FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE MODULE 1: SYSTÈMES DE PROTECTION SOCIALE ET LEUR ENVIRONNEMENT ÉCONOMIQUE EXTRAITS Bureau international du Travail - Genève Association internationale de la sécurité sociale - Genève Centre international de formation de l’OIT - Turin FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Module 1 ii FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE TABLE DES MATIÈRES Unité 1: Unité 2: Module 1 Dimension macro-économique et impact social A. Systèmes de protection sociale: Composantes et fonctions ................................................. 4 B. Dimension macro-économique de la protection sociale ....................................................... 9 C. Corrélation entre la protection sociale et l'économie nationale .................................................... 14 Problèmes économiques particuliers A. Considérations économiques générales .................... 18 B. Redistribution du revenu ................................................. 19 C. Incidence des cotisations ................................................. 22 D. Marché du travail: emploi et production ................... 24 E. Consommation et demande........................................... 28 F. Épargne, formation de capital et investissement .. 29 iii FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE MODULE 1 Systèmes de protection sociale et leur environnement économique Unité 1: A. Dimension macro-économique et impact social Systèmes de protection sociale: Composantes et fonctions L es systèmes nationaux de protection sociale ne sont pas des îlots économiques. Selon le niveau de développement, les systèmes nationaux de protection sociale redistribuent entre 10 et 30 pourcent du produit intérieur brut (PIB). Ils incarnent donc un des principaux mécanismes de redistribution des économies nationales. Avant de discuter des techniques de financement des souscomposantes individuelles des systèmes de protection sociale, il faut avoir une notion de base sur les interactions entre l'économie dans son ensemble et les mécanismes de redistribution de la protection sociale pour comprendre et accepter les contraintes macro-économiques dans les limites desquelles fonctionne tout système national de protection sociale. Composantes On peut concevoir les systèmes formels de protection sociale en fonction de quatre composantes: 4 systèmes de sécurité sociale: Prestations statutaires liées à l'emploi (pensions, prestations Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE en espèces à court terme, assurance-maladie sociale); systèmes de prestations sociales universelles: prestations pour tous les résidents (allocations familiales, services publics de santé, assurancevieillesse universelle); systèmes d'assistance sociale: prestations de soulagement de la pauvreté, en espèces et en nature, pour les citoyens et les résidents avec des besoins spéciaux; systèmes privés de prestations – prestations liées à l'emploi ou individuelles (pensions professionnelles, assurance-maladie établie par l'employeur). Quand les gouvernements établissent des systèmes publics de protection sociale, régissant la redistribution d'une part substantielle des revenues de la société, ils doivent s'assurer que les systèmes sont bien gérés et que les ressources qui leur sont confiées sont dépensées avec soin et responsabilité. Le personnel-cadre de tous les soussystèmes de protection sociale doivent être bien entraînés dans les techniques de gestion aussi bien que dans les techniques de gestion financières. Les techniques utilisées pour le financement des régimes de sécurité sociale qui, en termes quantitatifs, constituent la partie dominante de la plupart des systèmes nationaux de protection sociale, peuvent aussi s'appliquer en grande partie aux autres composantes des systèmes nationaux de protection sociale. Fonctions Les systèmes modernes de protection sociale ont deux fonctions de base: Module 1 Une fonction de filet de sécurité, qui devrait garantir à chaque membre indigent de la société un niveau minimum de revenu en espèces et de services sanitaires et sociaux qui lui permettent de mener une vie socialement utile; 5 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Une fonction de maintien du revenu, qui permet aux membres économiquement actifs de maintenir un niveau de vie décent durant les périodes de chômage, maladie, maternité, vieillesse, invalidité et survie, alors que d'autres formes de revenu et d'activités ne sont pas possibles. Les systèmes de protection sociale ne doivent pas se confiner à réagir à des situations créées par des changements économiques et politiques. Ils peuvent faciliter la transition ou le développement économique en prévoyant un système de distribution de prestations qui favorise le développement économique (ce qui peut inclure la restructuration de l'économie et du marché du travail). Le problème-clé des responsables de la politique de protection sociale dans une économie est de trouver une combinaison appropriée des fonctions de soulagement et de prévention du système de protection sociale et, en même temps, de supporter activement le processus de développement ou de changement économique. Il est admis que le développement social et le développement économique doivent marcher ensemble, et qu'un plan rigoureux des programmes de protection sociale et une allocation judicieuse de leurs ressources peuvent favoriser le développement social aussi bien qu'économique. La sécurité sociale est l'un de ces programmes sociaux. Dans tout pays, il y a un niveau de sécurité sociale qui est approprié à son infrastructure et à sa capacité administrative ainsi qu'au stade de développement économique qu'il a atteint. L'identification et la formulation détaillées de ce niveau, de sorte que les ressources consacrées à la sécurité sociale puissent permettre d'atteindre un degré maximum de protection sociale, sont un défi majeur auquel les planificateurs nationaux sont confrontés. Dans les pays sans programmes existants de sécurité sociale, les planificateurs 6 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE peuvent essayer de concevoir le programme optimal. Lorsque des régimes