Le marché de l`Etat à l`heure de la mondialisation

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Comprendre l’économie
Le marché de l’Etat à l’heure de la mondialisation
Première partie. L’économie de marché.
I.
La genèse.
Naissance de marché.
Paradis terrestre = image construite en miroir des contraintes qui étreignent notre vie réelle. (= un
désir à atteindre pour l’homme)
Mais cette quête n’est pas une partie de plaisir pour l’homme, qui vit dans un système de rareté.
(càd que tout n’est pas aussi abondant ou aussi aisé à obtenir...)
L’homme va donc s’adapter à la nature. Il va vivre en société et développer des processus
intelligents d’adaptation à la nature. Sociétés de taille réduites (nourriture --, pas de métiers), autosubsistantes.
Même très simples, le système éco. est déjà dans ces sociétés ce qu’il
restera : une organisation à la fois technique et sociale... tout ça pour
subvenir à leurs besoins.
Mais l’adaptation a ses limites : l’ingéniosité de l’homme lui permet de se dire : mettre la nature à
son service paraît plus simple que de s’y adapter. => Domestique la nature. Les besoins se
développent à mesure que les techniques se complexifient.
Naissance des métiers et de la monnaie : impossible à une seule personne de posséder toutes
les techniques, connaissances. Avec la naissance des métiers, l’interdépendance et l’échange...
Evolution du transport => concurrence (artisans & entrepr.) => Naissance des marchés (rencontres)
=> création de la monnaie (facilite le partage de, par ex. : une vache...)
Besoins et techniques complexes, sans cesse plus complexes,
spécialisation des productions, échanges nécessaires, monnaie facile,
marchés : l’éco. dite de marché est née.
(Personne ne l’a inventée. Elle est née naturellement de l’évolution des sociétés, de l’ingéniosité
des hommes, de leurs désirs, de leur recherche du profit.)
Fonctionnement du marché des biens.
Deux agents économiques : marchands et consommateurs.
Offre = quantité de produits proposée sur le marché (+ ou – abondante).
Demande = quantité de produits désirée sur le marché.
Le marché existe quand :
- 2 agents d’intérêt différent s’accordent : acheteur-vendeur, prêteuremprunteur, employeur-employé ;
- cet accord détermine des prix et des quantités échangées en fonction
de l’offre et de la demande des produits concernés.
Comprendre l’économie – Cesha80 1999
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Du marché au caddie : l’existence actuelle des supermarchés ne permet plus le marchandage.
L’offreur fixe sont prix : 1° il connaît le coût de fabrication de son produit. 2° il observe le prix
pratiqué par ses concurrents. 3° il détermine sa marge de bénéfice, le gain net sur la vente de son
produit.
Le marché n’est donc plus un lieu réel sur lequel des quantités de biens
sont échangées à prix discuté entre un acheteur et un vendeur mais un lieu
fictif intégrant une offre et une demande globalisées, résultat de nos microdécisions personnelles.
(Les conso. disposent cependant d’un pouvoir d’orientation du marché par nos choix d’achats.)
Le marché ne concerne pas que les biens.
- Le marché des services : on appelle activités de service toutes les activités économiques qui ne
produisent pas de biens mais offrent des compétences à la société. Les services, au sens large du
terme, constituent aujourd’hui la plus grande partie du revenu national. (les vedettes font gagner plus
d’argent que les cadres des industries traditionnelles...)
- Le marché bancaire : pour se prémunir contre les aléas du futur, l’homme stocke, c’est
l’épargne. D’autre part, les sociétés ont besoin d’argent pour fonctionner. Le système bancaire est
né de cette idée qu’il fallait reinjecter dans le circuit économique cet argent dormant pour favoriser
l’investissement et la consommation. Le taux d’intérêt détermine alors la rémunération de l’argent
placé. Il est le prix de l’argent sur le marché bancaire. Pour emprunter de l’argent, le taux d’intérêt
(dit débiteur) sera plus élevé. La différence entre taux d’intérêt créditeur et débiteur est appelée
“marge d’intermédiation”.
- Le marché des capitaux : on appelle capital tout bien ou toute somme d’argent investi, c’est-àdire qui n’est pas destiné directement à la consommation mais à rendre la production plus abondante
ou plus aisée. Attention, c’est terme très souvent mal utilisé... La voiture d’un taxi-man est de toute
évidence un capital technique, un bien d’investissement. La voiture de papy est un bien de
consommation.
Capital et sociétés : pour démarrer et pour fonctionner avant qu’elle soit rentable, une société a
besoin d’un capital plus ou moins élevé selon l’activité de celle-ci. Ce capital est réparti entre les
actionnaires, qui détiennent un certain nombre de parts sociales ou d’actions de la société, en fonction
de leur investissement. Ces parts peuvent être nominatives (SPRL) ou anonymes (SA). L’achat
d’une action implique la possession d’une partie du capital financier de cette entreprise. Elle
apporte de l’argent à son possesseur, appelé dividende. Cet argent permet à l’entreprise de produire
au mieux, d’acheter du capital technique ou du capital financier dans d’autres entreprises... L’action
représente aussi une partie du pouvoir de décision (pouvoir qui décide des grandes orientations que
l’entreprise doit suivre, et délègue des pouvoirs aux gestionnaires) dans la société.
- La Bourse = le marché des actions : passé une certaine taille, une société peut avoir besoin de
capitaux très importants, elle décide alors de mettre en vente ses actions en Bourse. C’est donc le
marché des actions où les sociétés et les particuliers peuvent y acheter ou y vendre des actions. Les
prix des actions, son cours, sa cotation, monte et descend en fonction de l’équilibre offre-demande.
Pourquoi une action est-elle bien cotée ?
1° En fonction des critères objectifs liés à la société elle-même : bon chiffre d’affaires, bonne
rentabilité, bon dividende...
2° En fonction de facteurs extérieurs : action libellée dans une monnaie stable, contexte sociopolitique du pays d’accueil, climat international favorable (croissance économique)...
3° En fonction d’éléments plus irrationnels : rumeurs, pressentiments...
Tous ces facteurs vont contribuer à gonfler la demande pour cette action alors que peu de
détenteurs voudront s’en séparer. Le cours monte. S’il monte trop = action surévaluée. Le
mouvement peut alors s’inverser : action trop chère pour les acheteurs, génial pour les détenteurs qui
voudront alors la vendre => le cours chute => action sous-évaluée. Phénomène appelé effet “yoyo”.
- Et la spéculation ? Le spéculateur essaie de prévoir l’évolution du cours d’une action, pour
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acheter bas et revendre haut. L’effet yo-yo du cours des actions est très propice à ce jeu. Il va
d’ailleurs l’amplifier. Aujourd’hui, la spéculation a son terrain privilégié sur les marchés internationaux
des monnaies où s’échangent plus de mille milliards de dollars.
