Le territoire du COO, aussi une destination botanique (et autres fantaisies)
Vous le savez bien, une sortie ornithologique englobe également la contemplation des paysages et l’observation de toutes les
autres manifestations de la nature. Surtout lorsque les oiseaux se dérobent de nos jumelles et télescopes, il s’avère opportun de
profiter d’autres découvertes. À ce propos, le monde des plantes s’avère des plus prodigue et nous réserve des surprises depuis
avril jusqu’à novembre. Loin d’avoir parcouru tous les coins névralgiques de notre territoire au point de vue botanique, des
expériences avec le groupe naturaliste Flora quebeca et des botanistes locaux (amateurs ou non) m’ont tout de même permis
d’entrevoir les vastes possibilités de notre région.Voici ici , d’abord d’Est en Ouest, les faits saillants de ces pérégrinations :
A-Grenville-sur-la-Rouge et Pointe-au-chêne. En 2007, nous avons exploré par endroits cette zone depuis le bord de la rivière
Outaouais à l’embouchure de la rivière Rouge jusqu’aux collines vers le nord, de chaque côté du tracé actuel de l’autoroute 50.
Les cerfs de Virginie sont très nombreux, surtout sous la ligne électrique passant par là. Les botanistes qualifient ce secteur de
‘’paradis des Desmodies’’, d’élégantes Fabacées (autrefois Légumineuses). Car outre la plus commune Desmodium glutinosum,
on peut y trouver D.canadense (moins commun dans la région), D.nudiflorum (rare) (1) et D.paniculatum (très rare et localisée
normalement aux Milles-îles, mais nous l’avons repérée, c’est une extension d’aire !). Pour avoir parcouru les collines de
Luskville, je crois bien que nous y avons aussi affaire à un possible refuge de Desmodies, qui fréquentent de telles pentes
boisées sèches.Observées aussi la plutôt rare Hackelia virginiana (2) perchée sur son rocher, dans les champs des Solidago
altissima (Verge d’or très élevée) et un Apios americana en fleurs, dans un ruisseau l’Hydrocotyle americana, sous un bosquet
du toujours rare et isolé Hamamelis virginiana* (‘’café du diable’’) (3). Sans parler de la quinzaine de nouvelles espèces que
les experts de Flora quebeca ajoutèrent à ma liste à vie.Il faudrait y retourner en d’autres saisons, pour en compléter l’inventaire.
1-Desmodium nudiflorum : silhouette / fleur 2-Hackelia virginiana : rameau fructifère / nucules / fleurs
3-Hamamelis virginiana : port / rameaux / fleurs / feuilles / distribution est-américaine
B-Lac La Blanche, Mayo. Nous avons cumulé trois visites (2007-2009) à ce site bien connu, en insistant sur les coulées
profondes, les couches d’humus s’accumulent (de même que les moustiques !). Dans des secteurs très restreints de la
Réserve, dont au fond de notre coulée préférée (où d’ailleurs la Paruline du Canada est omniprésente), tout concoure à créer une
forte impression de version ‘’outaouaise’’ de la forêt pluvieuse équatoriale, oui, sous les épaisses frondaisons des fûts disposés
sur plusieurs étages, les souches vermoulues, les pieds dans le sol boueux peuplé de salamandres. La première surprise de notre
coin favori fut un individu isolé de Ginseng à cinq folioles (Panax quinquefolius)(4).Les fougères y sont encore plus diverses et
grandes qu’ailleurs dans la Réserve : Cystopteris bulbifera le long d’un ruisseau, des Polystichum acrostichoïdes (fougère de
Noël), des bouquets de Deparia acrostichoïdes (peu commune) et de fougères de New-York (Phegopteris noveboracensis) dans
les pentes et de fougères-à-l’autruche (Matteucia struthiopteris) dans les plats. Les habituelles Adiantum pedatum (quelle
fougère !), Athyrium filix-femina, et Dryopteris intermedia .Puis les rares : des immenses Dryopteris Goldiana avec sa nervation
bleutée et des filiformes Diplazies à sores denses Diplazium pycnocarpon (5). Ne manquaient que les dinosaures ! Dans les sols
meubles, Dentaria maxima et Sanicula gregaria défient les fougères. En fait, on doit porter attention ici à tous les groupes de
plantes qui comportent des espèces de sols riches. Je crois bien qu’à l’Accueil de la Réserve on peut trouver une liste des
plantes. Au début des sentiers, on trouve des colonies de Galearis spectabilis (6), petite orchidacée plus évidente à la floraison,
laquelle s’échelonne sur 2 ou 3 semaines. Recommandons fortement aussi une incursion printanière, avant la feuillaison, qui
doit s’avérer heureuse. Ha oui ! L’amateur d’insectes ou de champignons sera également choyé au Lac La Blanche et à Mayo.
