commerce ultramarin et était devenue « droguée » à l’impérialisme colonial [J. Marseille,
« Les relations commerciales entre la France et son empire colonial de 1800 à 1913 », Revue
d’histoire moderne et contemporaine, avril-juin 1984, pp. 286-357].
L’implication dans la « mise en valeur » de l’empire passait plus par la recherche de
débouchés que par des plans d’industrialisation et donc de développement [J. Marseille,
« L’industrialisation des colonies : affaiblissement ou renforcement de la puissance française »,
Revue française d’histoire d’outre-mer, 1982, premier trimestre, pp. 23-34. Jacques Marseille,
« L’investissement privé dans l’empire colonial : mythes et réalités », in Catherine Coquery-
Vidrovitch & Alain Forest (dir.), Entreprises et entrepreneurs en Afrique, XIXe et XXe siècles, Paris,
Laboratoire Connaissance du Tiers-Monde & L’Harmattan, 1983, premier volume, pp. 43-57]. Et,
surtout, une énorme majorité des firmes avait choisi de se délester de ses actifs ou intérêts
coloniaux bien avant le processus de l’indépendance politique lui-même, avec réactivité et
pragmatisme [J. Marseille, « Les milieux d’affaires français ont-ils été cartiéristes ? »,
in J. Marseille, Empire colonial et capitalisme français. Histoire d’un divorce, Paris, Albin Michel,
première édition en 1984, réédition de 2005, pp. 579-592].
Aussi la thèse et le livre qu’elle sécrète (d’ailleurs rééditée) [J. Marseille, Empire colonial et
capitalisme français. Histoire d’un divorce, Paris, Albin Michel, édition en 1984, réédition en
2005] suscitent-ils débats et même polémiques ! Les historiens de l’économie coloniale
s’insurgent en prouvant la force des firmes engagées dans le « système économique
impérial », leurs profits, leur mobilité stratégique, leur « réinvention » (et nous-même
avons sur ce registre étudié la CFAO), l’influence d’un grand patronat colonial (thèse d’une
doctorante de J. Marseille, Catherine Hodeir [Stratégies d’empire. Le grand patronat colonial
face à la décolonisation (1945-1962), Paris, Belin, 2003]), et même, in fine, d’un « esprit
économique impérial », thème de deux colloques, auquel J. Marseille a participé en 2006
en poursuivant ses joutes intellectuelles avec des partisans (de parti-pris même) de la thèse
d’un grand capital ancré dans ses bastions ultramarins.
Consacré alors grand maître de l’histoire économique, accède à la fameuse chaire de la
Sorbonne (occupée par Bouvier, entre autres), où il dirige des thèses, suscite des émules
(comme Daniel Lefeuvre, à propos de l’Algérie économique coloniale) et organise une
« grand-messe » qui couronne son grand oeuvre d’histoire ultramarine économique
[J. Marseille (dir.), La France & l’outre-mer (actes du colloque de novembre 1996 ; Les relations
économiques & financières entre la France & la France d’outre-mer), Paris, Publications du
Comité pour l’histoire économique & financière de la France, 1998]. Il paraît alors avoir
« saturé » sa thématique, comme il le confiait bien volontiers. Il décida alors de « changer
de braquet », d’abandonner le champ des chiffres et des problématiques ultramarins. Il
aura laissé à d’autres le soin de mobiliser les statistiques au service d’une histoire
ultramarine comparative (notamment Bouda Étemad).
Les combats du pédagogue « éclairé »
J. Marseille décida alors de ne pas s’attacher à la conquête de « positions académiques »
(direction de centre de recherche, d’association, de revue, etc.), contrairement à ses grands
homologues et voisins de Paris 4 (François Caron puis Dominique Barjot), de Paris 10
(Michel Lescure) ou de l’EHESS (Patrick Fridenson). Il devint résolument « pédagogue »,
engagé dans la République des idées, c’est-à-dire le militant d’une « vulgarisation » de
masse d’une histoire rénovée et même d’une histoire économique accessible, loin de
l’outre-mer. Nouveau « Malet & Isaac », il dirigea une collection robuste et durable de
manuels de l’enseignement secondaire (chez Nathan) et des collections chez Larousse.
Ministre virtuel, il fonda et co-anima une association de formation des enseignants du
secondaire à l’histoire économique (avec des livres, des colloques, des conférences)
[J. Marseille (dir.), La révolution commerciale en France. Du Bon Marché à l’hypermarché, Paris,
Le Monde Éditions, 1997. J. Marseille (dir.), Les industries agro-alimentaires en France. Histoire