- Le marché du travail : le mécanisme de l’ajustement offre-demande agit aussi sur ce marché.
Ayant une capacité de travail, avec des compétences variées, nous offrons du travail, nous
demandons de l‘emploi. Mais beaucoup de travailleurs ayant la même qualification pour peu d’emploi
conduit à un revenu faible, à l’inverse une personne ayant la qualification demandée pour beaucoup
d’emploi aura un revenu supérieur...
Comment définir une économie de marché ?
Une économie de marché est une économie où les prix et les quantités produites ou
échangées (biens, services, crédit, capitaux, travail,...) dépendent pour l’essentiel de la
confrontation des offres et des demandes décentralisées.
(On opposait traditionnellement l’économie de marché à l’économie planifiée, dans laquelle les décisions relatives aux
quantités produites et échangées étaient centralisées au niveau de l’Etat.)
Capitaliste ou libérale ?
L’économie de marché est parfois appelée “économie capitaliste”, puisque le rôle du capital, sa
détention, sa structuration, son accroissement sont essentiels. D’autres la nomment encore
“économie libérale”, insistant sur la liberté de choix que génère le marché, par contraste avec le
caractère contraignant d’une planification centrale.
Ces expressions ne sont pas dépourvues de connotation idéologique. Economie “capitaliste” pour
les tensions, les rapports de force que génère l’accumulation de capital, c’est un terme engagé,
marquant une hostilité. (Utilisé par les marxistes). Economie “libérale” pour insister sur la valeur de
liberté qui l’emporte sur celle d’égalité et de fraternité. (Eco. Planifiée)
Notre économie est un système (Schéma vu au cours), composé d’unités de comportement
(consommateurs, producteurs, système bancaire,...) qui concluent des marchés. Il en résulte des flux
(monétaires et réels). L’utilisation de facteurs de production engendre des coûts pour l’entreprise,
qui sont des sources de revenus pour les ménages. Ces ménages dépensent une partie de leurs
revenus sur le marché des produits et procurent ainsi des recettes aux entreprises, l’autre partie des
revenus étant épargnée (utile car permet le financement des investissements ou de la consommation
à crédit). La boucle est bouclée !
Deux maladies de l’économie de marché : le chômage et l’inflation.
Ce sont des maux qui dérèglent la mécanique du système.
- Le travail de l’homme => travail de la machine => Surproduction => Marché plus capable
d’absorber ce qui est produit => réduction du personnel dans les entreprises.
Le passage homme => machine et l’évolution technologique traduit une évolution qui est la cause
du chômage structurel (par opposition au chômage conjoncturel, dépendant des variations de la
demande). Le secteur des services s’est alors développé, réjouissant tout le monde (car moins
pénible et mieux payé). Mais depuis quelques années, le secteur des services est pris à son tour
dans la tourmente des rationalisations en raison de l’automatisation et des gains de productivité que
celle-ci permet (ex. : carte à puce contre plusieurs banquiers licenciés)
- L’inflation se manifeste par des hausses de prix (d’origine étrangère ou non. Par ex. : la hausse
du prix du pétrole. Les entreprises doivent alors augmenter leurs prix pour survivre. Cette
augmentation des coûts et des prix se répercute sur les dépenses des ménages. Le pouvoir d’achat
des ménages diminue donc. En Belgique, il existe un mécanisme d’indexation automatique qui
augmente les salaires proportionnellement à l’augmentation du prix d’un “panier de ménagère”.
L’inflation est un cercle vicieux. Une fois enclenchée, elle est difficile à juguler.
L’inflation galopante (ou hyper-inflation) peut aussi atteindre plusieurs centaine de pour cent
dans des circonstances de guerre ou de famine, où des produits de base manquent et où les prix
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augmentent fortement. S’en suit une augmentation des coûts des entreprises et donc des prix à
nouveau... le cercle vicieux est amorcé. Les effets sont dévastateurs, notamment sur le tissu social.
II. La monnaie.
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Brève histoire de la monnaie.
Elle permet de décomposer l’échange en deux parties : vente de biens contre monnaie et monnaie
contre achats de biens.
Au fil du temps, sa forme va évoluer : monnaie-marchandise, monnaie métallique, billet
convertibles en or = monnaie-papier. La monnaie devient fiduciaire, c’est-à-dire qu’elle n’est plus
convertible en or.
Les fonctions de la monnaie.
- Instrument de paiement et pouvoir libératoire.
- Une réserve de valeur car transformable rapidement en un service ou un bien.
- Une unité de compte (si elle est stable).
- Un instrument de politique économique dans les échanges entre pays.
Dévaluation compétitive : pratique utilisée par un pays qui, en diminuant la valeur de sa monnaie
par rapport aux autres, voit les prix de ses produits vendus à l’étranger baisser. Il vend donc mieux à
l’exportation puisque à qualité inchangée et sans aucune restructuration, son produit est moins cher.
Par contre, les achats des produits étrangers deviennent plus chers et le volume des importations
devrait donc diminuer.
Balance commerciale : différence entre le total des exportations et le total des importations. Si
égale ou positive dans un pays, cela signifie que globalement, les échanges sont équilibrés et qu’il n’y
a donc pas d’argent qui quitte le pays.
Inconvénients de la dévaluation compétitive : 1er. Augmentation des produits importés : beaucoup
de pays doivent importer des matières premières pour pouvoir produire. 2ème. La hausse des prix des
produits importés oblige les entreprises à revoir les prix de leurs produits, diminuant ainsi le pouvoir
d’achat des ménages. 3ème. Une monnaie qui a moins de valeur est moins recherchée sur les
marchés. On cherche plus à la vendre qu’à l’acheter. Pour éviter la chute, on augmente les taux
d’intérêts. 4ème. L’augmentation des taux d’intérêts pèse aussi sur l’Etat, car lui aussi emprunte. Une
hausse de 1% signifie environ 20 milliards de FB de charges annuelles en plus pour l’Etat. 5ème. Les
concurrents étrangers vont être tentés de dévaluer eux aussi pouvant ainsi provoquer une spirale de
dévaluations compétitives en chaîne.
Dévaluation “forcée” : Il arrive parfois que des pays soient contraints de dévaluer leur monnaie.
Il ne s’agit pas ici d’une démarche volontaire de dévaluation. La dévaluation n’est ici que
l’entérinement des décisions prises sur le marché.
