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UE 2 Santé, société, humanité
M. Savriama
Date : 04/10/16 Plage horaire : 8h30 10h30
Promo : DFGSM 3 Enseignant : M. Savriama
Ronéistes :
OMARJEE Mohammad
RADJABALY Kayyum
Bioéthique : Problématiques de l’autonomie, de la dignité, de
l’acharnement thérapeutique, Partie 1
Introduction
I. La morale et l’éthique Fin de cette ronéo
II. Le concept d’autonomie
III. Le concept de dignité
IV. Variabilités culturelles et concepts
V. L’adhésion thérapeutique
VI. Les comités d’éthique
Conclusion
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Introduction
Qu’est-ce que la bioéthique ?
La bioéthique apporte au soignant une grille de lecture de sa pratique. Elle va vous permettre de répondre
aux questions « qu’est-ce que je fais de bien et qu’est-ce que je fais de moins bien pour mon patient ? ». En
effet, parfois la frontière entre ce qui est bienfaisant et ce qui est malfaisant est très fine. Un jour, vous serez
face à ce genre de problématique et il va falloir trancher. De plus vous vous retrouvez seul face à la décision,
et si ça se passe mal c’est vous qui irez devant les tribunaux.
Petit exemple concret :
« Madame Huberte est hospitalisée dans une chambre double d’un service de chirurgie pour une
intervention orthopédique programmée de longue date. Elle sort ce jour à partir de 14h30 comme le veut le
glement du service. Il est environ 10h, le service est complet et une entrée est annoncée. La question se
pose alors de savoir cette nouvelle patiente va être installée. L’équipe prend la décision d’installer la
madame Huberte dans le salon de télévision et de récupérer sa place pour la nouvelle patiente. Ses effets
personnels sont rapidement regroupés et mis dans un le salon se trouvent déjà 2 autres personnes.
Toujours en chemise de nuit, Madame Huberte se demande elle peut se changer et finir sa toilette
interrompue puisque sa chambre est dorénavant occupée. Elle est confuse et ne retrouve plus ses affaires. »
Que dire de cette situation clinique ?Comment aurait-on dû accompagner Madame Huberte ?
Sur le plan de la bioéthique, on touche ici au concept de dignité :
La décision a été prise sans l’avoir préparé et sans aucune explication
Il n’a pas été prévu de l’habiller dans des conditions dignes
La personne est confuse de ne plus trouver ses affaires: il n’est pas dit ici qu’une personne l’avait
accompagné et l’aidait dans ses démarches de vie ordinaire. Cela est tout à fait irrespectueux. Dans
cette situation ou un malade entre et demande aussi à être respecté au mieux selon ses besoins
cliniques, la décision peut être difficile. Pour autant, Madame Huberte peut légitiment croire qu’elle
est rejetée de sa chambre puisqu’elle n’est plus « rentable » financièrement.
Et c’est cet aspect qui est le plus choquant. Au final on se retrouve dans cette situation pour une question de
rentabilité. C’est une notion qui revient souvent en bioéthique : jusqu’à quand est-ce qu’on fait passer
l’économie avant le bien être du patient ?
Deuxième exemple :
« Une jeune patiente, majeure et capable, a subi dans un CHU une intervention de chirurgie orthopédique
dans les suites d’un traumatisme. Témoin de Jéhovah, elle refusait l’administration de tout produit sanguin,
hormis l’utilisation d’une autotransfusion peropératoire du sang récupé́ et filtré. Le saignement
postopératoire s’est accompagné d’une anémie profonde malgré́ l’administration régulière de fer par voie
intraveineuse, d’érythropoétine recombinante humaine et l’arrêt de tout médicament pouvant altérer
l’hémostase. Le 5 août 2002, alors que son taux d’hémoglobine était 3,8 g/dl (vérifié 3,7 sur l’autre
bras), elle était tachycarde, hypotendue, polypnéique et en sueurs, mais maintenait son refus. Après avis de
son chef de service, l’anesthésiste- réanimateur de garde a décidé de transfuser la patiente de deux
concentrés globulaires, alors qu’elle était encore consciente. [...] . Après obtention d’un taux
d’hémoglobine 6,2 g/dl et amélioration clinique, il n’y a pas eu d’autre transfusion. La patiente et son
entourage, prévenus de la transfusion, ont aussitôt déclenć une action en justice. [...]. L’argument était
qu’il s’agirait d’une atteinte grave et manifestement illégale l’exercice des libertés fondamentales et
notamment du principe de consentement aux soins et de la liberté́ de conscience et de religion. »
La transfusion sans consentement en cas d’urgence vitale : données récentes - André LIENHART, 2002
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La loi dit qu’on ne peut prodiguer aucun soin sans le consentement du patient. Cela s’applique pour les
médicaments, les examens, les interventions chirurgicales… On peut facilement se retrouver dans cette
situation et il y a toujours des alternatives (par exemple un patient qui refuse de prendre de la Cortisone).
