La grande consommation de soja en Chine et au Japon, pays où l'incidence du cancer de la
prostate est basse, a attiré l'attention sur son rôle protecteur. Le soja et ses dérivés diminuent
le risque de cancer.8 Il contient des phytœstrogènes, des isoflavanoïdes ainsi que des ligands
ayant une activité œstrogénique. Il est communément admis qu'il existe une corrélation
inverse entre le taux sérique d'isoflavanoïde et l'incidence du cancer de la prostate.
Le poisson ou l'huile de poisson, riche en oméga 3, réduit l'incidence et la progression du
cancer prostatique. Un homme de 30 ans, qui ne mange pas ou très peu de poisson, voit son
risque de mourir d'un cancer augmenter de deux à trois fois. La sardine, le pilchard, le sprat,
le hareng d'Atlantique, le kipper, la truite (sauvage), les anchois, la carpe (d'élevage), sont
riches en acides oméga 3. Les trois premiers de la liste présentent la plus forte teneur en acide
oméga 3. Le thon en boîte ne contient que très peu d'oméga 3 car sa graisse est extraite pour
être recyclée en nourriture pour animaux. Le thon frais est riche en oméga 3 mais est très
souvent contaminé par le mercure et d'autres toxiques : la pollution industrielle déversée
durant des décennies dans la mer a provoqué l'accumulation dans le tissu graisseux de certains
poissons, outre du mercure, des toxines cancérigènes comme la dioxine et les PCB
(polychlorobiphényles).
La bière, les alcools forts, le vin blanc n'ont pas d'effet protecteur. Par contre le vin rouge en a
un : la consommation de quatre à sept verres par semaine diminue le risque relatif de cancer
de la prostate de 48%.9
Des suppléments vitaminiques ou minéraux jouent également un rôle préventif.
Le rôle du stress oxydatif dans la carcinogenèse en général et prostatique en particulier est
connu depuis longtemps. Deux anti-oxydants autres que le lycopène peuvent être
recommandés : le sélénium et la vitamine E (alpha-tocopherol). Le sélénium à la dose de 200
mg/j, réduit le risque de cancer de la prostate de 63 à 74%.10 La vitamine E, à la dose de 50 IU
d'alpha-tocophérol/j réduit le risque de cancer de la prostate de l'ordre de 40%.11 Les
préparations polyvitaminées n'ont par contre pas d'effet sur le cancer de la prostate.
D'autres mesures ayant trait aux modifications du «style de vie» ont également un effet
préventif
Le tabac augmente le risque de développer un cancer de la prostate de l'ordre de 30% et sa
consommation sur une période de plus de dix ans augmente le risque de mourir de métastases
de cancer prostatique. L'effet de l'activité physique reste controversé. Dans certaines études à
moins d'être intense, elle ne semble pas avoir d'effet protecteur,12,13 mais une étude récente lui
reconnaît cependant un effet protecteur. Le coït a également un effet protecteur. Les hommes
qui développent un cancer de la prostate après 50 ans sont sexuellement moins actifs que ceux
qui sont épargnés.14 Toute pratique sexuelle n'est cependant pas bonne dans la prévention du
cancer : si le coït semble bénéfique, il n'en est pas de même de la masturbation puisque
lorsqu'elle démarre dans les premières années qui suivent la puberté, elle augmente le risque
de cancer.15
Il est donc possible en modifiant son style de vie, de réduire son risque de développer un
cancer prostatique de même que celui de mourir de maladie cardiovasculaire. Bien que ces
règles «d'hygiène de vie» soient relativement simples et désormais connues du grand public,
ce n'est pas demain qu'elles seront adoptées par tout un chacun. Des études montrent que
moins de 5% des hommes sont prêts à les adopter. La plus grande partie des patients préfère
prendre une ou des pilules quotidiennement plutôt que modifier leur style de vie. Pourtant ces
mesures ne sont pas trop douloureuses pour le porte-monnaie familial, au contraire des primes
de l'assurance maladie, qui parallèlement aux coûts de la médecine, prennent l'ascenseur. La
prévention reste le parent pauvre de la médecine. Les choses changeront peut-être demain.
Rappelons que dans la Chine Ancienne, le médecin était payé tant que son patient restait en
bonne santé et ne l'était plus dès l'instant où il tombait malade !