Trichomes avec dessins

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Les trichomes d’Arabidopsis
Chez les organismes pluricellulaires tels que les Angiospermes, le développement met en
place des types cellulaires variés. L’observation de quelques cellules de référence telles que
les poils racinaires, les papilles stigmatiques, les stomates, les cellules épidermiques de
« dallage » (pavement cells) et les trichomes de la feuille, a fourni de riches informations
concernant la morphogenèse cellulaire (Mathur, 2004). C’est plus particulièrement vrai pour
les trichomes, les stomates et l’épiderme racinaire d’Arabidopsis. L’analyse des mécanismes
coordonnés qui permettent la spécification et la structuration de ces types cellulaires est l’un
des enjeux de la biologie du développement des plantes. Chez Arabidopsis, la formation de
poils épidermiques unicellulaires à partir de cellules épidermiques de la feuille (trichome) et
de la racine (trichoblaste), constitue le modèle de référence pour l’étude des mécanismes
gouvernant la détermination du devenir cellulaire chez les plantes (Dolan et Costa, 2001 ;
Szymanski et al., 2000). Les mécanismes assurant la structuration des trichomes et des poils
racinaires sont différents. Les trichomes se mettent en place à distance d’un autre trichome, et
ne sont qu’exceptionnellement adjacents à un autre trichome, ce qui suggère l’existence d’un
mécanisme de contrôle de la densité des trichomes (Hulskamp et al., 1994 ; Serna, 2004 ;
Szymanski et al., 2000). Au contraire, les cellules racinaires sont spécifiées en files, d’une
façon dépendante de leur position, de telle manière que les cellules situées dans l’interstice
entre deux cellules corticales sous-jacentes, se développent en poils racinaires (Dolan et al.,
1994 ; Serna, 2004). L’épiderme de l’hypocotyle ne différencie pas de poils, mais des
stomates, dont la structuration est organisée d’une façon proche de celle des atrichoblastes
racinaires (Berger et al., 1998a et 1998b).
Malgré les différences observées dans leurs distributions épidermiques, les données de la
génétique moléculaire ont permis de montrer qu’un ensemble commun de facteurs de
transcriptions régulent la structuration des trichomes foliaires, des stomates hypocotylaires et
des poils racinaires chez Arabidopsis (Serna, 2005). Ainsi, TTG1, GL1 et GL2 permettent la
spécification trichome dans la partie aérienne, alors que TTG1, WER et GL2 entraînent la
spécification atrichoblaste dans l’épiderme racinaire. De plus, CPC et TRY inhibent la
formation de trichomes et d’atrichoblastes. Plus globalement, chez Arabidopsis, des
mécanismes aussi variés que l’initiation des trichomes, l’initiation des poils racinaires, la mise
en place des stomates sur l’hypocotyle, la biosynthèse des anthocyanes et la production de
mucilage dans les enveloppes de la graine (Western et al., 2004), font intervenir un ensemble
de régulateurs conservés durant l’évolution. Il s’agit de facteurs de transcription de type R2R3
MYB, comme GL1 (glabra1), WER (Werewolf), MYB23 (Lee and Schiefelbein, 1999), ou de
type bHLH (basic Helix-Loop-Helix) comme GL3 (Glabra3) et EGL3 (Enhancer of Glabra3)
(Payne et al., 2000), de la protéine à homéodomaine GL2 (glabra2) (Masucci et al., 1996), de
petites protéines MYB à un seul domaine R3, TRY (Tryptichon), CPC (Caprice), ETC1
(Enhancer of Tryptichon et Caprice) (Wada et al., 1997), et d’une protéine de type WD40,
TTG1 (Transparent Testa Glabra1) (Zhang et al., 2003).
MORPHOLOGIE DES TRICHOMES
Les trichomes sont présents sur l’épiderme (feuilles, sépales) de nombreuses plantes
terrestres. Leur structure varie, avec soit un seul type par plante, soit plusieurs (sic chez la
tomate), parfois sur la même feuille. Les trichomes peuvent se différencier en glandes
(Ballota), en vésicules (Chenopodium) ou en poils secréteurs (Urtica). De nombreuses
espèces, autres qu’Arabidopsis thaliana, possèdent des trichomes pluricellulaires dont les
ramifications sont initiées par un plan de division perpendiculaire à l’axe de croissance du
trichome (figure 1). Chez Arabidopsis, la mutation siamese produit des trichomes
multicellulaires (Walker et al., 2000). Du point de vue évolutif, ceci suggère que les trichomes
unicellulaires d’Arabidopsis, dérivent en fait de trichomes multicellulaires. Les fonctions
attibuées aux trichomes sont notamment la protection de la plante contre les insectes
herbivores et les rayons UV, la réduction de la transpiration et la résistance accrue au gel.
