de la phrase, ce qui donne lieu au pléonasme de sens ou à la redondance ambiguë. Considérant la structuration de ces règles que nous avons nommées omission et redondance, et leur systématicité forte au début d’apprentissage (classes ABCD) et faible à la suite (classes EFGH), il y a lieu d’affirmer qu’elles sont les reflets des difficultés éprouvées par les élèves pour la construction de la phrase simple et complexe. De là, il y a lieu, dans l’avenir, d’amener les élèves, lors de l’apprentissage et enseignement de la phrase, à maîtriser son fonctionnement. Quant à la progression de cet enseignement, nous proposons deux étapes : celle consistant à atténuer d’abord les difficultés des élèves à la base des règles de GRIF au niveau phrastique, et celle visant ensuite à enrichir la connaissance d’emploi judicieux de la phrase. 24 CISSE Alilou S. : Etude comparée de la restitution de récit et de la reformulation narrative dans les établissements du Togo La communication dont je présente ici le résumé s’inscrit dans le projet de recherche « Dynamique et appropriation du français en situation diglossique ». Elle porte sur les restitutions orales du récit de “l’enfant terrible’’ effectuées dans les classes de 5e et de CM2 dans les établissements du Togo. Cette communication cherche à comprendre comment les élèves de niveau différent procèdent pour le rappel des récits entendus et à décrire les stratégies discursives qu’ils utilisent pour reformuler à leur manière le récit oral. En situation d’apprentissage, le récit oral comme le récit écrit, constitue une activité fondamentale des programmes togolais de français dans les établissements. Il s’agit pour nous d’analyser les données orales recueillies et de les comparer pour confirmer ou infirmer notre hypothèse de départ à savoir que “le niveau atteint par les élèves en langue seconde détermine leur capacité dans la restitution et la reformulation narrative.’’ Les résultats de cette analyse doivent permettre de dégager des avenues didactiques pour l’enseignement du récit dans les établissements. 25 CORDIER Muriel, LEGROS Denis & Emmanuelle MAITRE de PEMBROKE: Etude de l’effet du mode d’apprentissage : Formel (école) vs informel (Internet) sur le développement de la compréhension et de la production en langue seconde en situation de diglossie. Exemple du Togo. Les élèves togolais découvrent et apprennent la langue française en entrant à l’école. C’est pour eux une langue à apprendre et une langue pour apprendre peu présente dans leur quotidien. Des travaux sur la compréhension de textes en français langue seconde menés à Lomé en CM1 et 5ème ont montré que dès la classe de 5ème, dans une tâche de rappel écrit d’un conte, les élèves sont capables de traiter les informations directement en français (langue seconde). Le recours à la relecture du conte en langue maternelle (L1) comme aide au rappel écrit en langue seconde n’est efficace que pour les CM1 (Cordier, Legros, Maître de Pembroke, & Noyau, 2003 ; Cordier, Legros, Noyau, & Khalis, 2003). Pourtant d’autres travaux montrent qu’en classe de troisième, les élèves maîtrisent encore mal la compréhension, la production et la construction de connaissances en langue seconde (Noyau, & Cissé, 2001). Partant de ce constat, nous avons analysé et comparé les compétences en lecture et production en français langue seconde de deux groupes de jeunes de Lomé : un premier groupe (G1) de 21 jeunes gens togolais qui ont quitté l’école depuis plus de deux ans et fréquentent un cybercafé et un second groupe (G2) de 43 élèves de troisième d’un collège privé. Deux tâches sont proposées : une tâche de production d’un texte explicatif sur les trois états de l’eau sur la planète, puis une tâche de lecture et de réécriture d’un texte expérimental sur le même sujet présenté comme le texte d’un élève à corriger. Les élèves du groupe G1 effectuent leurs tâches sur ordinateur, les élèves du groupe G2 travaillent dans la condition papier/crayon. Dans la première tâche, les internautes du Groupe G1 produisent plus d’informations pertinentes, c’est-à-dire en rapport avec le topic et inscrites dans une chaîne causale que les collégiens du groupe G2 qui eux produisent plus d’informations non ou peu pertinentes. De plus, ils produisent plus d’informations appartenant à la macrostructure et donc indispensables à la compréhension et à la construction d’un résumé du texte que les élèves du groupe G2. On peut supposer que la fréquentation d’Internet oblige les élèves à réfléchir davantage sur le contenu du texte à transmettre et donc à hiérarchiser et à sélectionner les informations. Dans la seconde tâche, très scolaire, et impliquant un grand nombre d’opérations cognitives (lecture, compréhension, planification, réécriture), les résultats des groupes G1 et G2 ne sont pas significativement différents. Cependant, les collégiens effectuent plus de corrections que les internautes et les internautes opèrent plus de suppressions que les collégiens. Ces résultats vont dans le sens de l’hypothèse selon laquelle une tâche trop scolaire ne permet pas aux internautes de mettre en valeur leurs compétences spécifiques en communication écrite. Mais ils indiquent aussi que la fréquentation d’Internet en dehors de tout cadre d’apprentissage formel ne permet pas au scripteur de gérer des tâches multiples et cognitivement lourdes. D’autres expérimentations nécessaires pour explorer ces directions nouvelles dans le domaine de la recherche et de la didactique de l’apprentissage en L2 en situation de diglossie seront menées dans le cadre du projet Numéral du programme TCAN/CNRS. 26 DAFF Moussa : Analyse des conséquences linguistico-didactiques de l’acquisition/apprentissage du français en milieu plurilingue sénégalais : cas des éléves de CM2. Les pédagogues d’hier ont toujours analysé les écarts des apprenants de français comme des fautes dont la remédiation unique est la proposition d’une correction par rapport à la norme scolaire. La démarche intralinguistique était en partie utilisée. Maintenant, de plus en plus, les didacticiens d’aujourd’hui interrogent à la fois l’intralinguistique et l’interlinguistique pour mieux comprendre les comportements langagiers des apprenants. L’environnement plurilingue influence forcèment l’acquisition du français dans un espace officiellement momolingue. Au Sénégal, le wolof, véhiculaire national, en rencontrant le français dans la rue et à la l’école primaire fait porter sur les productions des apprenants des traces de contagion réciproque. Le relevé des productions « fautives » par rapport au français scolaire tel qu’il est recommandé par l’institution révèle le caractère récurrent des mécanismes de déviations mis en place par les élèves du primaire en situation d’acqusition/apprentissage. Ces déviations et écarts d’interlangue sont à analyser comme faisant partie du processus d’acquisition du français en situation diglossique. Leur analyse linguistico-didactique apportera un éclairage sur les modes de fonctionnement cognitif des apprenants bilingues toujours désireux de bien s’approprier le français. 27 DIALLO Mamadou Saliou : Rédaction française chez des élèves pularophones de fin de primaire à Conakry, Guinée : des compétences en jeu. La présente communication a pour objet une analyse des compétences langagières et rédactionnelles en français d’élèves guinéens de langue maternelle pular (peul). L’analyse portera plus exactement sur un corpus constitué de copies de rédaction d’élèves de fin de primaire à Conakry. Ce corpus est recueilli dans le cadre d’un projet de recherche international (2003 et 2004) regroupant l’Université de Conakry et l’Université de Franche-Comté à Besançon, sur appui financier de l’Agence universitaire de la Francophonie. Intitulé « Rôle de l’école comme milieu de dynamique des langues, comme lieu de contact des langues, comme milieu d’appropriation culturelle », ce projet a permis de collecter d’importantes données sociolinguistiques brutes en rapport avec l’école et les pratiques langagières des élèves dans leurs différents milieux d’évolution (l’école, la famille et l’environnement social). A partir d’une microanalyse d’un corpus constitué d’une cinquantaine de copies de rédaction, j’espère pouvoir dégager les caractéristiques discursives des différents types d’interactions énonciatives observables dans les rédactions, dont la visée fonctionnelle de la consigne était de faire produire un texte narratif épistolaire portant sur un fait divers imaginaire. La microanalyse sera réalisée à partir d’un éclairage théorique unifié prenant en compte les modèles théoriques et les approches acquisitionnels de Klein W (1989), de Giacobbé J (1992) et de Noyau C. La démarche d’analyse de C. Noyau par domaines référentiels sera empruntée dans cette communication pour examiner les productions écrites des élèves pularophones de fin de primaire à Conakry. Trois domaines référentiels seront ainsi retenus conformément à l’approche utilisée par Colette Noyau : la référence aux entités, la référence aux événements et leur placement dans le temps, et les stratégies développées par les élèves pour la structuration des éléments textuels de leur production (v. documentation de l’atelier de formation en sociolinguistique et dynamique des langues lors des Journées de formation de Ouagadougou, juin 2004). Au niveau de ces références, une attention particulière sera accordée aux constructions des formes lexicales à travers leur représentation graphique visuelle et leur encodage sémantique, à l’usage des éléments de co-référence (noms, pronoms, détermination nominale, …) et à l’emploi des verbes en rapport avec la fonctionnalité discursive prédominante. Les caractéristiques langagières dominantes dans les différentes expressions écrites seront mises en parallèle avec celles d’ordre sociolinguistique des élèves en vue de voir dans quelle mesure la langue cible des élèves (ici, le français) serait porteuse d’influences de la langue source (le pular). Les catégories socioculturelles caractéristiques de l’environnement familial de l’élève (langues en usage en famille, intégration des biens culturels dans la vie de l’élève comme l’usage des livres en famille) seront mises en rapport avec les indices de compétence fonctionnelle en français avérés dans les productions écrites des enquêtés, pour essayer de déterminer si ces paramètres extrascolaires ont un quelconque lien significatif avec les capacités d’appropriation de la langue cible, la langue seconde et langue scolaire. La communication devrait déboucher sur des propositions d’aménagement didactique visant à aider l’enseignant de français dans ce contexte à capitaliser les acquis langagiers et rédactionnels des élèves pour les aider à mieux se repérer dans cet univers langagier confus où « oral » et « écrit » semblent former un véritable tourbillon langagier dans lequel ces enfants de situation culturelle souvent modeste se trouvent égarés à des degrés divers. 