La monnaie stable : s’il en a la possibilité, un pays peut choisir de mener une politique monétaire
de stabilité, par exemple en s’accrochant à une monnaie forte (c’est le cas de la Belgique depuis
1990). Cette politique du franc fort comporte des avantages : taux d’intérêts très bas, inflation très
faible, importations meilleur marché… Par contre les adversaires de cette politique se sacrifie pour
pouvoir s’accrocher à des monnaies fortes.
La réévaluation : un pays peut, dans certaines situations, vouloir réévaluer sa monnaie. Les
conséquences de cette politique sont strictement à l’opposé de celles de la dévaluation compétitive :
1er. Exportations plus chères. 2ème. Importations moins chères. 3ème. Frein à l’inflation à moyen
terme. 4ème. Risque de ralentissement brutal de l’économie pendant la première période. Les gens
épargnent d’avantage, la consommation recule, les entreprises souffrent à cause de la chute de la
consommation et des difficultés à l’exportation.
III. L’internationalisation.
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La logique de l’internationalisation.
- Evolution du commerce : le métier de commerçant consistera souvent à chercher ailleurs des
biens ou services qui possèdent un avantage comparatif.
- Naissance du protectionnisme : l’évolution du commerce conduit à la naissance du
protectionnisme : les producteurs se sentent menacés et réclament des protections contre
l’envahissement des produits extérieurs.
- Le temps des colonies : pour subvenir à leurs besoins, les pays s’étendent en conquérant des
colonies qui servent aussi de débouchés pour les productions de la métropole.
- Une expansion importante : la seconde partie du XXe siècle se caractérise par une expansion
considérable du commerce international.
- La concentration des entreprises : dans la recherche du profit maximum, l’entreprise capitaliste
doit poursuivre deux objectifs : 1° s’efforcer de vendre plus, augmenter les recettes ; 2° réduire les
coûts.
Or ces deux objectifs se rencontrent lorsque l’entreprise, en grandissant, réalise des économies
d’échelle. Lorsque la dimension d’une unité de production augmente, les coûts par unité produite
diminue. Pourquoi ? 1° Un investissement sera amorti plus facilement si la production augmente. 2°
De nombreux autres coûts dans l’entreprise ne sont pas directement proportionnels à la quantité
produite : frais de recherche, frais administratifs, publicité… 3° Produire plus permet aussi de
spécialiser la main-d’œuvre. A l’extrême, on aboutit à la “taylorisation”. Encore ne faut-il pas pousser
cette évolution trop loin. En effet l’excès de “taylorisation” favorise la déresponsabilisation et
dévalorise le travail. 4° Une grosse entreprise obtient de meilleur prix pour les matières premières et
autres fournitures parce qu’elle achète en grandes quantités. 5° Enfin, en prenant une place
importante sur le marché, elle acquiert une image de marque qui facilite l’écoulement de ses produits.
La même logique – réduction des coûts et augmentation des recettes – pousse à la
multinationalisation des grandes sociétés. Elle pratique une division internationale du travail.
- L’intégration des marchés financiers : pour fournir davantage de liquidité au commerce
mondial et favoriser les investissements des entreprises à l’étranger, les pays ont libéralisé les
mouvements de capitaux. Grâce à la révolution technologique des communications, les marchés ont
pu être fortement intégrés. La vente et l’achat d’obligations et d’actions de grandes sociétés se
poursuivent sans interruption, comme s’il n’y avait qu’un seul marché. Résultats prodigieux :
expansion du commerce mondial, autonomie croissante des flux financiers par rapport au commerce
des biens et des services.
- Un nouveau concept : la mondialisation.
Ce concept désigne cette extension des
raisonnements d’entreprise à l’échelle mondiale, entraînant des déplacements de biens, de
personnes, de services, d’informations et de capitaux, sans précédent dans notre histoire.
L’échange international et les économies nationales.
- La notion de contrainte extérieure ou l’obligation d’exporter. Le rôle économique des
exportations est de permettre, c’est-à-dire de financer, l’importation de produits qui ne sont pas
disponibles dans le pays même ou qui peuvent être produits à l’étranger à des conditions plus
avantageuses. Qui dit achat à l’étranger, dit besoin de monnaies étrangères ou de “devises” pour
payer ces exportations. Or, nous ne pouvons acquérir ces devises qu’en vendant à l’extérieur. Le
poids de nos importations détermine donc une contrainte extérieure sur nos économies, une
obligation de vendre à l’étranger ou de nous priver de biens importés. Sinon, notre économie court à
la faillite.
Heureusement, les marchés intérieurs sont devenus trop étroits pour beaucoup de firmes
nationales dont la taille augmente et dont la spécialisation accentue encore l’étroitesse des marchés.
- Les instruments de mesure du commerce extérieur. La balance commerciale mesure les
biens et les services, en faisant la somme des exportations moins la somme des importations. Le
total est soit + (le pays exporte plus qu’il n’importe ; ses entreprises sont compétitives), soit - (le pays
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doit redresser la barre pour éviter de s’endetter). La balance des paiements est cette fois un bilan
global de la totalité des flux entre un pays et le reste du monde. Côté positif, les devises entrant dans
le pays, somme des exportations, des capitaux entrants et du travail sortant. Côté négatif, les devises
qui sortent, somme des importations, des capitaux sortants et du travail entrant.
A qui profite la croissance du commerce international ?
L’augmentation importante du commerce mondial et la mondialisation économique dans son
ensemble font naître de nombreuses craintes dans les pays plus développés. C’est que la
concurrence de produits importés peut nuire à des pans entiers des économies nationales. Des pays
autrefois pauvres et peu développés (Asie) exportent maintenant des voitures, des ordinateurs, des
vêtements… Ils ont rapidement rattrapé leur retard sur le plan technologique, et leurs salaires étant
inférieurs aux nôtres, ils nous font une concurrence sévère.
- Les avantages comparatifs : la théorie des avantages comparatifs explique le bénéfice des
échanges internationaux. Elle explique que l’internationalisation de l’économie de marché génère
normalement un niveau de bien-être supérieur pour tous les pays qui y participent, puisqu’elle permet
une meilleure répartition des facteurs de production. Le commerce international va donc amener les
pays à se spécialiser dans les produits qu’ils peuvent produire le plus efficacement et à échanger ces
derniers contre des produits que l’étranger peut produire d’une manière plus efficiente. C’est ce que
l’on appelle la division internationale du travail.
La division internationale du travail est favorisée par l’existence d’“économie d’échelle” dans la
plupart des industries : le prix de revient unitaire diminue à fur et à mesure que le volume de
production augmente.
- Les petits pays : les petits pays profitent davantage du commerce international que les grands,
car leur marché intérieur n’est pas suffisamment grand pour tirer un profit maximum des économies
d’échelle. Ils ne peuvent le faire qu‘en élargissant leur marché grâce au commerce international.
