cristaux - LaCaverneD`AliBaba

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CRISTAUX
STRUCTURE DES CRISTAUX
DÉFINITION
La matière se présente normalement sur la Terre en trois états d'agrégation
différents : l’état gazeux (gaz), l’état liquide et l’état solide. Cela est dû au fait que
les particules, atomes ou molécules, dont elle est constituée, peuvent s'attirer et se
lier avec plus ou moins d'intensité.
Dans les gaz, les forces s'exerçant entre les particules sont très faibles,
pratiquement nulles, et la distance entre une particule et une autre est beaucoup
plus importante que les dimensions de chacune d'entre elles. Elles se meuvent
donc librement, suivant des trajectoires aléatoires, modifiées seulement par les
chocs qu'elles subissent. Les particules libres tendent toujours à s’éloigner l'une de
l'autre, si bien que le gaz se dilate et occupe tout le volume disponible. Il est
possible de comprimer un gaz, c'est-à-dire de forcer ses particules à se rapprocher,
jusqu'au point où, la distance de l'une à l'autre diminuant, leur répulsion réciproque
devienne assez forte pour empêcher toute compression supplémentaire.
Dans les liquides, les forces qui s'exercent entre les particules sont encore plutôt
faibles, mais suffisantes pour les rapprocher jusqu'à des distances comparables à
leurs dimensions. Par conséquent, la distance entre les particules ne peut pas
diminuer plus et, même sous l'effet de forces, les liquides se compriment très peu
et leur volume reste pratiquement constant. Toutefois, les liquides ne peuvent pas
garder une forme propre, ils doivent être contenus dans un récipient et occupent
tout le volume dont ils disposent.
Dans les solides, les forces d'attraction entre les particules sont en revanche très
intenses. Les atomes ou les molécules sont liés de façon stable et occupent des
positions fixes dans l’espace. Les solides ont une forme et un volume propres et
une compressibilité très faible.
Les propriétés et l’aspect des solides sont multiples. Songeons seulement à
l’incroyable variété des matériaux qui nous entourent. Dans certains cas, des
solides composés du même élément peuvent avoir des comportements très
différents selon les conditions dans lesquelles ils se sont formés. Parmi les
composés du carbone, par exemple, figurent aussi bien le diamant, qui est un
cristal très dur, que le graphite, qui est en revanche fragile et friable. Certains
solides, comme les métaux, conduisent le courant électrique, quand d'autres sont
isolants électriques. Certains solides sont transparents, d'autres opaques ; d'autres
encore ont des surfaces régulières et brillantes, d'autres irrégulières et rugueuses.
Malgré ces différences importantes, la plupart des solides présents dans la nature
ont une caractéristique commune : les atomes qui les constituent se disposent en
des structures ordonnées et périodiques. Cela signifie que les atomes sont placés
selon des configurations précises, par exemple sur les sommets d'un cube, qui se
répètent périodiquement dans les trois dimensions de l'espace. Un solide dont la
structure microscopique est ordonnée et périodique s'appelle cristal. La plupart des
solides existant sont par conséquent des cristaux, même si leur nature régulière
n'est pas toujours évidente à première vue. Parfois, les cristaux sont si petits qu'ils
ne sont visibles qu'au microscope. Les roches par exemple sont constituées pour
l’essentiel d'agrégats de petits fragments cristallins différents mélangés et
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« collés » l'un à l'autre. Généralement, l’aspect extérieur des roches est irrégulier,
mais la structure microscopique des fragments est ordonnée et périodique.
D'autres fois, en revanche, la structure ordonnée des cristaux se reflète aussi dans
leur forme macroscopique. Certains cristaux, comme le quartz, ont une forme très
régulière et peuvent atteindre des dimensions considérables. Dans la nature, il y a
peu d'exemples de solides non cristallins, appelés solides amorphes. Parmi les
solides amorphes les plus communs, citons les verres et les roches volcaniques.
Dès la fin du XVIIIe siècle, l’aspect géométrique et régulier de certains cristaux avait
convaincu les minéralogistes que ces matériaux étaient formés par la répétition
ordonnée de « briques » fondamentales. Mais le tournant dans l’étude de la
structure microscopique des cristaux eut lieu dans les premières années du
XXe siècle, grâce à la découverte des rayons X en 1895 par le physicien allemand
Wilhelm Röntgen. Les rayons X permettent d'obtenir les « radiographies » des
cristaux. Ce sont les images de diffraction grâce auxquelles les savants peuvent
remonter à la structure cristalline. Cette technique, appelée diffraction aux
rayons X, était pendant longtemps la technique principale pour l'étude des solides.
Aujourd'hui, on utilise aussi des instruments plus modernes et plus puissants,
comme le microscope électronique et le microscope à effet tunnel, qui permettent
d'obtenir de véritables photographies des cristaux au niveau microscopique.
L'étude des cristaux, de leurs propriétés et de leur structure microscopique est très
complexe. Pour l'aborder avec succès, les savants ont dû introduire le cristal idéal,
c'est-à-dire un modèle plus simple à étudier qui reproduit de façon simplifiée toutes
les caractéristiques principales d'un cristal réel. Le cristal idéal est infiniment étendu
et sa structure est parfaitement ordonnée et périodique ; tandis que les cristaux
réels ne sont pas infiniment étendus et leur structure peut présenter des
imperfections qui rompent l'ordre périodique exact. Naturellement, le cristal idéal
est seulement une abstraction, très utile aux savants, qui cependant n'existe pas
dans la nature.
LE RÉSEAU, LA BASE ET LA CELLULE ÉLÉMENTAIRE
Un cristal idéal est construit par la répétition infinie dans l’espace d'unités
structurelles identiques. Dans le cas le plus simple, celui des cristaux
monoatomiques, ceux constitués d'atomes d'un seul élément, l'unité fondamentale
est un simple atome. En général, elle est constituée d'un groupe d'atomes appelé
base. La position de chaque unité fondamentale, qu'il s'agisse d'un atome ou d'une
base, est fixée par les points du réseau cristallin qui constituent une sorte de
« grille » de points ordonnés dans l’espace. La structure du cristal est
complètement déterminée quand, à chacun des points réticulaires, est
« accrochée » une base. Dans les cristaux monoatomiques, à chaque point du
réseau correspond un atome, en général à chaque point du réseau correspondent
les deux atomes (ou plus) de la base.
Une autre notion très utile pour la description de la structure des cristaux est la
cellule élémentaire. C'est elle aussi une unité fondamentale qui se répète un
nombre infini de fois dans l’espace pour former le cristal. Il existe de nombreuses
façons de choisir la cellule élémentaire. Dans tous les cas, elle contient un seul
point du réseau et un nombre d'atomes égal à celui de la base. Par exemple,
chaque cellule élémentaire possible du diamant, qui est un cristal monoatomique
constitué d'atomes de carbone, contient un seul atome. Dans le chlorure de sodium
(le sel de table), constitué en revanche d'atomes de chlore et de sodium, la cellule
élémentaire contient 2 atomes.
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TYPES DE RÉSEAU, SYSTÈMES CRISTALLINS ET SYMÉTRIES
Les points du réseau cristallin sont disposés dans l’espace de façon ordonnée et
périodique. Cependant, toutes les dispositions ordonnées de points dans l’espace
ne constituent pas un réseau cristallin. Dans la nature, il existe seulement 14 types
de réseau regroupés en 7 systèmes cristallins fondamentaux :
1) système cubique, qui comprend 3 types de réseau : le réseau cubique simple, le
réseau à faces centrées, le réseau à corps centré ;
2) système tétragonal, 2 types de réseau ;
3) système orthorhombique, 4 types de réseau ;
4) système monoclinique, 2 types de réseau ;
5) système triclinique, 1 type de réseau ;
6) système trigonal, 1 type de réseau ;
7) système hexagonal, 1 type de réseau.
Les réseaux cristallins possèdent quelques propriétés de symétrie intéressantes.
Par exemple, si un réseau cubique simple est mû selon un mouvement de
translation sur l'une des arêtes d'une cellule élémentaire, les points réticulaires
coïncident exactement avec d'autres points réticulaires ayant les mêmes
caractéristiques. Le réseau jouit de la propriété de symétrie par translations. Les
réseaux possèdent aussi d'autres types de symétrie. Par exemple, il est possible
de faire tourner un réseau cubique simple de 90° autour de l'un de ses points. Dans
ce cas également, tous les points coïncident avec d'autres points identiques. On
parle alors de symétrie par rotation de 90°. Les réseaux n'ont de symétrie que par
rotations de 360°, 180°, 120°, 90° ou 60°. Il n'existe pas de réseaux jouissant de
symétries par rotations différentes. Il y a ensuite les propriétés de symétrie par
réflexion par rapport à un plan passant par un point réticulaire, et par inversion
(rotation de 180° suivie d'une réflexion). Généralement, un réseau ne jouit pas de
toutes les propriétés de symétrie possibles. Les réseaux qui ont les mêmes
symétries sont regroupés en classes de symétrie.
Parfois, les propriétés de symétrie d'un cristal donné se reflètent de façon
spectaculaire dans son aspect extérieur. L'exemple le plus familier de ce
phénomène est sans doute celui des cristaux de neige, qui offrent une variété
incroyable de formes d'étoile, toutes liées à la symétrie hexagonale (c'est-à-dire
une symétrie par rotations de 60°). De nombreuses propriétés des cristaux
dépendent de leur structure symétrique. En outre, les propriétés de symétrie
permettent d'aborder de façon assez simple l'étude théorique des cristaux au
niveau microscopique. C'est aussi grâce aux symétries et aux simplifications
qu'elles permettent d'introduire dans les calculs théoriques et qu'aujourd'hui de
nombreux aspects des systèmes cristallins sont connus et compris de façon
satisfaisante.