existent déjà, le processus est plus difficile parce que les planificateurs seront inévitablement confrontés à des rigidités institutionnelles et à une résistance au changement. Néanmoins, la pénurie des ressources et la nécessité de s'assurer qu'elles sont utilisées le plus avantageusement possible signifient que les planificateurs doivent continuer à améliorer le niveau et l'efficacité de la protection sociale. On peut évaluer les stratégies économiques alternatives par une analyse quantitative pour mesurer leur impact et leur succès potentiels. L'impact social et les effets économiques des ressources consacrées aux programmes de sécurité sociale - programmes qui produisent, par exemple, une population en meilleure santé ou conduisent à une productivité accrue, ou qui réduisent la pauvreté - sont souvent négligés ou sous-estimés parce qu'ils sont souvent difficiles à mesurer ou parce que les analystes ne sont pas familiers avec les techniques qui permettent la quantification de leurs effets. Néanmoins, une évaluation équilibrée des effets économiques de l'introduction de nouvelles mesures de sécurité sociale ne peut se limiter à une analyse de l'impact à court terme des cotisations de sécurité sociale ou des implications fiscales ou financières du régime, mais doit aussi tenir compte des effets potentiels à long terme du programme de sécurité sociale sur le comportement du marché du travail et de la société en général. Les interactions complexes de plusieurs facteurs, et la nature à long terme de plusieurs effets impliquent que toute évaluation de leur impact économique doit être faite sur une période suffisamment longue. Les estimations économiques de dimension limitée et qui sont faites sans tenir compte de ces éléments peuvent être trompeuses et elles ne contribuent pas à une évaluation équilibrée de la viabilité et de l'impact des programmes de sécurité sociale. Module 1 7 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Le concept de compromis est central en économie politique. Toute augmentation dans les dépenses de sécurité sociale implique que toutes les autres dépenses dans leur ensemble doivent diminuer. Si le gouvernement a un budget fixe, les augmentations dans les dépenses de sécurité sociale réduisent les autres dépenses du gouvernement. Par exemple, des augmentations dans les dépenses de sécurité sociale pour fournir des pensions de vieillesse peuvent causer des réductions dans les dépenses médicales dans le groupe des personnes âgées. Alors qu'il peut être désirable d'augmenter les dépenses de sécurité sociale, ces dépenses doivent être équilibrées avec d'autres dépenses valables. Il est difficile d'indiquer exactement ce qui est sacrifié lorsque les dépenses de sécurité sociale augmentent et, en réalité, le sacrifice peut être une légère réduction dans un certain nombre d'autres dépenses. Néanmoins, dans l'analyse de la politique à suivre, il est utile de se demander si une dépense alternative serait plus profitable aux personnes âgées ou à la société en général. Dans la plupart des pays, des changements structurels de base surviennent, dont plusieurs sont déclenchés par les politiques nationales, les plans de développement et les forces du marché. Dans les pays en développement, cela inclut le changement de l'emploi rural de subsistance à l'emploi urbain rémunéré et, en conséquence, les systèmes de support familial deviennent moins dignes de confiance. Pour rencontrer les besoins des travailleurs et de leur famille qui participent à ces ajustements, il faut prévoir une protection sociale - différente de la protection sociale rurale par le biais de lots de terre ou de l'aide de la famille étendue ou de la communauté de village. Certains employeurs veulent et peuvent fournir à leurs employés une partie de cette protection, et cette fourniture volontaire doit être encouragée. Néanmoins, pour la plupart des travailleurs du 8 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE secteur formel dans les pays en voie de développement, la protection sociale principale sera celle qui sera établie par le gouvernement. B. Dimension macro-économique de la protection sociale L es graphiques suivants illustrent la relation entre suivants illustrent la relation entre le niveau des relation entre le niveau des dépenses publiques globales pour la protection sociale et le niveau du PIB per capita dans certains pays choisis avec différents niveaux de développement économique. Ceci comporte deux aspects majeurs: (1) comme on peut le voir par la différence dans les dépenses sociales entre les pays en voie de développement et les pays industrialisés, il y a une corrélation positive entre la dimension de la dépense sociale et le niveau du PIB per capita; mais (2) entre les pays avec un niveau semblable de PIB per capita, il y a des différences considérables dans le niveau de la dépense sociale publique. L'explication de ces deux phénomènes vient en deux parties. La part du PIB que les pays peuvent y consacrer à travers les systèmes de protection sociale est clairement limitée par (a) la part et le niveau du revenu du secteur formel directement imposable dans le PIB, les montants des autres agrégats macroéconomiques (par exemple, la consommation, les importations et les exportations) qui peuvent être soumis à l'impôt, la capacité administrative et logistique de couvrir une large proportion de la population totale en vertu de systèmes formels de protection sociale et l'accessibilité de la population à ces systèmes. Module 1 9 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE (b) les valeurs sociétaires et les priorités politiques dans chaque pays quant à la distribution et l'utilisation du revenu national total. Une des questions-clé auxquelles doivent répondre les planificateurs nationaux est la suivante: Combien voulons-nous dépenser pour la protection sociale? Vu les besoins sociaux, en particulier dans les pays en voie de développement, la question se transforme généralement comme suit: Combien pouvons-nous dépenser pour la protection sociale? Il est intuitivement clair que le niveau de protection sociale en Europe de l'Ouest ne peut pas être financé à partir du PIB d'un pays en voie de développement. Cependant, les priorités de chaque société jouent un rôle tellement important dans la fixation du niveau de protection sociale qu'il ne peut y avoir de règle universelle sur ce qui est économiquement possible. 