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IV. Les limites de l’économie de marché.
Le marché est injuste.
- Du mythe fondateur à la réalité. Le mythe du self-made man exalte la volonté et le courage, le
travail et l’habileté : le battant l’emporte dans la compétition entre les individus et sa victoire méritée le
place au sommet de la hiérarchie d’argent. Mais derrière ceci, on passe alors d’une aristocratie de
sang à une aristocratie du capital. On constate ainsi (statistiquement) que le pouvoir économique,
comme naguère les titres de noblesse, se transmet de génération en génération.
- La société capitaliste est une société duale. De la même façon qu’il crée une aristocratie du
capital, le système laissé à lui-même crée ce que l’économiste Galbraith appelle une “sous-classe”,
irrémédiablement perdante de génération en génération. Ceci causé par une double spirale
d’accumulation : vers le haut, moyens financiers, éducation, culture se renforcent pour assurer la
réussite sociale ; vers le bas, les manques se cumulent : manque d’argent, inadaptation culturelle,
crise des familles, méconnaissance des institutions, manque de travail…
Le marché est myope.
La raison de l’efficacité du marché est l’encouragement du progrès technique et la satisfaction de
besoins toujours plus importants. Elle s’impose dans une logique de profit. Il faut innover, inventer
de nouveaux biens pour pouvoir vendre. Il faut s’adapter aux besoins plus ou moins conscients et en
perpétuelle évolution des consommateurs. Il faut innover, inventer pour trouver les moyens de
produire à moindre coût face à une concurrence de plus en plus internationale. Les découvertes
scientifiques, les innovations technologiques doivent dégager de la rentabilité. Mais la recherche
absolue de la rentabilité est un guide qui oublie trop souvent l’aspect humain des choses. Les
entreprises pharmaceutiques n’investissent pas autant dans la recherche contre le SIDA car la
majorité des cas de SIDA concernent le Tiers-Monde, c’est-à-dire une population qui ne saura pas se
payer les traitements découverts…
Une compétition sans règles ?
La lutte pour l’obtention d’un marché ressemble à une compétition sportive avec l’affrontement des
concurrents et la victoire du “meilleur”. Mais sur le marché comme en sport, certaines conditions
doivent être respectées pour assurer la loyauté de la compétition et la qualité du résultat.
- Pas de monopole : il faut atomicité du marché. Tant du côté de l’offre que de la demande
doivent exister de nombreux agents économiques dont aucun n’a une taille et une puissance
suffisantes pour influencer à lui seul les quantités et les prix. Or, la recherche de la facilité, la
tendance naturelle, pousse les entreprises à éviter la dure loi du marché en se regroupant ou en
s’entendant. De même, les acheteurs, en se regroupant dans des centrales d’achats, peuvent
influencer les prix par la quantité de leurs achats groupés.
- Homogénéité et transparence : toutes les firmes doivent livrer des produits que les acheteurs
apprécient sans préjugés, sans avoir de raison de préférer a priori telle ou telle firme. Sur le marché,
la transparence est indispensable. Tous les participants au marché doivent avoir une connaissance
complète des éléments importants du marché.
- Libre entrée : il faut libre entrée sur le marché, sans restriction ni délai. Aucune firme ne peut
s’opposer à l’arrivée de concurrents. Or, le haut degré capitalistique (quantité de machine nécessaire
pour produire) de certaines productions rend quasiment impossible l’arrivée d’un “petit nouveau”. De
même, les firmes nationales essaient souvent d’empêcher l’arriver de produits étrangers sur leur
marché par des mesures protectionnistes : contraintes techniques (exemple : type de prises
électriques), normes sanitaires, taxes douanières…
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Comprendre l’économie – Cesha80 1999
A marché mondialisé, problèmes exacerbés.
Comment parler d’atomicité et de libre entrée sur des marchés dominés par quelques firmes
multinationales ? Quant à la puissance publicitaire d’une offre mondialisée, elle est évidemment
démultipliée…
- Une croissance très inégale : si tous peuvent disposer d’avantages comparatifs, certains pays
en ont plus que d’autres. En Amérique latine et en Asie du Sud-Est, plusieurs pays, combinant leur
avantage salarial avec des politiques de stabilisation macro-économique, ont pu grimper dans le train
du développement.
- Des perdants et des gagnants dans chaque pays ? La croissance générée par l’augmentation
des échanges mondiaux ne se distribue pas de manière égale dans l’espace. Mais, au sein d’une
même société, elle ne profite pas également à tous les groupes sociaux. Certains en profiteront
beaucoup, d’autres peu ou pas du tout.
- Ceux qui peuvent y gagner :
Les détenteurs de capitaux : eux profitent pleinement de la libéralisation des mouvements
de capitaux et de la mondialisation des marchés financiers. En confiant leur épargne aux
“investisseurs institutionnels” (les fameux “zinzins”), ils peuvent réaliser des profits rapides et
parfois substantiels.
Les plus performants : ceux qui ont une formation poussée, multilinguisme, faculté
d’adaptation rapide, créativité…
Les consommateurs : ils bénéficient de produits sophistiqués et relativement bon marché
grâce aux stratégies internationalisées des entreprises. Ils peuvent acheter une voiture
“japonaise” au Pays de Galles…
- Ceux qui risquent d’y perdre :
Ceux qui pratiquent des métiers que la concurrence internationale menace : Swissair a
par exemple transféré l’encodage de sa billetterie en Inde où le salaire d’un informaticien est dix
fois moindre qu’en Suisse. Les données encodées sont transférées par satellite.
Les moins performants : pour de multiples raisons, de nombreux jeunes ne répondent pas
aux exigences du marché.
Les populations des pays pauvres : la vision optimiste est que le développement viendra
dans les bagages des entreprises qui investissent dans les pays à bas salaires et qu’ensuite ces
salaires augmenteront et, avec eux, le niveau de vie des populations de ces pays.
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Deuxième partie. L’intervention de l’Etat.
V. La création de l’état.
L’Etat, création juridique.
- Des valeurs communes.
La vie en société est moins difficile à organiser si elle se base sur des valeurs, des règles de vie,
des normes, une culture commune. Le groupe humain se forge ainsi une identité et éduque ses
enfants en vue de leur intégration.
Le système politique au sens large est l’ensemble des institutions et des règles qui ont pour
but d’assurer la cohésion de la société et de la protéger des agressions extérieures.
Y appartient le contrôle social, c’est-à-dire l’ensemble des punitions, récompenses, jugements
octroyés par le groupe en fonction de ses normes propres et du rôle qu’il attend de ses membres.