paroi
Figure 1. Mise en place d'un trichome pluricellulaire
Les trichomes, situés sur la face adaxiale de la feuille d’Arabidopsis, sont des cellules qui se
présentent comme une excroissance épidermique. Leur contenu en ADN atteint 32 C par
quatre endoréplications successives (Melaragno et al., 1993). La mise en place des trichomes
participe à la morphogenèse de la feuille. L’initiation des trichomes s’observe en premier lieu
à la pointe du jeune primordium foliaire, puis de façon basipétale gagne la base de la feuille
en croissance. Une très jeune feuille étalée montre, à sa surface, une distribution non aléatoire
de trichomes à divers stades de développement. Il est très rare que deux trichomes se forment
côte à côte. Alors que le trichome mature d’Arabidopsis mesure entre 300 et 500, aux stades
plus précoces, la cellule initiale du trichome se distingue de ses voisines, car elle est
légèrement plus large, enflée, d’un diamètre de 10 à 15. Entre 6 à 10 heures après son
initiation, la cellule se développe vers l’extérieur, en formant un tube, puis rapidement elle
définit des zones sous-apicales qui serviront de points de départ pour les ramifications futures.
Deux ou trois branches se forment et s’allongent rapidement, par croissance diffuse, mais
dans des orientations précises, génétiquement déterminées et corrélées étroitement avec l’axe
principal de croissance de la feuille. La majorité des trichomes des feuilles d’Arabidopsis
possèdent une structure en étoile, avec trois branches (plus rarement deux). Néanmoins, une
petite partie des trichomes foliaires peuvent demeurer non ramifiés. Les trichomes des feuilles
de la hampe florale et des sépales sont toujours moins ramifiés. Lorsque le trichome approche
de la fin de sa phase de développement, des épaississements apparaissent sur sa périphérie
cellulaire, à laquelle ils conférent un aspect en papilles. Enfin, un groupe de cellules « socle »
se répartissent autour de la base du trichome développé.
ETAPES DU DEVELOPPEMENT
La différenciation cellulaire du trichome se déroule de façon continue, mais fait apparaître
plusieurs formes successives. De nombreux mutants affectant le développement du trichome
ont été identifiés chez Arabidopsis (Hulskamp et al., 1994 ; Hulskamp, 2004). Parmi ces
mutants, une partie affectent le « profil trichome » de la feuille : densité ou formation de
groupes (Hulskamp, 2004), certaines entrainent la mise en place de trichomes sur les
cotylédons (West et al., 1994 ; Yamagishi et al., 2005), d’autres en modifient la forme
(Hulskamp, 2004). Ces mutants ont permis de bien analyser la morphogenèse cellulaire du
trichome. Afin d’en faciliter la description cinq stades ont été définis (Szymanski et al., 2000).
Grandissement cellulaire.
C’est au sein d’un ensemble de cellules épidermiques, a priori identiques, que seront
« sélectionnées » les cellules à l’origine des trichomes, qui vont alors stopper les divisions
mitotiques pour initier des endoréplications (figure 2a). Chez de nombreux organismes,
plantes inclues, la taille des cellules est fortement corrélée à leur contenu en ADN (Melaragno
et al., 1993). La grande taille des initiales de trichomes paraît résulter d’endoréplication(s).
Ceci différencie la cellule mère du trichome des cellules épidermiques voisines (figure 2b). Le
mutant glabra2 (gl2) est bloqué à cette étape. La phospholipase AtPLD 1 est la cible de GL2
(Dhonukse et al., 2003). Elle pourrait participer aux modifications de la membrane plasmique,
requises pour atteindre les étapes ultérieures.
Croissance tubulaire.