10 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Graphique 1: Dépenses publiques de protection sociale en pourcentage du PIB Source: Module 1 OECD, Social expenditure statistics of OECD members countries, Labour Market and Social Policy Occasional Paper, n° 17, Paris, 1996. 11 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Graphique 2: Dépenses en prestations de sécurité sociale en pourcentage du PIB Pour Centrafrique et Maurice, les données disponibles se réfèrent à 1981 et 1990 Source: Enquêtes du BIT sur le Coût de la sécurité sociale, Genève, diverses années. 12 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Une partie significative des dépenses sociales est d'ordinaire financée par les cotisations sociales des employés et par des impôts réservés, soit directement par des cotisations et des impôts payés par les employés, soit indirectement par une diminution de leur salaire (les contributions des employeurs étant considérées par la plupart des économistes comme étant supportées par les employés sous forme de diminution de salaire). Les contraintes sur les dépenses sociales sont généralement des contraintes de revenus plutôt que des contraintes de dépenses. Une des principales contraintes de revenus est de nature sociale. Dans toute société, il y a une limite à la solidarité. Cette limite est atteinte lorsque les employés ou les contribuables en général n'accepteront pas de financer d'autres dépenses publiques par des déductions sur leurs revenus, comme des cotisations de sécurité sociale et des impôts directs ou indirects. La limite globale peut être plus élevée si une partie importante du fardeau financier total du système de protection sociale provient de cotisations d'assurance sociale où d'ordinaire un lien personnel est établi entre les cotisations et le droit aux prestations et où les cotisants perçoivent un gain personnel découlant de leurs cotisations. La limite ne peut être identifiée que de manière très inexacte par des signaux comportementaux envoyés par la population, sous forme de résistance politique ouverte à une augmentation additionnelle du fardeau fiscal ou d'une évasion accrue. Pour résumer, la principale contrainte sous laquelle doivent opérer les planificateurs de la sécurité sociale est le fait que les ressources pour la sécurité sociale - comme virtuellement toutes les autres ressources dans une économie - sont rares. Les techniques de financement employées dans la gestion de la sécurité sociale devraient faire une utilisation la plus efficace des ressources disponibles. Module 1 13 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE C. Corrélation entre la protection sociale et l'économie nationale L e graphique suivant illustre les corrélations les illustre les corrélations les plus importantes corrélations les plus importantes entre l'économie dans son ensemble et le système de protection sociale - un sous-système financier et économique majeur. Graphique 3: Corrélations entre le système de protection sociale et l'économie Épargne nationale, taux d'intérêt, investissement Coût du travail, productivité, emploi Système de Protection Sociale Distribution du revenu, revenu disponible, Le système de protection sociale influence directement la distribution du revenu par la redistribution des ressources qui sont perçues à travers les cotisations ou impôts de certains individus économiquement actifs, entreprises et institutions à certains autres individus. Il influence donc la distribution du revenu et de la consommation entre différents ménages et, en conséquence, peut aussi changer indirectement leur total. Ceci a un impact sur la structure et le volume de la demande globale et ainsi du PIB. 14 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Le financement de la sécurité sociale implique généralement des coûts pour les employeurs qui peuvent (si les salaires n'ont pas de flexibilité à la baisse) accroître le coût de leur main d'oeuvre. Il y a un large débat sur la question de savoir si les charges relatives à la sécurité sociale (cotisations ou impôts salariaux) sont supportées de fait par les employeurs ou non. Si l'offre de main d'oeuvre excède la demande, il se peut fort bien que tous les excédents de charges ne font que réduire les salaires des travailleurs et le coût des régimes de sécurité sociale est, en réalité, supporté par les travailleurs. Cependant, ces charges relatives à la sécurité sociale peuvent réduire le secteur formel de l'emploi sur les frontières du marché du travail, notamment des travailleurs peu rémunérés dans les petites entreprises. Si les niveaux de salaires ne sont pas flexibles, des cotisations de sécurité sociale ou des impôts élevés augmentent le coût de la main d'oeuvre que les employeurs doivent supporter et, en conséquence, peuvent avoir un effet largement négatif sur l'emploi. D'autre part, les mesures de sécurité sociales (par exemple, l'assurance-maladie, les prestations de maladie, les mesures de sécurité et d'hygiène liées à l'assurance des accidents du travail, les prestations de réhabilitation et de chômage qui donnent au travailleur le temps de trouver le bon emploi) peuvent augmenter la productivité des travailleurs et réduire ainsi le coût unitaire de la main d'oeuvre. L'effet global net sur le coût de la main d'oeuvre, la productivité et l'emploi est déterminé par les conditions spécifiques de chaque économie nationale et même de chaque soussecteur économique. De toute façon, les mesures de protection sociale influenceront le PIB par le biais de la connexion coût de la main d'oeuvreemploi-productivité. Les mesures de protection sociale aident à créer ou maintenir la stabilité sociale. La stabilité sociale Module 1 15 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE stimule la demande domestique pour les biens et services qui, à leur tour, font marcher le PIB. Les mesures de protection sociale affectent également le niveau de l'épargne nationale et de l'investissement. Si les travailleurs