- Une création juridique.
L’Etat est création juridique. Il n’existe que lorsque le droit se saisit de ces éléments préalables et
les transforme en rapports juridiques. Les rapports entre les membres du groupe et les détenteurs
du pouvoir deviennent des rapports entre citoyens et pouvoir publics et s’analysent en termes de
droits et d’obligations formalisées ; les relations entre les divers détenteurs du pouvoir s’expriment en
termes de compétences, d’attributions et de fonctions.
- L’Etat moderne.
Il faut attendre le XVIIIe siècle pour qu’émerge la vision moderne de l’Etat. Les Etats sont des
personnes morales représentantes de la nation (c’est nous quoi !) et responsables du bien collectif de
cette nation.
L’Etat a dès lors un but à atteindre : améliorer le bien-être collectif des citoyens. Cette vision
repose sur un double postulat : le progrès et la raison conduisent inéluctablement la société vers un
avenir meilleur ; l’ensemble des membres de la société se trouve sur “le même bateau” économique
et social et participent tous à l’amélioration promise. L’avenir est nécessairement meilleur et commun.
L’Etat, acteur économique.
Création juridique, l’Etat a été, de tout temps, un acteur économique important. Il est même
souvent ressenti comme un prédateur dans l’économie. Mais, en même temps, on attend de lui qu’il
joue un rôle positif, qu’il offre des services à la population, qu’il comble les lacunes du marché.
Un Etat impartial ?
L’Etat bourgeois du XIXe siècle assurait les conditions nécessaires à l’épanouissement du
capitalisme industriel, alors en plein essor. L’Etat de cette époque est souvent appelé Etatgendarme, puisqu’il est principalement le défenseur des intérêts individuels.
Au cours du XXe siècle, le champ d’action de l’Etat va s’élargir. On peut donner trois raisons
principales à cet élargissement : la volonté démocratique ; la multiplicité des besoins collectifs ; la
mise en évidence des limites du marché.
Si l’Etat reste gendarme, il devient aussi providence assurant à tous une sécurité (sociale) et
intervenant directement dans l’économie.
Depuis les années 80, la persistance de la crise économique et la mise en évidence des faiblesses
de l’Etat-providence entraînent une remise en cause du rôle de l’Etat dans l’économie. Néanmoins,
l’Etat est devenu un agent économique tellement important que les économies modernes sont
appelées économies mixtes. Le terme “mixte” signifie l’ajout au libre jeu des agents économiques
d’une intervention de l’Etat, plus ou moins importante suivant les pays, mais toujours présente.
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Comprendre l’économie – Cesha80 1999
L’Etat dans le schéma de fonctionnement d’une économie mixte.
Dans ce modèle, l’Etat est entendu au sens large ; on vise l’ensemble des pouvoirs publics, non
seulement l’Etat fédéral, mais aussi les Régions, les Communautés, les provinces, les communes, les
intercommunales…
Les relations ménages – Etat.
Les ménages alimentent les caisses de l’Etat en payant des impôts et des cotisations sociales.
Ils reçoivent en échange des transferts (allocations diverses) directs. Les transferts indirects
désignent les services et infrastructures offerts par l’Etat à l’ensemble de la collectivité (ex. piscines,
autoroutes, administrations). D’autres, enfin, prêtent de l’argent à l’Etat, moyennant intérêts.
Les relations entreprises – Etat.
Comme les ménages, les entreprises paient des impôts et des cotisations sociales. En échange,
elles reçoivent aussi des transferts (subsides) directs et indirects. Certaines entreprises ont l’Etat
comme client, moyennant paiement du prix des biens et services vendus. D’autres, enfin, prêtent de
l’argent à l’Etat, moyennant intérêts.
L’Etat et l’extérieur.
L’Etat peut importer des biens et des services ou en emporter. Il peut faire entrer ou sortir des
capitaux (financement d’investissement dans les pays moins développés, par exemple). Quant au
travail, il ne peut en exporter puisque seuls les ménages offrent du travail. Il peut en importer mais
c’est assez rare puisque le personnel de l’Etat doit en principe être “national”.
L’Etat et les banques.
Il peut arriver que l’Etat place de l’argent en banque, mais c’est plutôt exceptionnel. Les
contribuables comprendraient d’ailleurs mal qu’un Etat dispose en permanence de revenus
excédentaires. En fait, aujourd’hui, la plupart des Etats éprouvent plutôt des difficultés à équilibrer
leur budget. Ils doivent alors emprunter. L’ensemble des emprunts en cours de l’Etat constitue la
dette publique.
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VI. L’Etat régulateur.
Les objectifs de la régulation.
- Assurer une concurrence réelle.
Les acteurs économiques ont une tendance naturelle à vouloir réduire l’incertitude et le risque.
Dès lors, ils cherchent à limiter la concurrence chaque fois qu’ils le peuvent. Un premier objectif de
l’intervention de l’Etat sera donc de minimiser, de contrôler et parfois d’interdire ces pratiques
restrictives de la concurrence.
- Contrôler les monopoles naturels.
Le marché est impuissant devant le développement des monopoles naturels.
Ceux-ci
apparaissent lorsque les coûts unitaires d’un seul producteur sont décroissants, rendant ainsi la
concurrence inefficace. Mais, en l’absence d’une menace concurrentielle, le risque est réel que le
producteur monopolistique ne pratique des prix trop élevés, soit parce qu’il n’est plus incité à maîtriser
ses coûts, soit parce qu’il peut s’octroyer une marge bénéficiaire particulièrement confortable. Dès
lors, pour limiter le risque d’un abus de la position de monopole, la puissance publique doit intervenir.
- Tenter d’obliger les entreprises à assumer tous leurs coûts.
Des producteurs peuvent abaisser leurs coûts en n’en assumant pas un certain nombre. Produire
sans se soucier de salubrité ou de pollution coûte moins cher. En fait, le coût de la pollution ou de
l’insalubrité n’est pas supprimé, mais il est reporté sur autrui : travailleurs, riverains, communes,
Etat… On parle alors de coûts externes ou des externalités. L’élimination des externalités est de
plus en plus souvent l’objectif des interventions de l’Etat régulateur.
- Défendre les plus faibles.
Interdiction du travail des enfants, maintien de la fourniture d’un minimum d’eau et d’électricité,
interdiction de certaines pratiques du commerce, réglementation du crédit à la consommation, etc.
- Protéger l’ensemble des citoyens.
Comme la société devient plus complexe, les citoyens sont de plus en plus incapables d’apprécier
par eux-mêmes si les produits offerts sur le marché présentent ou non des dangers. L’Etat crée alors
des administrations dont la mission est de surveiller l’état, le bon fonctionnement de tel ou tel produits.