La cellule mère élargie du trichome, s’accroît alors, sa partie supérieure prend une forme
tubulaire (figure 2c). Ceci s’accompagne d’ un nouveau cycle d’endoréplication (Hulskamp et
al., 1994). Les mutants scd1, Stomatal Cytokinesis-Defective1 (Falbel et al., 2003), ne
dépassent pas le stade tubulaire, et le trichome avorte lorsque la feuille s’étale. Plusieurs
études indiquent un rôle du cytosquelette microtubulaire dans cette étape de la morphogenèse
du trichome (Mathur et Chua, 2000).
Initiation de la ramification.
De nombreux mutants affectés dans la ramification du trichome ont été décrits chez
Arabidopsis (Hulskamp, 2004 ; Schellmann et Hulskamp, 2005). Mathur (2006) suggère que
c’est la délimitation de domaines apicaux dans l’initiale tubulaire qui permet cette
ramification (figure 2d). Les travaux de Mathur et Chua (2000) ont permis de montrer que la
stabilisation des microtubules détermine la croissance polarisée du trichome, mais que ce sont
les réorganisations du cytosquelette de microtubules qui amènent des variations de l’axe de
Figure 2. Développement du trichome et mutants
a - sélection d'une cellule épidermique
mutations : gl1,
cpc,
myb23, ttg1, gl3, egl3, try,
etc1, etc2, gl2
b - endoréplication et détermination du devenir cellulaire
sim, kak, spy, cpr5,
ick/krp, rhl2, hyp6
c - allongement tubulaire
an, sti, frc, tfca, tfcc,
sta, gl3, kak
d - ramification et croissance
grl, klk, brick1, rop2, dis1,
dis2, wrm, crk, spi, ali, zwi,
cdo, cha, rts, trb, udt
trichome
cellule
socle
e - expansion et maturation
croissance (Torres-Ruiz et Jurgens, 1994). De nombreux mutants confortent cette façon de
voir (Mathur, 2006). Ce sont des modifications locales des « enveloppes » de la cellule (paroi,
membrane et cytosquelettes sous-jacents) qui permettront une croissance cellulaire localisée
(Mathur, 2006). Le nombre de branches du trichome est corrélé positivement avec le niveau
de ploïdie de la cellule (Schnittger et Hulskamp, 2002). Ainsi les plantes tétraploïdes
possèdent des branches surnuméraires, et les cellules à moins de 32C possèdent moins de
branches.
Expansion des branches.
Le trichome acquiert une forme régulière par expansion de ses branches (figure 2e). Ceci
nécessite le réseau dynamique d’actine, puisque les traitements anti-actine entraînent le
phénotype « tordu » (Hulskamp et al., 1994). Plusieurs mutants affectés dans un modulateur
du cytosquelette d’actine composé de plusieurs sous-unités, le complexe ARP2/3, présentent
également un phénotype « tordu » (Mathur, 2006). Le cytosquelette d’actine possède
plusieurs fonctions : mise en place du réseau d’endomembranes, mobilité des organites,
réorganisation en réponse à des signaux de croissance ou externes. Les fonctions cellulaires
du cytosquelette d’actine sont assurées par des protéines qui en se liant à l’actine, permettent
son ancrage et la liaison entre ses filaments (Szymanski, 2005). Notons également que le
cytosquelette d’actine affecte la dynamique des microtubules et altère ainsi la croissance
directionnelle des ramifications du trichome (Mathur, 2006).
Maturation cellulaire.
L’achèvement de la morphogenèse du trichome est révélée par la formation de papilles
résultant de l’épaississement de la paroi cellulaire. Les mécanismes moléculaires mis en
œuvre sont mal connus, alors même que cinq mutants suppriment cet ornement de la surface
du trichome. Il s’agit de chablis, chardonnay, retsina (Hulskamp et al., 1994),
underdeveloped trichome ou udt (Haughn et Somerville, 1998) et trichome birefringence ou
trb (Potikha et Delmer, 1995). Les gènes correspondants coderaient des composants pariétaux
(Hulskamp, 2004), ou des éléments du cytosquelette d’actine (Mathur, 2006).