CLASSIFICATION DES CRISTAUX EN FONCTION DE LEURS
LIAISONS CHIMIQUES
LA LIAISON CHIMIQUE
Parmi les atomes on peut établir différents types de liaisons, chimiques, plus ou
moins fortes. Les liaisons entre les atomes de carbone du diamant sont très fortes
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et rendent ce cristal extrêmement dur. Les forces d'attraction entre les particules
des gaz sont au contraire très faibles. Dans des conditions normales, il ne s'établit
pas de liaisons entre elles. C'est uniquement dans des cas très particuliers
(températures très basses et pressions très hautes) que les particules gazeuses se
lient de manière stable, formant des solides qui se dissolvent et s'évaporent dès
que les conditions se rapprochent de la normale. La formation d'un solide peut se
faire, si les forces attractives de ses constituants ont une intensité suffisante pour
s'opposer à l'énergie d'agitation thermique, qui tendrait au contraire à faire fondre le
matériau. Certaines de ces forces, en particulier la liaison ionique, la liaison
covalente et la liaison hydrogène (liaisons chimiques), permettent la formation et
l'existence des molécules. D'autres forces au contraire, telles que la liaison
métallique et la liaison moléculaire, ou de Van der Waals, n'interviennent pas dans
la formation des molécules et sont typiques des solides cristallins. Les liaisons
ioniques, covalentes et métalliques sont fortes et sont à l'origine des solides
résistants. Les liaisons hydrogènes et moléculaires sont, au contraire, plutôt faibles.
Dans la nature, il est assez rare de trouver des atomes isolés : ceux-ci, en effet,
tendent quasiment toujours à se lier entre eux pour former des molécules ou des
agrégats plus complexes. Les atomes sont constitués d'un noyau central formé de
protons à charge électrique positive et de neutrons privés de charge électrique.
Autour du noyau, tournent des électrons qui ont une charge électrique négative. Il y
a autant d'électrons que de protons, et l'atome est électriquement neutre. Les
électrons ne peuvent se mouvoir librement, mais doivent se disposer en couches,
appelées niveaux électroniques, qui se remplissent successivement. En effet, le
principe d'exclusion de Pauli énonce que chaque niveau ne peut contenir qu'un
nombre bien précis d'électrons. Dès que le niveau inférieur est plein, les électrons
commencent à occuper le niveau suivant. Le premier niveau électronique peut
contenir 2 électrons, le deuxième peut en contenir 8, le troisième 8, le quatrième
18, et ainsi de suite. L'hydrogène est l'élément le plus simple ; il a un seul électron
sur le premier niveau. Le deuxième élément, l'hélium, a 2 électrons qui remplissent
le premier niveau. L'élément suivant le lithium a 3 électrons : les deux premiers
complètent le premier niveau et le troisième doit se mettre sur le deuxième niveau.
En ajoutant un par un les électrons, on obtient tous les éléments présents dans la
nature, qui sont énumérés dans la classification périodique des éléments. Lorsque
c'est possible, les atomes « préfèrent » compléter le dernier de leur niveau
électronique, car lorsque le dernier niveau d'un atome est plein, celui-ci devient
particulièrement stable. Il n'y a que peu d'éléments qui possèdent le bon nombre
d'électrons pour remplir exactement un niveau, sans en laisser d'autres
partiellement vides. Ces éléments sont les gaz rares qui se trouvent tous à l'état
gazeux et ne se lient pas facilement. Tous les autres éléments ne peuvent pas
compléter leurs niveaux externes tout seul, ils doivent collaborer avec d'autres
atomes. Le principe de la liaison chimique est le suivant : deux ou plusieurs atomes
collaborent, donc se lient, pour compléter chacun leur niveau électronique le plus
externe. Selon le nombre d'électrons nécessaires pour compléter le niveau externe
les atomes peuvent former plus d'une liaison. On appelle électrons de valence, les
électrons qui interviennent dans la formation des liaisons. C'est leur nombre qui
permet d'établir le groupe auquel l'élément appartient dans la classification
périodique. Ainsi un atome à 3 électrons de valence appartient au groupe III, un
atome à 5 électrons de valence appartient au groupe V et ainsi de suite.
Dans les solides il peut y avoir différents types de « collaboration » entre les
atomes qui sont à l'origine de différents types de liaisons : ionique, covalente,
métallique, moléculaire ou de Van der Waals et liaison hydrogène. Habituellement,
il y a un certain « mélange » entre les différents types de liaisons, et les matériaux
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dans lesquels apparaissent des liaisons pures sont assez rares. Souvent les
liaisons entre les composants d'un matériel ne sont pas purement ioniques ou
purement covalentes. Cependant, dans la mesure où dans les cristaux les liaisons
chimiques sont particulièrement importantes et contribuent à déterminer une
grande partie de la propriété du cristal lui-même, il est utile de classer ces
matériaux en fonction de la liaison chimique qui prédomine dans leur structure.
CRISTAUX IONIQUES
La liaison prédominante dans les cristaux ioniques est, comme son nom l'indique,
la liaison ionique (liaison chimique). Celle-ci s'établit quand, pour compléter son
niveau externe, les atomes d'un élément capturent les électrons des atomes d'un
autre élément qui lui, tend au contraire à les céder. Un atome qui capture
facilement les électrons pour compléter son niveau externe est appelé
électronégatif, alors qu'un atome qui cède facilement ses électrons de valence est
appelé électropositif. La liaison ionique se fait donc entre les éléments très
électronégatifs et les éléments très électropositifs.
Le cristal ionique le plus commun est le chlorure de sodium, à savoir le sel de
cuisine. Il est formé d'atomes de chlore et de sodium. Les atomes de chlore,
électronégatifs, ont 7 électrons sur le troisième niveau : pour compléter ce niveau, il
manque seulement un électron. Les atomes de sodium, électropositifs, ont le
deuxième niveau complet et n'ont qu'un seul électron sur le troisième niveau, celuici est donc pratiquement vide. Le chlore capture le dernier électron de sodium et
complète son troisième niveau. Le sodium, qui a cédé son électron du troisième
niveau, se trouve alors avec le deuxième niveau plein. Lorsqu'un atome cède ou
acquiert un électron, il n'est plus électriquement neutre. Le nombre de protons et
d'électrons est alors déséquilibré : si l'atome cède un électron, il se retrouve avec
un proton en plus, donc avec une charge électrique positive, et prend le nom d'ion
positif. Au contraire, si l'atome acquiert un électron, il devient un ion négatif avec
une charge électrique négative. Dans l'exemple du sel de cuisine, le chlore qui a
capturé l'électron, est un ion négatif, alors que le sodium qui l'a cédé est un ion
positif. Par l'effet des forces électrostatiques (Coulomb), les deux ions avec des
charges électriques opposées s'attirent et il s'établit ainsi une liaison ionique. Le
chlorure de sodium est formé d'ions positifs et négatifs placés alternativement sur
les sommets des cubes qui se répètent dans l'espace. Chaque ion chlore est
entouré de 6 ions de sodium et réciproquement. En général, chaque ion cherche à
s'entourer d'un maximum d'ions de charge opposée ; cela permet au cristal d'avoir
la structure la plus stable possible. Cette forme de rapprochement entre les ions est
à l'origine des structures géométriques tridimensionnelles, au centre desquelles est
placé un des deux types d'ions, alors que sur les sommets sont disposés les ions
de charge opposée. Ces structures tridimensionnelles sont appelées polyèdres de
coordination. La forme du polyèdre, et donc le nombre d'ions qui entourent ceux de
charge opposée, dépend uniquement du rapport entre les dimensions des deux
ions et détermine le type de réseau du cristal. Les polyèdres de coordination les
plus communs sont ceux à 4, 6, 8 et 12 sommets.
Habituellement, les cristaux ioniques ne sont pas de bons conducteurs de chaleur
et de courant électrique. Ils sont souvent transparents et de couleur variable, plutôt
durs, et fondent à des températures élevées.
CRISTAUX COVALENTS
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Les liaisons covalentes qui prédominent à l'intérieur des cristaux covalents, sont
parmi les plus présentes dans la nature. Ce sont, en effet, les liaisons qui
s'établissent à l'intérieur de la majeure partie des molécules. L'existence des
liaisons covalentes, et donc des molécules et des cristaux covalents, n'est pas
explicable dans le cadre de la mécanique physique. C'est grâce à la mécanique
quantique que l'on a pu comprendre et expliquer de manière satisfaisante
l'existence de ce type de liaisons.
Dans ce cas, comme dans le cas des liaisons ioniques, les atomes qui participent à
la liaison cherchent à compléter leur dernier niveau électronique. La principale
différence réside dans le fait que dans la liaison ionique, un atome cède
complètement un électron et que l'autre l'acquiert, alors que dans le cas de la
liaison covalente, les électrons de valence sont « prêtés » et mis en commun entre
les atomes qui participent à la liaison. La molécule d'hydrogène représente
l'exemple le plus courant de la liaison covalente. Elle est formée de deux atomes
d'hydrogène et chaque atome a un électron qui tourne sur le premier niveau. Les
deux atomes mettent en commun leurs électrons et complètent ainsi le premier
niveau (rappelons que deux électrons sont suffisants pour compléter le premier
niveau électronique). Chaque liaison covalente a donc besoin d'un couple
d'électrons de valence. Il est utile de souligner qu'une fois que la liaison s'est
formée, les deux électrons appartiennent en même temps aux deux atomes. Si un
atome a besoin de plus d'un électron pour compléter son dernier niveau, il peut
former plus d'une liaison covalente. L'oxygène, par exemple, a 6 électrons sur le
troisième niveau : il en manque donc 2 pour le compléter. Un atome d'oxygène peut
former deux liaisons covalentes avec un autre atome d'oxygène pour former une
molécule ; ou bien l'oxygène peut se lier à deux atomes d'hydrogène pour former
une molécule d'eau. Une autre caractéristique importante de la liaison covalente
est son effet directif : il s'établit selon une direction précise et les électrons
impliqués sont localisés de manière prédominante le long de l'axe qui joint les deux
atomes.
Les cristaux covalents sont constitués essentiellement d'éléments appartenant aux
groupes III, IV, V de la classification périodique qui possèdent respectivement 3, 4
ou 5 électrons de valence. L'exemple typique du cristal covalent est le diamant. Il
est constitué d'atomes de carbone, élément du groupe IV de la classification
périodique qui peut former 4 liaisons covalentes. La structure du diamant est
constituée de tétraèdres dans lesquels chaque atome de carbone central est lié
aux quatre autres atomes de carbone placés sur les sommets. Avec cette structure
particulière, chaque atome s'avère lié aux quatre autres atomes identiques. C'est
cette structure qui est à l'origine de la dureté particulière du diamant. Toutefois tous
les atomes de carbone ne forment pas toujours les 4 liaisons covalentes. Le
nombre de liaisons du carbone peut varier et est à l'origine de cristaux
complètement différents. Le graphite, par exemple, beaucoup moins dur et
précieux que le diamant, est constitué d'atomes de carbone qui forment seulement
3 liaisons avec leurs voisins. Les cristaux covalents ne sont généralement pas de
bons conducteurs d'électricité.