Les sociétés industrielles modernes sont confrontées à un volume croissant de déchets dangereux
ou toxiques, dont le conditionnement, le stockage et le traitement doivent être soigneusement
réglementés et contrôlés dans le souci de préserver la qualité de l’environnement et la santé des
citoyens.
- Sauvegarder les intérêts stratégiques de l’économie nationale.
Certains secteurs économiques sont tellement vitaux dans une société moderne qu’ils ont retenu
plus spécialement l‘attention de l’Etat régulateur. Dans la plupart des pays industrialisés, les secteurs
visés sont ceux du crédit, de l’énergie et du transport.
- Eviter des accidents déstabilisateurs.
Un objectif de stabilisation peut aussi justifier l’intervention de l’Etat. Ceci est particulièrement vrai
dans le secteur financier (banques et assurances).
Les moyens de la régulation.
Le tableau à double entrée ci-dessous nous montre les quatre grandes catégories de moyens de
régulation. Pour faire respecter une réglementation, on peut employer la “Carotte”, en donnant des
avantages à ceux qui s’y conforment. Le “Bâton” servira à punir, ceux qui ne s’y conforment pas.
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Comprendre l’économie – Cesha80 1999
Carotte
Encourager
le
respect
des
réglementations.
Bâton
Décourager
le
non-respect
des
réglementations
A l’aide de l’argent
Autrement que par l’argent
Incitant financier
Incitant non financier
Subsides : aides financières directes
Réduction d’impôts
Prêts
Garantis d’Etat sur prêts
Subventions-intérêts aux organismes de crédit
Règlements d’urbanisme
Législation des marchés
Critère de qualification professionnelle…
Désincitant financier
Désincitant non financier
Amendes
Charges financières
Obstacles administratifs
Sanctions non financières
Peines d’emprisonnement,
Fermetures d’établissement
Comprendre l’économie – Cesha80 1999
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VII. L’Etat redistributeur.
D’où vient l’argent de l’Etat ?
- Des recettes fiscales.
On distingue traditionnellement les impôts directs et les impôts indirects. Les impôts directs sont
des prélèvements opérés sur le revenu ou sur le capital des particuliers ou des sociétés. Les impôts
indirects sont des prélèvements opérés à l’occasion d’un acte posé par le contribuable (TVA)
- Des recettes parafiscales.
Les cotisations sociales dues par les employeurs et les travailleurs et destinées à financer les
diverses branches de la sécurité sociale.
- Des recettes non fiscales.
Grande variété de recettes qui ne constituent pas des prélèvements obligatoires (bénéfices
annuels de la Banque nationale, bénéfices de certaines sociétés dont l’Etat est actionnaire, des
revenus de propriétés foncières, de la vente de biens et de services…).
- Des emprunts.
Où va l’argent de L’Etat ?
- On peut diviser les dépenses de l’Etat en deux grandes catégories : les dépenses courantes
(dépenses de consommation, transferts de revenus, charges d’intérêts sur la dette publique) qui
reviennent normalement chaque année et les dépenses de capital qui, en principe, accroissent le
patrimoine du pays.
- Dans des dépenses qui n’en sont pas. Aides aux entreprises, allocations aux ménages, etc. sont
de l’argent redistribué qui rentre dans le circuit économique. Les entreprises l’utilisent pour s’équiper
et investir, pour payer du personnel, etc. Les ménages le dépensent et font ainsi tourner l’économie.
L’Etat redistributeur fonctionne donc comme une énorme “pompe aspirante et refoulante”.
- Dans la “Sécu” (redistribution au quotidien)
Plus ou moins d’Etat ?
On le voit, l’intervention de l’Etat a une influence sur l’économie. Mais l’Etat doit-il intervenir
beaucoup, ou peu ? Et surtout, de quelle façon ? Deux théories principales s’opposent à ce sujet,
sans qu’aucune paraisse pleinement convaincante à l’épreuve des faits : la théorie classique et la
théorie keynésienne. Une troisième voie pourrait voir le jour en empruntant celles des deux autres.
La rigueur budgétaire est indispensable pour ne pas endetter excessivement l’Etat et ne pas payer
des charges insupportables sur la dette. Mais il faut aussi maintenir à un niveau suffisant les
dépenses de transfert qui, globalement, sont indispensables pour assurer une certaine justice sociale.
La question n’est donc pas tellement “plus ou moins” d’Etat, mais bien d’orienter les dépenses vers
des secteurs et des activités porteurs d’emplois, ou indispensables à la cohésion sociale.
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Comprendre l’économie – Cesha80 1999
VIII.
L’Etat entrepreneur.
Deux exemples d’actions de l’Etat entrepreneur.
- L’école. L’enseignement est un investissement dont toute la société, et notamment les
entreprises, va profiter. Chacun sait que, de plus en plus, la force d’une économie dépend aussi de la
formation des travailleurs.
- Les transports publics. Il permet d’assurer la mobilité des personnes et des marchandises, et de
diminuer la pollution. Si le marché s’était occupé seul du transport, l’implantation d’une infrastructure
de transport en commun dépendrait uniquement de sa rentabilité. Les lignes fréquentées seraient
développées. Mais les régions éloignées et peu habitées, resteraient isolées.
L’Etat et le secteur non-marchand.
On désigne par l’expression “secteur non-marchand” l’ensemble des activités qui
fournissent des biens et surtout des services gratuits ou à un prix inférieur à leur prix de
revient.
L’Etat n’a pas le monopole du secteur non-marchand. Des associations privées, fonctionnant à
l’aide de dons et de bénévolat, tentent aussi de satisfaire des besoins pas ou peu solvables.
L’Etat et le secteur marchand.
Même dans des pays à économie de marché, et en dehors du champ traditionnel des services
publics, on a vu les pouvoirs publics acquérir des participations dans des entreprises existantes et
même prendre l’initiative de créer des entreprises nouvelles. Le champ d’action des Etats s’est
étendu à des secteurs qui s’écartent de leur domaine traditionnel. Le secteur public s’est ainsi lancé
dans la promotion immobilière, la production de services allant de la restauration collective à
l’assurance, et dans toutes sortes d’industries. Les motivations de ces interventions sont diverses ;
elles relèvent tantôt d’une volonté délibérée d’accroître le contrôle de la collectivité sur l’économie,
tantôt d’une nécessité de suppléer aux carences du secteur privé.
Accroître le contrôle de la collectivité.