SELECTION DU DEVENIR « TRICHOME » DANS L’EPIDERME
Les mécanismes permettant la spécification cellulaire « trichome » et la répartition des
trichomes sur la surface foliaire, ont été largement détaillés dans plusieurs revues récentes
(Hulskamp, 2004 ; Schellmann and Hulskamp, 2005 ; Szymanski, 2005 ; Serna and Martin,
2006 ; Mathur, 2006). Contrairement à la mise en place des stomates foliaires, l’initiation des
trichomes ne nécessite pas, chez Arabidopsis, une division asymétrique dans la taille des
cellules filles ou dans leur devenir cellulaire (Larkin et al., 1997). Une cellule épidermique
enclenche le devenir cellulaire trichome après avoir accumulé un niveau suffisant d’un
complexe transcriptionnel GL1-GL3-EGL3-TTG1-MYB23 (Szymansky et al., 2000 ; Kirik et
al., 2005). En dehors des divers types de facteurs de transcription (MYB R2R3, bHLH), les
profils « trichome » et « poil racinaire » impliquent plusieurs autres éléments permettant les
interactions entre cellules, nécessaires pour déterminer lesquelles en particulier vont se
différencier en trichomes ou en poils racinaires. Il s’agit par exemple de Caprice (CPC)
identifié dans un premier temps comme un gène spécifique du profil de l’épiderme racinaire,
et Tryptychon (TRY) identifié au départ comme un gène spécifique du profil trichome (Wada
et al., 1997). Ces deux gènes agissent de façon redondante pour supprimer le profil trichome
dans la feuille ou le devenir atrichoblaste (absence de poil racinaire) dans la racine
(Schellmann et al., 2002). Plus récemment Kirik et al. (2004a et 2004b) montrent que ETC1 et
ETC2 (Enhancer of TRY and CPC 1 et 2) agissent de façon redondante avec TRY et CPC.
D’autres fonctions existent pour ETC2, notamment dans le développement du stomate.
Le modèle actuel expliquant les profils « trichome » et « atrichoblaste », postule que TTG1,
GL1, WER, GL3, EGL3 et MYB23 stimulent le développement du trichome dans la feuille et
celui des atrichoblastes dans la racine (Hulskamp, 2004). Plusieurs gènes, agissant de façon
antagoniste à GL1 et WER, sont connus comme étant des régulateurs négatifs du
développement du trichome. Il s’agit de TRY, CPC, ETC1 (Perazza et al., 1999) et ETC2
(Kirik et al., 2004b). Leur mutation produit des trichomes plus gros, plus ramifiés, et dont le
niveau d’endoréplication est encore augmenté. TRY limiterait la quantité de complexe
activateur GL1-GL3-EGL3-TTG1-MYB23 dans les cellules qui ont enclenché le devenir
trichome. WER est particulièrement important pour le développement des poils racinaires, et
GL1-MYB23 pour le développement des trichomes.
Les données moléculaires indiquent par ailleurs que GL3 forme un homodimère qui se lie à
GL1 (Zhang et al., 2003 ; Payne et al., 2000) par un domaine D/E-L-x2-R/K-x3-L-x6-L-x3-R
(Serna et Martin, 2006). Un autre domaine de GL3 assure sa liaison avec le régulateur amont
qu’est TTG1, alors que GL1 n’interagit pas en double hybride avec TTG1. TRY, CPC et
ETC2 interagissent avec la protéine GL3 (Kirik et al., 2004b). Ainsi, GL1 (et/ou MYB23) et
GL3 permettraient l’activation transcriptionnelle et le complexe TTG1-GL3-GL1-MYB23
serait actif dans le précurseur du trichome et inactif dans les autres cellules épidermiques
(figure 3). Les régulateurs négatifs TRY, CPC, ETC1 et ETC2 entreraient en compétition
avec le complexe d’activation transcriptionnelle (Szymanski et al., 2000 ; Kirik et al., 2004a).
Les données relatives aux communications intercellulaires et à une régulation par une boucle
de rétrocontrôle manquent actuellement. Cependant, par analogie avec ce qui est connu pour
le profil poil racinaire, il est possible de faire l’hypothèse que la protéine CPC pourrait migrer
entre les cellules. Nous savons également que WER, un homologue de GL1 pour la racine,
rétro-contrôle négativement CPC.
initiale du trichome
GL1
MYB23
GL3
EGL3
GL3
EGL3
GL2
TTG1
TRY
CPC
ETC1
ETC2
cellule épidermique
TRY
CPC
ETC1
ETC2
GL1
MYB23
GL3
EGL3
GL3
EGL3
TTG1
GL2
Figure 3. Structuration de l'épiderme
TRY
CPC
ETC1
ETC2
La protéine à homéodomaine GL2 transmet les informations fournies par les éléments
impliqués dans la structuration de l’épiderme, pour amener à un état de différenciation
spécifique, que ce soit dans les enveloppes de la graine, les poils racinaires ou les trichomes
(Rerie et al., 1994 ; Masucci et al., 1996 ; Ohashi et al., 2002). Quelques éléments suggèraient
que GL2 participait à la structuration des trichomes en activant des gènes de différenciation
spécifiques du trichome (Rerie et al., 1994), mais il est désormais avéré que GL2 intervient
pour des événements de différenciation situés en aval de la spécification cellulaire (Ohashi et
al., 2002), comme cela a été montré pour la différentiation des poils racinaires (Ohashi et al.,
2003).
