C`est pas sorcier - Espace Educatif

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Dans le cadre de la préparation d'un mémoire de Master 2 « Recherches en information
Communication » sur l'indexation de l'audiovisuel, Marie Dominique Le Guillou, documentaliste, a
fait un stage d'un mois et demi au centre de documentation de C'est Pas Sorcier, en juin et juillet
2007.
« C'est Pas Sorcier »
Chercher, comprendre, expliquer
Accueillie par Laurence Le Bon, documentaliste, elle a pu suivre toutes les étapes de la
réalisation de l'émission et retrace ce long cheminement.
Après plus de 15 ans d'existence, l'émission qui a raflé de nombreux prix, rencontre toujours le
même succès tant auprès des jeunes que des adultes. Modèle de vulgarisation, elle est plébiscitée
par les scientifiques et les spécialistes des domaines traités.
En suivant la démarche de Marianne Cramer, l'une des journalistes de « C'est Pas Sorcier » ,
nous entrons dans les coulisses de la réalisation d'une émission.
Cerner le sujet et chercher l'information
Quand un sujet est confié à Marianne, elle échange pendant environ une heure avec le
rédacteur en chef qui exprime les idées ainsi que les pistes qu'il imagine et trace avec elle les lignes
directrices de son travail. Elle dispose alors de trois mois pour rendre la copie finale.
Après cet échange, Marianne entame un long processus de collecte d'informations. Elle
commande beaucoup d'ouvrages et fait des recherches sur Internet. Il faut lire énormément pour
comprendre un sujet lorsqu'on n'en est pas spécialiste. Avant de commencer les interviews, elle
préfère maîtriser le sujet.
Ce n'est que lorsqu'elle estime avoir suffisamment de connaissances, qu'elle contacte des
spécialistes, des personnes ressources à divers titres. Lors de ces échanges, elle discute des points
qui restent obscurs et se renseigne sur d'éventuels lieux de tournage. Ainsi, au fur et à mesure des
contacts, les lieux où vont être filmés les extérieurs se précisent.
Après avoir cherché les informations et accumulé les connaissances, Marianne laisse
décanter avant de se mettre à écrire.
Choisir les informations et faire un plan
Pour traiter un sujet, il faut d'abord décider de l'angle d'attaque.
L'hydrogène a ainsi été présenté comme l'énergie du futur pour la voiture, le téléphone.
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« L'hydrogène : le combustible du futur ? » L'émission sur la métrologie a été consacrée à 3
mesures. « Mètre, kilo, seconde : les Sorciers prennent des mesures »
Elle rédige alors une première trame, organise le sujet en parties, les ordonne et aboutit à un
document d'environ deux pages. Chaque partie comporte les informations clés à développer et des
précisions sur les actions, les lieux de tournages...
L'enchaînement entre les séquences est important et peut changer plus d'une vingtaine de
fois.
Lorsque le plan lui semble cohérent, elle se lance dans l'écriture d'un premier jet, relis,
remplis les trous, laisse encore décanter puis reprend à nouveau son texte.
Marianne travaille sur l'émission : « L'hydrogène : le combustible du futur ? »
L'étalement du travail sur trois mois lui convient. Collaborant à plusieurs magazines de
presse et de télévision et travaillant sur plusieurs projets parallèlement, elle apprécie de changer de
sujet. Tout en s'occupant d'un autre article ou d'une autre émission, elle glane de nouvelles
informations, de nouveaux contacts. Des idées lui viennent à l'esprit qu'elle intègre aux séquences.
Expliquer avec des mots et des images
Après cette étape de « débroussaillage », elle affine l'écriture du pré-scénario qui comprend
environ trente séquences, réparties entre
- les « plateaux extérieurs » animés par Fred ou Sabine,
- le « camion » où Jamy donne ses explications à l'aide des maquettes,
- les « sujets » , présentés par la Petite Voix et qui apportent des informations
complémentaires
Dès cette étape, il faut penser en images. C'est la grande différence avec la presse écrite. Le
pré-scénario est à la fois une explication du sujet, une présentation de la succession des séquences et
une première proposition de visualisation du sujet.
Marianne rédige entre cinq à sept versions avant d'aboutir à la proposition qu'elle remettra à
la rédaction .
Du pré-scénario au scénario : un travail d'équipe exigeant
Son document est alors étudié au cours de la réunion pré-scénario qui dure environ 4 heures.
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Elle est sur la sellette, et doit répondre à toutes les questions de l'équipe de rédaction qui a pris
connaissance de sa proposition. C'est un moment stressant, comme le passage d'un grand oral.