CRISTAUX MÉTALLIQUES
La liaison métallique n'intervient pas dans la formation des molécules. Elle apparaît
seulement à l'intérieur des métaux, comme l'or, le cuivre, le zinc et s'établit
exclusivement entre les atomes électropositifs, qui tendent à céder facilement leurs
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électrons de valence. Dans ce cas, à la différence de la liaison ionique, il n'y a pas
d'atomes électronégatifs qui capturent les électrons cédés. Ils restent donc libres
de se déplacer à l'intérieur du solide. Les cristaux métalliques sont formés d'ions
positifs immergés dans une « mer » d'électrons libres qui assurent la cohésion
entre les ions. Ces électrons ne peuvent abandonner le système qui doit rester
électriquement neutre. Si certains électrons abandonnaient le solide, celui-ci
deviendrait immédiatement chargé positivement et la force électrostatique attirerait
de nouveau les électrons. Par intuition, on peut imaginer un métal, comme un
cristal ionique, dans lequel les ions négatifs ne sont plus des atomes fixés en
position bien déterminée, mais des électrons libres de se déplacer dans toutes les
directions entre les ions positifs fixes. Dans la mesure où les électrons de valence
dans les solides métalliques sont libres, la charge électrique qu'ils portent peut être
déplacée à l'intérieur du matériau. C'est cette propriété qui rend les métaux
d'excellents conducteurs électriques et thermiques. Le mouvement des électrons
n'est cependant pas complètement libre. Ceux-ci sont arrêtés par des chocs sur les
ions positifs qui oscillent à cause de l'agitation thermique. C'est la raison pour
laquelle la conductibilité électrique des métaux s'améliore généralement lorsque la
température baisse. Les vibrations thermiques des ions diminuent et empêchent
moins le mouvement des électrons. À des températures très basses, des
phénomènes très complexes interviennent qui rendent le mouvement des électrons
quasiment privé d'obstacles. Dans ces conditions, les métaux deviennent
supraconducteurs : cela signifie que leur résistance au passage du courant est
quasi nulle.
CRISTAUX MOLÉCULAIRES OU DE VAN DER WAALS
Les liaisons moléculaires ou de Van der Waals s'établissent entre les atomes des
gaz rares (néon, argon, krypton et xénon) ou bien entre les molécules de gaz
comme le méthane, l'hydrogène et le chlore. Ces liaisons de type électrostatique
sont très faibles et les solides moléculaires ne sont stables qu'à des températures
très basses et des pressions hautes. En effet, aussi bien dans le cas des gaz rares
que dans celui des molécules citées, il s'agit d'atomes dont les niveaux
électroniques externes sont déjà complets : il n'y a donc aucune nécessité
d'échanger ou de « prêter » des électrons. Les forces moléculaires tirent leur
origine du déplacement des noyaux depuis la position qu'ils occupent par rapport
aux électrons, dans les atomes ou dans les molécules libres. Ce déplacement se
vérifie quand la distance entre les atomes ou les molécules devient comparable
avec leurs dimensions. Il provoque une sorte de « déséquilibre de charge » appelé
dipôle électrique. Un dipôle électrique est totalement neutre, mais à une de ses
extrémités il y a un excès de charge positive alors que dans l'autre il y a un excès
de charge négative. Une faible attraction électrostatique s'établit entre les différents
dipôles, cela permet la formation du solide.
Les solides moléculaires ne sont pas conducteurs de courant électrique car tous
les électrons du système sont localisés autour des atomes.
CRISTAUX À LIAISON HYDROGÈNE
Ce type de cristaux dérive des propriétés particulières de l'atome d'hydrogène.
Comme nous l'avons déjà dit, l'hydrogène est l'élément le plus simple qui existe
dans la nature et il possède un seul électron qui tourne sur le premier niveau.
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Quand l'hydrogène établit des liaisons covalentes avec les éléments
électronégatifs, qui tendent donc à acquérir des électrons comme le chlore ou le
fluor, il subit une ionisation partielle. Le fluor ou le chlore attirent vers eux l'électron
de l'hydrogène qui, même s'il ne cède pas complètement son électron, reste avec
un excès de charge positive. Dans ce cas, l'hydrogène peut faire pont entre deux
ions négatifs et établir une liaison hydrogène.
Le glaçon est un exemple très important de cristal à liaison hydrogène. La molécule
d'eau est constituée d'un atome d'oxygène et de deux atomes d'hydrogène.
L'oxygène, électronégatif, attire vers lui les électrons des atomes d'hydrogène. La
molécule devient alors un dipôle électrique permanent, avec un excès de charge
négative pour l'oxygène et un excès de charge positive pour les atomes
d'hydrogène. Il peut alors s'établir des liaisons entre les extrémités de charge
opposée des différents dipôles : s'alternent alors, aux atomes d'hydrogène ayant un
excès de charge positive, les atomes d'oxygène ayant un excès de charge
négative. L'intensité du dipôle de l'eau est plus importante que celle des cristaux
moléculaires que nous avons décrits plus haut. Le glaçon reste donc solide et
stable à des températures supérieures par rapport aux cristaux moléculaires.
PROPRIÉTÉS DES CRISTAUX
LA CRISTALLISATION
La cristallisation est le processus par lequel les constituants d'un solide occupent
dans l’espace les positions ordonnées et périodiques qui forment la structure
cristalline. Le processus de cristallisation peut se produire à partir de différents
états d'agrégation de la matière. Selon les cas, les cristaux peuvent être obtenus à
partir d'un matériel de départ à l’état gazeux, à l’état liquide (matériel en fusion), ou
bien en solution, quand les constituants du cristal sont dissous dans un solvant.
Dans tous les cas, que le composé de départ soit à l’état gazeux, à l’état liquide ou
en solution, la cristallisation implique le passage d'une situation dans laquelle les
constituants du matériel ne sont pas disposés dans une structure fixe et ordonnée,
à une situation où les atomes ou les molécules prennent en revanche une structure
ordonnée et précise. En vertu précisément de leur structure ordonnée, les cristaux
se trouvent dans un état de moindre énergie que les liquides ou les gaz. C'est
pourquoi, pour dissoudre, puis faire s'évaporer, un morceau de glace, il est
nécessaire de le réchauffer, c'est-à-dire de lui fournir de l'énergie. La nature tend
toujours à évoluer spontanément vers les états présentant une énergie interne
minimale compatible avec les conditions de température et de pression du
système. C'est l'un des principes fondamentaux des phénomènes naturels, qui
permet d'expliquer pourquoi la cristallisation a lieu spontanément. Naturellement,
chaque matériel cristallise dans des conditions de température et de pression bien
définies ; autrement, si l'énergie dont le système dispose est suffisante, il reste à
l’état liquide ou gazeux. Par exemple, l'énergie disponible à température ambiante
est suffisante pour maintenir l'eau dans l’état liquide. Mais si la température
descend au-dessous d'un certain seuil, le processus de cristallisation de l'eau en
glace commence spontanément.
Quand un matériel à l’état liquide est refroidi jusqu'à sa température de fusion, il
commence à se solidifier. Dans certains cas, il peut arriver que la substance reste à
l’état liquide, même à des températures inférieures à la température de fusion.
Dans ces conditions, on obtient un liquide en état de surfusion. Pour que la
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cristallisation puisse commencer, il faut que le noyau ou germe cristallin se forme.
Autrement dit, les constituants du solide, qui sont encore à l’état liquide, doivent
commencer à se lier les uns aux autres en se disposant de manière ordonnée, de
façon à former un groupe ayant les caractéristiques structurelles du cristal final. Si
le noyau cristallin ne dépasse pas une certaine taille minimale, de l'ordre d'un dix
millième de millimètre, il n'est pas stable et peut se désagréger. Inversement, si le
noyau est suffisamment grand, un nombre plus grand de particules se disposent en
ordre autour de lui, et le processus continue spontanément jusqu'à ce qu'on
obtienne un cristal macroscopique. La nucléation, c'est-à-dire la formation du noyau
cristallin, dépend du mouvement fortuit des molécules à l’état liquide ; elle est
favorisée par la faible vitesse des molécules du liquide. Toutefois, si un liquide en
surfusion restait complètement au repos, le noyau pourrait ne pas se former,
empêchant ainsi la cristallisation. En revanche, une petite intervention de
l'extérieur, comme un choc, l'introduction d'une impureté ou d'un germe cristallin
préformé, suffirait à amorcer la cristallisation.
Si le matériel de départ se trouve à l’état gazeux ou en solution, la cristallisation
commence quand la densité des constituants cristallins dépasse le seuil de
saturation. Dans ce cas également, comme pour les liquides en surfusion, il est
nécessaire que se produise la nucléation, possible ici grâce à la densité élevée des
constituants. Autrement, le seuil de saturation peut être franchi sans que la
cristallisation commence, et on peut par conséquent obtenir des gaz et des
solutions sursaturés. Dans le cas des gaz, la condition de saturation est obtenue
par abaissement de la température, tandis que pour les solutions, le rapport entre
la quantité de solvant et de soluté doit descendre au-dessous d'un certain seuil
critique. Normalement, cela a lieu si le solvant commence à s'évaporer. Prenons
l'exemple de l'eau salée. Au fur et à mesure qu'elle s'évapore, les sels
précédemment dissous recommencent à cristalliser. L'apparition des noyaux
cristallins peut être favorisée par la présence d'impuretés ou de germes cristallins
préformés. La formation des cristaux de neige, par exemple, est déclenchée par la
poussière atmosphérique en suspension dans l'air. Ces interventions externes sont
très importantes, et souvent même nécessaires pour le processus de nucléation.
En l'absence absolue d'impuretés et de perturbations externes, une solution ou une
vapeur peuvent atteindre un niveau de sursaturation de 300 %. Ce niveau ne
dépasse pas 1-5 % en présence d'impuretés.