28 DIOUF Mayé Mboul : Les interactions dans les pratiques langagières en classe à l’école de base au Togo : le couple question-réponse. En tant que langue officielle de la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne, le français est parfois la seule langue en usage dans l’administration, la vie publique mais aussi dans le processus de scolarisation. Par conséquent, l’apprentissage a le plus souvent lieu dans le milieu institutionnel à savoir l’école qui est le seul endroit sinon l’endroit privilégié où s’effectue le contact entre les jeunes africains et la langue. En dehors de l’enceinte institutionnelle et de ses règles, c’est-à-dire dans la vie quotidienne ou intime, le français s’efface au profit des langues du milieu. Il apparaît dès lors que son acquisition s’effectue entièrement à l’école où, en même temps qu’il s’acquiert, il sert de véhicule à toutes les connaissances scolaires, autrement dit, à enseigner les autres matières. C’est donc cette double tâche que doit accomplir la langue qui suscite l’intérêt que nous portons à la classe comme environnement écologique en général et, aux interactions maître / élèves en particulier. Pour ce faire, nous nous focaliserons sur le couple "question-réponse" dans une perspective d’analyser leur nature, leur forme, leur fonction, mais aussi leur distribution et leur rôle dans le processus global de l’apprentissage. Nous partirons d’études empiriques sur l’acte de question et les échanges interactionnels dont les contenus seront examinés en rapport avec des données contextuelles. 29 DREYFUS Martine : Pratiques de classes, interactions et appropriation du français en milieu formel et non formel à Dakar. Notre communication renvoie aux axes 3 et 4 de l’appel à communication : « L’école et les langues en présence, leurs usages, l’accès au monde de l’écrit », « Les représentations de la langue, de l’école, des apprentissages », elle s’appuie sur des observations d’interactions en classe, des recueils de productions d’élèves et des entretiens auprès d’enseignants dans des écoles traditionnelles et des écoles alternatives (écoles de base) des quartiers périphériques de Dakar (Sénégal, niveaux observés CP et CM). Les corpus analysés proviennent d’une recherche inscrite dans le cadre d’une ARP du réseau « Sociolinguistique et dynamique des langues » de l’AUF intitulée « Dynamiques sociolinguistiques (scolaires et extrascolaires) de l’apprentissage et de l’usage du français dans un cadre bi- ou plurilingue » (C. Juillard, M. Dreyfus, D. Morsly, A. Napon, N. Thiam). Un des thèmes de la recherche traitait de l’école, comme lieu du contact des personnes et des langues, et notamment de la classe, comme espace d’interactions sociales particulières. Le premier axe de la recherche concernait le parcours des instituteurs (trices), et formateurs (trices) du primaire : qui sont-ils ? Quelle est l’incidence de leurs parcours (stratégies d’acquisition, lieux et circonstances de l’emploi des langues en contact, représentations vis à vis des langues, etc.) sur la norme qu’ils veulent transmettre ainsi que sur leur(s) usage(s) dans le cours de leur pratique professionnelle ? - Le second axe étudiait les stratégies d’enseignement des maîtres et des formateurs d’après l’observation de leurs pratiques pédagogiques en classe et d’après l’analyse des déclarations faites lors d’entretiens d’explicitation. - Le troisième traitait du recours aux langues locales (ou aux langues d’origine) dans la classe et hors de la classe. On a pu ainsi spécifier la nature des contacts de langues, leur fonction et la représentation qu’en ont les usagers. La fonction de l’alternance des langues en classe a été ainsi appréciée, tant pour les maîtres qui l’utilisent que pour leurs élèves. L’exploitation pédagogique du bilinguisme se révèle variable, compte tenu de la diversité des situations et des parcours des maîtres ou encore des types d’enseignement Les diverses enquêtes et recueils de données nous ont permis de mettre en relation plusieurs types d’informations : le répertoire et la biographie linguistiques des enseignants ; les représentations de la langue à enseigner et de la langue des élèves ; les modèles linguistiques, discursifs et langagiers et les pratiques observées en classe et à l’école. A partir de l’analyse des corpus produits par la recherche, notamment ceux concernant des interactions en classe, portant sur l’apprentissage de l’écrit (lecture/écriture), nous étudierons, dans le cadre de cette communication, les conditions d’appropriation/apprentissage du français dans un contexte diglossique et les représentations de l’écrit associées à ces pratiques. L’apprentissage de l’écrit suppose (entre autres) que soient nettement différenciés dans les modèles langagiers et linguistiques proposés aux élèves langue orale et langue écrite, et que les supports textuels/discursifs soient diversifiés (cf. Fayol, 1996, Giasson, 2001) Qu’en est-il dans les pratiques effectives ? Corollairement, nous étudierons la prise en compte - ou la non prise en compte- des langues- cultures d’origine des élèves (usages et aspects fonctionnels de l’alternance de langues dans l’apprentissage du français, rituels communicatifs). On sait que dans l’approche communicative et ses avatars, qui ont fortement marqué l’apprentissage des 30 langues étrangères ou secondes ces dernières années, le recours à la (ou aux) langue(s) source(s), langues premières des apprenants, est généralement exclu, de même que les pratiques de comparaison inter – langues (analyses contrastives). Il s’agit pour l’enseignant d’utiliser uniquement la langue d’apprentissage, langue cible, dans la classe et d’en exclure tout autre. De même, dans les recherches portant sur l’acquisition des langues secondes, Py (1997) rappelle combien la ou les langues maternelles ont longtemps occupé une place « ambiguë », par exemple les notions de transferts ou d’interférences linguistiques ont souvent été accompagnées de connotations négatives par rapport à l’acquisition ou à l’apprentissage des langues et les travaux de recherche sur l’interlangue des apprenants ont souvent gommé l’influence de la langue première au profit d’universaux d’acquisition. Ce n’est qu’assez récemment, dans le cadre des recherches sur le bilinguisme et sur l’acquisition des langues dans des sociétés plurilingues, que ces notions ont été ré-interrogées et, en partie, réintroduites dans la didactiques des langues. 31 FILLOL Véronique, NOCUS Isabelle, SALAUN Marie & Jacques VERNAUDON : La prise en compte des langues maternelles kanak favorise-t-elle l’appropriation du français ? Bilan d’étape d’une expérimentation en Nouvelle-Calédonie. Si le français en Nouvelle-calédonie est langue officielle, langue véhiculaire et seule langue de scolarisation, son enseignement à l’école primaire reste l’une des principales préoccupations des enseignants, puisque de nombreux élèves (sur la Grande-Terre et aux Îles Loyautés) commencent leur apprentissage/acquisition du français en découvrant l’école. Dans le même temps, le français progresse dans la sphère familiale au détriment de la transmission des langues maternelles, en particulier en milieu urbain. On pourrait penser naïvement que cette progression du français va dans le sens d’une plus grande réussite des élèves océaniens. Loin s’en faut ! Une thèse récente montre au contraire que certains adolescents vivent une double insécurité linguistique, voire un mal-être identitaire et une réelle exclusion sociale : ils survalorisent leur langue maternelle ou d’origine, alors qu’ils ne la parlent pas, et se construisent une langue identitaire (français dit « kayafou » ou français « mélangé ») en refusant de parler le français « standard » de peur d’être assimilé à un « Blanc ». Ainsi, même si le français est accepté comme langue véhiculaire, ils en parlent comme d’une langue « obligée » et développent des formes de résistance plus ou moins conscientes à son apprentissage dans un contexte où la pratique de l’institution scolaire privilégie la « norme » sur le sens ou la communication. La plupart des recherches en matière d’acquisition du langage laisse entendre que, dans une situation plurilingue et diglossique, la double valorisation des langues maternelles et de la langue principale de scolarisation favorise la réussite scolaire, et que l’enseignement bilingue précoce, loin d’être une source d’interférences, permet le développement d’un bilinguisme et d’un biculturalisme additifs. Fort de ces présupposés théoriques, le laboratoire Transcultures de l’Université de la Nouvelle-Calédonie assure, depuis février 2002 et à la demande du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, l’organisation et le suivi scientifique d’une expérimentation pour l’introduction des langues et de la culture kanak à l’école primaire publique. En 2004, huit enseignants-stagiaires, locuteurs d’une langue kanak, dispensent un enseignement de/en langue kanak (drehu, nengone, ajië, xârâcùù) dans dix écoles primaires du premier degré, répartis sur les trois provinces. Un dispositif d’évaluation externe, comprenant deux axes complémentaires, permet d’apprécier l’impact de cet enseignement. L’axe psycholinguistique mesure les effets de ce dispositif sur l’évolution des compétences langagières des élèves, tant dans la langue maternelle qu’en français, leur attitude face à leur langue maternelle et au français, et leur niveau d’estime de soi. L’axe sociolinguistique permet de rendre compte de ce qui se joue hors de la classe de langue, dans l’équipe pédagogique, dans les familles et dans la communauté au sens large. Nous souhaiterions présenter dans cette communication les premiers résultats de cette expérimentation, en reprenant les deux perspectives évoquées ci-dessus, à savoir : l’intérêt de la prise en compte de la langue maternelle de l’enfant pour son développement psychologique et langagier (par conséquent, pour une meilleure intégration et réussite scolaire). Y a-t-il des transferts observables au niveau des apprentissages entre la première langue et le français langue seconde ? et d’un point de vue sociolinguistique, en quoi la prise en compte des langues maternelles à l’école peut-elle modifier les représentations sur les langues, et en particulier les représentations sur le français ? L’enseignement des langues maternelles permet-il un rapprochement des familles et de l’école ? 