Mais lorsque sa vie est en danger, comment fait-on ? Est-ce que l’on continue à respecter les choix du
patient ? Mais de l’autre côté, il y a la loi de non assistance à la personne en danger.
En résumé, soit on va au tribunal pour non respect du principe de consentement aux soins, soit pour faute
médicale grave (ne pas avoir transfusé alors que c’était clairement nécessaire).
Autre exemple dans le même style :
« Un petit garçon arrive aux Urgences avec la rate totalement explosée, avec pronostic vital engagé. Dans
l’urgence de la situation, chirurgien de garde ne se pose même pas la question de demander la famille, il
transfuse. Quand l’état du gamin devient plus stable, il explique ce qu’il a fait aux parents. Manque de bol,
ce sont aussi des témoins de Jéhovah. Le garçon se retrouve alors éjecté de son groupe familial et est placé
à la DDASS (sympa la famille !) »
Ainsi on a sauvé le patient, mais pour quelle vie après ? A-t-on le droit de décider à la place du patient ?
Nouvelle anecdote :
« Un patient de 80 ans qui fait un bilan de contrôle chez le cardiologue. La scintigraphie demandée montre
des vaisseaux bouchés. Le cardiologue regarde le patient droit dans les yeux et lui dit “ne vous inquiétez
pas, vous avez un cœur de cycliste”. Trois mois après il fait un infarctus (le patient, pas le cardiologue) ».
Ici le cardiologue a décidé à la place du patient pour lui éviter des interventions lourdes, compte tenu de son
âge, et lui a carrément menti. Il était clairement dans le tort : il aurait du lui exposer la situation, lui proposer
la mise en place d’un stent, tout en lui disant que c’est risqué à son âge. Le patient aurait ensuite pris lui
même la décision. Ce qu’il a fait est inadmissible.
L’objectif sera ici de mettre en évidence certains concepts qui pourront aider le soignant à bien prendre en
charge son patient. Tout cela est important pour que ce qui est mis en place par le médecin soit suivi par le
patient (adhésion thérapeutique). Et pour qu’il y ait adhésion thérapeutique, le patient doit se retrouver
dans le projet de soin, qu’il en fasse partie.
Il existe des comités d’éthiques associés aux structures de soin. Ils ont pour rôle d’analyser les cas les
équipes sont en difficulté. Mais elles ne donnent qu’un avis, et c’est toujours l’équipe soignante, en
particulier le médecin, qui va trancher.
Petite remarque hors des sujets abordés dans le cours : aujourd'hui on n’utilise plus les termes
d’acharnement thérapeutique, on parle d’obstination déraisonnée.
I. La morale et l’éthique
L’éthique (monde des idées) Conflit de valeurs.
Dans l’éthique on retrouve le respect de la dignité et des valeurs de la personne, notamment sur les idées
religieuses : respecter son choix de suivre ses valeurs même si c’est au détriment de sa vie.
On est dans la réflexion sur les habitudes qu’il faut contracter pour rendre un espace habitable. Le concept
est d’autant plus important à la Réunion, qui est un espace multiculturel dans lequel on arrive à vivre tous
ensemble.
Questionnement sur les valeurs qui sous-tendent l’action, où intervient le comité d’éthique.
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La morale (monde des faits) Conflit de devoirs.
Ensemble des règles de bonnes mœurs. Au delà des idées, on est dans le côté pratique. C’est ce que l’on peut
faire on ce qu’on ne peut pas faire au nom des valeurs culturelles.
La morale n’est pas la religion, mais toute religion renferme des préceptes de morale. Jean Benoist disait que
« Le soin est indissociable du fait religieux » (1998).
Pour autant, la religion ce n’est ni la morale, ni l’éthique. Mais dans la pratique, ces trois choses peuvent
s’enchevêtrer et on peut se retrouver dans des situations comme celles des exemples de l’introduction.
Question : quel est le lien entre l’éthique et la morale ?
Réponse du prof : L’éthique va amener  des faits, des actions, donc à la morale.
Imaginez la situation suivante : une personne âgée qui veut traverser, et un petit garçon qui vient l’aider
traverser. Dans un premier temps, il y a la morale : c’est bien d’aller aider la personne âgée, c’est une
règle de bonne conduite. Mais cette action là, il ne la ferait pas si on ne lui avait pas inculqué un certain
nombre de valeurs (le respect des aînés…), c’est l’éthique.
Question : Mais dans le premier exemple (transfusion chez une témoin de Jéhovah), 2 valeurs peuvent être
en conflit : d’un côté je me dis qu’il ne faut pas aller l’encontre du patient, mais de l’autre, devant la
situation je ne peux pas laisser le patient mourir.
Réponse :En effet, c’est un conflit de valeur. L’action qui va en découler (transfuser ou non) provient d’un
conflit de valeur : qu’est-ce qu’on estime être bien ou non. Et les deux actions sont justifiables : dans les
deux cas on va penser avoir bien fait.
