Des troubles sont attestés en Dacie, en Maurétanie et en Bretagne (Brigantes, vaincus
par Lollius Urbicus) ; quelques historiens en font de vraies guerres, ce qui est peut-être
excessif.
En Bretagne, fut érigé un deuxième mur pour séparer le monde romain du monde
barbare. Plus au nord que le mur d’Hadrien, qui au demeurant ne fut pas abandonné, il
s’étendait sur 60 km. Les constructeurs ont utilisé davantage le bois et la terre, notamment
pour la palissade, les fortins, les forts et les tours ; du nord vers le sud, il comprenait un fossé,
une berme, un rempart et une route.
III. Une civilisation équilibrée
Ce fut une sorte d’apogée, d’équilibre presque parfait.
• Dans le domaine religieux, les cultes traditionnels furent à l’honneur, mais des
innovations sont attestées.
La triade capitoline ne fut pas négligée, pas plus que les autres dieux de la tradition
romaine (Mars, notamment).
Le culte impérial ne fut pas pratiqué avec excès. Une limite : Faustine fut proclamée
diua dès 141 ; être veuf d’une divinité n’était pas sans intérêt, politiquement.
Les cultes orientaux gardèrent leur statut ; l’empereur lui-même en pratiqua quelques-
uns. Cybèle connut une grande diffusion, notamment en Gaule, mais elle avait été introduite à
Rome et « naturalisée » dès la fin de la deuxième guerre punique. Bien qu’iranien, Mithra fut
très honoré parce qu’il représentait le bon ordre cosmique (il eut davantage de succès dans les
camps). Plus exotique et plus original, le Jupiter d’Héliopolis, un Baal syrien (de Baal-bek),
connut aussi une certaine diffusion.
• Dans le domaine intellectuel, le monde grec s’imposa avec une brillante école de
rhétorique (la « deuxième sophistique »).
Hérode Atticus n’a laissé aucun écrit, mais il a fortement marqué les esprits.
Aelius Aristide, auteur de nombreux discours, illustra la richesse culturelle et matérielle
de la Grèce d’Asie, et son attachement à Rome.
Pausanias, lui aussi Grec d’Asie, a laissé une Périégèse, une sorte de Guide bleu de
l’Antiquité, où il exprima son patriotisme culturel, un sentiment qui n’était pas incompatible
avec un fort attachement à Rome.
Lucien de Samosate a laissé une œuvre abondante, plus populaire, notamment un roman
picaresque, L’âne d’or. On lira aussi ses Dialogues des morts.
• L’Occident n’était pas en retrait.
Aulu Gelle se rendit en Grèce pour y écrire ses Nuits attiques, un recueil d’anecdotes et
de réflexions sur des sujets de son temps. Le choix de cette retraite montre l’importance de la
Grèce pour les intellectuels, même italiens.
Apulée de Madaure, un Africain, a laissé une œuvre importante. Elle manifeste
également la croissance, dans tous les domaines, de cette partie de l’empire. On lira de lui les
Métamorphoses, un roman picaresque qui brode sur le même thème que l’Âne d’or de
Lucien : un homme est transformé en âne par la magie et il vit des aventures étonnantes ; on
lui doit également l’Apologie, un plaidoyer prononcé pour se disculper d’avoir séduit une
femme riche en recourant à la magie (il risquait la peine de mort), et les Florides, des
conférences au contenu assez cuistre.
Fronton de Cirta, un autre Africain, a acquis la célébrité pour avoir eu un excellent
élève, encore inconnu à cette époque, le futur Marc Aurèle. Il a laissé une œuvre légère, un
Éloge de la fumée, un autre éloge, de la poussière. C’était là jeux d’intellectuel.