DESBROSSES Estelle Correction : SURGOT Sophie EQUILIBRE HYDROMINERAL SELON LES MILIEUX (UN EXEMPLE MARIN, UN EXEMPLE DULCAQUICOLE, UN EXEMPLE AERIEN) Définition des termes du sujet : Equilibre hydrominéral : équilibre en eau et sels minéraux Dulçaquicole : qualifie un organisme qui vit dans les eaux douces Les problèmes de conservation de l’eau et de maintien des concentrations en solutés constantes varient en fonction de l’environnement. De plus ces mécanismes de conservation de l’eau sont complètement différents pour les animaux marins, dulçaquicoles et terrestres. Les animaux vivants dans des environnements différents ont des mécanismes d’osmorégulation différents. I) L’ OSMOREGULATION EN MILIEU MARIN a) Caractéristiques générales de l’eau de mer L’eau de mer a une osmolarité d’environ 1,1 Osm. L -1 (elle contient environ 3,5% de sels). Cette osmolarité est due principalement aux ions qu’elle contient. VOIR TABLEAU N°1 D’autres ions interviennent également dans la composition de l’eau de mer, ce sont les ions Ca2+ et K+. La composition est toute de fois variable selon les régions étudiées. Les animaux aquatiques euryhalins sont ceux qui peuvent tolérer des variations de salinité assez larges (ex : animal vivant dans une eau saumâtre), tandis que les sténohalins ne tolèrent que des variations étroites de salinité. Na+ 470 mOsm.L-1 soit 10,8 g.L-1 Cl- 545 mOsm.L-1 19,4 g.L-1 Mg2+ 53,5 mOsm.L-1 1,3 g.L-1 SO42- 28,2 mOsm.L-1 2,7 g.L-1 TABLEAU N°1 : COMPOSITION DE L’EAU DE MER b) Le cas d’un téléostéen d’eau de mer : Exemple : Les liquides organiques des Téléostéens marins sont hypotoniques par rapport à l’eau de mer, c'est-à-dire que la concentration osmotique (300 mOsm L -1) de ses liquides corporels est inférieure à celle du milieu dans lequel il vit. (1100 mOsm. L -1). Ces poissons ont donc tendance à perdre de l’eau par osmose dans le milieu plus concentré en ions. Leur corps, en particulier les branchies sont perméables à l’eau. (Cette perte en eau s’effectue aussi par l’urine). Pour compenser cette perte en eau ces poissons vont boire de l’eau de mer car c’est par cette voie que les sels vont être renouvelés plutôt que par des échanges à travers la peau ou les branchies. Bien que cet apport restaure la teneur en eau de l’animal, de grandes quantités de sels sont ingérées et absorbées par le tube digestif en même temps. Cette absorption de sels augmente la concentration saline du corps et cet excès d’ions devient un problème et ces ions doivent être éliminés dans une solution plus concentrée que l’eau dans laquelle ils ont été prélevés. VOIR SCHEMA 1 Le rein des téléostéens est incapable de remplir ce rôle car il ne produit pas une urine plus concentrée que le sang. D’autres organes vont donc éliminer les ions en excès, ce sont les branchies qui ont une double fonction, elles participent aux échanges gazeux et à la régulation osmotique. Les branchies des téléostéens marins sont constituées d’un épithélium spécialisé composé de cellules à chlore qui interviennent dans le transport du NaCl du sang vers le milieu externe. (Transport actif puisqu’il se fait depuis le sang peu concentré vers le milieu extérieur à plus forte concentration.) SCHEMA 1 : ECHANGES D’EAU ET DE SOLUTES CHEZ UN TELEOSTEEN c) Les branchies et le fonctionnement des cellules à chlore SCHEMA 2 : LA STRUCTURE DE LA BRANCHIE DE TELEOSTEEN La surface épithéliale des branchies est très développée, elle fonctionne en tant qu’organe respiratoire et en tant qu’organe osmorégulateur. VOIR SCHEMA 2 En effet les branchies participent non seulement aux échanges gazeux mais aussi à diverses fonctions comme le transport d’ions, l’excrétion des déchets azotés et le maintien de l’équilibre acido-basique. L’épithélium qui sépare le sang du milieu aqueux et formé de différents types de cellules : des cellules à mucus, des cellules à chlore et des cellules pavimenteuses. L’épithélium des lamelles branchiales est surtout formé de cellules pavimenteuses plates (l’épaisseur n’excède pas 3-5 µm) qui contiennent beaucoup de