peuvent compter sur des mesures crédibles de sécurité sociale, ils peuvent être enclins à économiser plus ou moins; l'évidence quantitative de cette relation n'est pas très forte. Les systèmes de protection sociale qui accumulent des réserves peuvent aussi influencer l'épargne nationale totale. L'épargne nationale, de même que la nature de l'épargne (individuelle vs. institutionnelle), influencent la structure et le volume de l'investissement national qui, à son tour, a un impact sur le PIB. Le produit national brut aussi bien que la distribution du revenu dans l'économie influencent à leur tour le volume de ressources qui peut être consacré à la protection sociale. Les sections suivantes discutent plus en détail les aspects spécifiques de ce tissu de relations. Avant d'examiner à fond les aspects économiques, il est utile de mentionner brièvement les effets sociaux projetés des systèmes de protection sociale. Effets sociaux 16 Quels sont les effets sociaux que l'on attribue généralement à la mise en place de mesures de sécurité sociale adéquates? La fourniture de soins médicaux (incluant les mesures de prévention) amélioreront la santé des travailleurs et de leur famille. La sécurité et la santé au lieu de travail peuvent être améliorées en affectant des ressources d'un régime d'accidents du travail à des programmes de sécurité et d'hygiène du travail. La fourniture d'une pension de retraite fait qu'un travailleur n'a plus besoin de compter sur le support familial. Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Les régimes de remplacement du revenu ont pour résultat d'assurer aux travailleurs et à leur famille une plus grande sécurité économique et psychologique, d'où une plus grande stabilité. A travers une redistribution horizontale, le remplacement du revenu peut permettre la consommation et le maintien du niveau de vie en période d'adversité et, en particulier, de chômage. La fourniture de prestations de retraite portables rendra l'emploi du secteur privé plus attractif et encouragera la mobilité du travail. La fourniture d'une pension de retraite encouragera les travailleurs à quitter la main d'oeuvre active lorsqu'ils deviennent admissibles à la pension, créant ainsi des ouvertures pour les nouvelles entrées. On peut introduire une redistribution verticale par des structures de cotisations progressives et des prestations ciblées, réduisant ainsi les disparités de revenu. En introduisant et en améliorant les mesures de sécurité sociale, le gouvernement fait savoir qu'il est conscient des besoins et de l'importance des travailleurs et de leur famille et qu'il ne considère pas le travail seulement comme un moyen d'atteindre la croissance économique. La mesure dans laquelle ces effets sociaux agissent réciproquement et s'appliquent à long terme dépend de la nature de la société et des dispositions du programme de sécurité sociale. Alors qu'une amélioration de la santé, que la stabilité et la motivation de la main d'oeuvre auront pour résultat une plus grande productivité et contribueront à la croissance économique, il n'est pas possible de quantifier le moment et l'étendue de cette contribution. Module 1 17 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Unité 2: A. Problèmes économiques particuliers Considérations économiques générales U ne importante considération dans l'analyse considération dans l'analyse d'un nouveau l'analyse d'un nouveau programme de sécurité sociale ou de son extension, est la vitesse à laquelle il sera introduit. Les employeurs et les investisseurs ne réagissent pas favorablement aux surprises, et une analyse économique limitée d'un régime qui prévoit une extension substantielle de la couverture ou des taux de cotisation plus élevés conduira inévitablement à des pronostics des plus pessimistes si l'on suppose que l'extension prendra effet immédiatement. Dans les pays en voie de développement, l'extension de la couverture et l'introduction de mesures plus rigoureuses de participation ne peuvent être réalisées que graduellement. En conséquence, une analyse économique qui se concentre sur les effets de l'extension d'un programme ou d'un taux de cotisation plus élevé peut être trompeuse à moins de tenir compte du fait que ces mesures doivent être mises en oeuvre sur plusieurs années. Un programme de sécurité sociale doit être économiquement supportable et ne pas causer de distorsion économique. Alors que le gouvernement fournit une garantie explicite ou implicite des prestations de sécurité sociale, dans les pays en voie de développement où le régime étatique obligatoire de sécurité sociale ne couvre qu'une petite portion de la main d'oeuvre, le régime devrait être financé de façon à ne pas requérir de subventions directes ou indirectes du budget du gouvernement. De telles subventions tirées de la 18 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE taxation générale en faveur d'un programme de prestations pour une minorité ne seraient pas équitables. La nécessité de subventions des fonds publics peut être évitée en adoptant un plan adéquat de prestations et en appliquant des systèmes appropriés de financement. B. Redistribution du revenu L es programmes de sécurité sociale qui suivent sécurité sociale qui suivent les principes de suivent les principes de l'assurance, ou qui offrent une prestation en nature comme les soins médicaux, aident les gens à diminuer les fluctuations dans leurs revenus et à maintenir leur niveau de vie quand elles sont en chômage ou malades. Un régime d'assurance qui fournit des paiements périodiques assure une sécurité du revenu qui, dans les pays où il y a de grandes disparités de richesse, peut contribuer à la réduction des tensions sociales. La mesure dans laquelle un régime est redistributif dépend de la nature des prestations et de la source des cotisations (travailleurs, employeurs et gouvernement). Un régime peut redistribuer le revenu "horizontalement" parmi les travailleurs couverts par le régime qui sont (ou étaient) dans le même groupe de revenu; par exemple, des travailleurs actifs aux travailleurs retraités ou des travailleurs actifs à ceux qui sont en congé de maladie. La redistribution "verticale" de revenu veut dire un