complicité, et se plaignit publiquement de passer sa vieillesse à combattre contre
des enfants. Par ces paroles il faisait allusion au jeune Marius, qui lui avait si
opiniâtrement disputé la victoire. Mais tandis qu’au forum et dans le sénat on
représentait Pompée comme une rebelle, celui-ci, au contraire, luttait contre ses
troupes mutinées, et pour vaincre leur obstination les menaçait de se tuer à leurs
yeux si elles refusaient plus longtemps d’obéir. Elles cédèrent enfin, et
s’embarquèrent pour l’Italie. Après avoir remis entre les mains de son successeur
le gouvernement de la province, le jeune général suivit ses légions. Rome tout
entière alla à sa rencontre pour lui faire honneur, et Sylla, l’embrassant avec
tous les signes d’une extrême affection, le salua du surnom de grand, titre qui
depuis lors n’a cessé d’être joint au nom de Pompée.
Dans l’intervalle qui sépare la première guerre civile de la seconde, les
colonies africaines restèrent paisibles, mais eurent à subir un fléau plus cruel
que la guerre même, la préture de Catilina. Les exactions, les violences de ce
gouverneur devinrent si insupportables, qu’un cri unanime s’éleva contre lui. De
tous côtés les plaintes arrivèrent à Rome. Quelques-uns des sénateurs opinèrent
pour la mise en jugement; mais les nombreux amis qu’il comptait dans l’assemblée
lui épargnèrent cette juste honte. A l’expiration de sa charge, il rapporta dans sa
patrie d’immenses richesses qui lui servirent à fomenter cette fameuse
conjuration sous laquelle la république faillit périr.
Les convulsions politiques de la métropole, se succédant presque sans
interruption, réagissaient sur la colonie africaine, sans toutefois arrêter l’essor
de sa prospérité. Les tributs que Rome lui imposait, en blé, en huile, en fruits de
toute espèce, allaient toujours croissant. On en trouve, dès cette époque, une
preuve remarquable. Peu d’années après la conjuration de Catilina, une disette
ayant menacé Borne, Pompée reçut du sénat et du peuple la mission de remédier
au mal. Il mit à contribution les trois greniers de la république, l’Égypte, la Sicile,