4-P. quinquefolius : cliché Parc de La Gatineau / sommité florifère et système souterrain / avec les drupes
5-D.pycnocarpon : allure générale (2) / fronde fertile / sores en rangs serrés au revers d’une fronde fertile
6-G.spectabilis : plante entière et schéma de la fleur / lors de la floraison / zoom sur une sommité florale
C-Parc de La Gatineau.Remarquable de par la diversité de ses habitats et surtout le contraste marqué, dans la partie sud, entre
la plaine de l’Outaouais et les pentes abruptes.Les nombreux visiteurs naturalistes amateurs ajoutent à l’acuité des possibles
observations.La recherche de plantes en nature, c’est quasi indissociable de la géologie, de la géomorphologie et de la
glaciologie locales.Certains taxons sont des reliquats des mers et des fleuves post-glaciaires; elles reposent sur les sables laissés
lors du retrait des eaux (embouchures des fleuves, etc).Ici , leurs origines occidentales témoignent d’ailleurs d’une ancienne
communication entre le lac Huron (autrefois l’immense lac Algonquin) et la vallée de l’Outaouais à la fin de la dernière
glaciation.Toutes les espèces marquées d’une étoile*dans le présent texte doivent leur présence ici à cette origine et sont
caractéristiques de la vallée de l’Outaouais.D’autres espèces ainsi localisées ont des affinités pour les substrats calcaires (PH
alcalin).À cet égard, les environs des lac Pink et Kingsmere attirent l’attention.Selon la répartition des dépôts sablonneux et des
zones calcaires au Québec, on dénote souvent des aires de distribution disjointe parmi les espèces qui leur sont inféodés. Par
exemple, elles peuvent se trouver à la fois en Minganie, en Gaspésie, au Lac St-Pierre, au Témiscamingue, à la Baie James, au
lac Huron et dans les sables de l’Ottawa, et nulle part ailleurs ! Ainsi, muni d’une carte exposant la nature des affleurements
rocheux, des facteurs édaphiques, et connaissant la géographie post-glaciaire, on peut cibler des zones plus prometteuses.Le
Parc est aussi reconnu pour ses petites fougères saxicoles (et calcicoles) rares qui s’agrippent sur les escarpements et les éboulis.
Côté arbres, notre Parc est le foyer québécois de Quercus alba*(Chêne blanc) (7), poussant sur les collines et les sommets.
Début été 2006, Flora quebeca y organise son grand rendez-vous botanique de trois jours, faisant valoir avec raison que le Parc
fut quelque peu négligé question inventaire floristique. L’objectif fut d’initier un examen à savoir si persistent certaines plantes
notables observées 15-20 ans plus tôt , et si tel est le cas, d’indiquer leurs emplacements au moyen des GPS (d’ailleurs c’est un
réflexe maintenant chez les botanistes). Le Parc nous donna la permission de cueillir des spécimens, question de les identifier
tous ensemble à notre base d’opération : le Musée canadien de la Nature du chemin Pink. Cet édifice consacré à la recherche est
fermé au public mais sa riche bibliothèque vous est accessible.Le samedi, guidés par Jacques Cayouette, un des botanistes les
plus respecté du Canada, nous trouvons des espèces notables dans les champs du chemin Pink, comme Panicum philadelphicum,
Chaenorrhinum minus, Draba nemorosa* et Trichostema brachiatum*. Le lundi, une excursion spéciale nous invitait à Danford
Lake, entre autre pour voir le Pterospora andromedea* (pine-drops), plante saprophyte sans chlorophylle.Question de mieux
explorer tout le territoire du Parc, notre groupe est divisé en sept équipes de 4 à 6 personnes.Mon groupe part en direction de la
Chûte-de-Luskville avec la présence de Laurent Brisson, spécialiste des saules,des amélanchiers et des aubépines.Dans les
champs et boisés au pied de la falaise, il ne manque pas de repérer Salix humilis, Amelanchier Wiegandii et Parthenocissus
inserta. Nous croisons des Silene antirrhina, Comptonia peregrina* (Comptonie voyageuse), Lechea intermedia* et des
immenses Inules aulnées (Inula helenium), qui affectionnent les anciens pâturages.Caractéristique du Pontiac, je propose l’inule
comme sa plante-emblème. Puis, dans la forêt se cache Solanum nigra, beaucoup plus rare que sa cousine S.Dulcamara. Ce sont
les caps rocheux près du sommet qui nous réservent les espèces les plus remarquables : l’arbuste Vaccinium stamineum
(habituellement du sud de l’Ontario), Arctostaphylos rubra (normalement de Gaspésie), Polygonum douglasii*(8)(rare) et le
parasite Comandra umbellata (9)(rare et dispersé), dont les racines se fixent sur celles de d’autres plantes au moyen de suçoirs.