32 FLORIGNY Guilhem: Représentations des langues à travers la référence aux entités dans l’appropriation du français par des enfants créolophones mauriciens L’objectif de cette communication sera de présenter certains résultats de notre mémoire de DEA intitulé “Variations dans l’appropriation du français par des enfants créolophones mauriciens : référence aux entités”, résultats d’une enquête de terrain menée en mars 2004 à l’Ile Maurice. Cette enquête consistait à faire raconter une courte histoire à partir d’images par des enfants de 6 ans et 8 ans respectivement aussi bien en français qu’en kreol mauricien. Il nous fallait ensuite contraster ces différents récits, tant entre les langues qu’entre les deux groupes d’âge, dans la référence aux entités, que nous avons divisé entre la référence aux personnages à proprement parler et la référence relationnelle, marquée par les rapports de possession et/ou d’appartenance. Il nous semble indispensable de présenter dans un premier temps la réalité sociolinguistique de l’Ile Maurice, c’est-à-dire, les liens entre langues, culture et religion, ainsi que les rôles et représentations hiérarchiques des langues tels qu’ils sont véhiculés à l’Ile Maurice (ex : le kreol mauricien : langue ou patois ? l’opposition entre langue orale/écrite représentée par le couple kreol/français). Nous parlerons brièvement du système éducatif mauricien, surtout en ce qui concerne les problèmes de bilinguisme, de l’importance de l’oral et de l’écrit dans l’enseignement tant dans le déroulement des classes que dans celui des examens. Enfin, il nous semble utile de définir la méthodologie que nous avons utilisée aussi bien dans la collecte du corpus (tâche à accomplir par les enfants, consignes aux enquêteurs pour obtenir un corpus adéquat, etc.) que dans l’analyse proprement dite (cadre théorique pour l’analyse de récit). Nous nous attacherons enfin à présenter certains des résultats obtenus, à savoir l’analyse de certaines expressions servant tant dans la référence aux entités que dans la référence relationnelle. Nous montrerons, en nous appuyant principalement sur deux ou trois récits en français et en kreol mauricien issus de notre corpus, ce que ces moyens référentiels peuvent nous apprendre de la conception des langues pour ces enfants d’un point de vue socio-psycholinguistique. Par ailleurs, l’analyse d’expressions référentielles nous permettra de montrer que certaines notions (ex : le genre et le nombre) et structures (ex : pour exprimer le démonstratif ou la structure du complément du nom en français) qui peuvent paraître évidentes pour un locuteur natif de français ne le sont pas forcément pour un enfant créolophone mauricien. Nous tenterons de montrer cela ou, au moins, de lancer des pistes de réflexions en prenant en compte l’apparente proximité entre ces deux langues, essentiellement due au fait que la plupart des items du lexique kreol sont issus du français. 33 GBETO Souley Kossi : L’acquisition des énoncés complexes en L1 (éwé) et en L2 (français) dans les discours procéduraux et explicatifs : comparaison acquisitionnelle et typologique. Cette communication aborde la question de l’acquisition des connecteurs dans la structuration de ces discours en L1 (éwé), en L2 (français) et s’attache à analyser le rôle joué par les connecteurs dans l’élaboration verbale des discours procéduraux notamment les règles de jeu et les recettes de cuisine. En effet, une bonne capacité discursive demande la maîtrise des mécanismes linguistiques qui permettent d’intégrer plusieurs propositions entre elles en vue de la construction d’énoncés complexes. ( Bocaz, 1989). Dans cette optique, les connecteurs sont des outils permettant de relier des prédications de procès entre elles et en une structure globale. Des recherches ont montré que les connecteurs étaient acquis chez les enfants plus tardivement que la morphologie verbale. Parmi ces connecteurs les conjonctions de subordination sont encore plus tardives puisqu’elles supposent qu’il y ait combinaison des phrases. Nous étudions les énoncés complexes dans les discours procéduraux et explicatifs produits par les élèves en situation de diglossie de notre corpus répartis en trois tranches d’âge : CP (6ans), CM (10 ans), et 3e (16ans) en éwé (L1), en français (L2). Nous observons le développement de la construction des énoncés complexes dans les discours procéduraux oraux en gengbé et en français pour examiner les points suivants : Quelle trajectoire développementale les élèves togolais en situation de diglossie suivent –ils dans l’acquisition des énoncés complexes dans les deux langues typologiquement différentes ? Y a-t-il une spécificité dans la structure des énoncés complexes produits par ces élèves en situation de diglossie gengbé – français. Nous ferons une comparaison typologique des énoncés complexes en L1 et en L2 de manière à dégager la spécificité acquisitionnelle des élèves de notre corpus. Nous interprétons les résultats de nos analyses en nous fondant sur la notion de condensation (Noyau 1977,1999), une notion conceptuelle qui peut se manifester par différents procédés linguistiques selon chaque langue. Nous nous appuyons sur les données orales de discours procéduraux et explicatifs enregistrés et transcrits dans le cadre de l’enquête transversale en cours au Togo, en milieu scolaire. Cette étude s’inscrit dans le cadre du projet multilatéral et interdisciplinaire CORUS / AUF / Cognitique « Appropriation du français langue de scolarisation en situation diglossique ». 34 HOAREAU Yann-Vigile et Denis LEGROS : Effet de la langue maternelle (L1, Créole) sur la compréhension de texte explicatif en langue seconde (L2) en situation diglossique. Rôle de la langue L1 dans l’activation de la Mémoire de Travail à Long Terme. Les recherches sur l’apprentissage en situation de bilinguisme, de diglossie ou en contexte multiculturel ont montré l’importance de facteurs tels que l’oralité et la prise en compte des connaissances culturelles de l’apprenant (Brewer, 1985 ; Kintsch & Greeno, 1978 ; Mistry, 1993). Dans le même temps, les recherches sur les processus cognitifs sous-jacents à ces phénomènes de construction de connaissances en milieu bilingue (Singual, 2002 ; Verhoaven, 1994) n’ont jusqu’alors pas su proposer d’explications se rattachant aux modèles classiques de la compréhension du langage (Kinstch, 1998). L’objectif de ce travail est de montrer qu’une lecture fine du modèle Construction-Intégration (Kintsch, 1998) permet une compréhension des mécanismes de construction de connaissances en contexte bilingue. Nous montrerons que les conditions d’activation de la Mémoire de Travail à Long Terme (Kintsch & Ericsson, 1995), qui est un élément central du modèle de Kinstch (1998), varie du fait de facteurs contextuels (relation entre les connaissances liée à culture de l’élève et les connaissances véhiculées par le texte) et de la langue (L1 vs L2). Notre expérimentation a concerné cinq classes de CM2 de Saint-Joseph et Saint-Philippe de l’île de la Réunion. Nous avons fait lire aux sujets un texte se rapportant au thème du dérèglement climatique (dont les effets sont bien connus par les enfants Réunionnais). Nous avons par la suite proposé des aides orales à la compréhension du texte en créole (L1) pour le groupe 1 et en français (L2) pour le groupe 2. Nous avons fait lire le texte sans aide à la compréhension pour notre groupe contrôle ( groupe 3). Nous avons analysé la production des élèves des trois groupes en tâche de rappel libre via une analyse prédicative (Kintsch, 1974). Les résultats que nous avons recueillis nous permettent de conclure à un effet significatif de la langue L1 (créole) sur l’activation des connaissances et la production d’inférences lors de la lecture d’un texte en L2 (français). Notre travail montre qu’il est possible d’appliquer le modèle Construction-Intégration pour comprendre les mécanismes de construction de connaissances en contexte bilingue ou diglossique. Cela a pour conséquence de proposer la situation de diglossie comme lieu de reformulation de questionnements liés aux modèles de la compréhension du langage en psychologie cognitive. 