LE POLYMORPHISME
Le polymorphisme est la propriété qu'ont de nombreux matériaux de pouvoir
présenter des structures cristallines différentes. Cela signifie que, bien que leur
composition chimique soit toujours la même, la disposition géométrique des atomes
ou des molécules qui les constituent peut varier et aboutir à la formation de cristaux
ayant des propriétés parfois très différentes. Chacune des structures qu'un cristal
peut présenter prend le nom de variant ou modification polymorphe. Ce sont la
température, la pression et le milieu chimique présents au moment de la
cristallisation qui déterminent la modification polymorphe particulière du cristal.
Cela est très important dans les études géologiques, puisque les variants
polymorphes de cristaux contenus dans les roches permettent de remonter aux
conditions qui régnaient au moment de leur formation. Le passage entre deux
modifications polymorphes peut être réversible ou irréversible. Le soufre, par
exemple, possède deux variants polymorphes : le soufre-a, à structure rhombique,
stable à une température et une pression ordinaires, et le soufre-b, à structure
9
monoclinique, stable au-dessus de 95,3 °C. Le passage d'une forme de soufre à
l’autre est toujours possible en cas de changement de température. Dans le cas du
carbone, en revanche, le passage d'un variant à l’autre n'est pas toujours possible.
L'une des formes cristallines du carbone est le diamant, qui est transparent, très
dur et isolant. Chauffé à plus de 1 500 °C, le diamant se transforme en graphitequi,
lui, est opaque, tendre, et est un excellent conducteur de courant. Le passage
inverse, du graphite au diamant, n'a jamais été observé dans la nature. On ne peut
l'obtenir qu'en laboratoire, à des pressions et des températures très élevées et
dans des milieux chimiques particuliers. Le phénomène du polymorphisme est
plutôt répandu. En plus des exemples que nous venons de décrire, rappelons
certains des composés polymorphes. Le sulfure de fer possède deux variants
possibles. La pyrite, l'un des constituants de la poudre, et la marcassite. Le
carbonate de calcium aussi peut avoir deux types de structure, la calcite et
l'aragonite. La silice ou dioxyde de silicium possède 7 variants polymorphes : le
quartz-a, le quartz-b, la tridymite-a, la tridymite-b, la cristobalite-a, la cristobalite-b
et enfin la coésite. Ce dernier variant ne peut se former qu'à des températures
élevées et à des pressions énormes, 20 mille fois plus élevées que la pression
atmosphérique. À l’état naturel, la coésite se trouve seulement dans les matériaux
produits par l'impact des météorites à la surface terrestre. Sa présence est donc
l'indice d'un impact météorique probable dans cette zone.
L'ISOMORPHISME
Tout comme à la même formule chimique peuvent correspondre des structures
cristallines différentes, la même structure cristalline peut être commune à plusieurs
solides ayant une composition chimique différente. C'est le phénomène de
l'isomorphisme, appelé parfois isotypie. Deux cristaux possédant la même structure
sont appelés isomorphes ou isostructurels. Parfois, la formule chimique de deux
cristaux isomorphes est qualitativement analogue. Le chlorure de sodium, dont la
formule est NaCl, est isomorphe au sulfure de plomb, qui a la formule PbS.
D'autres fois, en revanche, bien que la structure cristalline soit identique, il n'y a
aucune ressemblance entre les formules chimiques, comme dans le cas du sulfure
de zinc, ou blende (ZnS), isomorphe au diamant (C). Quand deux solides
isomorphes possèdent une formule chimique analogue et que les propriétés
physico-chimiques et les dimensions de leurs constituants sont semblables, ils
peuvent donner lieu à des cristaux mixtes. Par exemple, la magnésite (MgCO 3) et
la sidérite (FeCO3) peuvent constituer des cristaux mixtes ayant différentes
proportions de fer et de magnésium. Parfois, les cristaux mixtes sont aussi appelés
solutions solides.
LA THÉORIE DES BANDES D'ÉNERGIE
Une étape importante de la compréhension des propriétés des solides cristallins a
été accomplie par l'extension des principes de la mécanique quantique de l'étude
des propriétés des atomes isolés à celle des atomes ordonnés en structures
périodiques. L'application de la mécanique quantique à l'étude des solides a abouti
à l'élaboration de la théorie des bandes d'énergie. Elle n'est rigoureusement valable
que dans le cas des cristaux idéaux. Toutefois, ses prévisions ont contribué
considérablement à la compréhension du comportement de nombreux cristaux
réels.
10
Pour comprendre les principes de la théorie des bandes, il est nécessaire de partir
des propriétés des différents atomes isolés, puisque les propriétés d'un solide
dépendent dans une large mesure de celles de ses atomes. Selon les lois de la
mécanique quantique, les électrons qui entourent le noyau d'un atome isolé sont
disposés en « couches » appelées niveaux électroniques. Chaque niveau
électronique possède une énergie caractéristique bien précise, au point qu'ils sont
aussi appelés niveaux énergétiques. Les électrons d'un atome donné ne peuvent
pas par conséquent prendre une énergie quelle qu'elle soit, mais seulement
l'énergie des niveaux électroniques caractéristiques de cet atome particulier.
D'autres valeurs d'énergie sont interdites. Quand il se forme un solide, les atomes
s'approchent à des distances très petites, de l'ordre d'un dix millionième de
millimètre. À ces distances les électrons des niveaux les plus périphériques
interagissent, et leur énergie caractéristique est modifiée par rapport à l'énergie
typique de l'atome isolé. En outre, l'énergie finale du niveau perturbé est
légèrement différente dans chaque atome. Le nombre d'atomes dans un solide est
très élevé, en moyenne dix mille millions de milliards par millimètre cube. Par
conséquent, étant donné que dans chaque atome le niveau perturbé a une énergie
finale différente, les niveaux énergétiques y sont extrêmement denses, au point
qu'ils constituent un intervalle d'énergie pratiquement continu qui prend le nom de
bande. Autrement dit, si dans les atomes isolés, chaque niveau électronique
possède une énergie précise, quand les atomes sont insérés dans un réseau
cristallin, leurs niveaux s'« élargissent » pour former les bandes d'énergie. Les
différentes bandes sont séparées par des intervalles d'énergie interdite, appelés
précisément bandes interdites.
De nombreuses caractéristiques physico-chimiques fondamentales des atomes
isolés, nous l'avons vu, sont déterminées par la structure de leurs niveaux
énergétiques. De la même façon, de nombreuses propriétés des solides dépendent
de leurs bandes d'énergie, en particulier des bandes où l'énergie est la plus élevée,
la bande de valence et la bande de conduction. La théorie des bandes permet de
comprendre pourquoi il existe des cristaux opaques ou transparents, incolores ou
colorés, conducteurs de courant électrique ou isolants.
CONDUCTEURS, ISOLANTS ET SEMI-CONDUCTEURS
La théorie des bandes d'énergie permet d'expliquer de façon plutôt simple l'une des
propriétés fondamentales des matériaux : le fait qu'ils soient conducteurs de
courant électrique ou bien isolants. Les niveaux électroniques des atomes isolés,
comme nous l'avons vu, ne peuvent pas contenir plus d'un nombre déterminé
d'électrons. De la même façon, le nombre d'électrons que les bandes des solides
peuvent contenir n'est pas arbitraire. Une bande énergétique complète, c'est-à-dire
contenant le nombre maximum d'électrons permis, ne peut pas contribuer à la
conduction de courant électrique. Pour qu'il puisse y avoir conduction électrique, il
est nécessaire que la bande soit partiellement vide. Dans des conditions normales,
la bande de valence est pleine, tandis que la bande de conduction est
complètement ou partiellement vide.
Dans les conducteurs, la bande de valence et la bande de conduction sont
séparées par un intervalle d'énergie interdite très petit. Dans de nombreux cas, les
deux bandes sont même partiellement superposées, et forment une seule bande
de valence-conduction, en partie vide. Dans des conditions normales, c'est-à-dire
quand le conducteur n'est pas soumis à un champ électrique, les électrons se
meuvent au hasard dans toutes les directions. Par conséquent, il n'y a pas de
11
déplacement de charge d'une région à l’autre du matériel. Si, par contre, un champ
électrique est appliqué, une partie des électrons vient occuper les niveaux encore
vides de la bande de conduction. Au-dessous de l'action du champ électrique, leur
mouvement n'est plus complètement fortuit, mais acquiert une direction
préférentielle, déterminée précisément par le champ électrique. On a de la sorte un
déplacement de charge d'une zone à l’autre du conducteur, c'est-à-dire un courant
électrique.
Dans les matériaux isolants, la bande de valence, complète, est séparée de la
bande de conduction, entièrement vide, par un intervalle d'énergie interdite très
large. Les électrons de la bande de valence ne peuvent en aucun cas acquérir
l'énergie suffisante pour sauter la bande interdite et atteindre la bande de
conduction.
Certains matériaux, en particulier le silicium et le germanium, ont des propriétés
intermédiaires entre celles des conducteurs et des isolants purs. Dans ces
matériaux, appelés semi-conducteurs, les bandes de valence et de conduction sont
séparées par un intervalle d'énergie interdite pas trop large. Dans des conditions
normales, les électrons remplissent la bande de valence. La bande de conduction
reste vide et le matériel se comporte comme un isolant. Cependant, comme
l'intervalle d'énergie interdite n'est pas très large, il peut arriver que certains
électrons aient une énergie suffisante pour passer dans la bande de conduction,
rendant de la sorte le matériel conducteur. L'énergie nécessaire pour le saut peut
être fournie aux électrons à travers des mécanismes différents. Par exemple, le
réchauffement du matériel provoque l'augmentation de l'agitation thermique, par
conséquent de l'énergie des électrons. Mais un choc, le rayonnement lumineux ou
l'application d'un champ électrique peuvent eux aussi provoquer le même effet. Les
propriétés des semi-conducteurs expliquent leur énorme succès technologique.
Tous les circuits intégrés, aujourd'hui indispensables pour la réalisation de
n'importe quel appareil, des ordinateurs aux appareils électroménagers, des
montres aux systèmes de commande industriels, sont fabriqués au moyen de
matériaux semi-conducteurs.
LES CRISTAUX LIQUIDES
Certains matériaux, selon la température, peuvent se présenter dans des états
intermédiaires entre l’état solide cristallin et l'état liquide. Ces matériaux sont
communément appelés cristaux liquides, mais on parle parfois aussi de
mésophases ou d'états mésomorphiques. Les cristaux liquides sont formés de
molécules organiques (chimie), qui ont généralement une forme ellipsoïdale
allongée. Sous certains aspects, ils ressemblent aux liquides. Ils ont la propriété de
couler, de former des gouttes et de prendre la forme du récipient qui les contient.