Ce pré-scénario est épluché, trituré, étudié sous toutes les coutures et cette séance de
questions/réponses, permet à chacun d'explorer et de comprendre le sujet. Il faut aussi se mettre à la
place du public pour étudier ensuite la mise en scène des explications.
Cet échange est très impressionnant par la densité des débats et l'exigence extrême de clarté.
Les présentateurs, ne se contentent pas de lire un texte écrit par les journalistes mais veulent
maîtriser parfaitement ce qu'ils vont ensuite devoir expliquer au public.
Elle reconnaît, comme d'autres journalistes, avoir été impressionnée par l'exigence de
l'équipe. Le texte ainsi que les propositions visuelles sont analysées très précisément. Rien n'est
laissé au hasard. Même si elle ressort parfois de la réunion, découragée, avec de nombreuses
modifications à faire, elle reconnaît la pertinence des remarques qui font évoluer sa proposition.
Selon les sujets, les modifications sont plus ou moins importantes : des plateaux peuvent devenir
des sujets, l'ordre peut bouger...Mais à la fin de cette réunion, la succession des séquences est
arrêtée.
Selon Marianne, C'est Pas Sorcier est une très bonne école pour apprendre à construire une
émission. On y apprend en particulier la rigueur : toutes les informations doivent être vérifiées et
validées par plusieurs sources, aucune approximation n'est possible.
L'écriture du scénario définitif qui suit cette réunion doit intégrer toutes les modifications
décidées.
Il faut alors prendre de nouveaux contacts, faire de nouvelles recherches pour compléter les
informations. Une validation par des spécialistes est nécessaire. Même si dans le domaine
scientifique on ne peut jamais parler de certitude, les notions sont expliquées en tenant compte de
l'état des connaissances à ce moment donné et si des désaccords entre scientifiques existent, il faut
en tenir compte et relativiser.
C'est Pas Sorcier est bien perçu par les scientifiques qui acceptent facilement d'intervenir.
Mais il faut cependant mesurer la capacité de communication du spécialiste. Quelqu'un qui connaît
parfaitement un sujet ne sait pas forcément l'expliquer clairement. Cette émission est très suivie par
les jeunes et le langage doit leur être accessible.
A cette étape, environ deux semaines avant la réunion scénario, le réalisateur est choisi avec
qui elle travaillera désormais étroitement. Un binôme journaliste-réalisateur se constitue alors. Cette
collaboration orientera la version définitive du scénario. Ils font ensemble les repérages des lieux de
tournage et décident des mises en scène. Le but de la scénarisation est de faciliter la compréhension
du sujet et l'écriture du scénario est guidée par cette exigence.
Marianne prépare alors un texte de base pour les présentateurs Fred, Sabine et Jamy qui
ensuite l'adaptent.
Avant le tournage de la séquence, ils font également relire leur version par le journaliste qui
par sa connaissance du sujet devient également une caution scientifique. Là aussi, les échanges
entre tous les membres de l'équipe sont importants.
L'écriture est différente selon les journalistes : certains ont une âme de dialoguiste et
rédigent tout ce que disent les présentateurs sous forme de dialogues. D'autres écrivent sous forme
de sujet.
Le scénario détaillé et précis, tenant compte de tous les paramètres, est alors soumis à la
rédaction qui l'explore à nouveau au cours d'une réunion tout aussi dense que la précédente. Toutes
les informations sont à nouveau passées au crible et décortiquées jusqu'à ce que la moindre zone
d'ombres soit éclaircie. Chacun doit comprendre toutes les informations données et le journaliste
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doit être capable d'apporter les éclaircissements demandés. Les ébauches des maquettes et des
illustrations graphiques étayant les explications sont présentées.
Après cette réunion, il reste quelques dernières modifications à faire et il faut organiser
précisément le tournage. En fonction des contraintes de lieux, de temps, d'argent, de logistique
matérielle, de disponibilités des personnes, paramètres que connaît le journaliste, le réalisateur
prévoit avec ce dernier les plans de travail.
Les maquettes pour Jamy
Parallèlement, les maquettes, qui seront utilisées par Jamy pour ses explications et qui ont
été prévues dans le scénario, ont été dessinées par le chef d'édition en collaboration avec David
Mahé, le maquettiste et véritable magicien. Elles sont étudiées attentivement lors de deux autres
réunions : la réunion pré-maquettes et la réunion maquettes. Une travail extrêmement important de
visualisation de notions théoriques est mené par chacun qui sera concrétisé par le maquettiste. Les
maquettes qui font l'admiration de beaucoup de fans de C'est Pas Sorcier, sont une composante très
importante de l'émission.