Au retour des expéditions, chacune des équipes avait effectué autant ou plus de découvertes que la nôtre...Quant aux
implantations d’espèces datant de 15-20 ans, elles s’étaient pour la plupart déplacées ou n’avaient pu se maintenir.
7- Quercus alba : comparaison du port du Chêne blanc, Chêne à gros fruits et Chêne rouge / types de feuilles /
glands
8-Polygonum Douglasii : rameaux florifères / fleur 9-Comandra umbellata : plante parasitant une racine de Picea/
rameau (spécimen d’herbier) / fleur
D-Rivage du Lac-des-Chats (Pontiac).Ce renflement de la rivière Outaouais s’étire entre Sand Bay et Quyon. Nos excursions
-bas se sont ‘’limitées’’ à longer la rive entre Knox-Landing, Bristol, Pontiac-Station et Quyon ; les surprises botaniques y
foisonnent. Le Pontiac comporte un nombre impressionnant d’espèces floristiques rares, très rares ou menacées au Québec (au
moins 110, soit environ le quart du total québécois), dont 65 fréquentent les rivages et les petites îles du Lac-des-Chats. En plus
des phénomènes de reliquats glaciaires et d’affinité pour les milieux calcaires, on trouve en ces lieux la flore particulière des
alvars, un habitat ouvert en milieu calcaire, sur substrat mince, la croissance des arbres est presque totalement inhibée.
Habituellement inondés au printemps, les alvars subissent des sécheresses sévères en été, conditions changeantes et difficiles ne
retenant que des communautés végétales spécialisées, adaptées à divers stress. Mais la région du Lac-des-Chats est des plus
exceptionnelles à d’autres titres. À vrai dire, c’est un joyau naturel aux secrets jusqu’à présent à peine révélés. Elle est
fréquentée par le coyote, survolée régulièrement par les pygargues en patrouille, disposant d’habitats favorables au Tohi et aux
Bruant des plaines, des champs et sauterelle ainsi qu’à diverses espèces de couleuvres et leurs hibernaculums.Une connexion
des Grands Lacs et de l’Outaouais via la rivière Rideau et des caractéristiques du territoire : micro-climat torride en été, apports
des eaux courantes de la rivière et des nombreux ruisseaux, réseau de marais (méandres abandonnés et/ou partie prenante de la
zone d’exondation), découpage complexe de ses rivages encaissés prêtant flanc à des baies abritées aux eaux basses couvertes
d’herbiers aquatiques et riches de sédiments lacustres (je vous laisse deviner la richesse de la diversité piscicole), ont permis à
toutes les espèces de tortues du Québec(terrestres et amphibies) de s’y installer et de s’y maintenir, incluant les recherchées
Tortue musquée, ponctuée, des bois, mouchetée, molle à épines et Terrapène géographique (10) !!. Il est évidemment sous-
entendu que la diversité et l’originalide la faune entomologique sont du même acabit. La zone située entre Knox-Landing et
Pontiac-Station fait l’objet de projets d’aire d’étude ou de conservation et ce n’est guère surprenant. En ce qui me concerne, j’y
verrais bien un centre d’interprétation de la nature, une destination éco-touristique ou encore un site pour des camps de sciences
naturelles. À force de visites des botanistes amateurs ou de ceux mandatés par les gouvernements, le portrait botanique s’y
précise. En voici quelques éléments notables. Côté arbres, les Genévriers de Virginie (Juniperus virginiana)*, d’allure
pyramidale, y croissent assez bien. Nous sommes toujours à la recherche de l’Orme de Thomas (ou liège), Ulmus thomasi,*avec
ses rameaux ailés-subéreux.Du côté des plantes ligneuses basses, on a remarqué Ceanothus herbaceus(ovatus) *(11) et
C.americanus,* Prunus susquehanae* (un cerisier nain), Rubus flagellaris, Hypericum kalmianum*et de magnifiques parterres