Mais, à un examen plus attentif, les cristaux liquides présentent des propriétés
analogues à celles des cristaux. Par exemple, certaines de leurs caractéristiques,
comme la résistivité ou l'indice de réfraction de la lumière, sont différentes selon la
direction dans laquelle elles sont mesurées. Ces matériaux, à la différence des
liquides à proprement parler et de façon analogue aux cristaux, sont anisotropes.
Habituellement, les substances qui forment des cristaux liquides sont produites
artificiellement. Il existe cependant des cristaux liquides dans la nature aussi, en
particulier dans la matière vivante, où ils semblent remplir des fonctions
importantes. Toutefois, les études dans ce secteur sont seulement à leurs débuts
et de nombreux aspects doivent encore être éclaircis.
12
La disposition des molécules dans les cristaux liquides est intermédiaire entre la
disposition complètement ordonnée des cristaux et la disposition entièrement
désordonnée des liquides. Les molécules, de forme ellipsoïdale, tendent à se
disposer principalement avec l'axe le plus grand orienté dans des directions
déterminées. La structure finale est par conséquent dotée d'un certain degré
d'ordre. Selon leur structure, les cristaux liquides peuvent être subdivisés en trois
classes principales : les cristaux nématiques, cholestériques et smectiques.
Dans les cristaux nématiques, les axes les plus grands des molécules suivent une
seule direction, tandis que leurs barycentres sont disposés au hasard. Les
molécules peuvent tourner autour de leur axe principal ou glisser le long de la
direction de ce dernier.
Les cristaux cholestériques ressemblent aux cristaux nématiques, au point qu'ils
sont souvent considérés comme une sous-classe de ces derniers. Les molécules
sont disposées localement comme dans les cristaux nématiques, avec l'axe le plus
grand dirigé dans une direction donnée. Mais, à une échelle supérieure, la direction
des axes tourne à la façon d'un escalier en escargot. Les cristaux cholestériques
possèdent donc la structure d'une spirale dont le pas est beaucoup plus grand que
la taille typique des molécules. Les dimensions du pas sont particulièrement
importantes pour déterminer les propriétés de réflexion de la lumière visible par ces
matériaux. Le pas (réseau de diffraction) et aussi la couleur du cristal peuvent
varier facilement sous l'effet de causes externes telles que la variation de
température ou de pression ou bien l'application de champs électriques et
magnétiques.
Les cristaux smectiques sont constitués d'une série de couches de molécules
superposées. À l'intérieur de chaque couche, les molécules sont orientées dans
une seule direction, et leurs barycentres peuvent être distribués au hasard ou non.
Les différentes couches ont cependant une orientation différente et peuvent glisser
l'une sur l'autre. L'exemple le plus répandu de ce type de composés est le savon.
Ces dernières années, les possibilités d'exploiter les cristaux liquides, surtout les
cristaux nématiques et cholestériques, pour des applications pratiques se sont
multipliées.
Les cristaux nématiques sont utilisés pour la fabrication des afficheurs numériques,
appelés précisément afficheurs à cristaux liquides. La réflexivité de ces cristaux
peut être modifiée par l'application de faibles champs électriques dans les
directions opportunes. Une fine pellicule de cristal liquide est insérée entre deux
plaquettes de verre sur lesquelles les électrodes sont disposées. La forme des
électrodes et l'application des champs électriques aux points opportuns permettent
d'afficher les formes souhaitées (chiffres, lettres ou autres figures).
Pour les cristaux cholestériques, on exploite par contre leur aptitude à changer de
couleur suivant la température. Ils sont employés en effet pour la fabrication de
thermomètres. Dans ce cas également, une pellicule de cristal liquide est insérée
entre deux plaques de verre. Après avoir étalonné le thermomètre en associant à
chaque couleur une température donnée, il est possible de visualiser les
températures comprises entre 7 °C et 200 °C environ, de n'importe quelle surface.
Cette technique est utilisée, en particulier, pour certains diagnostics cliniques. La
présence de fractures ou de tumeurs provoque parfois un réchauffement
considérable de la peau au niveau de la zone intéressée. Ce réchauffement est mis
en évidence grâce aux thermomètres à cristaux liquides.
LES MÉTAUX
13
STRUCTURE ÉLECTRONIQUE ET FAMILLES DE MÉTAUX
On appelle métaux les éléments qui, en réagissant avec l'oxygène, forment les
oxydes basiques, qui peuvent à leur tour réagir avec certains acides pour former
des sels. À ces propriétés chimiques, communes aux éléments métalliques,
correspondent certaines propriétés communes à tous les cristaux métalliques. Ils
sont ductiles et malléables, leurs surfaces ont un aspect brillant, parce qu'elles
possèdent un pouvoir réfléchissant élevé, en particulier pour la lumière visible, et ce
sont des conducteurs de chaleur et de courant électrique beaucoup plus efficaces
que les cristaux non métalliques. À une température et à des pressions ordinaires,
les métaux se présentent à l’état solide, sauf le mercure, qui est liquide. Dans la
nature, la plupart des métaux ne se trouvent pas sous une forme pure. En général,
ils sont mélangés dans des composés, oxydes ou sels, dont ils doivent être extraits
au moyen de procédures de raffinage. Parmi les métaux qu'on trouve à l'état pur,
citons l'or, l'argent, le cuivre et le platine. Dans le langage commun, le terme de
métal est utilisé également pour indiquer les alliages, comme le laiton, le bronze ou
l'acier, qui tout en étant constitués d'un mélange de différents éléments, possèdent
de nombreuses caractéristiques des métaux à proprement parler.
Les éléments métalliques possèdent peu d'électrons de valence, un ou deux en
général. Pour atteindre une configuration électronique stable, c'est-à-dire un état
dans lequel le dernier niveau électronique est complet, ils tendent à céder leurs
électrons de valence. Sont des métaux typiques, par exemple, les éléments du
premier groupe de la classification périodique (lithium, sodium, potassium, rubidium
et césium) qui, comme le cuivre, l'argent et l'or, ont un seul électron de valence. Le
caractère métallique devient de moins en moins marqué au fur et à mesure que le
nombre d'électrons de valence augmente, jusqu'aux éléments non métalliques
typiques, comme l'oxygène, le soufre et le chlore, qui ont six ou sept électrons de
valence. À la différence des métaux, ces éléments tendent à acquérir les électrons
manquants pour compléter leur niveau externe et atteindre ainsi une configuration
stable.
Les métaux constituent environ 75 % des éléments existant dans la nature. Dans la
classification périodique, ils occupent les positions situées à gauche par rapport
aux éléments bore, silicium, germanium, antimoine et bismuth, qui marquent la
frontière entre métaux et non-métaux. En partant de la gauche, on trouve dans le
premier groupe de la classification périodique les métaux appelés alcalins : lithium,
sodium, potassium, rubidium et césium. Ces éléments possèdent un seul électron
de valence et ont une tendance plutôt marquée, dans certains cas même violente,
à réagir chimiquement avec d'autres éléments, en particulier avec l'oxygène. Le
deuxième groupe de la classification périodique comprend quant à lui les métaux
alcalino-terreux : béryl, magnésium, calcium, strontium et baryum. Leur tendance à
réagir avec d'autres éléments est moindre que celle des métaux alcalins. Si on se
déplace vers la droite, on trouve des métaux de moins en moins réactifs comme le
nickel, l'étain, le plomb et le cuivre, et on finit par arriver aux métaux dits nobles :
l'or, l'argent, le mercure et le platine. Ces derniers ne réagissent avec aucun
élément, à moins qu'ils ne se trouvent dans des milieux chimiques particulièrement
agressifs. La zone centrale de la classification périodique, dont font partie aussi
nombre des éléments que nous venons d'énumérer, est occupée par les métaux
dits de transition. Ces éléments ne respectent pas la règle de remplissage des
niveaux électroniques. Les électrons les plus périphériques occupent leur niveau,
même si le niveau immédiatement inférieur n'est pas encore complet. Les niveaux
incomplets contribuent à la cohésion du solide, qui est ainsi très forte. C'est pour
14
cette raison que les métaux de transition, parmi lesquels on trouve tous les métaux
les plus communs comme le fer, le cuivre et le zinc, possèdent des caractéristiques
de résistance mécanique et de température de fusion très élevées, et sont
particulièrement intéressants pour leurs applications technologiques. Parmi les
métaux de transition, on trouve aussi deux importantes familles d'éléments, dits
aussi éléments de transition interne : les lanthanides et les actinides. Bien qu'ils
appartiennent à des groupes différents de la classification périodique, les éléments
de ces deux familles ont des propriétés chimiques semblables. Parmi les actinides,
on trouve en outre certains métaux particulièrement intéressants : l'uranium, le
plutonium et le thorium.
STRUCTURE CRISTALLINE DES MÉTAUX
Les métaux possèdent des configurations cristallines très compactes ; autrement
dit, leurs atomes, à l'intérieur du solide sont très denses et occupent le plus
d'espace possible. Les structures les plus communes appartiennent aux groupes
cristallographiques relatifs à la symétrie cubique à corps centré, cubique à faces
centrées et hexagonale compacte. Plusieurs métaux présentent le phénomène du
polymorphisme : ils peuvent avoir plus d'une structure typique. Le fer, par exemple,
a une structure cubique à corps centré au-dessous de 910 °C, et prend la
configuration cubique à faces centrées jusqu'à 1 390 °C, pour revenir à la structure
cubique à corps centré au-delà de cette température. À l'intérieur des cristaux
métalliques, s'établissent des liaisons chimiques particulières, les liaisons
métalliques, qui ne se trouvent pas dans les cristaux non métalliques et dans les
molécules. Quand les atomes s'organisent dans la structure cristalline, les
électrons les plus périphériques ne sont plus liés à un atome particulier, mais
peuvent se déplacer « en sautant » d'un atome à l’autre. On peut se représenter un
réseau d'atomes pratiquement fixes, ayant un excès de charge positive puisqu'ils
ont cédé au moins un électron, plongés dans une « mer » d’électrons libres dont la
charge négative constitue le « collant » du métal.