35 ITALIA Magali : Construction des connaissances syntaxiques du français en situation diglossique Le français, bien que langue d’enseignement car unique langue officielle et véhiculaire du Gabon, se heurte à la résistance du Fang, seul vernaculaire présent dans la province rurale du nord du pays, le Woleu-Ntem, où la plupart des enfants n’ont pas le français comme langue maternelle. Ainsi l’appropriation du français se fait principalement à travers la scolarisation, dans un système éducatif monolingue. En raison de cette situation diglossique, et parfois d’insécurité linguistique, besoin est de définir les constructions des connaissances du français, et ses différentes étapes, afin de mieux appréhender son apprentissage. Cela revient à délimiter les séquences successives d’un énoncé pour rationaliser leur identification et leur description, puis à déterminer l’élaboration de chacune de ces séquences en étudiant les degrés divers de complexité de leurs unités syntaxiques, à partir de l’analyse en grille élaborée par le GARS. Les corpus étudiés, composés d’enregistrements de français parlé et produits par huit locuteurs, répartis en deux groupes distincts, classés selon des variables d’âge et d’années de scolarité, mais possédant la même langue de substrat, sont transcrits selon le modèle du GARS. Chacun des locuteurs est enregistré lors d’un long monologue qui ne subit alors aucune interaction dialogique. A travers la comparaison de ces corpus oraux, l’objectif est de déterminer, grâce à l’étude des dispositifs tels que l’extraction et les tournures pseudo-clivées, en quoi les différences de mécanismes d’apprentissage du français (pour les uns, absence de scolarité et acquisition de la langue seconde en milieu informel au contact de francophones, et, pour les autres, scolarité jusqu’en troisième, c’est-à-dire apprentissage guidé en milieu formel) ont des conséquences sur la syntaxe utilisée. La prise en considération et la reconnaissance de cette syntaxe pourra améliorer l’apprentissage du français en milieu diglossique et éviter le conflit latent entre le français parlé et le français tel qu’il est décrit dans les manuels scolaires. 36 KOUADIO N’GUESSAN Jérémie : Apprendre le /et en français : parcours du combattant de l’écolier africain. Apprendre le français et apprendre en français (langue seconde ou quasi étrangère), des petits enfants africains l’ont fait depuis des générations avec plus ou moins de succès. Les optimistes pencheront pour le « plus ». Ce faisant, ils se référeront sans doute à la période de l’immédiate post-indépendance ou même à celle d’avant. L’école en ces périodes-là était caractérisée par a) la présence de maîtres à la compétence pédagogique éprouvée par l’exigeante et contraignante doctrine coloniale, b) des élèves particulièrement motivés, c) des classes aux effectifs réduits. Toutes choses qui, combinées au caractère répétitif de la pédagogie d’alors, ont pu masquer en partie les difficultés liées à l’apprentissage d’une nouvelle langue, vecteur de savoirs nouveaux. Ils pourront à loisir égrener pêle-mêle les noms de grands hommes de lettres que l’école africaine a produits et montrer qu’aujourd’hui l’Afrique francophone compte des millions de cadres de haut niveau aux compétences comparables à leurs homologues d’ailleurs. Mais des questions demeurent. Et c’est là où les moins optimistes ou simplement les plus réalistes mettront en avant les limites de ce « succès ». L’école africaine est en crise, et les systèmes éducatifs au sud du Sahara sont les moins productifs au monde. Les causes de cette situation sont nombreuses et, parmi celles-là, la question de la langue d’enseignement/apprentissage n’est pas la moindre. Et il semble que dans aucun pays de cette aire géographique l’on n’ait réussi à régler l’épineux problème du rapport entre le français et les activités cognitives, dans des classes composées en grande partie par des enfants alloglottes. Ce rapport français-activités cognitives constituera la trame principale de cette communication, qui s’appuiera sur des enquêtes dans des classes de CP en Côte d’Ivoire. Nous poserons également la question de savoir si les déficiences constatées à ce niveau ne proviendraient pas du fossé qui se creuse de plus en plus entre la variété de français (normé) que l’école essaie de faire acquérir et d’autres variétés véhiculaires plus dynamiques parlées par toutes les couches de la société. La situation ivoirienne est de ce point de vue exemplaire. Enfin, comme il y a eu ici, comme ailleurs, quelques essais d’utilisation des langues nationales dans les premières années de scolarisation dans le but de pallier justement les difficultés nées de ce rapport, nous rendrons compte également de ces expériences pour en faire ressortir les limites. 37 KUBE Sabine : « On fait tout en français et on nous dit toujours d’apprendre le français. Mais quel français apprendre encore ?» - Représentations du français et de son enseignement de lycéens abidjanais. Connaître les représentations que les élèves africains dans un système scolaire basée uniquement sur le français ont de cette langue s’avère décisif pour deux raisons. Ces représentations influencent d’une part l’apprentissage par les élèves à la fois de la langue française mais aussi du savoir scolaire véhiculé par elle. Elles sont d’autre part d’excellents indicateurs des déficiences de l’actuel système scolaire en Afrique francophone et des méthodes d’enseignement du français en particulier. Nous essayons, dans la présente communication, d’expliciter cette thèse en nous basant sur les résultats d’une enquête menée par questionnaire et entretien de nature métalinguistique en 2002 dans trois lycées abidjanais avec des élèves de 15 à 22 ans (de la Troisième à la Terminale). Le français joue un rôle important dans l’univers linguistique abidjanais, non seulement en tant que langue officielle mais aussi comme langue véhiculaire pour la majorité de la population urbaine. Le français est désormais pour les élèves la langue qu’ils utilisent le plus. Cette évolution du français a conduit à sa différentiation. Plusieurs normes du français coexistent aujourd’hui dans la pratique linguistique des élèves et dans leur environnement linguistique. Cette coexistence s’avère particulièrement conflictuelle à l’école où l’écart entre le français parlé en dehors de l’école (et souvent déjà en son sein !) et celui enseigné par les professeur et servant de référence pour les examens est évident. L’important taux d’échec au baccalauréat n’est que le signe extérieur des problèmes linguistiques des élèves provoqués par l’enseignement du français. Dans un tel contexte, étudier les représentations du français et de l’enseignement chez les élèves devient particulièrement important. Après quelques remarques préliminaires sur les caractéristiques de la situation linguistique vécue par les lycéens abidjanais et leur principaux problèmes linguistiques à l’école, nous montrerons, dans un premier temps, les représentations du français chez les élèves interviewés en mettant l’accent sur le jeu très complexe des différentes variétés de cette langue actuellement présentes en Côte d’Ivoire et en concurrence dans le quotidien linguistique des élèves. Un deuxième point essayera de démontrer à quel point ces représentations sont influencées par celles des professeurs et surtout leurs méthodes d’enseignement. Nous nous appuyerons sur les propos des élèves mais aussi sur nos propres observations en classe, nos participations aux conseils de classe, aux réunions des professeurs et sur des discussions avec différents professeurs, éducateurs et inspecteurs au Ministère de l’éducation. Nous allons conclure notre communication en ouvrant quelques pistes à suivre pour une réforme des méthodes de l’enseignement du français en Côte d’Ivoire et en Afrique francophone en général. 38 LE ROHELLEC Solange : Parler, lire, écrire en français : des outils de socialisation dans l’enseignement primaire à Madagascar Langue officielle et langue d’enseignement avec le Malgache, le français a le statut d’une langue étrangère de « fait » depuis son retour en 1992 dans les programmes officiels de l’école primaire. Pour faciliter les interactions verbales en classe, l’enseignant a recours à sa langue maternelle, c’est-à-dire un malgache dialectal oral qui est en général le même pour ses élèves, pratique majeure pour la plupart de ces enfants, au détriment des langues d’enseignement. Alors que la langue française devrait assurer la fonction culturelle et éducative des écoliers malgaches, constat doit être fait que ce n’est pas réellement le cas, vu la pauvreté du capital langagier des enseignants ; celle-ci s’explique par une faible maîtrise du français qui est une des conséquences de la malgachisation, par un niveau académique proche d’un brevet des collèges dévalorisé, et d’une formation professionnelle tronquée ou inexistante. C’est pourquoi la question de la socialisation de l’enfant dans ces conditions doit être posée. Nous proposons d’analyser différentes pratiques didactiques et pédagogiques d’enseignants du primaire à Madagascar en visualisant des séquences où les élèves sont en situation d’oral, de lecture et d’écriture. Nous démontrerons ainsi les impacts irréversibles sur la maîtrise de savoirs fondamentaux comme la lecture et l’écriture. En effet, les choix linguistiques de ces enseignants avancent des préférences didactiques fondées sur leurs propres représentations, savoirs et savoir-faire en corrélation avec leur compétence linguistique lacunaire. Ainsi, la répétition de mots ou groupes de mots isolés, décontextualisés, en marge de tout aspect social et culturel, n’a-t-il aucun sens pour l’élève incapable de fixer le vocabulaire de base. Cette situation peut s’expliquer, d’une part, par des difficultés à l’oral qui persistent depuis le début de l’apprentissage sans aucune correction et ajustage d’une année sur l’autre et qui se répercutent à l’écrit et, d’autre part, par l’absence d’un bain linguistique dans une continuité scolaire qui ne favorise pas l’usage du français. Par ailleurs, si l’oral semble « acceptable » dans certaines classes, l’écrit est loin de l’être : de nombreuses difficultés surgissent et nous verrons que les élèves se heurtent aux problèmes liés à la structuration et au découpage même d’un mot, tombant inévitablement dans le piège associatif phonie/graphie. Aussi nous interrogerons-nous sur les raisons de cette situation. Nous ne pouvons certes pas en attribuer la seule responsabilité aux élèves car ils ne font que reproduire le modèle du maître ; ils sont simplement les garants de sa continuité. Pour rendre compte des phénomènes étudiés, nous ferons référence à des séquences vidéo attestées puisque nous avons pratiqué une méthodologie de terrain enregistrant des situations pédagogiques telles qu’elles se déroulaient en contexte scolaire. Nous avons privilégié le milieu provincial de différentes régions de Madagascar car il représente la grande majorité des écoliers malgaches. Nous suivrons le cheminement classique de l’appropriation d’une langue en situation oral/écrit. Notre démarche d’observation s’est orientée vers des séquences de classe présentant tour à tour des élèves en situation de non intégration. 