La logique de cette volonté de contrôle est d’inspiration marxiste : pour que l’économie soit
réellement au service du plus grand nombre, il faut soustraire au privé les principaux leviers de
commande de l’économie. C’est pourquoi les secteurs touchés par ces nationalisations sont l’énergie
(charbonnages, gaz, électricité), le transport (transports urbains, aviation civile), la banque et
l’assurance.
En revanche, dans d’autres pays où les socialistes étaient pourtant au gouvernement, par exemple
dans les pays scandinaves et en Belgique, il n’a pas paru utile que l’Etat étende à ce point son rôle
d’entrepreneur. La question est fondamentale : pour corriger les inégalités dues au marché, faut-il se
substituer à celui-ci (ce sont les nationalisations), ou l’encadrer ?
Suppléer aux carences du secteur privé.
Plus souvent, l’extension du secteur public est due à la nécessité de combler le vide provoqué par
le retrait ou l’abstention du secteur privé. Cette forme d’extension du secteur public peut elle-même
correspondre à deux logiques : l’une défensive (“sauver les meubles”) et l’autre offensive (“préparer
l’avenir”).
Comprendre l’économie – Cesha80 1999
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IX. Les limites de l’Etat.
L’Etat bureaucratisé.
Les interventions de l’Etat sont coûteuses pour les producteurs et les consommateurs, elles
demandent trop de formalités administratives, elles retardent l’apparition de nouveaux produits, elles
réduisent l’efficacité du marché, elles créent des secteurs “protégés”, elles alimentent l’inflation, elles
réduisent la capacité concurrentielle des entreprises nationales sur les marchés internationaux, elles
sont maintenues alors qu’elles ne sont plus utiles… Bref, loin d’améliorer le fonctionnement du
marché, les interventions de l’Etat le pervertiraient.
Nous pouvons donc constater l’affaiblissement de l’autorité de l’Etat, et en donner quelques
raisons.
- Un Etat surdimensionné.
Nous avons vu que l’Etat puisait sa légitimité dans le fait qu’il apparaissait capable d’améliorer le
bien-être collectif des citoyens. Les populations ont donc continuer à en attendre toujours plus et les
responsables politiques ont répondu à cette demande en étendant sans cesse la sphère d’activité de
l’Etat.
Or, échappant aux lois du marché, en situation de monopole pour un certain nombre de ses
activités, pouvant se permettre des déficits comme aucun autre acteur économique, alourdi par les
charges d’un personnel mieux protégé qu’aucun autre, l’Etat est rarement un modèle d’efficacité. En
outre, la tendance apparemment irrésistible à vouloir tout diriger par le sommet a engendré la
multiplication des règlements et le développement d’énormes bureaucraties pour les appliquer. Dès
lors, la dérive du “foisonnement administratif”, de la lenteur, voire de l’immobilisme, devient presque
inévitable.
Impotent car devenu en partie incapable de remplir ses missions de base et d’offrir des services de
qualité, on a le sentiment que cet Etat trop grand, trop lourd, trop centralisé, s’est lui-même éloigné
des citoyens qu’il est censé servir. D’où la déception de ceux-ci et leurs interrogations.
- Rendre l’Etat plus efficace.
Si l’on veut éviter cette dislocation sociale, ce règne du chacun pour soi, il faut donc s’efforcer de
rendre l’Etat plus efficace, donc plus légitime. De nombreuses voix se font entendre pour que l’Etat
organise ses services de façon plus souple et décentralisée. C’est le principe de subsidiarité. Celui-ci
consiste à rechercher pour l’action des pouvoirs publics le niveau d’intervention le plus efficace et le
plus proche possible du citoyen.
L’idée est d’éviter la constitution de lourdes pyramides
administratives qui accentuent la lenteur décisionnelle et tuent la diversité des initiatives de base.
Pour être efficace, cette recherche doit aussi avoir le courage de remettre en causes des niveaux
de pouvoir qui se trouveraient amoindris. Si l’on donne plus de compétences aux Régions, comme en
Belgique, il faut aussi réduire les administrations centrales et provinciales. Sans quoi, le citoyen se
trouve devant des niveaux de pouvoirs superposés, qui s’occupent tous plus ou moins des mêmes
problèmes : un parcours du combattant qui réduit encore la confiance du citoyen dans les services
publics.
- Dégraisser l’Etat ?
L’Etat en fait trop, il doit aujourd’hui laisser de ses activités au secteur privé. C’est une thèse qui
fait incontestablement son chemin. Mais qui a aussi ses détenteurs.
Voyons tout d’abord les différentes formes que ce transfert d’activités de l’Etat au secteur privé
peut prendre.
1° La suppression d’un service public dans l’attente que le trou ainsi produit sera comblé
spontanément par le secteur privé. (Frégibel)
2° Le blocage ou la réduction des subventions de l’Etat à certains secteurs publics, pour les forcer
à mieux s’autofinancer, ou à rechercher des partenaires privés. (Poste et SNCB)
3° La conclusion de contrats avec le secteur privé pour la prestation de services en lieu et place de
l’administration. Cette technique est plus ancienne que les Etats modernes. (Découverte de
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Comprendre l’économie – Cesha80 1999
l’Amérique par Christophe Colomb, les “Poney Express”)
4° La réalisation de “joint-ventures”, d’associations entre entreprises publiques et privés. (Accord
de coopération entre Belgacom et Airtouch)
5° L’assouplissement des monopoles légaux pour accorder aux acteurs privés l’accès à certains
secteurs. (Aux USA, la fin du monopole de “Postal Service” permet la création de Federal
Express, United Parcel Service…)
- La privatisation.
Une dernière mais importante forme de diminution du rôle de l’Etat est la vente d’une partie ou de
la totalité des actions d’une entreprise publique. C’est ce qu’on appelle la “privatisation”. On privatise
ainsi pour que soit mieux assuré le service public ou au contraire pour qu’il cesse de l’être. On
privatise une entreprise publique pour la “débureaucratiser” en y introduisant les méthodes de gestion
du secteur privé, pour la “rationaliser” en laissant au secteur privé le soin de procéder aux
licenciements, pour la “consolider stratégiquement” en lui donnant un partenaires plus puissant
économiquement ou plus évolué technologiquement. On privatise par idéologie (“moins d’Etat !”), par
contagion internationale, pour montrer sa vertu aux marchés financiers, pour être considéré comme
un bon élève du FMI. On privatise aussi pour se faire des sous, pour réduire le déficit ou
l’endettement public (c’est la motivation principale en Belgique).
L’Etat endetté.
L’augmentation rapide des déficits publics dans les années 70 a entraîné le gonflement rapide de
la dette publique. Cet endettement excessif réduit fortement la marge de manœuvre de l’Etat pour de
nouvelles interventions.
La dette est injuste. Chaque année, l’Etat doit donc trouver de quoi financer son endettement.