LA CONDUCTIBILITÉ ÉLECTRIQUE DANS LES MÉTAUX
L'excellente conductibilité électrique des métaux est due précisément au fait que, à
l'intérieur du réseau cristallin, les électrons de valence ne sont pas liés à un atome
particulier, mais peuvent « sauter » d'un atome à l’autre. Du point de vue de la
théorie des bandes d’énergie, les métaux sont caractérisés par une bande de
valence et une bande de conduction très proches l'une de l'autre. Dans certains
cas, les deux bandes sont même partiellement superposées et constituent une
unique bande de valence-conduction. Parmi les métaux aussi, il existe des
conducteurs plus ou moins efficaces. La résistance électrique d'un mauvais
conducteur peut être jusqu'à 100 fois plus haute que celle d'un bon conducteur ;
quoi qu'il en soit, la résistance des métaux est de 100 à 10 000 milliards de fois
plus grande que celle d'un non-métal typique comme le soufre.
Pour obtenir un courant électrique, il faut qu'il y ait un déplacement net de charge à
l'intérieur du métal, c'est-à-dire que les électrons se meuvent principalement dans
une direction. Cela a lieu seulement en cas d'application au métal d'un champ
électrique, en mesure d'exercer une force sur les électrons et de diriger leur
mouvement dans une direction préférentielle. En l'absence de champ électrique,
les électrons sont certes mobiles et se déplacent à l'intérieur du matériau, mais leur
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mouvement se fait au hasard. Pour un électron qui se déplace dans une direction, il
y en aura un autre se mouvant dans la direction opposée, sans qu'il y ait un
déplacement net de charge.
Si le réseau cristallin était absolument parfait et que les atomes n'oscillaient pas
sous l'effet de l'agitation thermique, le mouvement des électrons de conduction des
métaux ne serait absolument pas perturbé et la résistance serait presque nulle. En
réalité, même le réseau du métal le plus pur présente de nombreux défauts, et les
atomes sont soumis à l’agitation thermique. Les défauts et les vibrations réticulaires
ainsi que les chocs sur les atomes perturbent le mouvement des électrons, qui
rencontrent par conséquent une certaine résistance. Les oscillations thermiques et,
par conséquent, la résistance électrique des métaux, augmentent
proportionnellement à la température. Dans les interactions avec les défauts et
avec les vibrations réticulaires ainsi que lors de chocs, les électrons cèdent une
partie de leur énergie au matériau qui se réchauffe. Cet effet, appelé effet Joule,
est exploité, par exemple, dans les ampoules à incandescence. Un fil de métal à
haute résistance (du tungstène en général) est parcouru par un fort courant
électrique. Le réchauffement dû à l'effet Joule suffit à rendre le filament
incandescent et lumineux. Le filament doit être renfermé dans une ampoule
contenant une petite quantité de gaz inerte. En effet, s'il était au contact de
l'oxygène de l'air, il réagirait avec ce dernier et se consumerait en quelques
instants.
LA SUPRACONDUCTIVITÉ
Quand la température est proche du zéro absolu (-273 °C), de nombreux métaux
manifestent une brusque transition et passent à l’état de supraconducteurs.
Chaque métal subit cette transition à une température bien précise, dite
température critique. Quand elle est atteinte, en l’espace de quelques millièmes de
seconde la résistance électrique du matériau s'effondre, atteignant des valeurs
jusqu'à 100 milliards de fois plus faibles que la normale. Un courant circulant dans
un supraconducteur rencontre par conséquent une résistance presque nulle et peut
durer très longtemps sans s'éteindre, comme ce n'est pas le cas dans des
conditions normales, car les électrons de conduction cèdent au fur et à mesure leur
énergie aux atomes du réseau à cause de l'effet Joule. On a pu observer qu'un
courant induit dans un anneau de cuivre supraconducteur reste pratiquement
inaltéré pendant au moins deux ans. Toutefois, il existe une limite au courant
maximum circulant dans un supraconducteur. En effet, chaque courant électrique
produit un champ magnétique induit (induction magnétique) qui, au-delà d'une
certaine intensité, détruit l’état supraconducteur en ramenant le matériau à l’état
normal.
L'effondrement de la résistance électrique n'est pas le seul effet observable dans
un matériau supraconducteur. Les supraconducteurs sont en effet parfaitement
diamagnétiques. S'ils sont plongés dans un champ magnétique, les lignes de force
de ce dernier sont « expulsées » hors du matériau ; autrement dit, l'intensité du
champ magnétique est pratiquement nulle à l'intérieur du supraconducteur.
Le phénomène de la supraconductivité dans les métaux a été observé pour la
première fois au début de ce siècle, mais ce n'est que vers la fin des années 50
qu'a été présentée une théorie expliquant leur comportement. On trouve des
supraconducteurs dans chacune des classes de symétrie cristalline des métaux.
Toutefois, le phénomène n'a jamais été observé dans les métaux alcalins, dans les
métaux nobles, ferromagnétiques et antiferromagnétiques. Fait surprenant, les
16
supraconducteurs les meilleurs, bien souvent, ne sont pas, dans des conditions
normales, de bons conducteurs. Plus surprenant encore, on a découvert ces
dernières années des matériaux non métalliques, parfaitement isolants à
température ambiante, qui deviennent supraconducteurs à des températures
beaucoup plus hautes que les métaux. Ces matériaux, dits supraconducteurs à
haute température, pourraient permettre d'exploiter la supraconductivité pour des
applications à l'échelle industrielle, ce qui ouvrirait d'importantes perspectives. Leur
température critique élevée (quelques dizaines de degrés au-dessous de 0 °C)
permet de pallier la plupart des problèmes que pose l'exploitation pratique des
supraconducteurs métalliques, dont les températures critiques sont proches du
zéro absolu. Toutefois, le comportement des supraconducteurs à haute
température demeure mystérieux sous plus d'un aspect, et constitue l'un des défis
les plus intéressants à l'heure actuelle pour les physiciens de l'état solide.
LA CONDUCTIBILITÉ THERMIQUE
Les métaux ne sont pas seulement des conducteurs de courant électrique, ils sont
aussi d'excellents conducteurs de chaleur (conduction thermique). Autrement dit, ils
possèdent une conductibilité thermique très haute, jusqu'à 100 fois plus grande que
celle des matériaux non métalliques. Cela signifie que, si par exemple une barrette
métallique est réchauffée à une extrémité, la chaleur « s’écoule » à travers le
métal, de sorte que bientôt l'autre extrémité aussi se réchauffe. C'est la raison pour
laquelle les manches des casseroles dont nous nous servons ne sont pas en métal,
mais sont réalisés dans des matériaux particuliers, qui possèdent une faible
conductibilité thermique. Il existe une étroite corrélation entre la bonne
conductibilité électrique et la bonne conductibilité thermique des métaux. En effet,
ici encore, les principaux responsables du transport de la chaleur sont les électrons
de conduction.
Du point de vue énergétique, le transport de chaleur correspond au transfert
d'énergie thermique d'une zone dans laquelle les vibrations réticulaires sont très
intenses, c'est-à-dire une zone chaude, à une zone dans laquelle les vibrations
sont moins intenses, à savoir une zone plus froide. Dans les métaux, ce
phénomène peut avoir lieu selon deux mécanismes. Le premier est la propagation
directe des vibrations réticulaires. Les atomes « chauds », ceux qui oscillent le plus,
excitent leurs voisins ; les vibrations thermiques se propagent ainsi à travers le
réseau jusqu'à ce que la température du matériau soit uniforme. Le deuxième
mécanisme implique en revanche les électrons de conduction. Dans les zones
chaudes, les vibrations réticulaires excitent les électrons de conduction en cédant
leur part d'énergie ; ces électrons se portent ensuite dans les régions plus froides,
où ils cèdent à leur tour une partie de l'énergie aux atomes du réseau, ce qui en
augmente les oscillations thermiques. Dans les métaux, ce dernier mécanisme est
de loin le plus fréquent. Dans le cuivre pur à température ambiante, par exemple, il
est responsable de 99 % de la conductibilité thermique.
Aussi bien la propagation directe des vibrations réticulaires que le mouvement des
électrons de conduction sont très sensibles à la température et aux défauts du
réseau cristallin. Cela signifie que la conductibilité thermique varie de façon plutôt
compliquée en fonction de la température et de la pureté du matériau.
LES PROPRIÉTÉS MAGNÉTIQUES DES MÉTAUX
17
Les propriétés magnétiques des solides en général, et des métaux en particulier,
dépendent essentiellement de celles des atomes dont ils sont constitués.
Les champs magnétiques y sont générés par des charges électriques en
mouvement, c'est-à-dire par des courants électriques. À l'intérieur des différents
atomes, il existe deux sources possibles de champs magnétiques. La première est
constituée par les électrons, qu'on peut se représenter comme des aimants
microscopiques. Les électrons possèdent un moment magnétique intrinsèque,
appelé moment magnétique de spin, qui les rend sensibles à l'action de champs
magnétiques externes. La deuxième source de champs magnétiques à l'intérieur
des atomes est liée au mouvement des électrons. Puisque les électrons sont
chargés, leur mouvement génère des microcourants électriques qui, à leur tour,
sont la source de faibles champs magnétiques et donnent lieu aux moments
magnétiques orbitaux. La somme des moments magnétiques de spin et des
moments magnétiques orbitaux est le moment magnétique total de l'atome. Il existe
des éléments dans lesquels les moments de spin et les moments orbitaux se
compensent exactement, si bien que l'atome est dépourvu de moment magnétique
total. D'autres atomes, par contre, se comportent à leur tour comme des « microaimants », autrement dit ils possèdent un moment magnétique total qui, en
présence d'un champ externe, s'oriente selon la direction de ses lignes de force.
La réaction des solides à la présence de champs magnétiques externes est due à
la réaction collective de leurs atomes. Les solides peuvent être subdivisés en trois
catégories principales, présentant des comportements magnétiques différents : les
matériaux diamagnétiques, les matériaux paramagnétiques et les matériaux
ferromagnétiques.
Les solides diamagnétiques sont généralement constitués d'atomes dépourvus de
moment magnétique. Toutefois, l'application d'un champ externe perturbe le
mouvement des électrons. Cela a pour effet la génération dans le matériau d'un
champ magnétique orienté dans le sens contraire du champ externe appliqué.