39 MALLAM GARBA Maman : Un plurilinguisme sans bilinguisme : le parcours du combattant du locuteur kanuri du Niger Les expériences et recherches sur l’enseignement bilingue en Afrique semblent se focaliser sur la coexistence, pacifique ou conflictuelle, dans le système éducatif formel, de la langue maternelle de l’enfant et de la langue officielle qui est généralement d’essence exogène. Les cas des plurilinguismes, souvent complexes mais fort instructifs, auxquels sont confrontés de nombreux enfants africains, dans leur parcours vers la vie active passent à travers les mailles de la problématique bilingue. La situation des enfants kanuri du Niger est, à cet égard, emblématique. De la cellule familiale à la vie professionnelle en passant par l’Ecole, c’est un véritable parcours de combattant, au sens militaire du terme mais parsemé d’embûches linguistiques et langagières, qu’ils entament. Un enfant kanuri qui arrive à effectuer des études supérieures est confronté à plus d’une dizaine de langues et variétés de langues différentes. Comment s’en sort-il ? Cette étude porte sur une série des recherches menées, à des périodes différentes, en 1993 et en 1997, dans des écoles bilingues francais-kanuri auprès des élèves, des enseignant(e)s, parents d’élèves et des responsables pédagogiques et administratifs. Dans un premier temps, elle marque le parcours langagier de l’enfant kanuri, le nombre de langues et variétés de langue qu’il s’approprie, et dans un second, elle dégage les avantages que l’on peut tirer des stratégies développées par cet enfant pour la mise en œuvre d’un enseignement bilingue efficace, qui prend en compte les besoins de l’enfant et ceux de sa communauté. Quelles interactions peut-il y avoir entre le plurilinguisme in vivo des communautés et le plurilinguisme in vitro des instances scolaires ? Telle est la question à laquelle, nous tenterons d’apporter une réponse à partir des faits et suivant la voix des personnes directement concernées. Les corpus à traiter proviennent des entretiens menés auprès des différents acteurs de l’éducation et de l’observation des cours en classes. 40 MASSOUMOU Omer : Les usages linguistiques chez les élèves des cours préparatoires dans un quartier de Brazzaville : la place du français Une enquête menée dans le quartier de la poudrière a montré le caractère très hétérogène des usages linguistiques chez les personnes adultes. Ces adultes sont de parents d’élèves qui déterminent les pratiques linguistiques de leurs enfants. Les élèves en début de scolarisation (6 et 7 ans) qui, fréquentent les deux écoles primaires de ce quartier, ne manquent pas d’exprimer la diversité en fonction de leurs origines ethniques. La notoire pluralité des langues (français, kituba, lingala, lari, mbembé, ndondo, kamba, hangala, kuni, pounou, vili, etc.) dans ce quartier fonctionne de façon variable au niveau social mais le cadre scolaire, par son monolinguisme, instaure une uniformisation linguistique vécue différemment par les jeunes acteurs. La consolidation ou l’acquisition des connaissances du français chez ces élèves obéissent à des stratégies ou à des paramètres complexes. Nous envisageons la description des usages linguistiques et des compétences communicationnelles pour permettre une définition des tendances linguistiques existantes. La gestion du bilinguisme ou du multilinguisme restera un aspect intéressant à étudier surtout à partir des interférences générées dans la pratique du français. 41 ONGUENE ESSONO Louis Martin Compétence d’écriture en français chez les élèves bilingues et monolingues du Cameroun Le Cameroun, célèbre par sa mosaïque linguistique, compte près de 250 langues différentes. Le français et l’anglais, langues officielles, servent à la scolarisation selon la zone linguistique considérée. En abordant les problèmes de l’acquisition/apprentissage et de l’enseignement du français en zone francophone, on observe que l’appropriation du français signifie la réinvention pure et simple de cette langue, le lexique, la structuration, la pragmatique et la (morpho) syntaxe du français subissant l’assaut de la cohabitation du français et des langues locales. Je me propose, dans cette communication, d’examiner les productions écrites en français des élèves de 4ème de plusieurs établissements publics et privés de quelques villes et villages du Cameroun sous le prisme de l’utilisation du pronom relatif. Près de 300 occurrences ont été recueillies, transcrites, puis analysées pour montrer que les langues locales, rattachées pour la plupart à l’espace bantu, et bien que non homogènes, ne connaissent qu’un seul relatif, lequel se rend en français par la forme que, rencontrée dans 88% de cas. Si la forme qui est parfois bien utilisée (25%), on a l’impression que, malgré leur niveau d’étude en français, les élèves continuent de transposer en français les structures de leur langue. L’intérêt de la communication vient du fait que les apprenants proviennent à 40% des zones rurales où le français est L2, et à 60 % des zones urbaines où le français est leur seule LM. Mais les erreurs commises par les deux groupes sont strictement identiques et révèlent que les élèves monolingues de la ville conservent le substrat des langues locales comme chez les bilingues des villages. L’approche longitudinale est proposée, afin de permettre d’évaluer l’évolution dans l’acquisition du français. Cette méthodologie consiste à suivre les apprenants tout au long de leur apprentissage. Les sujets ont été observés depuis la classe de 6ème , et leurs productions analysées, pour permettre de conclure sur la progression ou non de l’apprentissage et de l’acquisition du pronom relatif en L2. Si la didactisation du concept de relatif s’avère ardue, même pour les enseignants formés, il demeure difficile de déceler les obstacles cognitifs qui bloquent les élèves pour intérioriser les structures et les mécanismes du pronom relatif français. L’existence d’un seul relatif dans la L1 peut expliquer ce blocage, même si les élèves monolingues des zones urbaines produisent exactement les mêmes erreurs. Cette récurrence des erreurs vient appuyer l’hypothèse que le français camerounais n’a pas atteint encore le statut de langue maternelle, puisqu’il est constamment entaché du substrat de la L1 que ne parlent même plus les enfants. L’enseignement de cette notion entraîne une surnorme ( ?) aboutissant à des solécismes. On analysera par exemple les occurrences du type 1a 1b1c1d1e1f- Mon père où j’habite chez lui, me commissionnè quand je veu étudié. j’ai fui ché mon noncle donc la maison est à situé à Godon Les jans venait dans la maison doux le corps de mon père est poser. Je vous ferez la description d’un homme que j’avai décidé de rendre visite j’ai rencontré les camarades que j’écris sous vent. Le cahier que je travaillait sur ça est finit. Mon père a dix donc j’arrache les feuilles alors. 42 PEUVERGNE Julie (provisoire) Enseignants de Lomé (Togo), entre pratiques et représentations. Notre travail se place sous l’égide du projet Corus-AUF « Appropriation du français et construction de connaissances via la scolarisation en situation diglossique au Togo », dans sa dimension sociolinguistique, à savoir décrire l’environnement dans lequel émerge le français langue seconde. Nous nous intéressons donc au milieu des enseignants. Nous nous proposons d’exposer ici les principaux concepts théoriques sur lesquels nous nous sommes basée, en nous appuyant sur deux études pour les illustrer. L’école étant bien souvent le premier et unique lieu de contact avec le français, les enseignants, en particulier les instituteurs, tiennent le rôle de locuteurs autorisés pour leurs élèves. Leur parler fait alors office de référence : la variété de référence se définit comme un ensemble de traits sur lesquels porte l’attention normative. Mais ces enseignants ont acquis le français de la même façon que leurs élèves. De plus, les formations souvent lacunaires laissent à penser que leur parler est perméable à une norme endogène. Une première étude portant sur la description de la structure du groupe verbal dans le parler des enseignants (en primaire et collège) lors de leurs cours nous permettra de mettre à jour certaines manifestations de cette norme endogène, susceptibles de pénétrer la variété de référence en construction chez les enfants. Nous aborderons les représentations du français, ainsi que celle du métier d’enseignant, sur la base d’entretiens semi-dirigés auprès d’instituteurs de Lomé. Nous intéresserons entre autre à la conscience de la norme, du rôle de locuteur autorisé, à la place accordée aux langues premières, et à l’insécurité linguistique de ces enseignants. L’enseignant, locuteur autorisé, contribue à l’élaboration du français de référence, tout en étant sensible à une norme endogène en extension. Il est également un acteur social, tiraillé entre les exigences administratives et la demande en matière d’éducation et d’apprentissage, pris entre deux langues. Nous espérons esquisser un "portrait sociolinguistique" des locuteurs autorisés. 