transfert de revenu de ceux avec un revenu plus élevé vers ceux avec un revenu moins élevé. Cela peut arriver, par exemple, dans un régime d'assurance sociale de pensions où les travailleurs moins payés reçoivent des pensions basées sur un pourcentage plus élevé de leur revenu que les travailleurs mieux payés et où les cotisations de Module 1 19 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE tous les travailleurs sont basées sur le même pourcentage de leur paie. De même, dans un régime de soins médicaux ou autres prestations en nature, et où les cotisations sont un pourcentage des salaires, il y a souvent une redistribution verticale. Un régime d'assurance sociale qui prévoit des prestations en espèces peut être conçu de façon à atteindre n'importe quel niveau de redistribution verticale de revenu désiré. Parce qu'ils sont des régimes d'épargne individuelle, les régimes à cotisations définies (par exemple, les fonds de prévoyance) ne résulte en aucune redistribution verticale ni horizontale de revenu. Un régime d'assurance sociale peut faire une redistribution de revenu entre la phase de travail actif de la vie et la phase de retraite. Les économistes considèrent que la plupart des gens prennent des décisions en tenant compte des effets de leurs actions courantes sur leur revenu futur. Quand elles ne sont considérées que dans le contexte de la période courante, les cotisations à un régime de sécurité sociale à prestations définies sont un impôt sur les travailleurs qui sert à financer les transferts aux retraités. Cependant, quand elles sont considérées dans un contexte de vie entière, les gens réalisent que les cotisations augmentent leurs prestations futures de sécurité sociale. La relation exacte entre les cotisations et les prestations est déterminée par la formule de prestations. Dans les périodes où les cotisations n'augmentent pas les prestations, la perspective de période unique s'applique et la sécurité sociale est un impôt. Dans les périodes où il y a une connexion entre les cotisations et les prestations, si la valeur présente des prestations futures accumulées est égale aux cotisations, l'impôt est contrebalancé par les prestations futures. Alors, dans une perspective de cycle de vie, les cotisations sont de l'épargne obligatoire. 20 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Un programme de sécurité sociale peut produire une redistribution de revenu des zones urbaines aux zones rurales, entre les occupations ou entre les régions d'un pays. Cette redistribution ne résulte pas généralement de la conception du régime de sécurité sociale, mais dépend plutôt dans quelle mesure les participants reçoivent des prestations (soins médicaux, prestations en espèces pour maladie ou maternité), selon qu'ils se retirent dans des zones rurales, et d'autres facteurs indépendants du régime lui-même, Toute redistribution de revenu ne peut bénéficier qu'aux personnes qui sont couvertes par le régime d'assurance sociale. Dans les pays en voie de développement, la couverture ne s'étend typiquement qu'aux personnes en emploi salarié, et les régimes sont souvent critiqués à cause de cette restriction parce que dans la plupart de ces pays, la grande majorité des travailleurs sont des travailleurs ruraux dans l'agriculture qui ont également besoin de la protection fournie par la sécurité sociale. C'est évidemment exact, mais la couverture de ces travailleurs, dont plusieurs ne sont pas dans l'économie monétaire, présente des problèmes formidables relativement au choix de prestations appropriées et à l'administration du régime. D'autre part, les travailleurs en emploi salarié se trouvent normalement dans les zones urbaines, où ils ont migré avec leurs personnes à charge laissant derrière leur famille étendue et le support communautaire qu'elle implique. Alors que ces travailleurs peuvent déjà être favorisés par le fait de vivre dans une zone urbaine et d'avoir accès à un emploi salarié, ils ont néanmoins besoin de la protection de la sécurité sociale parce qu'ils ne peuvent se fier sur le support de leur famille étendue. De plus, ces travailleurs contribuent directement au développement industriel du pays et la sécurité sociale qui leur est fournie favorise ce Module 1 21 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE développement. Il serait injuste pour un gouvernement d'affecter les revenus fiscaux généraux au financement d'un régime de sécurité sociale restreint aux travailleurs urbains seulement et, dans les pays en voie de développement, ces régimes sont généralement financés entièrement par les cotisations des travailleurs et de leurs employeurs sans aucune subvention courante ou anticipée de l'État. C. Incidence des cotisations A lors que le paiement des cotisations de sécurité des cotisations de sécurité sociale est établi sécurité sociale est établi dans la législation, une question se pose souvent: Qui supporte réellement le coût de ces cotisations? Est-ce que les contributions de l'employeur sont des salaires différés des travailleurs? Est-ce que les employeurs transfèrent le fardeau de leurs contributions aux consommateurs sous forme de prix plus élevés ou maintiennent-ils à la baisse les salaires des travailleurs (ou les augmentations de salaires) pour recouvrer le montant de leurs contributions? Comme mentionné ci-dessus, la plupart des économistes favorisent la dernière hypothèse. Estce que les travailleurs demandent des augmentations de salaire pour compenser pour les cotisations qu'ils doivent payer? Il y a des limites à ces alternatives, mais même si les salaires des travailleurs étaient maintenus à la baisse, pourvu que les cotisations produisent des prestations significatives qui protègent adéquatement les travailleurs et leurs personnes à charge, tout salaire qui pourrait être perdu tendrait à être contrebalancé par la protection obtenue. Le fardeau du financement des dépenses publiques sur les programmes sociaux est difficile à discerner. La participation des autorités publiques est souvent 22 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE financée par le budget ordinaire de l'État dont le revenu est produit par la taxation directe ou indirecte et les redevances. Par