TELECHARGEMENT La polémique rebondit en France à propos des problèmes de droits d’auteur en ce qui concerne les produits informatiques : comment définir un téléchargement légal ou illégal ? Quel contrôle, quelles sanctions prévoir ? Doit-on différencier un usage privé d’une arrière-pensée commerciale ? En tout cas, pour s’y retrouver dans cette jungle, et mieux comprendre le débat suscité par le vote des parlementaires français il y a deux jours, il faut savoir ce qu’est le téléchargement, et comprendre à quoi correspond le mot. Empruntons au dictionnaire Robert sa définition : transfert de données entre ordinateurs au moyen d’un réseau téléinformatique. Le mot en fait est moins compliqué que le chose : si l’on sait comment ça se pratique, on comprend très bien comment ça s’exprime : on charge, c’est à dire on s’approprie des données informatiques qui sont présentes sur un autre système informatique en les recopiant sur son propre ordinateur. Et le préfixe télé- n’a rien de bien mystérieux : c’est celui qu’on utilise déjà dans téléphone, télévision ou télé travail… Il signifie « au loin » et s’emploie quand une information est transmise, au mépris des distances, d’un lieu à un autre, d’un site à un autre. Le mot français téléchargement est donc très utilisé et ne semble pas poser de problèmes… Encore que son équivalent anglais, download, soit également assez présent, et que parfois, dans une langue familière, on l’entende, même conjugué à la française : j’ai downloadé le programme ! Plus problématique pour ceux qui sont récalcitrants aux expressions anglo-saxonnes, l’énigmatique peer to peer. Il s’agit là d’un système de téléchargement d’un ordinateur personnel à un autre : on ne va pas se connecter au site d’une société, d’un fournisseur de programmes. Mais simplement, on va picorer les données que possède quelqu’un d’autre, équipé, grosse modo comme vous. Et on recopie ce qu’il possède : images, film, musique, logiciel etc. Que veut dire peer to peer ? Simplement d’égal à égal. Le mot de peer se comprend assez aisément en français si l’on se souvient qu’il est de la même famille que pair. Et le pair, c’est l’égal. Les pairs de France, au temps des rois, étaient ces puissants, égaux entre eux, même s’ils étaient supérieurs, par leurs droits, à la majorité des habitants. L’expression pourrait alors assez bien se traduire par « de pair à compagnon », vieille expression française, qui évoque tout à la fois la familiarité des rapports, l’absence de cérémonie, le côté bonne franquette. Mais il y manque la symétrie, on n’a pas ce balancement des monosyllabes qui marque le peer to peer, parfois raccourci en p 2 p. Et on a dans ce raccourci une sorte de précipité de ce qui peut séduire dans le clin d’œil anglo-américain. Alors comment traduire ? Plusieurs possibilités sont en concurrence : pair à pair, point à point, poste à poste, comme au Québec. Mais pour l’instant, l’équivalent français a encore un gros handicap sur l’original anglais : même dans la presse écrite la plus sérieuse, même dans les débats à l’Assemblée nationale, on tient encore pour le peer to peer. La politique du peer l’emporte !