mitochondries. Ces lamelles sont bien adaptées aux échanges respiratoires car du fait de leur faible épaisseur elle représente une barrière minimale à la diffusion des gaz. Cet épithélium contient également des cellules à chlore qui ont une membrane basale très plissée contenant beaucoup de mitochondries et d’enzymes impliquées dans le transport actif de sels. VOIR SCHEMA 3 SCHEMA 3 : L’EPITHELIUM DE LA BRANCHIE ET LES CELLULES ASSOCIEES Les cellules à chlore ont été décrites en 1932 par A Keys et E Willmer, ils leur attribuaient un rôle dans le transport du chlore. Ensuite, d’autres études histochimiques ont confirmé la présence de niveaux élevés de chlore dans ces cellules. Le mécanisme de transport des cellules à chlore est le suivant ; ces cellules présentent à la fois beaucoup de Na+/K+ ATPases et de cotransporteurs Na/2Cl/K dans leur membrane basale et des canaux à chlore dans la membrane apicale. Chaque cellule est associée à une cellule accessoire différente des cellules pavimenteuses. Le sodium va diffuser du sang vers l’eau de mer par des canaux paracellulaires placés entre les cellules à chlore et les cellules accessoires. Ces cellules interviennent également dans les échanges d’ions Ca2+. Ces ions présents dans l’eau sont prélevés à travers les canaux à calcium de la membrane apicale des cellules à chlore. Puis on observe un transport actif dans le sang par une Ca2+ATPase qui est aussi localisée dans la membrane basale. VOIR SCHEMA 4 SCHEMA 4 : LE FONCTIONNEMENT DES CELLULES A CHLORE II) L’OSMOREGULATION EN EAU DOUCE a) Caractéristiques générales de l’eau douce L’eau douce à une osmolarité variant de 0,1 à 10 mOsm.L-1. D’infimes quantités de sels sont présentes dans l’eau de pluie mais cette eau va voir sa composition modifiée par son passage dans le sol. Les ions contenus dans l’eau de pluie proviennent de la mer : les gouttelettes de l’océan s’évaporent, des particules de sels vont être transportées par les courants aériens et vont retomber avec la pluie. Suivant la roche traversée on va distinguer deux types d’eaux : l’eau douce et l’eau dure. L’eau sera dite douce si elle coule sur une roche dure et insoluble comme du granite, en effet l’eau ne va dissoudre qu’un peu de matériel. L’eau sera dite dure si elle coule, par exemple, à travers un calcaire poreux car elle pourra dissoudre une grande quantité de sels. VOIR TABLEAU 2 TABLEAU 2: COMPOSITIONS IONIQUES DE DIFFERENTES EAUX b) Le cas d’un téléostéen d’eau douce Exemple : Les liquides internes de téléostéen d’eau douce sont généralement hyperosmotiques par rapport à l’eau environnante. Ils ont une osmolarité sanguine de l’ordre de 200 à 300 mOsm.L-1 alors que l’eau douce à une osmolarité de 0,1 à 10 mOsm.L-1. Ces animaux vont donc avoir tendance à gonfler à cause du gradient osmotique dû à des mouvements d’eau vers le corps. D’autre part ils tendent à perdre continuellement des sels vers le milieu extérieur dont la salinité est faible. Les téléostéens doivent donc empêcher l’entrée d’eau et la perte de sels par différents moyens. Pour éviter la surcharge en eau un des moyens utilisés est de produire une urine très diluée. Cette urine, produite par le rein est très abondante (jusqu’à 30g d’eau pour 100g de poids corporel par 24h) Les sels utiles sont, pour certains, retenus par une réabsorption par le sang à partir de l’ultrafiltrat tubulaire (ce qui permet d’obtenir un urine très diluée). Mais on a quand même certains sels biologiquement importants tels que KCl, NaCl et CaCl2 qui passent dans l’urine. c) le rôle des branchies Mise en évidence de la réabsorption de sel chez un téléostéen d’eau douce : VOIR SCHEMA 5 SCHEMA 5 : MISE UN EVIDENCE D’UN TRANSPORT ACTIF AU NIVEAU DES BRANCHIE On place un poisson dans un bac à deux compartiments où les échanges au niveau de la tête et du corps peuvent être étudiés séparément. Dans cette expérience, l’entrée active des ions se produit dans le compartiment antérieur ; c'est-à-dire au niveau de la tête (branchies et bouche). On peut ainsi conclure que la peau a un rôle minime, voire