43 RANAIVO Velomihanta et Vololona RANDRIAMAROTSIMBA : Des langues-cultures aux pratiques de classe en contexte diglossique : quelle cohérence ? L’exemple de Madagascar. Une des causes majeures de l’échec du bilinguisme provient du manque de cohérence entre les différents éléments et niveaux du système éducatif malgache depuis les représentations et les croyances sociales ou doxa jusqu’aux pratiques de classe en passant par les lois d’orientation, les politiques linguistiques et éducatives sans oublier les dispositifs et outils didactiques mis en œuvre. La présente communication se donne principalement comme objectif l’analyse des ruptures entre les lois d’orientation successives d’une part et ces lois d’orientation et la réalité du terrain d’autre part. Ces ruptures engendrent divers dysfonctionnements dont il convient de mettre en lumière les mécanismes et les impacts car elles affectent la maîtrise concomitante des deux outils linguistiques en présence dans le champ scolaire : le malgache avec ses variantes dialectales et le français. Ces phénomènes sont mis en exergue à travers la présentation d’un corpus constitué par le biais de mémoires de fin d’études d’étudiants en formation initiale (futurs professeurs de lycée) ainsi qu’en formation des encadreurs de l’éducation (conseillers pédagogiques de collège) à l’Ecole Normale Supérieure d’Antananarivo. Ces travaux se fondent sur des enquêtes effectuées par les preneurs de formation dans ces différents cadres auprès des parents d’élèves, des élèves et des enseignants du primaire et du collège (enseignement fondamental). Sur la base de ces investigations complémentaires (entretiens, questionnaires et observations de classe menés dans des établissements de la capitale et des provinces), les analyses menées permettent de dégager un état des lieux de la maîtrise du français comme un des principaux outils de prise en charge cognitive et de pointer les problèmes à prendre en considération pour renforcer la construction des compétences : manque de motivation pour une langue entachée de perceptions plutôt négatives, ambiguité du statut pédagogique du français oscillant entre langue étrangère et langue seconde, difficultés d’application des textes officiels qui se limitent souvent à des considérations vagues et qui laissent surtout trans paraître une absence de véritable politique linguistique, pratiques scolaires en butte à des problèmes de formation ainsi qu’à des manuels et/ou méthodes inadéquats. Fondée sur une approche systémique, cette étude intègre différents domaines de référence : linguistique, sociolinguistique, anthropologique et didactique. Outre la contribution à une meilleure connaissance de terrain, ainsi qu’à des prises de décision éclairées, l’une des principales finalités de cette recherche est de parvenir également à une présentation critique et synthétique des travaux sur l’apprentissage/enseignement du et en français à Madagascar au cycle concerné pendant la décennie écoulée. 44 RANDRIAMASITIANA Gil Dany: Représentations contrastées du français dans l’enseignement primaire en contexte diglossique. Du façonnage sociolinguistique à la diversité des répertoires verbaux des apprenants. Cas de deux classes de base malgaches. En partant du postulat que les représentations ont à la fois un ancrage socio-historique et idéologique, axiologique et normatif et un soubassement social individualisé, d’une part, et en s’appuyant sur une approche systémique, d’autre part, cette contribution tente d’étudier dans quelle mesure il existe une inter-relation entre les représentations contrastées du français par les entités impliquées dans le secteur éducatif, le moule sociolinguistique des apprenants du niveau primaire, et les répertoires verbaux de ceux-ci. L’étude comparative menée au sein de deux classes primaires (publique et privée) cherche, à l’aide de trois instruments d’analyse (les questionnaires, les entretiens, les dessins et les supports graphiques), à examiner que les fluctuations du statut des langues partenaires (L1, le malgache, L2, le français) ont largement modelé aussi bien les pratiques d’enseignement que les perceptions contrastées des acteurs du système éducatif, notamment des apprenants, des parents et des enseignants. L’effet psychosocial du prêt-à-penser et du prêt-à-enseigner est patent. La diversité du moule sociolinguistique et communicationnel des apprenants entraîne une variété de leurs répertoires verbaux. En fait, le français, médium d’enseignement et instrument efficace pour l’insertion socioprofessionnelle, détient, en tant que langue additionnelle du malgache officiel, une légitimité linguistique. Les normes prescriptives (véhiculées essentiellement par l’apprentissage formel dans les écoles primaires et les usages institutionnalisés) et les normes évaluatives (découlant principalement des attitudes positives des acteurs susmentionnés vis-à-vis de l’ouverture biplurilingue) renforcent en partie l’acquisition du français de référence. 45 RUI Blandine Des enfants racontent : Entre oralité et scripturalité en contexte diglossique guinéen. Le travail qui sera présenté s’inscrit à l'intérieur de l'action de recherche "Incidences du multilinguisme sur les compétences en français des élèves guinéens en fin de cycle primaire" financée par l'Agence Universitaire de la Francophonie (programme 2002- 2004) et menée en réseau par les universités de Conakry (Guinée), de Franche-Comté (Canada), de Provence (Canada) et de Montréal (Canada). Je me propose d’interroger de manière croisée les caractéristiques textuelles, discursives, interactionnelles, culturelles des mises en récit individuelles orales et écrites de huit écoliers guinéens de Conakry en fin de scolarité primaire. Autrement dit, c’est l’analyse, (sous forme d’études de cas) des relations entre compétences narratives orales et écrites en français de chacun de ces sujets plurilingues qui nous intéressera. Les récits oraux et écrits analysés et mis en relation ont été produits en situations expérimentales assimilées assez fortement par les enfants à des situations scolaires. Le propos sera fondamentalement didactique. En, effet, je fais l’hypothèse que les résultats d’analyse, bien que non représentatifs et non généralisables, peuvent être plus que de simples indicateurs pour une étude ultérieure plus quantitative sur corpus vaste. Ce sont, à mon sens, déjà des éléments de réflexion intéressants pour contribuer à bâtir, en contexte multilingue guinéen, une didactique des langues intégrée et intégrative, fondée notamment sur un principe de continuité entre oralité et scripturalité. 46 SANOGO Mamadou Lamine : Le bilinguisme de transfert dans un contexte diglossique : Les écoles bilingues de Tin-Tua (Fada Ngourma, Burkina Faso) L’une des expériences de l’enseignement bilingue les plus anciennes au Burkina Faso, le programme PAG (Programme d’Alphabétisation dans le Gulmu) a enregistré de très bons résultats scolaires en présentant ses élèves aux examens officiels en français. Pourtant, cette scolarisation qui a commencé en langue nationale gulmance dans la plupart des centres a été confrontée à d’énormes difficultés, comme la perception péjorative des langues d’enseignement des deux premières années et le manque de matériel didactique en langue africaine. Aujourd’hui, sans doute, l’un des pionniers dans son domaine, le PAG excelle surtout par son programme d’enseignement du français au néo-alphabétisés, à telle enseigne que son expérience fait l’objet d’analyse en vue de sa généralisation. Il existe bien d’autres programmes d’enseignement du français aux néo-alphabétisés en langue nationale au Burkina Faso. La présentation de ces différents programmes a fait l’objet d’une communication aux journées scientifiques du Libreville en mars 2003. Nous nous proposons de présenter l’expérience du PAG, en nous fondant sur ses fondements scientifiques, ses acquis et ses difficultés. Appelée méthode TIN-TUA, cette expérience d’enseignement du français à partir des acquis en langue nationale repose surtout sur la maîtrise d’un français fonctionnel, un français oral. Cependant, elle a changé la vie de nombreux adolescents, et mérite de faire l’objet de recherches approfondies, pour éviter des dérives qui pourraient survenir du fait de sa généralisation. Les partisans d’une généralisation systématique de l’enseignement bilingue au Burkina Faso n’ont sans doute pas tenu compte de tout l’environnement de ces écoles (maîtres bien formés, motivations diverses, cantines scolaires, …). Si la scolarisation du tout en français a montré ses limites, une généralisation de l’expérience bilingue ne nécessite-elle pas une étude appropriée ? 47 SAWADOGO François, LEGROS Denis & Emmanuelle MAITRE de PEMBROKE : Quelle place pour la langue maternelle Mooré (L1) dans la construction et la production de connaissance via la langue française (L2) à l’école au Burkina Faso ? Le rôle et la place des langues maternelles dans les situations d’enseignement diglossique, notamment les systèmes d’enseignement francophone d’Afrique comme c’est le cas au Burkina Faso, suscitent beaucoup d’interrogations quant à l’acquisition de la langue L2 et son instrumentalisation (Noyau & Cissé (2001, à paraître). Fondée sur le cadre théorique de la sémantique cognitive et le paradigme expérimental de l’analyse en système, la présente recherche, menée au Burkina Faso autour d’une tâche de la vie quotidienne “ comment faire chauffer l’eau ”, étudie l’effet de l’utilisation du mooré langue maternelle (L1) sur l’activation des connaissances et leur verbalisation en français (L2). Nous situant dans le champ de la sémantique cognitive (Jamet, Legros & Pudelko, 2004), nous considérons que les représentations langagières des objets et des procédures sont déterminées par les représentations sémantiques dont elles dépendent. Nous avons étudié l’acquisition et la construction des connaissances sur une procédure en utilisant comme matériaux les productions verbales des sujets. Nous avons analysé la procédure “ comment faire chauffer l’eau ” comme un système avec ses sous systèmes, en fonction des buts et des sous buts du sujet (Legros, Baudet, & Denhière, 1994). L’expérimentation menée avec 104 élèves du primaire de niveau CM1 de la ville de Ouagadougou a consisté en l’activation de connaissances à l’oral dans deux conditions expérimentales L1 vs L2 suivie d’une production verbale écrite en L2. L’analyse comparative des productions écrites des deux groupes expérimentaux montre que les verbalisations orales en L1 sur une tâche de la vie quotidienne ont un effet positif sur l’activation de connaissances et la production écrite sur la dite tâche en L2. Les résultats apportent des arguments forts à la réflexion didactique, notamment par rapport aux effets sur l’apprentissage en situation de bilinguisme à l’école. La langue maternelle n’interfère pas de manière négative dans l’acquisition et la construction de connaissance en langue seconde comme on a pu l’avancer. Au contraire si elle est valorisée et bien utilisée dans la relation pédagogique, elle permet une activation des connaissances construites dans le contexte culturel et linguistique de l’élève et donc une meilleure et plus efficace structuration des représentations sémantiques (Legros, Maître de Pembroke, & Acuna, 2004). Ce qui a un effet facilitateur sur l’acquisition de la langue seconde et la production de connaissances dans cette langue L2. 