Nous avons vu qu’il fait appel aux banques, à l’extérieur, et aussi aux ménages et aux entreprises
belges. Pour assurer ce financement, les taux d’intérêts sur les emprunts de l’Etat doivent rester
suffisamment hauts pour attirer l’épargne.
La dette publique “fait l’affaire” des épargnants. Mais, par son ampleur, elle contribue à rendre le
crédit moins abondant et plus cher. La dette ne fait donc pas que priver l’Etat de marge de
manœuvre ; elle pèse aussi sur les agents économiques, privilégiant les épargnants au détriment des
emprunteurs que sont les consommateurs et les entreprises.
L’Etat étriqué.
Nous avons vu que le développement de l’échange a conduit à une internationalisation de
l’économie. Celle-ci rend les frontières nationales de plus en plus archaïques au fur et à mesure que
les sociétés multinationales se développent, que les capitaux circulent librement, que les marchés
s’élargissent et s’intègrent au niveau mondial.
Toutefois, l’Etat national est bien étriqué lorsqu’il s’agit de contrôler les agissements des sociétés
multinationales ou de réguler les marchés financiers.
- Contrôler les agissements des sociétés multinationales.
Si une grande société est gênée par l’intervention publique dans un Etat, elle peut aisément
déplacer son siège social, son administration ou sa production dans un autre Etat. Une société qui a
des sièges dans plusieurs pays peut, en manipulant les prix de transfert à l’intérieur du groupe,
moduler l’ampleur et la localisation de ses bénéfices de manière à minimiser sa charge fiscale. C’est
la recherche de “la voie la moins imposée”, pratiquée à l’échelle internationale.
La remis en cause, dans plusieurs pays européens, du régime du salaire minimum obligatoire est
largement la conséquence du chantage à la délocalisation pratiqué par des sociétés multinationales.
Inversement, des régimes fiscaux préférentiels sont maintenus en leur faveur, de crainte que leur
suppression ne provoque des délocalisation.
- Réguler les marchés financiers.
Comprendre l’économie – Cesha80 1999
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Traditionnellement, les rapports de change entre monnaies reflétaient les données économiques
fondamentales des pays concernés, en particulier la situation relative de leur balance de paiements,
elle-même fonction des échanges commerciaux. Aujourd’hui, le volume quotidien des flux financiers
est très largement supérieur à la valeur des biens échangés. A travers le monde, des millions
d’investisseurs, particuliers et sociétés, spéculent sur les monnaies, beaucoup d’entre eux suivant
automatiquement les indications données par des programmes informatiques.
Dans ce contexte, il devient de plus en plus difficile pour les gouvernements de mettre en œuvre
les mesures qui leur paraissent nécessaires. Tout gouvernement qui ose mener une politique qui
n’est pas juger orthodoxe par les marchés s’expose à des réactions préjudiciables à son pays.
Le problème, c’est que le marché est injuste. Le marché, par sa nature même, n’est pas concerné
par l’équité et la justice sociale. Dès lors, la seule réponse possible face à un marché mondialisé,
c’est de donner à l’autorité publique elle-même une dimension internationale. Tâche urgente, car, en
rendant l’Etat impuissant, la mondialisation est en train de délégitimer toute action publique.
L’Etat ne peut pas tout.
L’Etat doit sans arrêt d’interroger sur son efficacité redistributrice. Néanmoins, la redistribution par
l’Etat atteint aujourd’hui des montants importants et jamais les écarts de revenus n’ont été aussi
faibles dans notre pays. Alors ?
Il semble qu’ici aussi, l’intervention publique rencontre ses limites et que les méthodes
traditionnelles soient insuffisantes pour résoudre des problèmes plus individualisés et moins purement
économiques.
L’Etat-providence crée une solidarité financière.
solidarité interpersonnelle.
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Mais il est incapable de retisser liens de la
Comprendre l’économie – Cesha80 1999
Comprendre l’économie – Cesha80 1999
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de
= DANGER
Toute-puissance
= DANGER
Pouvoir partagé
la
classe
Idéalisation de l’homme-solidarité
techniquement, inefficace.
Le “TOUT ETAT”. Echec car intenable
dirigeante politiquement
classe
Responsabilité-solidarité
Combinaison
Les moins mauvaises des solutions
limitée dans le secteur marchand
L’Etat = l’entrepreneur
dirigeante économiquement
la
Toute-puissance
Détention du pouvoir
de
Liberté-individualisme-responsabilité
MARCHE-ETAT
intenable socialement (moralement)
Valeurs dominantes
EQUILIBRE MULTIPLES
Le “TOUT MARCHE” inexistant car
important
CONCLUSION
+/-
secteur non marchand et intervention
Développement
(mais nomenklatura)
- sécurité sociale +/- étendu
Redistribution maximale
pas de marché (mais marché noir !)
Officiellement pas de classes sociales
du
au
Pas de besoin de régulation puisque
Economie planifiée
- imposition +/- lourde
Redistribution +/- forte :
Fonctions de l’Etat-gendarme
charité
Aides minimales aux plus pauvres,
Etat entrepreneur
Etat redistributeur
marché
contraintes
imposant
fonctionnement du marché
certaines
Vaste gamme régulatrice possible,
Règles se limitant à permettre le bon
Etat régulateur
Economie libérale mixte
Economie de marché “pure”
Rôle de l’Etat
Troisième partie. L’Etat à l’heure de la mondialisation : les institutions
internationales.
Le besoin d’un redéploiement de l’Etat, à la fois vers le haut pour résoudre les grands problèmes et
vers le bas pour résoudre les petits, engendre la création de structures publiques mieux adaptées à la
nouvelle dimension des problèmes collectifs.
1) Le rôle des institutions et des accords internationaux croît. Si les nouveaux défis sont globaux,
ils ne peuvent être relevés avec succès qu’à une échelle globale, par des institutions
transnationales et par des politiques communes. (ONU, FMI…)
2) Des organisations supranationales dites “régionales” émergent.
3) Des pouvoirs étatiques sont transférés vers des entités plus petites. La suppression des
frontières à l’intérieur de l’Europe s’accompagne de l’affirmation d’autonomie fondées le plus
souvent sur des différences de langes, de culture ou de développement économique.
4) Des activités de l’Etat sont transférées au secteur privé. Comme nous l’avons vu à propos du
rôle de l’Etat entrepreneur, nous constatons une tendance à faire appel au secteur privé pour
des activités traditionnellement assumées par l’Etat.
Les points X et XI illustraient deux formes de redéploiement de l’Etat, l’un au niveau international,
l’autre au niveau régional. Ils ne seront pas développés ici.
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