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Introduction
Qu’est-ce que la bioéthique ?
La bioéthique apporte au soignant une grille de lecture de sa pratique. Elle va vous permettre de répondre
aux questions « qu’est-ce que je fais de bien et qu’est-ce que je fais de moins bien pour mon patient ? ». En
effet, parfois la frontière entre ce qui est bienfaisant et ce qui est malfaisant est très fine. Un jour, vous serez
face à ce genre de problématique et il va falloir trancher. De plus vous vous retrouvez seul face à la décision,
et si ça se passe mal c’est vous qui irez devant les tribunaux.
Petit exemple concret :
« Madame Huberte est hospitalisée dans une chambre double d’un service de chirurgie pour une
intervention orthopédique programmée de longue date. Elle sort ce jour à partir de 14h30 comme le veut le
règlement du service. Il est environ 10h, le service est complet et une entrée est annoncée. La question se
pose alors de savoir où cette nouvelle patiente va être installée. L’équipe prend la décision d’installer la
madame Huberte dans le salon de télévision et de récupérer sa place pour la nouvelle patiente. Ses effets
personnels sont rapidement regroupés et mis dans un le salon où se trouvent déjà 2 autres personnes.
Toujours en chemise de nuit, Madame Huberte se demande où elle peut se changer et finir sa toilette
interrompue puisque sa chambre est dorénavant occupée. Elle est confuse et ne retrouve plus ses affaires. »
Que dire de cette situation clinique ?Comment aurait-on dû accompagner Madame Huberte ?
Sur le plan de la bioéthique, on touche ici au concept de dignité :
La décision a été prise sans l’avoir préparé et sans aucune explication
Il n’a pas été prévu de l’habiller dans des conditions dignes
La personne est confuse de ne plus trouver ses affaires: il n’est pas dit ici qu’une personne l’avait
accompagné et l’aidait dans ses démarches de vie ordinaire. Cela est tout à fait irrespectueux. Dans
cette situation ou un malade entre et demande aussi à être respecté au mieux selon ses besoins
cliniques, la décision peut être difficile. Pour autant, Madame Huberte peut légitiment croire qu’elle
est rejetée de sa chambre puisqu’elle n’est plus « rentable » financièrement.
Et c’est cet aspect qui est le plus choquant. Au final on se retrouve dans cette situation pour une question de
rentabilité. C’est une notion qui revient souvent en bioéthique : jusqu’à quand est-ce qu’on fait passer
l’économie avant le bien être du patient ?
Deuxième exemple :
« Une jeune patiente, majeure et capable, a subi dans un CHU une intervention de chirurgie orthopédique
dans les suites d’un traumatisme. Témoin de Jéhovah, elle refusait l’administration de tout produit sanguin,
hormis l’utilisation d’une autotransfusion peropératoire du sang récupéré́ et filtré. Le saignement
postopératoire s’est accompagné d’une anémie profonde malgré́ l’administration régulière de fer par voie
intraveineuse, d’érythropoétine recombinante humaine et l’arrêt de tout médicament pouvant altérer
l’hémostase. Le 5 août 2002, alors que son taux d’hémoglobine était 3,8 g/dl (vérifié 3,7 sur l’autre
bras), elle était tachycarde, hypotendue, polypnéique et en sueurs, mais maintenait son refus. Après avis de
son chef de service, l’anesthésiste- réanimateur de garde a décidé de transfuser la patiente de deux
concentrés globulaires, alors qu’elle était encore consciente. [...] . Après obtention d’un taux
d’hémoglobine 6,2 g/dl et amélioration clinique, il n’y a pas eu d’autre transfusion. La patiente et son
entourage, prévenus de la transfusion, ont aussitôt déclenché́ une action en justice. [...]. L’argument était
qu’il s’agirait d’une atteinte grave et manifestement illégale l’exercice des libertés fondamentales et
notamment du principe de consentement aux soins et de la liberté́ de conscience et de religion. »
La transfusion sans consentement en cas d’urgence vitale : données récentes - André LIENHART, 2002