Les futurs travaux devront s’intéresser aux mécanismes mis en place durant le développement
embryonnaire. Actuellement, le parallèle établi entre les profils trichome et atrichoblaste ne
permet pas de remonter à un événement antérieur à l’étape de différenciation (Serna, 2005).
CONTROLE DU CYCLE ET DEVELOPPEMENT DU TRICHOME
Les mutants affectés dans la régulation du cycle cellulaire des trichomes affectent soit la
transition d’un cycle mitotique vers un (ou des) cycle(s) d’endoréplication, soit le nombre de
cycles d’endoréplication, donc la ploïdie. La mutation siamese (sim) supprime la transition
mitose-endoréplication, ce qui a pour conséquences de produire des trichomes multicellulaires
avec de 2 à 15 cellules (Walker et al., 2000). Ainsi, si le premier cycle est directement
mitotique, deux trichomes sont produits au lieu d’un seul, mais si la transition vers la mitose
est plus tardive, un trichome multicellulaire est mis en place.
Des éléments classiques de régulation du cycle cellulaire participent au contrôle des
endoréplications. La surexpression de la cycline AtCYCB1;2 induit une transition
endoréplication-mitose, ce qui conduit à des trichomes pluricellulaires (Schnittger et al.,
2002a). L’expression de cette cycline entraîne non seulement des divisions nucléaires, mais
également autorise une cytokinèse normale. De même, la surexpression ectopique de la
cycline AtCYCD3;1 conduit à des divisions cellulaires (Schnittger et al., 2002b). Dans le
mutant sim, AtCYCB1;2 est plus fortement exprimé dans le trichome, suggérant que SIM
inhibe habituellement l’expression G2/M de cette cycline. Dans cet exemple, l’observation
montre que des endoréplications se produisent (Schnittger et al., 2002a). Néanmoins, bien que
l’endoréplication soit en général associée à l’achèvement de la différenciation, Weinl et al.
(2005) montrent que la spécification du devenir cellulaire est indépendante de
l’endoréplication induite par ICK (inhibiteur de CDK). Plus récemment, Imai et al. (2006)
observent que le promoteur de la cycline AtCYCA2;3 (c’est également vrai pour AtCYCA2;2
très redondant) est actif dans les cellules en prolifération et dans les trichomes qui achèvent
leurs endoréplications. Les mutants cyca2;3 présentent un plus grand nombre d’endocycles,
suggérant que AtCYCA2;3 est un régulateur négatif de l’endoréplication (Imai et al., 2006).
Le gène KAKTUS (KAK) réprime le mécanisme d’endoréplication, après que la quatrième ait
eu lieu. Il code une ubiquitine E3 ligase potentielle. Ceci suggère que KAK ubiquitine, pour
qu’elles puissent être dégradées, les protéines qui permettent de réenclencher le cycle
cellulaire (Downes et al., 2003 ; ElRefy et al., 2003).
La surexpression de AtFIP37 affecte également le développement du trichome, très ramifié
car il a subi plus d’endoréplications (jusqu’à 256C). AtFIP37 régulerait positivement
l’endoréplication en procédant à un épissage alternatif de gènes impliqués dans le contrôle du
cycle (Vespa et al., 2004). Il est enfin nécessaire de rappeler que deux des gènes impliqués
dans la spécification des trichomes, GL3 et TRY, sont également des régulateurs
respectivement positif et négatif, des cycles d’endoréplication (Hulskamp et al., 1994). Cette
double fonctionnalité démontre que la détermination du devenir cellulaire est
fonctionnellement liée à la régulation du cycle (Hullskamp, 2004). GL3 contrôlerait le
passage de la troisième à la quatrième phase d’endoréplication. Malgré l’absence de lien
fonctionnel entre la plupart de ces éléments (SIM, AtCYCB1;2, AtCYCD3;1, AtCYCA2;3,
KAK, AtFIP37, GL3, TRY), il apparaît désormais clair que plusieurs mécanismes régulent les
cycles d’endoréplication dans les trichomes. Il est également avéré que la différenciation
finale des trichomes est, au moins en partie, indépendante du cycle cellulaire (Jakoby et
Schnittger, 2004).
