Discours Ambassadeur sur changement climatique

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Introduction
Monsieur le Recteur, Mesdames et Messieurs, Monsieur le
Professeur, Chers amis,
La ville de Poznan doit accueillir en décembre 2008 la 14ème conférence
des parties à la Convention cadre des Nations Unies sur le changement
climatique – autrement dénommée COP 14 – et la 4ème réunion des
parties du Protocole de Kyoto. Cet événement s’inscrit dans le cadre des
conférences internationales qui doivent conduire à la mise en place d’un
régime international qui assurera la suite du Protocole de Kyoto, en
vigueur de 2008 à 2012. Poznan prend donc la suite de la conférence de
Bali qui a établi une feuille de route en 2007, et précède la conférence
de Copenhague qui doit conclure les négociations en décembre 2009.
On peut donc sans exagération considérer qu’en décembre 2008,
Poznan sera le centre de l’attention du monde entier, et le cœur des
décisions pour l’avenir de la planète pendant le siècle prochain.
Par sa dimension planétaire, le changement climatique est,
incontestablement, l’un des défis majeurs auxquels se trouve confronté
l’humanité tout entière. La communauté scientifique mondiale a constaté
la réalité du changement climatique lié aux activités humaines et à la
production de gaz à effet de serre. Les travaux internationaux menés à
travers les conférences internationales1 insistent sur le fait que, même si
tout est mis en œuvre pour éviter les dérèglements climatiques par la
réduction des émissions de gaz à effet de serre, je répète, même si tout
1
Rio 1992, Kyoto 1997, Marrakesh 2001, Johannesburg 2002, Bali 2007, etc…
1
est mis en œuvre, ces dérèglements sont désormais inévitables du fait
de l’inertie du système climatique.
L’Union européenne (UE) joue un rôle particulier, car elle est de
facto le « leader » des négociations internationales pour la période
« post Kyoto », dans le cadre qui a été mis en place par l’Organisation
des Nations Unies. Le passage à une économie mondiale à faible
intensité de carbone constitue en effet l’élément fondamental de la
politique de l’Union européenne en matière de changement climatique et
d’énergie, et le seul moyen d'atteindre l’objectif que s’est fixé l’Union, à
savoir faire en sorte que la moyenne des températures mondiales ne
dépasse pas de plus de 2 degrés centigrade, les niveaux de l’ère pré
industrielle. Je répète, ne pas dépasser de plus de 2 degrés centigrade,
le niveau de l’ère pré industrielle, sachant que nous avons déjà
augmenté ce niveau moyen de 0,7°C, et un peu plus, ce niveau moyen
de l’ère pré industrielle, et qu’il y a un effet d’inertie inévitable, comme je
viens de le dire, dû au système climatique. Ca veut dire que nous
n’avons pratiquement plus de marge d’augmentation et qu’il faut donc
faire un freinage assez brutal.
La France, comme vous savez, assurera la présidence de l’Union
européenne au 2ème semestre de 2008. Elle a fait de la question
« énergie-climat » la principale priorité de sa présidence, qui s’achèvera
justement par la conférence de Poznan. La France sera donc un
partenaire privilégié de la Pologne, qui évidemment préside la COP en
2008.
Je voudrais donc aujourd’hui vous présenter les objectifs de la
présidence française de l’Union européenne en matière de changement
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climatique, objectifs qui recoupent bien entendu ceux de la communauté
internationale et ceux de l’UE.
(1) Les objectifs internationaux face au constat du changement climatique
Notre objectif est de mettre en place un régime international qui
prendrait la suite du protocole de Kyoto à partir de 2012.
Pour la France, le protocole de Kyoto constitue en quelques sortes
le socle d’un système international après 2012. Les « acquis de Kyoto »
doivent donc constituer la base d’un système international d’atténuation
des effets du changement climatique. Le protocole de Kyoto a introduit
pour la première fois en effet dans un domaine où les politiques
s’appuient plus traditionnellement sur des instruments classiques, c’est à
dire réglementation et taxes par exemple, des mécanismes de marché
accessibles à l’ensemble des acteurs économiques, qu’ils soient publics
ou privés, mécanismes de marché définis à l’échelle mondiale. Les pays
industrialisés et en transition vers une économie de marché doivent bien
entendu respecter des limitations d’émissions de gaz à effet de serre
d’origine anthropique en mettant en œuvre des politiques et des
mesures régionales et nationales. En complément, des mécanismes et
des mesures de flexibilité visent à limiter, à l’échelle de la planète, le
coût des politiques d’évitement des émissions de GES en établissant un
système d'échange des droits d'émission, pour favoriser des projets de
développement durable. La contrainte carbone, qui est ainsi créée, doit
nécessairement modifier l’environnement réglementaire, économique et
financier des entreprises.