nul, dans l’absorption active d’ions. Les téléostéens ont la capacité de prélever des sels dans leur environnement. Ils sont capables d’extraire Na+ et Cl- par leurs branchies sur le milieu contenant moins de 1mM de NaCl. Le transport actif dans la branchie peut donc agir contre un gradient de plus de 100 fois. Ce mécanisme de réabsorption dépend d’une pompe électrogène à protons de type ATPase, qui rejette activement les protons vers l’environnement. Les cellules pavimenteuses des branchies des poissons d’eau douce contiennent une pompe à protons ATPase et des canaux sodium situés dans la membrane apicale. La proton ATPase est probablement électrogène et pompe les protons pour les rejeter vers l’extérieur des branchies. Ceci va générer un potentiel qui entraîne le Na+ dans la cellule. L’épithélium branchial de ces poissons possède aussi des cellules à chlore qui vont intervenir dans le prélèvement de Ca2+ sur l’eau. Elles sont différentes des cellules à chlore des téléostéens marins car elles renferment des transporteurs d’anions dans la membrane apicale et beaucoup de pompes intracellulaires qui pourraient intervenir dans le prélèvement de chlore et de calcium. III) L’OSMOREGULATION EN MILIEU AERIEN a) Les principales caractéristiques du milieu aérien Le principal avantage de ce milieu est un accès facile au dioxygène, le principal désavantage est le risque de déshydratation. Cette déshydratation résulte de l’évaporation qui se produit au niveau du tégument s’il est perméable à l’eau mais également au niveau des poumons. L’osmorégulation en milieu terrestre doit permettre de contrebalancer l’évaporation qui prend place au niveau des téguments et des organes respiratoires. On observe différentes adaptations qui vont former un continuum depuis les animaux très dépendants à l’eau (comme les lombrics) jusqu’aux animaux pouvant se passer totalement d’apports exogènes d’eau de boisson. (Ex : rat kangourou des désert d’Amérique du Nord). b) Exemple d’osmorégulateur aérien Remarque : j’ai choisi de traiter un exemple particulier d’osmorégulateur terrestre : le cas du rat kangourou. Un autre exemple celui de l’homme sera traité dans le thème osmorégulation. Le rat kangourou (Dipodomys spectabilis) est un mammifère vivant dans les déserts d’Amérique du nord. Cet animal est confronté à deux dangers principaux : d’une part l’intense chaleur et d’autre part la quasi absence d’eau douce. Cet animal contient autant d’eau que le corps des autres mammifères c'est-à-dire environ 66%. Et ce même s’il a reçu une alimentation à base d’aliments déshydratés pendant plusieurs semaines (sans apport d’eau sous forme de boisson). Ceci montre que son équilibre hydrique peut être maintenu à partir de cette nourriture déshydratée et qu’il ne dépend d’aucune forme de stockage d’eau. Les pertes d’eau n’excèdent jamais les gains. BILAN DU METABOLISME HYDRIQUE DU RAT KANGOUROU : VOIR TABLEAU SUIVANT BILAN DU METABOLISME HYDRIQUE GENERAL DU RAT KANGOUROU Les entrées d’eau : - eau d’oxydation : il s’agit de l’eau formée par l’oxydation de l’orge : on a 54g d’eau formée pour 100g d’orge - eau libre : elle correspond à l’eau contenue dans le grain d’orge, elle dépend du taux d’humidité relatif de l’air : à 20% d’humidité dans l’air on a 6g d’eau libre dans 100g d’orge. - Bilan entrée d’eau : 60g Les sorties d’eau : - urine : presque ¼ de l’eau disponible est éliminée dans l’urine. (Plus l’urine est concentrée en urée plus les pertes d’eau sont réduites) - fèces : 2,6g d’eau sont perdus par les fèces (chiffre obtenu en collectant les fèces et en mesurant leur teneur en eau) - l’évaporation : elle constitue la perte la plus importante et elle a lieu principalement au niveau des poumons, cette perte représente 43,6g d’eau - Bilan perte d’eau : 60g La balance hydrique du Rat kangourou est ainsi équilibrée Remarque : dans une atmosphère très sèche, le Rat kangourou ne peut pas équilibrer sa balance hydrique, en effet l’orge contient alors moins d’eau libre et de plus une grande quantité est perdue par évaporation. Pour