CONCLUSION
Le contrôle de la forme cellulaire et la répartition des types cellulaires mettent en œuvre
plusieurs mécanismes de régulation, notamment de la prolifération et de la différenciation
cellulaires, des mécanismes participant à la communication inter-cellulaire, et des
mécanismes de contrôle global de la morphogenèse. Les trichomes sont actuellement utilisés
pour des études relatives au contrôle du cycle cellulaire (voir Hulskamp, 2004), ainsi que pour
l’analyse de la structuration de l’épiderme (Schellmann et Hulskamp, 2005). Les travaux
réalisés à ce jour ont permis de montrer que la mise en place de ces cellules très particulières
requiert un contrôle de leur répartition sur l’épiderme foliaire et des mécanismes spécifiant
leur identité (endoréplication, contrôle transcriptionnel). Les données accumulées suggèrent
que de nombreux facteurs de transcription, assez largement redondants, jouent un rôle dans la
spécification du devenir cellulaire au sein des épidermes foliaire, hypocotylaire et racinaire.
Ceci reflète probablement la nécessité d’une structuration très reproductible des types
cellulaires épidermiques. Il est intéressant de constater que certains des facteurs impliqués
dans la spécification « trichome » contrôlent en parallèle le niveau d’endoréplication du noyau
de ce trichome. Dans une phase ultérieure, la mise en place de la forme définitive requiert des
phospholipases membranaires, des protéines G de type Rho, le complexe ARP2/3 de
modulation du cytosquelette d’actine, et des interactions actine-microtubules (Mathur, 2006).
Trois types cellulaires coexistent dans l’épiderme foliaire, des cellules de dallage, des
trichomes et des stomates. La ploïdie de ces trois types cellulaires est contrôlée différemment
(Melaragno et al., 1993), la répartition des trichomes et des stomates est contrôlée,
probablement par des mécanismes similaires, enfin, il est probable que la mise en place des
trichomes et des stomates, respectivement sur les faces adaxiale et abaxiale de la feuille, est
également contrôlée, par un ou des mécanismes non élucidés à ce jour.
La duplication de gènes, suivie de leur diversification fonctionnelle est un mécanisme évolutif
permettant la création de nouvelles fonctions (Causier et al., 2005). Cette diversification
fonctionnelle peut résulter soit de modifications de la régulation transcriptionnelle, soit de la
fonction de la protéine. Ainsi, les fonctionnalités différentes des gènes GL1 et MYB23 (R2R3
MYB), pour l’initiation du trichome, résulte de modifications des séquences régulatrices en
cis. Parallèlement, la diversification pour ce qui est de la ramification du trichome a nécessité
des variations des protéines (Kirik et al., 2005). Les travaux de Kirik et al. (2004a et b) ont
permis de montrer que les gènes ETC1, ETC2, TRY et CPC (R3 MYB) agissent d’une façon
largement redondante pour permettre la spécification cellulaire dans l’épiderme de la racine et
de la feuille (Kirik et al., 2004a et b). De même, GL3 et EGL3 (bHLH) fonctionnent de façon
redondante (Zhang et al., 2003). L’analyse des ressemblances entre les mises en place des
trichomes foliaires, des atrichoblastes racinaires et des stomates hypocotylaires, a cependant
fait émerger quelques différences, comme la dépendance de la position (atrichoblaste,
stomates) ou de l’espacement (trichomes) ou encore la régularité de la mise en place
(beaucoup moins bonne pour les stomates hypocotylaires que pour les atrichoblastes
racinaires).
Enfin, les analyses les plus récentes (Serna et Martin, 2006) montrent que les trichomes
d’Arabidopsis et de coton, se développent en utilisant un réseau transcriptionnel très différent
chez ces deux espèces de celui qui régule le développement des trichomes chez Antirrhinum
et chez les Solanaceae. Les différents types de trichomes pourraient donc provenir d’une
évolution convergente, survenue depuis l’origine des Eudicotylédones (Serna et Martin,
2006).
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