conséquent, il est impossible de dire si la part consacrée à la sécurité sociale provient de l'un ou de l'autre item dans le budget de l'État. Même s'il était possible d'évaluer l'effet à court terme de ces impôts, comme dans le cas des taxes spéciales affectées à la sécurité sociale, il serait très difficile d'en déterminer l'incidence finale. En principe, les cotisations et les taxes sur les traitements et salaires qui sont proportionnelles diffèrent dans leur impact des impôts sur le revenu, qui sont en principe généralement progressifs. Cependant, plusieurs pays ont introduit des planchers ou des plafonds sur les rémunérations assurées qui altèrent la proportionnalité et le degré de progressivité ou de régressivité. Il est nécessaire, cependant, de considérer non seulement le taux de cotisation de sécurité sociale mais aussi la structure des prestations et, en particulier, s'il y a un élément de redistribution de revenu des travailleurs mieux payés aux travailleurs moins payés dans les stipulations concernant les prestations. Comme la décision sur les sources de financement doit être faite sur la base des conditions particulières prévalant dans chaque pays, les normes du BIT ne présentent aucune disposition particulière à ce sujet et laissent le problème de financement à être réglé en grande partie par la législation nationale. La Convention (no 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952 stipule que le coût des prestations et l'administration seront supportés collectivement par le biais des cotisations d'assurance ou de la taxation ou des deux d'une façon qui évite de causer des privations aux personnes de faibles ressources et qui tienne compte de la situation économique du pays membre et des classes de personnes protégées. La Convention stipule, de Module 1 23 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE plus, que la cotisation d'assurance totale supportée par les employés ne dépassera pas 50 pour cent du total des ressources financières consacrées à la protection des employés et de leur femme et enfants. La Convention exige aussi que l'État membre accepte la responsabilité générale d'une fourniture adéquate des prestations prévues en conformité de la Convention; cependant, cela ne veut pas dire que l'État est obligé de participer de façon régulière au financement du régime. D. Marché du travail: emploi et production I l y a deux points de vue extrêmes sur l'effet de la vue extrêmes sur l'effet de la sécurité sociale sur de la sécurité sociale sur la production et l'emploi. D'un côté, les prestations sont généralement dépensées pour satisfaire les besoins courants, soutenant ainsi un niveau accru de demande pour les biens et services qui, à son tour, conduit à un niveau d'emploi plus élevé que possible autrement. D'un autre côté, on prétend que le coût de la fourniture de prestations est un fardeau économique important. Si la sécurité sociale est financée exclusivement par des cotisations des travailleurs et des employeurs (comme c'est le cas dans presque tous les pays en voie de développement), deux observations sont souvent faites. Les travailleurs peuvent prétendre que les cotisations imposent un fardeau injuste aux travailleurs à faibles revenus, et qu'elles peuvent créer ou aggraver la pauvreté parmi eux. Dans le cas des employeurs, on présente deux arguments connexes. En premier lieu, on peut prétendre que dans les marchés domestiques les cotisations de sécurité sociale augmentent les coûts de production et réduisent la rentabilité, encourageant ainsi les employeurs à rechercher des méthodes à forte intensité de capital qui conduisent 24 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE inévitablement à des niveaux réduits d'emploi. En deuxième lieu, au sujet des marchés internationaux, les employeurs peuvent prétendre qu'en augmentant les coûts de production, les cotisations rendent leurs produits moins compétitifs avec ceux des producteurs des pays où les cotisations de sécurité sociale sont plus basses ou même inexistantes, conduisant ainsi à diminuer les exportations. En considérant ces arguments, il faut noter que les cotisations élevées des employeurs peuvent fort bien conduire à des salaires moins élevés, de sorte que les coûts de la main d'oeuvre ne seraient pas affectés. On peut aussi noter que, parmi les pays qui se font concurrence dans les marchés internationaux, il n'y a pas d'évidence claire que les pays avec des cotisations de sécurité sociale basses ont atteint des gains significatifs sur ceux qui ont des taux élevés. (On peut citer comme exemple l'Union européenne où les taux de cotisation des employeurs varient considérablement.) Ultimement, la compétitivité est affectée par la productivité, dont la productivité de la main d'oeuvre ne constitue qu'une partie. La façon dont ceci est perçu par les partenaires commerciaux est aussi influencée par les cours du change. De plus, les cotisations de sécurité sociale ne sont généralement qu'une partie des coûts totaux du travail; les salaires sont beaucoup plus importants, et il y a d'autres coûts associés aux dispositions concernant la sécurité et le bien-être des travailleurs. Comme les cotisations des employeurs sont admises comme frais généraux, l'État fournit une subvention au régime de sécurité sociale sous forme d'exemption d'impôts. Si les coûts de la sécurité sociale sont relativement sans importance, les tentatives de manipuler les sources des cotisations à la sécurité sociale ont peu de chance d'avoir un effet significatif sur la production et l'emploi. Module 1 25 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Les travailleurs et les employeurs peuvent chercher à transférer l'incidence des cotisations des uns aux autres, ceux-là en recherchant des augmentations compensatoires de salaire et ceux-ci en différant les augmentations futures de salaire. Les employeurs peuvent essayer de transférer le coût aux consommateurs, augmentant ainsi le coût de la vie et réduisant la compétitivité des industries d'exportation. Ou bien, les employeurs peuvent maintenir les prix et absorber le coût additionnel en augmentant la production. A mesure que la productivité s'améliore, cette alternative