Il faudrait en effet savoir comment le recensement a été conduit
avant les déportations. Selon les mentalités du lieu et de l’époque,
on peut supposer que seuls les hommes adultes ont été
comptabilisés : en effet, l’une des préoccupations des Unionistes
était de récupérer les biens des Arméniens. Dans la mesure où les
femmes n’étaient pas susceptibles de posséder de terres ni de
maisons (qui se transmettaient aux fils), elles n’ont
vraisemblablement pas été comptées dans le recensement pré-
génocide. Alors qu’elles l’ont été (ainsi que les enfants), dans les
chiffres recensant les survivants après les déportations. Le
nombre des Arméniens exterminés lors du génocide de 1915 ne
peut donc pas se déduire par une simple soustraction comme
Murat Bardakci le fait.
On relève dans cette interview, les contradictions symptomatiques
de la schizophrénie qui frappe les intellectuels turcs. Descendant
d’Unioniste (« Le père de son père était un proche compagnon
d'arme d'Ataturk, devenu par la suite le préfet de Konya, Cemal
Bardakci. »), et fervent admirateur du Comité Union & Progrès,
Murat Bardakci défend la thèse officielle turque (« 1915 n’était
pas un génocide », « ce sont les Arméniens qui ont commencé »)
mais donne dans le même temps des éléments réels qui
contredisent le discours officiel et accréditent (malgré lui ?),
l’existence du génocide arménien… Sans doute, en tant que petit-
fils d’un membre du Comité Union & Progrès, Murat Bardakci est-il
bien placé pour savoir que sa propre famille s’est enrichie avec les
biens volés aux Arméniens : ceci explique qu’il continue à
défendre encore le crime, ayant lui-même profité de ses «
bienfaits »…
Notons cependant que Murat Bardakci avait participé à un débat
télévisé avec le très négationniste ex-Président de l’Institut turc
d’Histoire, Yusuf Halacoglu. Ce dernier y minimisait le chiffre des
morts tandis que Bardakci répondait d’un air moqueur : "monte,
monte, c'est largement supérieur à 300 000"…
D’ordinaire, nous essayons de vous proposer des traductions faites
directement à partir de la langue originale, mais cette fois-ci, le
Collectif VAN vous propose la traduction d’une synthèse résumée,
déjà préalablement traduite du turc en anglais, avec certaines des
notes du traducteur initial, John Havoonjian. Nos remerciements à
Christine Gardon pour son travail de traductrice de l’anglais vers le
français et à nos sympathisants turcophones qui nous permettent
de vous proposer des introductions explicatives et de compléter
ainsi le résumé ci-dessous.
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