Ainsi, l'intensité du champ magnétique total à l'intérieur du matériau, somme du
champ externe et du champ induit dans le solide, est plus faible que celle du
champ externe appliqué. Dans les matériaux parfaitement diamagnétiques, comme
par exemple les supraconducteurs, le champ induit compense exactement le
champ externe. Par conséquent, le champ à l'intérieur du supraconducteur est
pratiquement nul. Remarquons qu'un faible effet diamagnétique peut être observé
dans tous les matériaux plongés dans un champ magnétique. Toutefois, exception
faite des matériaux diamagnétiques à proprement parler que nous venons de
décrire, l'effet est masqué par les effets paramagnétiques et ferromagnétiques qui
sont beaucoup plus intenses.
Les solides paramagnétiques sont constitués d'atomes dotés d'un moment
magnétique propre. Quand aucun champ externe n'est appliqué, les moments des
atomes sont orientés au hasard sous l'effet de l'agitation thermique, et leurs
contributions s'annulent réciproquement. L'application d'un champ externe amène
en revanche un alignement partiel des moments atomiques suivant la direction du
champ, qui se trouve ainsi renforcé. Plus grande est l'intensité du champ, meilleur
est l'alignement et, par conséquent, l'effet de « renforcement ». Au contraire,
l'augmentation de la température et, ainsi, de l'agitation thermique qui tend à
rompre l'alignement, a pour effet un affaiblissement de la magnétisation.
Les matériaux ferromagnétiques, qui ne comptent que des métaux, sont eux aussi
constitués d'atomes ayant un moment magnétique propre. Ils doivent leur nom au
fer, qui est leur représentant le plus commun. Du point de vue de l'alignement des
moments atomiques, ces matériaux sont subdivisés en régions, dites domaines de
Weiss, qui peuvent atteindre des dimensions importantes (de 1/10 à 1 mm). À
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l'intérieur des domaines, l'alignement des moments magnétiques atomiques est
total. Toutefois, les différents domaines sont orientés de façon arbitraire et, en
l'absence de champs externes, leurs effets s'annulent réciproquement. L'application
d'un champ externe provoque un alignement des domaines d'autant plus exact que
le champ est plus intense. Quand l'alignement est complet, l'effet de
« renforcement » du champ externe est maximum, et on atteint ce qu'on appelle la
magnétisation de saturation. Si, à ce point, le champ externe est éliminé, les
domaines de Weiss restent partiellement alignés, le matériau devenant par
conséquent un aimant. La température joue un rôle fondamental dans ces
processus. L'alignement des domaines n'est obtenu qu'au-dessous d'une
température critique, caractéristique de chaque métal : la température de Curie. Audessus de cette température, l'agitation thermique suffit toujours à empêcher
l'alignement complet, et le matériau se comporte toujours de façon
paramagnétique. Inversement, quand un aimant est réchauffé au-dessus de la
température de Curie, ses domaines perdent leur alignement et la magnétisation
disparaît. Les aimants sont des objets plutôt communs, dont les propriétés sont
connues depuis l'Antiquité. Toutefois, ce n'est que dans les premières décennies
de notre siècle qu'a été fournie une interprétation théorique satisfaisante de leur
comportement, grâce à la mécanique quantique. En effet, les théories classiques
ne permettent pas d'expliquer chaque aspect des propriétés des matériaux
ferromagnétiques. En particulier, il est nécessaire de recourir à la mécanique
quantique pour expliquer correctement le comportement des matériaux
ferromagnétiques au-dessous de la température de Curie et de l'alignement des
moments magnétiques atomiques à l'intérieur des domaines de Weiss.
Dans les antiferromagnétiques, comme dans les matériaux ferromagnétiques, les
moments atomiques sont alignés, mais leurs sens sont alternativement opposés.
Naturellement, leur effet s'annule, et ces matériaux ne présentent pas d'effets
magnétiques macroscopiques. Citons, pour finir, les matériaux ferrimagnétiques,
qui ressemblent aux antiferromagnétiques, sauf en ce qui concerne l'intensité des
moments atomiques opposés.
Les métaux possèdent des propriétés magnétiques très variables et sont aussi bien
paramagnétiques que dia- ou ferromagnétiques. Les applications les plus
intéressantes concernent surtout les matériaux ferromagnétiques. Les matériaux
ferromagnétiques naturels les plus communs sont le fer, le nickel et le cobalt. Mais
on a mis au point aussi des alliages métalliques ayant des propriétés
ferromagnétiques très marquées, qui permettent d'obtenir des aimants très
puissants. Ils sont employés surtout en électrotechnique, pour la construction de
générateurs et de transformateurs électriques. Citons également les ferrites, dont
les applications, surtout en électronique, sont importantes. Il s'agit de substances
ferromagnétiques, non métalliques, au moyen desquelles on fabrique les mémoires
magnétiques rapides des ordinateurs.
LES SURFACES MÉTALLIQUES
Bien qu'ils soient libres de se déplacer à l'intérieur du métal, les électrons de
conduction ne peuvent pas quitter la surface de ce dernier. En effet, il y a à la
surface du matériau une barrière d'énergie, caractéristique de chaque matériau, qui
empêche à la plupart des électrons de sortir. Il peut arriver toutefois que certains
électrons aient, ou acquièrent, assez d'énergie pour franchir la barrière de surface.
Il existe deux mécanismes particulièrement intéressants grâce auxquels les
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électrons échappent à la surface des métaux : l'effet photoélectrique et l'effet
tunnel.
L'effet photoélectrique
L'effet photoélectrique, ou photo-émission, consiste dans l'émission d'électrons par
un matériau, provoquée par des radiations électromagnétiques, généralement la
lumière visible ou ultraviolette, mais aussi par des radiations infrarouges, des
rayons X et des rayons g. Ce phénomène peut se produire également dans les
liquides ou dans les gaz, mais est beaucoup plus fréquent dans les solides, en
particulier dans les métaux. Rappelons que l'effet photoélectrique, dont l'explication
fut fournie par Albert Einstein en 1905, ce qui lui valut le prix Nobel, est l'un des
effets expérimentaux les plus évidents de la nature corpusculaire de la lumière. Au
début du siècle, ce fut l'une des preuves décisives à l'appui de la théorie de la toute
nouvelle mécanique quantique. L'émission d'électrons provoquée par des
radiations électromagnétiques s'explique de façon très naturelle si on pose que les
radiations, au lieu d'ondes continues, sont constituées de faisceaux de particules,
dits photons. Il existe une relation précise entre l'énergie des photons et la
fréquence de la radiation. L'énergie des photons est égale à la fréquence de la
radiation multipliée par une constante universelle, dite constante de Planck, du nom
du physicien Max Planck, qui l'introduisit le premier, en 1899. Ainsi, plus élevée est
la fréquence d'une radiation, plus grande est l'énergie de ses photons. Par exemple
les rayons X, caractérisés par une fréquence élevée et une petite longueur d'onde,
sont beaucoup plus énergétiques que les radiations infrarouges, caractérisées par
une fréquence faible et une grande longueur d'onde. Rappelons que, dans la
lumière visible, la fréquence détermine la couleur de la lumière et augmente en
passant du rouge au violet. L'intensité d'une radiation de fréquence fixée détermine
en revanche le nombre de photons d'énergie correspondante. Quand les photons
de la lumière incidente frappent les électrons du métal, ils cèdent à ces derniers
toute leur énergie. Si cette énergie est suffisante, les électrons peuvent sauter la
barrière de surface et sortir du métal. L'émission d'électrons commence de façon
brusque et improvisée dès que l'énergie de la radiation, c'est-à-dire sa fréquence,
est suffisante pour permettre aux électrons de dépasser la barrière superficielle.
L'émission d'électrons a lieu même si l'intensité de la radiation est très basse. En
effet, elle dépend exclusivement de la fréquence de la radiation, c'est-à-dire de
l'énergie que les photons peuvent céder aux électrons, et non de l’intensité, c'est-àdire du nombre des photons. Une radiation plus intense, ayant plus de photons,
provoque seulement l'émission d'un nombre électrons plus élevé.
L'effet photoélectrique est exploité pour la construction d'instruments permettant de
détecter des intensités lumineuses même très basses. En exploitant la possibilité
d'« amplifier » les électrons émis par effet photoélectrique, ces instruments, dits
phototubes ou photomultiplicateurs, permettent de relever des radiations d'intensité
de quelques dizaines de photons. Les cellules photoélectriques des appareils
photographiques exploitent elles aussi l'effet photoélectrique. Dans ce cas, le
nombre d'électrons émis est plutôt élevé, suffisant pour constituer un faible courant
électrique proportionnel à l’intensité de la lumière qui frappe la cellule
photoélectrique. La mesure de ce courant et, par conséquent, de l'intensité
lumineuse, est visualisée dans le viseur de l'appareil ou bien directement utilisée
pour le réglage automatique de l'appareil photographique.
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L'effet tunnel
Si l'effet photoélectrique est l'une des preuves expérimentales de la nature
corpusculaire des radiations électromagnétiques, l'effet tunnel est en revanche
l'une des preuves les plus évidentes de la nature ondulatoire des électrons. Tout
comme l'effet photoélectrique, l'effet tunnel ne s'explique que dans le cadre de la
théorie de la mécanique quantique, alors qu'il échappe complètement aux
prévisions de la mécanique classique. Selon la mécanique classique, une particule
ne peut pas dépasser une barrière énergétique si elle ne possède pas l'énergie
suffisante pour en atteindre et en franchir le sommet. Dans le cadre de la
mécanique quantique, en revanche, les particules peuvent être décrites comme des
paquets d'onde. Dans ce cas, il existe une probabilité que la particule-onde pénètre
à l'intérieur de la barrière et, dans certaines conditions, la franchisse, même si son
énergie est inférieure à celle de la barrière. C'est comme si la particule traversait un
tunnel qui lui permet de passer de l’autre côté. Grâce à ce mécanisme, les
électrons de conduction des métaux peuvent, dans certains cas, franchir la barrière
de surface.