48 SIMARD Yves : L’école guinéenne et l’acquisition de la morphosyntaxe du français oral Nos travaux actuels portent sur les variations morphosyntaxiques qu’a pu connaître le français depuis le XVIIè siècle lorsque s’il s’est retrouvé coupé de la norme centrale ou en situation de langues en contact. Ces recherches sont centrées sur l’évolution ou la variation des formes verbales telle qu’elle se manifeste dans les français à norme endogène, dans les parlers véhiculaires, principalement en Afrique, ainsi que dans ce qu’il est convenu d’appeler des créoles. Comme au plan morphosyntaxique les changements se situent principalement aux niveaux de la délimitation de l’unité lexicale verbale – valence et rection -, des marqueurs de conjugaison – personne, temps, auxiliaires aspecto-temporels -, et des pronoms clitiques compléments, l’analyse porte donc en priorité sur ces quelques points. Dans le cadre de cette recherche, nous avons comparé les formes verbales relevées dans des productions orales de jeunes locuteurs de Conakry peu ou pas scolarisés avec celles d’élèves du primaire et du collège. La thématique de ce colloque étant l’appropriation du français et la construction des connaissances via la scolarisation en situation diglossique, il nous semble tout à fait pertinent d’y présenter les résultats de cette étude particulière puisqu’elle permet de voir ce que l’école a appris à ces enfants à l’oral. Avec les résultats obtenus par cette comparaison de productions d’élèves et de jeunes locuteurs peu ou pas scolarisés, nous tenterons de dégager le statut de l’oral dans l’apprentissage scolaire du français en Guinée. Nous pensons pouvoir étendre le constat à l’ensemble de la Guinée car l’échantillon analysé ne comporte pas seulement des élèves de Conakry mais aussi des élèves habitant d’autres régions de ce pays. 49 SOMÉ Maxime : Analyse comparative des productions écrites des élèves : Éducation bilingue Vs Éducation monolingue. Cas du Burkina Faso, l’éducation bilingue, une alternative au système éducatif de base ? Le constat est accablant dans l’Afrique francophone notamment au Sud du Sahara. Le système éducatif n’arrive pas à scolariser l’ensemble des enfants en âge de l’être. Une quarantaine d’années après les indépendances, une enquête réalisée par la CONFEMEN en 1991 confirme l’échec de la francisation de la société et du système éducatif. Cette enquête montre que 96% des enfants scolarisés parlent le français avec leur maître en classe. Dans la cour de récréation, seulement 48% parlent le français avec le maître ou avec leurs camarades. En dehors de l’école, 28% parlent le français entre eux et seulement 20% emploient le français avec le père et 10% avec la mère. Contre toute attente, à la fin des années 90, les États ont mis en place des « Programmes Décennaux d’Education de Base » caractérisés par le « tout en français ». Ces nouveaux programmes ambitionnent de scolariser entre 60 à 70% des enfants en 10 ans et d’alphabétiser 40% des adultes. Toutefois on peut déjà s’interroger sur les conditions de mise en place de ces programmes. Les premières observations permettent malheureusement de prévoir que la précipitation de la mise en place de ces programmes va générer les germes de leur futur échec. Dans des communications ou publications précédentes, nous avons montré les avantages socio-économiques, culturelles et psychologiques de la mise en place d’une éducation bilingue : langue africaine/français. D’une façon empirique on avait anticipé sur les acquisitions et l’appropriation du français par les jeunes apprenants. PROTOCOLE : À partir des données du terrain ( sur les 13 régions du pays en zone rurale) en 2003 et 2004, nous proposons aujourd’hui, une analyse comparative des productions écrites des élèves de 5ème année d’école bilingue (CM2) avec des celles des élèves de 6ème année d’école monolingue (CM2). - corpus proposé pour la production écrite : les oisillons - analyse des récits - ANALYSE MACRO-STRUCTURALE - structure du récit en phases et en épisodes narratifs - trame narrative/arrière plan 2) ANALYSE MICRO-SEMANTIQUE - référence aux personnages (participants au procès) - référenciation temporelle - structure relationnelle du texte L’actuel système éducatif monolingue dans les pays africains propose une scolarisation des enfants à partir de 7 ans. Mais en réalité l’élite scolarise sa progéniture dès l’âge de 5 à 6 ans. Nul ne peut nier que le contexte familial est très déterminant dans cette situation. Ces enfants vivent dans un environnement familial où le français est déjà une réalité linguistique. Toutefois, tout ceci nous montre l’incapacité du système à scolariser l’ensemble des enfants du pays. Dans un système d’éducation bilingue, chaque enfant du pays – de toute origine sociale et de tout milieu de vie- pourrait être scolarisé dès l’âge de 6 ans dans sa langue première les deux premières années de sa scolarisation. 50 L’actuel système éducatif propose un enseignement de base sur trois cycles en six ans. L’ensemble de l’école primaire porte théoriquement sur six ans, mais la réalité est autrement plus triste, car nous avons beaucoup d’abandons scolaires et de redoublements. Le choix de maintenir la scolarité du primaire sur une période de six ans était justifié par le fait que le français était enseigné comme une langue maternelle, or tous les pédagogues sont conscients que le français n’est pas une langue maternelle, cela explique cette prolongation d’une année. Nous connaissons, tous, la situation de l’enseignement du français actuellement en Afrique et celle du système éducatif. Par conséquent, il y a une nécessité de repenser tout l’ensemble, car le système éducatif actuel n’a pas éradiqué réellement l’illettrisme dans les pays africains. L’analyse des données recueillies sur le terrain montre de manière non empirique que l’éducation bilingue est une alternative au système éducatif de base en Afrique. Les Facultés des Lettres et Sciences humaines, les écoles normales et les écoles normales supérieures sous l’impulsion des autorités devraient-elle mettre des formations sur la didactique du français et des langues africaines. C’est la situation qui nous impose de proposer un aménagement du système éducatif. Un tel aménagement linguistique permettrait de mettre en place une éducation bilingue dans l’enseignement primaire. Il présenterait également plusieurs avantages, notamment d’ordre psycho-pédagogique, didactique, économique… 51 TIRVASSEN Rada : Pratiques langagières et représentations sociolinguistiques en milieu scolaire mauricien. L’apport de la sociolinguistique à la compréhension de l’école dans sa dimension linguistique est indéniable. De la démystification de la norme scolaire à l’aménagement linguistique en passant par les notions de compétence de communication, de sécurité/insécurité linguistique , etc., la sociolinguistique a contribué à une compréhension plus fine de la question du langage en milieu scolaire. On peut toutefois penser que la légitimité du discours sociolinguistique sur l’école se trouverait renforcée si ses travaux s’inscrivaient dans deux démarches précises. Il lui faudrait d’abord offrir un réel statut de locuteur (doté de représentations sociolinguistiques) à l’enfant-apprenant, en particulier lors de la phase de son entrée dans le bilinguisme, étape incontournable pour la grande majorité des enfants des pays du sud. Ensuite, sur le plan théorique, il lui est nécessaire d’interroger ses concepts les plus féconds pour évaluer leur adéquation au contexte scolaire. C’est en tout cas les préoccupations que nous nous sommes données dans le cadre de cette communication. Sur le plan empirique, cette communication rendra compte de deux types d’enquêtes que nous menons. Le premier portera sur l’entrée dans le bilinguisme d’enfants ayant le créole comme première langue et qui sont scolarisés dans des écoles maternelles où le français est la langue de scolarisation. Il s’agira, pour reprendre les termes de l’appel à communications, d’observer les pratiques langagières d’enfants élèves (créolophones) dans des écoles francophones afin de dégager les types d’interactions dans lesquels ils sont impliqués, tant en situation formelle que hors la salle de classe, où les contraintes sont différentes, avant que l’on analyse quelques-unes des caractéristiques morpho-syntaxiques et lexicales de leurs productions en français. Par ailleurs nous menons des enquêtes sur les représentations des principaux acteurs concernés par le système éducatif mauricien, afin de déterminer les significations que les acteurs de l’école se construisent d’elle (dans sa dimension linguistique), et surtout de vérifier si les enfants (en début de scolarisation) ont déjà développé des phénomènes de représentations sociolinguistiques. Si tel est le cas, il faudrait alors se demander s’ils se construisent les mêmes significations que leurs parents. On peut toutefois penser que, tant pour la recherche que pour d’éventuelles applications concrètes, la démarche qui consiste à observer les pratiques langagières d’enfants entrant dans le bilinguisme, et la tentative de faire émerger les représentations, ne peuvent être intéressantes que si l’on esquisse une conceptualisation des données brutes recueillies. Une première approche pourrait nous amener à nous poser la question de l’adéquation du concept de diglossie, et de ses limites, pour rendre compte de la gestion des langues dans l’environnement scolaire, tant par l’institution que par les deux catégories d’acteurs que sont les enseignants et les enfants-apprenants. On sait que ce concept est fréquemment associé avec l’école dans les pays qui ont connu la colonisation. Un exemple parmi d’autres est la caractérisation de l’école comme le lieu qui cristallise la diglossie (R. Chaudenson : 1983). Pour en revenir aux objectifs de notre communication, nous sommes en effet d’avis qu’il est nécessaire non seulement de dégager les aspects majeurs qui caractérisent les représentations sociolinguistiques des acteurs de l’école, de tenter d’établir un lien entre elles et la réalité sociale, mais aussi de déterminer l’aire de conceptualisation de la diglossie (quand on l’applique à l’école) ainsi que ses limites. 