devient de plus en plus possible. Si le fardeau des cotisations sur les employeurs est considéré comme excessif, on peut s'efforcer de remplacer le capital pour le travail. L'effet ultime sur la demande pour le travail et sur la croissance économique sera une combinaison complexe de tous ces facteurs selon le marché en général, le marché du travail, le coût en capital de changer les méthodes de production, les améliorations dans la productivité de la main d'oeuvre et la force des organisations des travailleurs. La sécurité sociale peut affecter le travail ou le secteur d'emploi qu'un travailleur choisit quand les travailleurs cherchent à éviter de verser des cotisations obligatoires. L'évasion ou l'échappatoire devant les cotisations sont des concepts étroitement reliés. L'évasion consiste à ne pas payer les cotisations qui sont légalement requises pour une occupation particulière. L'échappatoire consiste à choisir une occupation où les cotisations ne sont pas légalement requises. L'évasion peut impliquer le choix d'une occupation où le travailleur peut éviter de payer les cotisations de sécurité sociale même s'il est légalement obligé de le faire. C'est ainsi que l'évasion aussi bien que l'échappatoire peuvent affecter le choix de son occupation par un travailleur. Un facteur important qui affecte l'évasion et l'échappatoire est le fait 26 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE pour le travailleur de considérer la cotisation obligatoire comme un impôt. La sécurité sociale peut jouer un rôle important dans la génération d'emploi si les fonds de réserve accumulés par le régime sont investis dans des entreprises productives. Le capital généré par les régimes de sécurité sociale constitue une proportion significative de la formation de capital domestique. Même si les fonds de la sécurité sociale sont affectés aux fonds d'État, cette affectation réduit la demande du gouvernement pour des fonds d'autres sources et les libère pour des investissements dans les entreprises. La sécurité sociale peut aussi affecter l'emploi dans le marché du travail en ayant une incidence sur l'âge auquel les travailleurs prennent leur retraite. Aussi bien les régimes de sécurité sociale à prestations définies que ceux à cotisations définies peuvent affecter la décision d'un travailleur de prendre sa retraite en octroyant une pension de vieillesse alors qu'autrement le travailleur n'aurait pas suffisamment d'épargne-retraite pour lui permettre de prendre sa retraite. La sécurité sociale peut aussi affecter la retraite d'autres façons. Dans plusieurs régimes de sécurité sociale à prestations définies, les travailleurs peuvent ne pas recevoir de pension et continuer à travailler, à moins que leurs gains ne soient au-dessous d'un certain niveau. Cette condition de ressources peut être la cause du fait que quelques travailleurs prennent leur retraite dans le but de recevoir des prestations. Cependant, les pensions peuvent parfois être augmentées en différant l'âge où débute le paiement des prestations. Si les travailleurs étaient myopes, ils ne tiendraient pas compte de l'augmentation dans les prestations futures en décidant quand prendre leur retraite. Dans une perspective de vie, les travailleurs tiendront compte de l'augmentation dans les prestations futures qui résultent d'une retraite Module 1 27 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE différée, ce qui les encouragera à prendre leur retraite plus tard qu'autrement. E. Consommation et demande L es cotisations des travailleurs à la sécurité travailleurs à la sécurité sociale constituent une sécurité sociale constituent une diminution dans leur revenu disponible et les prestations périodiques qui sont payées remplacent au moins une partie de ce revenu. Une réduction dans le revenu disponible pour la consommation implique un niveau plus bas de dépenses discrétionnaires et, en particulier, une demande réduite pour les produits de luxe ou de semi-luxe. Cette réduction de la demande peut aussi avoir l'effet de d'atténuer l'inflation et, dans certains pays, on a utilisé une augmentation dans le taux de cotisation de sécurité sociale pour atteindre cet objectif. Le remplacement du revenu prévu par les paiements de prestations périodiques en espèces, permet aux travailleurs et à leurs personnes à charge de se maintenir durant le risque (maladie, retraite) qui ouvre droit aux prestations. En d'autres termes, les paiements périodiques leur permettent de maintenir leur consommation, bien qu'à un niveau réduit. (Les paiements uniques, d'autre part, seraient normalement utilisés, au moins en partie, pour une augmentation subite et temporaire de la consommation). L'effet des paiements de prestations périodiques est de contribuer (durant les périodes de maladie ou la retraite) à la stabilité de la consommation par les travailleurs et leurs personnes à charge. Les programmes de sécurité sociale qui sont financés sous le système de la répartition redistribuent les revenus de cotisations en les transférant aux ménages où le revenu du salarié a 28 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE cessé dû à la réalisation d'un risque couvert par le régime. De tels régimes aident ainsi à maintenir la demande collective et la consommation, en particulier si le chômage est parmi les risques couverts, et l'analyse économique de leur impact doit tenir compte aussi bien des cotisations que des prestations. Dans les pays où la plupart des travailleurs sont couverts par un régime de sécurité sociale, les gouvernements doivent s'efforcer de se servir du régime comme instrument para-fiscal pour gérer l'économie. Par exemple, la demande pourrait être stimulée en augmentant les prestations ou en réduisant les taux de cotisation. De fait, cependant, comme les régimes de sécurité sociale sont normalement définis par la loi, l'occasion d'effectuer de tels changements est limitée. Cela est comme il se doit parce que dans un régime complet, les travailleurs et leurs personnes à charge planifient leur existence en tenant compte de leurs attentes et obligations en vertu du régime. Bien qu'un régime de sécurité sociale soit dynamique et doive être modifié de temps en temps pour tenir