L'une des applications les plus récentes et les plus intéressantes de l'effet tunnel
est le microscope à effet tunnel, ou STM, de l'Anglais Scanning Tunneling
Microscope. Dans cet instrument, une pointe métallique très fine, dite tip, est
approchée de la surface d'un échantillon conducteur jusqu'à environ
20 millionièmes de millimètre. Quand on applique entre l'échantillon et la pointe une
différence de potentiel électrique, certains électrons « perforent » par effet tunnel la
barrière présente entre la pointe et l'échantillon et établissent un faible courant
électrique entre eux. Si le courant est constant, la pointe est contrainte de garder la
même distance par rapport à l'échantillon et, si on la déplace, elle suit les
irrégularités de la surface, dont elle fournit des images très spectaculaires. Le STM
permet littéralement de voir le profil des atomes de la surface et constitue par
conséquent une source d'informations irremplaçable pour les chercheurs. En effet,
la présence d'une surface est une perturbation considérable de la régularité d'un
réseau cristallin qui, pour le moins dans les cristaux idéaux, est infiniment étendu et
dépourvu de surfaces. Très souvent, à cause de cette perturbation, les atomes de
la surface se disposent suivant des séquences différentes de celle des atomes
sous-jacents. Les techniques habituelles de recherche cristallographiques, comme
la diffraction à rayons X, ne permettent pas de remonter à la disposition atomique
de la surface, ce que rend possible à présent le STM.
AUTRES SOLIDES
LES SEMI-CONDUCTEURS
Les semi-conducteurs sont des éléments, ou substances composées, dont les
propriétés électriques sont intermédiaires entre celles des conducteurs et celles
des isolants électriques purs. Du point de vue de la théorie des bandes, ils se
caractérisent par une bande de valence (semi-conducteurs) et une bande de
conduction séparées par un intervalle d'énergie assez étroit pour que les électrons
puissent le franchir sous l'effet de l'agitation thermique ou d'autres causes externes
(chocs, illumination, etc.). Dans les semi-conducteurs, le nombre d'électrons dans
la bande de conduction et, par conséquent, la conductivité électrique, augmentent
proportionnellement à la température. Rappelons qu'on a un effet opposé dans les
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métaux, dans lesquels la conductivité électrique diminue au fur et à mesure que le
matériau se réchauffe, le nombre d'électrons de conduction étant indépendant de la
température, tandis que leur mouvement est gêné par la température, plus élevée.
Les deux éléments semi-conducteurs les plus répandus sont le silicium et le
germanium. Ils appartiennent tous deux au groupe IV de la classification périodique
et ont la même structure cristalline que le diamant. D'autres éléments semiconducteurs assez répandus sont le bore (groupe III), le sélénium et le tellurium
(groupe VI). La plupart des composés semi-conducteurs sont constitués toutefois
d'un élément du IIIe et d'un élément du groupe V de la classification périodique.
Parmi les autres éléments, rappelons l'arsenic de gallium, le phosphore de gallium,
l'antimoniure d'aluminium, l'antimoniure d'indium et l'antimoniure de gallium. Il
existe aussi des semi-conducteurs constitués d'éléments des groupes II et VI.
Parmi ceux-ci, le plus important est le sulfure de zinc ou blende. La blende, comme
de nombreux autres composés semi-conducteurs, a la même structure cristalline
que le diamant, mais avec des atomes de l'un et de l'autre élément alternés dans le
réseau.
Pour expliquer le comportement électrique des semi-conducteurs, considérons, à
titre d'exemple, le cas du silicium. À de basses températures, les 4 électrons de
valence des atomes de silicium participent aux liaisons covalentes avec les atomes
voisins. Ils sont ainsi localisés dans la région de la liaison et ne peuvent pas
transporter de courant. Du point de vue de la théorie des bandes, la bande de
valence est pleine, tandis que la bande de conduction est vide et le silicium se
comporte comme un isolant. Au fur et à mesure que la température monte, une
partie des électrons peut acquérir assez d'énergie pour rompre les liaisons. Ils
deviennent alors des électrons libres, en mesure de se mouvoir dans le matériau et
de contribuer à la conduction de courant électrique. Le silicium devient conducteur
et sa conductivité s'améliore au fur et à mesure que la température augmente et
qu'un nombre toujours plus grand d'électrons sont libérés. La libération d'un
électron n'est pas le seul effet de la rupture d'une liaison. Quand l'électron échappe
à la région de liaison, il laisse derrière lui un trou, appelé lacune, qui est à son tour
occupé par un autre électron libre, qui crée une autre lacune dans un site différent,
et ainsi de suite. De cette façon, la lacune se déplace dans le matériau puisque elle
est occupée et recréée dans un autre site. Les lacunes aussi participent à la
conduction électrique, puisque elles peuvent être considérées comme des charges
positives se déplaçant dans le matériau. Autrement dit, chaque fois qu'une liaison
est brisée dans un semi-conducteur, il se forme un électron libre, ayant une charge
négative, et une lacune, ayant charge positive, qui, sous l'influence d'un champ
électrique, se déplacent dans le matériau dans des directions opposées et
contribuent tous deux à la conduction électrique.
Dans un semi-conducteur constitué d'un seul type d'atome, comme le silicium pur
que nous venons de décrire, la rupture de chaque liaison porte à la formation d'un
couple de porteurs de charge, c'est-à-dire d'un couple électron-lacune. Le nombre
d'électrons libres est égal à celui des lacunes et augmente proportionnellement à la
température, améliorant ainsi la conductibilité électrique du matériau. Ces semiconducteurs sont appelés intrinsèques. Ils présentent cependant peu d'intérêt en
termes d'application, car aux températures ordinaires le nombre de couples
électron-lacune est encore très bas et le matériau, en pratique, est un isolant. Les
semi-conducteurs extrinsèques sont beaucoup plus intéressants du point de vue
des applications. Dans ces derniers, le nombre d'électrons ou de lacunes est
augmenté artificiellement par l'ajout de petites quantités d'impuretés externes.
Cette procédure est appelée dopage du semi-conducteur. Pour doper un semiconducteur ayant 4 électrons de valence, comme le silicium, on peut utiliser des
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atomes ayant 5 électrons de valence (par exemple antimoine, arsenic, azote ou
phosphore) ou bien des atomes ayant 3 électrons de valence (aluminium, bore,
gallium ou indium). Les atomes de l'élément dopant remplacent ceux du matériau
dopé dans certains sites cristallins. Ils sont introduits dans des pourcentages plutôt
faibles, par exemple un atome de dopant par milliard d'atomes de dopé. Si on
utilise des éléments dopants ayant 5 électrons de valence, 4 d'entre eux participent
aux liaisons avec les atomes du semi-conducteur, tandis que le cinquième reste
pratiquement libre pour la conduction électrique. Les semi-conducteurs ayant un
excédent d'électrons, provenant des atomes de l'élément dopant, sont appelés
semi-conducteurs de type n, ou plus simplement semi-conducteurs n, car la
majorité des porteurs de charge sont des électrons, de charge négative. Si, par
contre, on utilise des éléments dopants ayant 3 électrons de valence, le semiconducteur présente un excédent de lacunes. Dans ce cas, on parle de semiconducteurs de type p, puisque les lacunes peuvent être considérées comme
porteuses de charge positive.
La découverte et l'emploi des semi-conducteurs a représenté une véritable
révolution dans le domaine de l'électronique. En effet, les constituants
fondamentaux de tous les circuits électroniques, diodes et transistors, sont
constitués de couches de semi-conducteur p alternées à des couches de semiconducteur n. Les technologies modernes ont permis de réduire considérablement
les dimensions de ces dispositifs. Aujourd'hui les circuits intégrés, les « puces »,
plus petits que la phalange d'un doigt, contiennent des milliers de diodes et des
transistors. Une technique particulière, dite croissance épitaxiale, a été mise à point
récemment. Elle permet de construire des dispositifs, appelés wafers, dans
lesquels les couches de semi-conducteurs ont l'épaisseur d'un seul atome.
LES MATÉRIAUX AMORPHES
La plupart des matériaux solides se présentent dans la nature à l'état cristallin.
Celui-ci est caractérisé par le fait que les atomes sont disposés de façon ordonnée
et régulière, selon une séquence qui se répète périodiquement dans les trois
dimensions de l'espace. Toutefois, il existe quelques exceptions, autrement dit, il
existe des matériaux solides dont la structure atomique n'est ni ordonnée ni
périodique. Ces matériaux sont dits amorphes. Les plus répandus dans la nature
sont les verres et les roches volcaniques. Rappelons cependant que la plupart des
solides, qui sont normalement à l'état cristallin, sont obtenus aussi à l'état amorphe
suivant des procédures de préparation particulières.
Pour comprendre de façon intuitive quel est le mécanisme qui porte à la formation
d'une substance amorphe, rappelons brièvement le processus qui mène à la
formation des cristaux, la cristallisation. Quand le matériau en fusion est refroidi, les
atomes commencent à se disposer de façon ordonnée, selon la configuration
typique du cristal. Ce processus requiert cependant un certain temps. Les atomes
doivent avoir le temps de former d'abord le noyau cristallin, puis le réseau, et de
passer de l'état désordonné du liquide à l'état ordonné du cristal. Autrement dit, le
refroidissement du mélange fondu doit être lent, car il faut que le matériau soit
encore à l'état liquide pour que ses atomes puissent se déplacer et atteindre leur
place dans le réseau. Si, par contre, le refroidissement est rapide, les atomes n'ont
pas le temps d'atteindre une configuration ordonnée. Leur position est « congelée »
à un stade intermédiaire entre le stade complètement désordonné du liquide et le
stade complètement ordonné du cristal. Il existe de très nombreuses techniques,
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parfois très différentes, pour obtenir des matériaux amorphes. Toutefois, toutes se
fondent sur le principe consistant à refroidir brusquement le mélange en fusion.
Les propriétés et les caractéristiques des matériaux amorphes présentent différents
aspects qui n'ont pas encore été éclaircis. L'étude de ces substances est l'un des
thèmes sur lesquels se concentrent les recherches de physique de l'état solide, de
chimie et d'ingénierie des matériaux. Par exemple, on n'a pas encore éclairci les
mécanismes de formation des matériaux amorphes. Le processus de formation
joue un rôle très important dans l'établissement de certaines des caractéristiques et
des propriétés finales du matériau. Deux échantillons de la même substance
peuvent présenter des propriétés sensiblement différentes s'ils sont préparés au
moyen de techniques différentes, ou même s'ils sont obtenus grâce à la même
technique, mais en modifiant les conditions externes, comme par exemple la
température de départ du mélange en fusion ou la vitesse de refroidissement.
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