52 TRÉFAULT Thierry : L’enfants scolarisé en milieu rural bambarophone (Mali). L’entrée dans l’écriture en langue nationale et en français. Le corpus qui nourrit cette communication est composé d’observations in situ de nombreux moments de classe menés dans les écoles bilingues rurales de la région de Ségou (Mali), de tests d’élèves scolarisés, de jeunes et d’adultes alphabétisés, ainsi que d’entretiens de parents d’élèves et d’enseignants. Ces travaux ont été réalisés entre 1996 et 1998 dans le cadre d’une thèse de doctorat, et ont depuis été réactualisés par de fréquents séjours dans le même milieu (2001 et 2004 principalement), et par une recherche actuellement en cours avec l’équipe DIDAXIS de Montpellier. Le matériau empirique est composé : de tests d’écriture inventée (au sens où l’entendent Emilia Ferreiro ou Jacques Fijalkow) en langue nationale, ici le bambara ; ces tests ont été menés en 1997 auprès d’échantillons représentatifs d’élèves, et de classes entières de 3ème année dans cinq écoles bilingues rurales du Mali, de test de lecture et de production d’écrits dans les classes de 5 ème et 6ème années des mêmes écoles. Les résultats des tests de 3ème année montrent qu’au moment où les élèves abordent l’apprentissage de la lecture en français, les compétences acquises en bambara sont loin d’être suffisantes pour assurer le passage à la langue seconde. Si les correspondances graphie/phonie sont maîtrisées, il n’en est pas de même pour la compréhension du principe alphabétique, des liens entre l’oral et l’écrit et de l’utilité sociale de la lecture. Les tests complémentaires dans les classes supérieures tendent à révéler l’existence de seuils (au sens des « Thresholds » définis par James Cummins) en deçà desquels l’entrée dans la langue seconde peut se révéler très précaire. Si les « compétences académiques », et notamment les capacités métalinguistiques, conditions d’un bilinguisme « additif », ne sont pas suffisamment développées, le passage au français est problématique. Dans les classes de 3ème année, un grand nombre d’élève (en proportion variable suivant les écoles) ne parvient pas à faire le lien entre le laborieux exercice de récitation qui tient lieu d’apprentissage de la lecture et la logique de l’écrit, en tant que mode nouveau et différent de transmission des messages. Ils risquent à la fois de ne pas accéder à la lecture en langue seconde, et aussi de perdre leur aptitude à lire la langue maternelle. En 6ème année, on trouve une faible proportion d’élèves lecteurs en français, et ayant conservé l’aptitude à lire en bambara, même en l’absence de pratique pendant plusieurs années. Les compétences métalinguistiques, en tant que capacité réflexive sur la langue première orale, sont développées dans l’éducation traditionnelle par les paroles rituelles ou les jeux de parole : les devinettes, les proverbes, les contes et les salutations développant respectivement la métaphore, l’ellipse, l’inférence, la structure narrative et les capacités communicatives. Mais ce type d’échanges linguistiques en langue nationale n’est en général ni repris ni valorisé par l’école bilingue, même si la « pédagogie convergente », modèle préconisé actuellement, leur accorde une certaine place. Aussi, les nouveaux curricula proposent d’autres « convergences » pour la didactique de la lecture/écriture, partant de l’étude contrastive des langues avec une didactique de la langue nationale préparant (au niveau grammatical et lexical) à l’enseignement du français. Elle devrait aboutir à un meilleur développement des compétences bilingues pour les enfants scolarisés. 53 VERDELHAN Michèle : L’enfant, le langage et la classe : étude de cas au Mali Le Mali présente une situation intéressante en matière d’étude de la scolarisation en français. Pays de l’ex-champ colonial français, les apprentissages scolaires étaient mis en place en français dès l’entrée à l’école. Des expériences dites de pédagogie convergente, mêlant rénovation méthodologique et introduction d’apprentissages en langue nationale ont été menées depuis plus de 20 ans. Une réforme éducative de grande ampleur a étendu récemment à tout le pays l’entrée en scolarisation par les langues nationales. L’étude présentée ici converge avec un programme de recherche sur la relation entre enseignement du français et des langues nationales au Mali. Le corpus utilisé pour cette communication consiste principalement en en observations de classes de langage, de maths et de français, dans des écoles de Bamako et alentours, en octobre 2002 et avril 2003. Un corpus secondaire est fait d’enregistrements d’entretiens avec des élèves-maîtres de deux IFM, en février 2004. Dans les observations de classe, on s’intéressera aux comportements langagiers des élèves, à la relation qu’ils manifestent vis-à-vis du savoir scolaire et de la manière dont s’établit le rapport au maître et à ce qu’il enseigne. On mettra ces observations en relation avec la méthodologie adoptée dans chaque cas. On cherchera ainsi à répondre à quelques questions : quelles occasions les élèves ont-ils de parler en français en classe ? A quelles productions linguistiques sont-ils incités et avec quel résultat ? Ont-ils des comportements langagiers différents en classe de bamanankan et en classe de français ? Si, oui, en quoi ? Est-ce lié à la manière dont l’enseignant procède dans son enseignement ? Y a-t-il d’ailleurs différence méthodologique entre la classe faite en bamanakan et celle de français ? Peut-on enseigner la langue 2 comme la langue 1 ? La « convergence » prônée par la théorie ne trouve-t-elle pas là une de ses limites ? Pour expliquer le comportement langagier des enfants, ne faut-il pas aussi s’intéresser au rapport que les maîtres entretiennent avec le langage et les langues ? Le corpus IFM donne des indications sur la représentation que se font les futurs enseignants de leur rapport aux langues qu’ils devront enseigner, français ou langues nationales. Ce rapport est complexe, variable selon les personnes, leurs origines, leur formation. Les degrés d’implication dans l’enseignement des langues nationales sont également très variables et traduisent des stades très divers en matière de maîtrise de ces langues. Ce sont en fait les relations entre les performances langagières des élèves, la méthodologie employée par les maîtres et le positionnement des enseignants par rapport aux langues à enseigner qui sont ici objets d’attention. En l’état actuel du travail, on ne cherchera pas à tirer de conclusions trop fermes de ce croisement d’observations, mais plutôt de nouveaux questionnements sur quelques facteurs de réussite scolaire en langue seconde dans un environnement diglossique. 54 INDEX NOM DES COMMUNICANTS AFOLA-AMEY Ufualè Christine AMEGASHIE Komla ANCIAUX Frédéric ARRAICHI Rachid AVOLONTO Aimé AYEVO Jean Yaovi AYEWA Noël Kouassi BAGOUENDI-BAGERE Diane BECUWE Jacques BEDOU-JONDOH Edith BEYOM Robert BITJAA KODY Zachée Denis BURGAT Sandrine BURSTON Monique COURRIEL [email protected] kanmt6@voilà.fr [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] BWANGA Zanzi Jean-Pierre [email protected] CISSE Alilou S. CORDIER Muriel DAFF Moussa DIALLO Mamadou Saliou DIOUF Mayé Mboul [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] martine.dreyfus@ montpellier.iufm.fr [email protected] [email protected] [email protected] yann-vigile.hoareau@ laposte.net [email protected] DREYFUS Martine FILLOL Véronique FLORIGNY Guilhem GBETO Souley Kossi HOAREAU Yann ITALIA Magali KOUADIO N’GUESSAN Jérémie KUBE Sabine LE ROHELLEC Solange LEGROS Denis MAITRE DE PEMBROKE Emmanuelle MALLAM GARBA Maman MASSOUMOU Omer [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] 55 UNIVERSITE Lomé, Togo Lomé, Togo Antilles-Guyane Casablanca, Maroc York, Toronto Libreville, Gabon Cocody, Abidjan Provence Pau Lomé, Togo Bangui, Centrafrique Yaoundé, Cameroun Paris VIII Philadelphia, USA Lumumbashi, Congo RDC Lomé, Togo Paris VIII Dakar, Sénégal Conakry, Guinée Paris X IUFM Montpellier Nouvelle-Calédonie Paris X Lomé, Togo Paris VIII Provence Abidjan, Côte d’Ivoire Leipzig, Allemagne Montpellier 3 Paris VIII Paris VIII Niamey, Niger Brazzaville, Congo NOCUS Isabelle ONGUENE ESSONO Louis Martin PEUVERGNE Julie [email protected] RANAIVO Velomihanta [email protected] RANDRIAMAROTSIMBA Vololona RANDRIAMASITIANA Gil Dany RUI Blandine SALAUN Marie SANOGO Mamadou Lamine SAWADOGO François SIMARD Yves SOMÉ Maxime TIRVASSEN Rada TRÉFAULT Thierry VERDELHAN Michèle VERNAUDON Jacques [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] marie.salaun@ paris5.sorbonne.fr Nantes Yaoundé, Cameroun Paris X Antananarive, Madagascar Antananarive, Madagascar Antananarive, Madagascar Franche-Comté Paris V Ouagadougou, Burkina Faso Ouagadougou, [email protected] Burkina Faso [email protected] Franche-Comté [email protected] Paris X [email protected] MIE, Ile Maurice [email protected] Montpellier 3 [email protected] Montpellier 3 [email protected] Nouvelle-Calédonie [email protected] 56