compte des changements socio-économiques, ces modifications ne devraient être effectuées qu'après consultations et un large débat public. Les gouvernements ont d'autres et de meilleurs moyens de gérer l'économie. F. Épargne, formation de capital et investissement D ans des programmes comme un régime de programmes comme un régime de pensions comme un régime de pensions qui génère des réserves ou un régime de prévoyance qui accumule des cotisations, la consommation est différée jusqu'à la retraite (le décès ou l'invalidité). Que ces régimes conduisent à une baisse de l'épargne des Module 1 29 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE ménages supérieure aux montants de cotisations qui leur sont versés, et ainsi à une chute dans l'épargne nationale globale, est une question qui a été le sujet de beaucoup de recherche non concluante. Les actifs de ces régimes font partie de l'épargne nationale. Que la perspective de recevoir des prestations de sécurité sociale affecte les décisions d'épargne des personnes couvertes par un régime de sécurité sociale en les incitant à réduire leur épargne personnelle, est une question incertaine. L'effet peut être négatif (si les prestations servent comme substituts à l'épargne), mais il peut aussi être positif si les prestations encouragent la retraite et si les gens épargnent pour arrondir leur revenu de retraite. Quand les régimes de sécurité sociale sont financés de telle sorte que des réserves substantielles sont créées, ils constituent des accumulations d'épargne domestique qui peuvent être employées à favoriser le développement national. Dans les pays en voie de développement, ces accumulations de réserves se trouvent dans les régimes de sécurité sociale de pensions et dans les fonds de prévoyance. De fait, alors que les régimes de pensions et les fonds de prévoyance peuvent avoir été établis au début pour promouvoir des objectifs de développement social, les montants énormes de capital qu'ils génèrent capital qui est généralement investi dans des fonds d’État ou des entreprises para-étatiques - ont parfois conduit les gouvernements à augmenter les taux de cotisation dans le but de faciliter les placements dans les fonds d'État. Comme ces augmentations ont été basées sur des considérations économiques plutôt que sur des considérations sociales, elles n'ont généralement pas été accompagnées d'améliorations dans les prestations ou dans les régimes eux-mêmes. Dans le cas des fonds de prévoyance et en vertu des systèmes de financement des régimes de sécurité sociale de pensions qui suivent une 30 Module 1 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE formule de capitalisation, les placements peuvent être effectués pour de longues périodes et la liquidité est de moindre importance sinon entièrement sans rapport. Ces régimes amassent des montants substantiels de capital, et ils peuvent devenir une institution financière importante, sinon la principale du pays, en particulier dans les pays en voie de développement, Alors que l'on peut définir des débouchés appropriés de placements pour ces régimes, dans les pays en voie de développement les fonds disponibles pour investissement peuvent mettre sous tension la capacité des instruments nationaux d'investissement à les absorber dans des projets valables. L'impact potentiel fiscal et monétaire des investissements de la sécurité sociale (et, en particulier, d'un changement dans la politique d'investissement ou de désinvestissement) veut dire que les investissements doivent être coordonnés et ne pas être en conflit avec la politique du gouvernement. De cette façon, les fonds de réserve de la sécurité sociale peuvent servir au mieux à contribuer à la croissance économique. Il ne doit pas y avoir nécessairement d'incompatibilité entre les exigences d'investissement d'un régime de sécurité sociale et les objectifs de formation domestique de capital d'un pays, et il est possible de formuler une politique d'investissement qui rencontre ces deux conditions. Les réserves doivent alors être accumulées pour produire un revenu des placements qui permettra un taux de cotisation moins élevé qu'autrement, et elles devraient être investies dans des projets qui auront comme résultat une croissance économique réelle et des gains de productivité ; par exemple, sous forme de rendement direct accru d'une entreprise, ou de rendements indirects résultant d'améliorations dans l'infrastructure nationale comme, par exemple, les télécommunications, les routes ou les facilités pour les soins médicaux. Module 1 31 FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE Cependant, si les fonds de réserve sont utilisés, directement ou indirectement, pour rencontrer les dépenses courantes du gouvernement, ils n'augmenteront pas la capacité de production du pays, et ils ne réaliseront probablement pas un taux de rendement positif pour les fonds de la sécurité sociale. Une partie de la contribution à la sécurité sociale devient alors essentiellement un impôt. Le contrôle du gouvernement sur l'investissement des fonds de la sécurité sociale ne veut pas dire que ces fonds devraient être utilisés systématiquement pour financer les déficits du gouvernement. Quand ils sont ainsi utilisés, le régime de sécurité sociale devrait recevoir le taux d'intérêt du marché sur les fonds empruntés. Les fonds de la sécurité sociale sont particulièrement appropriés pour financer des projets d'infrastructure à long terme qui ont un rendement social élevé et qui contribuent à la croissance économique à long terme (étant entendu qu'un tel investissement produit également un taux positif réel de rendement). Le besoin d'avoir recours aux emprunts externes peut être réduit. Un instrument, comme une obligation de sécurité sociale à long terme, pourrait être créé afin de s'assurer que les fonds de la sécurité sociale ne se substituent pas aux autres fonds du gouvernement qui sont alors utilisés pour financer un déficit. Le taux d'intérêt sur une telle obligation devrait être basé sur les taux d'intérêt du marché domestique pour les emprunts du gouvernement. La sélection d'un taux plus élevé voudrait dire que le régime subventionne un déficit du gouvernement. 32 Module 1