éviter une trop grande évaporation, le Rat kangourou reste dans son terrier et ne sort que la nuit. Cette vie nocturne est une adaptation comportementale répandue pour l’adaptation à la vie dans le désert. VOIR SCHEMA 6 SCHEMA 6 : ADAPTATIONS OSMOREGULATRICES DU RAT KANGOUROU Le terrier frais réduit les pertes thermiques mais également les pertes d’eau par les voies respiratoires. La conservation de l’humidité respiratoire par le mécanisme du contre courant nasal va dépendre de la température du terrier qui doit rester inférieure à la température centrale (c'est-à-dire aux environs de 37°C). L’eau métabolique est produite en combinant principalement des électrons, des protons et du dioxygène dans la respiration cellulaire. c) mécanisme de limitation des pertes en eau (le système à contre courant) Diverses adaptations pourraient limiter les pertes d’eau par exemple une amélioration de l’extraction de dioxygène. Ceci diminuerait le volume d’air respiré pour une consommation donnée de dioxygène et la quantité d’eau évaporée serait réduite dans les mêmes proportions. Mais ce n’est pas cette solution qui est utilisée pour réduire l’évaporation au niveau de l’appareil respiratoire chez les mammifères. Une seconde possibilité de limiter les pertes d’eau pourrait être la présence d’une hémoglobine à très haute affinité pour le dioxygène. Mais ce n’est pas non plus le cas chez le Rat kangourou puisque l’hémoglobine de cet animal ne présente pas de différences avec celle des autres rongeurs. C’est donc une autre adaptation qui permet de limiter les pertes en eau, cette adaptation résulte en une conservation de l’humidité respiratoire comme citée auparavant. VOIR SCHEMA 7 SCHEMA 7 : MECANISME A CONTRE COURANT AU NIVEAU DU NEZ DU RAT KANGOUROU Pendant l’inspiration, les parois nasales vont perdre de la chaleur au profit de l’air qui circule. La température des parois baisse donc et peut passer en dessous de la température de l’air inspiré (à cause de l’évapotranspiration). Pendant l’expiration l’air chaud venant des poumons passe sur les parois nasales plus froides : l’air est alors refroidi et se condense sur les parois. Remarque : l’ampleur du refroidissement va donc varier en fonction de la température et de l’humidité de l’air inspiré. CONCLUSION : Nous avons vu ici l’importance des systèmes excréteurs et adaptatifs dans le maintien d’une certaine constance des concentrations internes et de la composition en eau des organismes. Ces adaptations dépendent du milieu et chaque espèce possède ces propres mécanismes de régulation qui ont tous en commun de réguler le milieu interne. Ce type d’espèce osmorégulatrice est à comparer avec un autre ensemble : les osmoconformes qui eux ne régulent pas la concentration en ions de leur milieu interne. Ces derniers ont des compositions osmotiques proches du milieu extérieur. (c’est un bon moyen pour éviter les flux d’eau) BIBLIOGRAPHIE : - ROGER ECKERT : Physiologie animale, mécanismes et adaptations, De Boeck Université (4è édition) p 581 à 587 : exemples d’osmorégulation en fonction des milieux. p 609 : schéma de fonctionnement de la cellule à chlore. p 613 à 615 : les branchies des poissons - KNUT SCHMIDT-NIELSEN : Physiologie animale, adaptations et milieu de vie, Dunod p 301 à 305 : caractéristiques physico-chimiques du milieu aquatique p 305 à 324: nombreux exemples d’animaux vivant en milieu aquatique (invertébrés et vertébrés) p 324 à 325 : caractéristiques physico-chimiques du milieu aérien p 325 à 348 : nombreux exemples d’animaux vivant en milieu aérien (invertébrés et vertébrés) -MICHEL RIEUTORT : physiologie animale, les grandes fonctions, Masson, 2e édition de l’abrégé p 135 à 143 : résumé synthétique des différentes caractéristiques de chaque milieu et des adaptations nécessaires à l’osmorégulation dans chacun de ces milieux. -GUILLAUME LECOINTRE ET HERVE LE phylogénétique du vivant.3è édition. p 395 à 398 : caractéristiques de la famille du rat kangourou p 514-515, p 527 : caractéristiques des téléostéens. GUYADER : Classification