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Beaucoup de théologiens catholiques contemporains ont admis que le dogme de la Trinité n’est rien de
plus qu’une réaction aux dissensions qui se sont produites au début du Christianisme, comme la
controverse arienne du quatrième siècle. Dans son livre primé, God for Us : The Trinity and Christian
Life[11], la théologienne Catherine Mowry LaCugna reconnaît que, de l’époque du Nouveau Testament à
nos jours, la compréhension de la nature de Dieu chez les chrétiens a considérablement évolué et que la
préférence marquée par Augustin « pour le concevoir, et parler de lui comme d’une Trinité...
‘défonctionnalise’ la façon dont la Bible et les confessions religieuses parlent de Dieu[12] ». En effet, la
conception chrétienne traditionnelle de Dieu est tellement déformée quand on la compare aux idées des
premiers chrétiens (que l’on trouve dans le Nouveau Testament et les écrits patristiques) que des érudits
tels que le théologien allemand influent Karl Rahner déclarent que si la doctrine tout entière de la Trinité
était rejetée comme fausse, la majeure partie de la littérature religieuse resterait virtuellement
inchangée[13]. L’exégète biblique Philip B. Harner note que dans « les deux premiers siècles de notre
ère... la doctrine spécifique de la Trinité n’était pas encore formulée » et que les « premiers chrétiens...
croyaient apparemment en ‘deux pouvoirs’ dans le ciel, à savoir Jésus et Dieu[14] ». Même Jean-Paul II,
le pontife actuel, reconnaît que la formulation du credo de Nicée-Constantinople était une réaction à
l’hellénisation de l’Église et à la nécessité de trouver « une manière de présenter sa doctrine qui serait
adéquate et convaincante dans ce contexte culturel[15] ».
Pour ce qui est de l’existence de la Trinité dans la Bible, un savant catholique écrit :
« Il était courant dans les manuels néo-scolastiques de la théologie dogmatique de citer des textes tels
que Genèse 1:26 : Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance (voir aussi Genèse 3:22;
11:7; Ésaïe 6:2-3) comme preuve d’une pluralité en Dieu. Mais aujourd’hui, les savants s’accordent
généralement pour dire qu’il n’y a pas de doctrine de la Trinité comme telle, que ce soit dans l’Ancien
Testament ou dans le Nouveau Testament... Ce serait aller loin au-delà de l’intention et des formes de
pensée de l’Ancien Testament que de supposer que l’on puisse y trouver une doctrine chrétienne datant
de la fin du 4e ou du 13e siècle... De même, le Nouveau Testament ne contient pas de doctrine explicite
de la Trinité... Ce serait un anachronisme de dire que le Nouveau Testament implique nécessairement ce
qui sera formulé plus tard, avec un raffinement métaphysique, comme étant une Trinité de trois
personnes divines égales partageant la même substance... On ne peut pas trouver le vocabulaire de la
métaphysique dans les Écritures. De ce fait, il y a des théologiens qui considèrent toute l’évolution
doctrinale post-biblique comme arbitraire et même aberrante. Pour eux, on ne peut pas aller au-delà du
langage et des concepts de la Bible [16] ».
Ainsi, même les savants catholiques reconnaissent que ce serait appliquer une règle fausse que de
rejeter une personne ou un groupe de personnes sur la base de leur acceptation ou de leur refus de la
Trinité [17]. Les chrétiens des 1er et 2e siècles n’acceptaient pas la Trinité (telle qu’on la conçoit
aujourd’hui). Les pères de l’Église, auxquels les catholiques et les orthodoxes accordent beaucoup
d’importance, ont fréquemment écrit pour combattre l’enseignement hérétique que le Père et le Fils
partageaient l’égalité et une unité métaphysique. Irénée [18], Justin Martyr [19] et d’autres [20] ont tous
dit très clairement que le Père et le Fils étaient des êtres séparés, le dernier étant subordonné au
premier, et que c’était une hérésie que de les confondre ou de les combiner.
Les savants catholiques romains (et cela comprend la Congrégation pour la doctrine de la foi) n’ignorent
pas le contexte historique dans lequel s’est développée la théologie trinitaire, ni les proclamations
patristiques reconnaissant l’individualité distincte du Père et du Fils [21]. Au contraire, ils considèrent
traditionnellement l’évolution de la doctrine de Dieu dans l’Église comme une avancée et un modèle plus
philosophique et de plus haut niveau. Dans l’esprit subordinationniste de Jean 14:28 (voir Matthieu 19:16-
17; 24:36; Marc 13:32 et Jean 17:21), le catholique saint Justin Martyr déclare que Jésus met simplement
« à exécution« les « instructions » du Père, publiant « aux hommes les commandements du Père et
Créateur de toutes choses [22] ». Justin ajoute :
« Je vais m’efforcer de vous persuader... qu’il y a... un autre Dieu et Seigneur soumis au Créateur de
toutes choses, qui est aussi appelé Ange, parce qu’il annonce aux hommes tout ce que le Créateur de