d’un sumac, le Rhus aromatica*. Reste à voir l’Hudsonia tomentosa,* plus abondante à l’ouest du Pontiac. D’autres espèces
sont dignes d’intérêt comme Lonicera dioica et L.hirsuta (des chèvrefeuilles), Physocarpus opulifolius, Zanthoxylum
americanum*(munis d’épines et au port très aéré), Viburnum rafinesquianum,* V.lentago et V.acerifolium (des viornes aux
fleurs très mellifères), Amelanchier alnifolia, Cornus rugosa et C.amomum(obliqua) (des cornouillers), L’Ilex verticillata(le
Houx, formant des bosquets denses), l’étonnante Shepherdie (Shepherdia canadensis) aux feuilles tapissées de poils et argentées
inférieurement, dont les baies servaient de savon chez certains peuples amérindiens.On remarque aussi le Bidens discoïda,* la
Verge d’or faux-ptarmica (Solidago ptarmicoïdes), les Lamiacées Pycnanthemum virginianum *(rare) et Dracocephalum
parviflorum.Du côté des Orchidacées, on note les rarissimes Spiranthe lustrée (Spiranthes lucida)*à fleurs blanches, Platanthère
petite-herbe (Platanthera flava)* à fleurs jaunes et Cypripède tête-de-bélier (Cypripedium arietinum)à fleurs blanches et brunes
panachées de rouge-pourpre.On recherchera aussi le Cypripedium parviflorum (calceolus), un Sabot-de-la-Vierge à fleur jaune,
et le Liparis Loeselii, aux fleurs verdâtres. En eaux peu profondes,on a pu admirer les plus petites plantes au monde, les rares
Wolffies flottantes; Wolffia columbiana et W.borealis, grandes comme la pointe d’un crayon. Elles pourraient survivre
longtemps dans un verre d’eau sur la table de votre cuisine. Nous espèrons fortement découvrir les rares Utriculaires de ce
secteur, les Utricularia gibba, U.resupinata*et U.geminiscapa, de menues plantes en partie carnivores. En effet, les utricules,
dont le mécanisme fut longuement étudié, sont ces petites capsules submergées agissant comme des pièges à zooplancton. En
milieux marécageux, nous avons pu admirer un millepertuis au coloris rougeâtre, le Triadenum virginicum et une plante peu
élégante, qui a l’air d’une grosse tige plantée de biais, le Decodon verticillatus.Les autres espèces locales à trouver sont Viola
affinis, Allium canadense (cousin de l’Ail des bois), Proserpinaca palustris*, Ranunculus flabellaris,Gentianopsis crinita,
Persicaria robustior et P.hydropiperoïdes,ainsi que Gratiola aurea. Pour les plus communes espèces, tout aussi intèressantes,
on doit mentionner Viola nephrophylla, Triadenum fraseri, Asclepias incarnata, Lathyrus palustris et L.ochroleucus*, Spirea
alba et les merveilleuses Lobélies de Kalm (Lobelia kalmii) (12) (vues à Pontiac-Station), ténues et gracieuses, à fleurs d’un
bleu intense, se contentant pour pousser de fentes sur les rochers du bord de la rivière Outaouais, conséquemment englouties
sous l’eau au printemps. Les boisés et ruisseaux de Pontiac-Station nous réservaient aussi Stachys palustris, le rare et très typé
Galium circaezans (13) ainsi que de rutilantes Lobelia cardinalis. Les milieux forestiers mixtes nous ont livré Waldsteinia
fragaroïdes,* le spectaculaire Pedicularis canadensis, ainsi que Polygala paucifolia, bien caché dans la litière. Les milieux
ouverts ou semi-ouverts nous offrent une vaste panoplie végétale avec les raretés comme Astragalus australis, Minuartia
michauxii (Sabline dressée), Asclepias tuberosa, Corydalis aurea, Geranium carolinianum, Helianthemum canadense,
Lysimachia quadrifolia et L. hybrida*, Polygala senega et P.polygama, Vicia americana, Adlumia fungosa*et Polygonella
articulata*. Parmi les plus communes, il faut quand même signaler le Cephalanthus occidentalis sur les rivages, avec ses fleurs
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