L’enchevêtrement entre morale éthique et religion fait qu’on se retrouve parfois dans des situations
compliquées à gérer.
On peut définir l’ « éthique » comme un système ou un code de valeurs morales, avec ses règles et normes
de conduite. Les trois grands principes d’éthique qui devraient guider toutes les enquêtes portant sur des
êtres humains (y compris les méthodes utilisées pour recueillir l’information) sont les suivants:
1. Respect des personnes, principe qui a trait au respect de l’autonomie et de l’autodétermination des
participants, et à la protection de ceux qui ne sont pas autonomes, notamment en leur offrant un abri
contre les dangers ou les sévices.
2. Générosité, devoir de préserver le bien-être des personnes/communautés impliquées, ce qui signifie
réduire les risques au minimum et veiller à ce que les avantages soient supérieurs aux risques. Ce
qui n’est pas forcément facile, surtout dans les situations qui mêlent religion et soin. On ne s’occupe
pas de la même manière d’un patient catholique, musulman ou juif… Si le soin se heurte à sa
représentation, on risque la non adhésion thérapeutique. Il faut faire en sorte de s’ajuster et
d’accompagner le patient.
Exemple de la situation du Chikungunya (2005-2006). Un bon pourcentage de la population ne
croyait pas, et ne croit toujours pas, que le moustique ait pu véhiculer la maladie. On se retrouve
face à 3 représentations : celle du médecin (maladie vectorielle transportée par le virus), celle du
patient (douleur dans les os) et celle de la société (attaque terroriste…). NB : ce sont les concepts de
disease, illness et sickness. Mais si on va l’encontre de ces représentations, on n’arrive pas
convaincre les gens de se protéger contre le moustique. Il ne faut pas s’opposer au patient qui a ces
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représentations, mais montrer qu’on l’entend, tout en suggérant les conduites tenir et négocier le
soin (porter des vêtements longs, se protéger des moustiques, etc…).
Autre exemple : le diabète. Si le patient croit que le diabète est une punition du diable (origine du
mot diabète). Il faut s’adapter, aller dans son sens, et proposer le traitement.
3. Justice, devoir de répartir équitablement les avantages et les charges (justice distributive). Et c’est la
société qui fixe ce qui est juste ou non. D’une société à une autre, ça peut changer (exemple des
mères porteuses : en France, il est interdit de prêter son corps à autrui. Aux Etats-Unis, c’est un fait
courant et socialement accepté). Dans une situation de crise, la dépendance, la perte d’autonomie,
l’écroulement des systèmes communautaires/sociaux et la menace permanente de l’insécurité sont la
norme. Lors d’une enquête sur la violence sexuelle faite dans ce cadre, il faut donc être
particulièrement soucieux de comprendre comment s’acquitter au mieux des obligations
qu’entrainent ces principes.
Le respect de ces principes a plusieurs conséquences importantes pour la collecte de l’information. Par
exemple, l’obligation de répartir les avantages qu’elle apporte exige que l’on examine soigneusement les
points suivants :
• Comment l’information sera utilisée,
• Qui la verra,
• Comment elle sera rapportée et à qui,
• En vue de quels objectifs elle sera rapportée, qui en bénéficiera et quand.
En tant que médecin, lorsque l’on interroge le patient, il sera peut être amené faire des confidences. Que
faire de ces informations ? On ne peut pas simplement les ignorer. Il faut donc décide, si oui ou non on fera
figurer cette information dans le dossier -auquel cas elle sera visible par la secrétaire (par exemple)-, si on
appellera un confrère pour en discuter, etc…
Un exemple un peu délicat : un patient se pointe aux urgences, et au cours de l’interrogatoire, informe le
soignant qu’il est séropositif. Deal with it. Cette information aura des conséquences sur la prise en charge
du patient. Mais se pose surtout la question de savoir à qui partager cette info, si on la met dans le dossier.
Pire : le patient établi une liste de ses derniers partenaires, et manquant de courage, il demande au
soignant de les contacter et de les informer. Bien que ce ne soit pas nôtre job, il faut savoir comment gérer
cette situation. Si on choisit l’inaction, les personnes de cette liste ne sauront peut être jamais qu’elles ont
eues un rapport à risques. Une solution intermédiaire serait de convaincre le patient de le faire lui-même,
ou alors de contacter le médecin traitant des intéressés, afin qu’un dépistage soit proposé.
Question tout aussi importante : savoir si l’information que l’on recherche est véritablement nécessaire. Ce
souci est parfois particulièrement pertinent ; en effet, dans certaines situations, le risque existe que la
recherche sur la violence sexuelle soit abusive, par exemple lorsque de multiples enquêtes sur ce sujet sont
faites au même endroit, par différentes organisations ou personnes, qui ne se communiquent pas ou peu
les informations, ou ne coordonnent pas leurs interventions.
Voici un schéma résumant parfaitement ce qui a été dit jusqu’à maintenant :
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