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Comme vous le voyez, le protocole de Kyoto ne constitue qu’une
première étape. Le régime même sur les cinq ans à venir, c’est à dire
2012 – 2017 le « Kyoto bis » ne suffira pas. Il faut donc envisager un
nouveau régime multilatéral qui devra évoluer.
Le nouveau régime devra viser une période d’application
supérieure à 5 ans et devra inclure l’ensemble des
acteurs
internationaux. Les pays développés d’abord, à cause de leur
responsabilité historique et de leur capacité d’agir les premiers, doivent
être à l’avant-garde de la lutte contre les changements climatiques. L'UE
s'est fixé donc un objectif à horizon 2020 et même 2050. De son côté
l’Australie a décidé de ratifier le protocole de Kyoto en décembre dernier.
C’est une bonne nouvelle. A ce stade, les Etats-Unis sont donc en
réalité, le seul grand pays industrialisé à ne pas être inclus dans le
dispositif international.
Pour l’instant, les émissions des pays en développement vont
croissantes. Les grands pays émergents (Inde, Chine, Brésil) doivent en
particulier apporter leur contribution, en explorant des approches
particulières pour faciliter un développement plus sobre plus économique
en carbone. Il faudra donc veiller à compléter le régime actuel, par une
action plus décisive sur les technologies pour réduire les émissions, et
aussi des actions sur l’adaptation aux changements climatiques.
Comme je l’ai dit en commençant, un certain degré de modification
du climat est inéluctable pour le siècle présent et au-delà, même si les
efforts d’atténuation déployés à l’échelle de la planète au cours des
prochaines décennies portent leurs fruits.
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De nombreuses régions du monde doivent déjà affronter les effets
négatifs d’une hausse des températures mondiales moyennes de 0,76°C
par rapport à 1850. L’élévation du niveau des mers touche déjà les petits
Etats insulaires, et touchera ensuite les deltas comme ceux du Nil, du
Gange ou le delta du Mékong. La fonte des glaciers de montagne réduit
déjà les disponibilités en eau douce. Les effets des phénomènes
météorologiques extrêmes et l’augmentation des maladies infectieuses
figurent également parmi les principaux risques à prendre en
considération. En Europe, le climat s’est réchauffé de près de 1°C
pendant le siècle dernier, soit plus vite que la moyenne mondiale. Le
volume des pluies et des précipitations neigeuses a augmenté de
manière significative dans le nord de l’Europe, tandis que les
sécheresses sont devenus plus fréquentes dans le sud. Plus de la moitié
des espèces végétales européennes pourraient être menacées.
La Conférence de Poznan aura donc pour mission de participer à
la création d’un nouveau système international qui permette à la fois :
- d’atténuer le changement climatique en permettant la réduction
des émissions de gaz à effet de serre ;
- d’adapter la vie humaine aux changements climatiques qui ont
déjà débutés, et dont l’amplification va se faire sentir dans les
prochaines années.
2) Les engagements de l’Union européenne
L’UE s’est engagée à faire aboutir les discussions internationales
en cours sur l’engagement post-Kyoto, dans le cadre des Nations Unies,
et sur la base des mécanismes mis en place par le protocole de Kyoto.
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En tant que présidente de l’UE pendant l’année 2008, la France
devra donc s’assurer de la coordination des positions européennes dans
le cadre des négociations internationales, et de l’organisation de la
participation européenne à la conférence de Poznan.
Afin de poursuivre cette politique, les chefs d’Etat ou de
gouvernement de l’UE sont convenus à l’unanimité, je répète à
l’unanimité, de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’au
moins 20% d’ici à 2020, et si un accord mondial global était conclu, de
30% d’ici à 2020. De plus, ils appellent à une réduction globale, jusqu’à
concurrence de 50% par rapport aux niveaux de 1990 d’ici à 2050.
Afin de respecter ces engagements, les Etats membres de l’Union
européenne veulent adopter une série de mesures législatives nouvelles
– appelées nouveau paquet « énergie-climat ».