Préparation d'une maquette pour l'émission sur les mouches
Le tournage des extérieurs avec Fred et Sabine
Un autre aspect du travail qui plaît à Marianne, c'est le rôle de coordinateur qu'elle doit jouer
dans l'organisation du tournage. Un journaliste à C'est Pas Sorcier doit être multitâches et pouvoir
donner toutes les informations indispensables au bon déroulement du tournage. C'est lui qui a tous
les éléments en tête pour la coordination de la réalisation. Il est à la charnière entre la production,
l'équipe de rédaction, l'équipe de tournage et les intervenants. Il assure ainsi la régie, comme le
paiement des factures par exemple. Il choisit les intervenants et doit être capable de tenir compte
des contraintes et des disponibilités de chacun et en particulier des emplois du temps et du budget.
Un tournage en extérieur dure environ 3 jours, les lieux doivent donc ne pas être trop éloignés les
uns des autres.
Mais le vrai responsable du tournage, reste le réalisateur.
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Les « sujets » avec la Petite Voix et le rôle de la documentaliste
Le scénario déroule une alternance entre les plateaux extérieurs, les manipulations de Jamy
mais aussi les « sujets » qui sont des montages d'images, achetées pour la plupart auprès d'autres
organismes et commentés par la Petite Voix. Ces « sujet »s ont pour objectif d'apporter des
informations complémentaires ou des éclaircissements.
Marianne rencontre alors Laurence, la documentaliste qui travaille pour C'est Pas Sorcier
depuis le début de l'émission, et discute avec elle des images nécessaires à leur illustration. Dès le
lancement d'un projet, Laurence suit l'évolution des textes. Avant de prendre les premiers contacts
avec les banques images, elle étudie très attentivement le scénario. A partir d'un budget défini avec
la production, elle mène alors la recherche des images nécessaires dans le monde entier : auprès des
sociétés de production, des organismes patrimoniaux, des télévisions, des entreprises, des
laboratoires de recherches...Kharbine Tapabor pour les images fixes, le service de documentation de
France 3, l'INA, Gaumont-Pathé pour les images animées, font partie des services fréquemment
sollicités par Laurence.
Laurence Le Bon, documentaliste à C'est Pas Sorcier
Les images trouvées et choisies influencent la rédaction du « sujet ». Le rôle de la
documentaliste à ce niveau est déterminant. Idéalement, les journalistes devraient d'abord tenir
compte des images disponibles ou achetables avant d'écrire. Ce n'est malheureusement pas toujours
le cas et ils rédigent souvent avant de s'en inquiéter.. Les images demandées sont alors parfois
introuvables ou trop chères et les textes doivent être réécrits et adaptés aux ressources visuelles
disponibles.
Par ailleurs, la documentaliste a parfois connaissance d'images qui peuvent enrichir le
« sujet » et orienter sa rédaction. Pour ces choix, elle tient compte de l'identité visuelle de
l'émission. La rédaction du « sujet » devrait se faire dans un aller-retour permanent entre écriture et
images.
Selon Marianne, Laurence écrit les « sujets » par les images qu'elle propose.
Les images fixes sont dynamisées par des zooms ou d'autres effets à l'infographie.
Actuellement les émissions présentent régulièrement un point historique, ce qui n'était pas
le cas auparavant. L'interrogation des banques images comme l'INA, Gaumont-Pathé est donc
devenue incontournable. A ce niveau les négociations financières sont très importantes.
Les « sujets », apportant des explications complémentaires, doivent s'articuler parfaitement
avec les autres parties.
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Dernières étapes
Enfin, il faut assembler l'ensemble des parties, mixer le son, étalonner les couleurs avant de
visionner le résultat final et de proposer l'émission à la chaîne qui donnera ou non son accord à la
diffusion.
Marianne souligne l'intensité des échanges qui ponctuent la réalisation d'une émission C'est
Pas Sorcier. C'est un véritable travail collectif qui s'articule autour du journaliste.
Qui est Marianne Cramer ?
Biographie (2007)
Marianne a 27 ans.
Titulaire d'un DESS de journalisme scientifique obtenu à Paris 7 en 2005. Journaliste pigiste
dans le domaine scientifique, elle travaille pour plusieurs magazines de presse écrite et pour
la télévision.
Elle collabore depuis maintenant 2 ans à C'est Pas Sorcier
Elle a travaillé sur les émissions :
- Roller, skate, BMX : comme sur des roulettes !
- Mètre, kilo, seconde : les sorciers prennent des mesures
- L’hydrogène, combustible du futur ?
- Les textiles du futur (titre provisoire)
- Le diabète (titre provisoire)
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