La France se félicite de l’adoption par la Commission du paquet
climat – énergie. Il constitue une base solide pour la mise en place d’une
politique européenne ambitieuse sur le changement climatique. L’Union
Européenne, afin de conforter son rôle moteur dans les négociations
internationales sur le climat, se doit d’être exemplaire : un accord final
sur ce nouveau paquet énergie-climat est nécessaire avant la
conférence de Copenhague de décembre 2009 qui devrait conclure les
négociations commencées à Bali et mettre en place la gouvernance
mondiale du climat pour l'après 2012. L'Europe ne peut pas demander
une répartition mondiale de l'effort de lutte contre le changement
climatique si elle n'est pas elle-même parvenue à repartir cet effort entre
ses Etats membres.
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Compte tenu du renouvellement du Parlement Européen en 2009,
cet objectif nécessite un accord entre le Parlement et le Conseil avant la
fin du premier trimestre 2009. C’est pourquoi la France fera du paquet
climat – énergie une priorité de sa présidence. Nous organiserons deux
conseils informels environnement et énergie consacrés à la lutte contre
le changement climatique.
Je sais les difficultés que représente ce nouveau paquet énergieclimat pour la Pologne. Je ne vais pas nier la difficulté qui existe à
prendre des décisions aussi contraignantes et complexes dans un laps
de temps aussi bref pour l’ensemble des Etats membres de l’Union
Européenne.
La présidence française compte donc travailler avec beaucoup
d’énergie pour remplir cet objectif qui favorisera grandement les résultats
internationaux. Elle sera bien entendu à l’écoute des difficultés des
différents Etats membres afin de préserver la logique communautaire
d’une progression par consensus.
3) Les engagements de la France
Je voudrais maintenant aborder la façon dont la France a prévu, au
niveau national, de respecter ses engagements internationaux et
européens.
La France a engagé en 2007 un processus de consultation et de
discussion sur l’ensemble des sujets
liés
à la protection de
l’environnement et au développement durable, associant l’ensemble des
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acteurs français en la matière, pouvoirs publics, ONG, secteurs
économiques et entreprises, monde de la recherche, syndicats, etc…
Les travaux ont abouti en décembre 2007 après la remise de plusieurs
rapports réalisés par différents groupes de travail.
La France a décidé de réorienter sa politique dans le sens d’une
croissance écologique durable. Les éco-innovations, la prise en compte
de la dimension sociale des actions menées ainsi que le développement
de la fiscalité écologique devraient être au cœur de cette nouvelle
politique. L’ensemble des acteurs (entreprises, syndicats, ONG, élus et
Etat) devront être impliqués pour conduire ces mutations.
Trois thèmes d’actions prioritaires se sont dégagés :
- la lutte contre le changement climatique ;
- la préservation de la biodiversité ;
- le développement d’un environnement plus sain comme avec la
réduction des déchets et des pollutions chimiques.
La première priorité est donc la lutte contre le changement
climatique, c’est à dire une croissance fondée sur les énergies sans
carbone - dites « décarbonées » - ce qui suppose :
- d’abord et avant tout l’entretien d’un parc nucléaire important,
qui nous permet de générer 78% de notre électricité ;
- le
développement
des
énergies
renouvelables
et
des
biocarburants de deuxième génération : dépasser l’objectif
européen de 20% à l’échéance 2020. La Commission nous a
fixé 23% ce qui est légèrement supérieur mais acceptable.
- la maîtrise des consommations énergétiques, notamment grâce
à
des
investissements
accrus
dans
le
bâtiment,
le
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développement
de
transports
collectifs
avec
des
investissements ciblés sur les transports urbains, ferroviaire et
maritime. Cet objectif coïncide avec la proposition de la
Commission d’une réduction de nos émissions dans ces
secteurs de 14% d’ici à 2020.
- la
nécessité
d’élargir
le
marché européen
des
quotas
d’émission, notamment pour y inclure les émissions de l’aviation
ce qui correspond aux propositions de la commission.
En conclusion
En conclusion, je voudrais rappeler la volonté de coopération
étroite qui existe entre la France et la Pologne pour la préparation de la
conférence de Poznan, et plus généralement pour la lutte contre le
changement climatique. Cette coopération sera gage de progrès
substantiels à Poznan dans la perspective de l’accord international en
2009. La France propose à la Pologne ses capacités d’analyse, sa
participation active à l’organisation d’événements annexes pendant toute
l’année 2008 et pendant la durée de la conférence, la mise à disposition
des expériences réussies des entreprises, des ONG et des collectivités
publiques françaises sur les sujets liés au changement climatique. Il
apparaît déjà que la France et la Pologne partagent des objectifs sur des
questions telles que la déforestation. Il ne reste donc plus qu'à se mettre
au travail...
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