O ERNST 2011 1 RADIOLOGIE VASCULAIRE SPLANCHNIQUE Remarque : * = ancienne nomenclature Intérêts cliniques de l’étude de la vascularisation du tube digestif : 1 Artérielle La principale pathologie est représentée par les ischémies et les infarctus mésentériques par obstruction des artères. Les infarctus mésentériques sont une pathologie grave entraînant souvent le décès du patient. Parfois, l'infarctus est précédé d'une phase d'ischémie chronique qu'il est important de diagnostiquer avant le stade d'infarctus pour réaliser une des obstructions artérielles. La connaissance de l'anatomie artérielle du tube digestif permet de mieux connaître les pathologies. 2 Veineuse La principale pathologie mortelle impliquant la vascularisation veineuse du tube digestif et représenté par les hémorragies digestives développées à partir des anastomoses portes aux caves lors d'hypertension portale en particulier en cas de cirrhose hépatique. La connaissance de ces voies de dérivation permet de mieux comprendre cette complication d’hypertension portale. ARTERES I LES ARTERES NORMALES. A Le tronc cœliaque (T.C.) Il naît de la face antérieure de l'aorte en regard du disque T12-Ll, et se divise en trois branches L'artère hépatique (A.H.). L'artère hépatique qui naît du T.C. est qualifiée sur le plan embryologique d'A.H. moyenne par opposition aux autres A.H. de naissance anormale que l'on rencontre assez couramment. Elle comporte deux segments séparés par la naissance de l'artère gastro-duodénale : l'artère hépatique commune en amont: l'artère hépatique propre en aval. L'artère hépatique propre chemine dans le petit épiploon jusqu'au hile du foie en suivant un trajet obliquement ascendant en haut et à droite. Elle donne naissance à l'artère gastrique droite (pylorique*) dont l'origine est située à peu de distance de l'artère gastro-duodénale. L’artère gastrique droite s’anastomose à la gastrique gauche le long de la petite courbure gastrique. L’artère gastrique droite peut parfois naître de la branche gauche de l’artère hépatique ou rarement de l’hépatique commune. L’artère gastro-duodénale est en rapport avec la face postérieure du bulbe duodénal (possibilité de perforation de cette artère par un ulcère du bulbe), puis avec le bord supérieur de la tête du pancréas. A ce niveau, elle donne : - deux collatérales : les artères pancréatico - duodénales supérieures qui pénètrent dans le pancréas et forment deux arcades qui longent le bord externe et inférieur de la tête et s'anastomosent avec des artères homologues venues de l'artère mésentérique supérieure. Ces deux arcades sont intra-pancréatiques : l'une est dite postérieure (artère pancréatico-duodénale postéro-supérieure), l'autre est dite antérieure (artère pancréatico-duodénale antéro-supérieure) car elle contourne le bord externe de la tête du pancréas en avant en-dessous de la papille. O ERNST 2011 2 - une branche terminale, l'artère gastro-épiploique droite qui longe la grande courbure gastrique et s'anastomose avec la gastro-épiploique gauche venue de la terminaison splénique. L'artère splénique (A.S.) Plus ou moins tortueuse, longe le bord supérieur du pancréas en donnant des collatérales pancréatiques et gastriques. L'artère pancréatique dorsale - naît très près du tronc cœliaque (parfois même du T.C. lui-même ou de l'origine de l'A.H.). Elle est en rapport avec la face postérieure de l'isthme du pancréas et elle donne deux branches principales. Une branche céphalique qui s'anastomose avec les arcades pancréatico - duodénales (anastomoses de KIRK) ; une branche corporéo-caudale qui longe le bord inférieur du corps et de la queue du pancréas c'est l'artère pancréatique transverse ; enfin une artère plus inconstante qui s'anastomose directement avec l'origine de l'artère mésentérique supérieure. Les artères pancréatiques corporéales et caudales. Toutes ces artères s'anastomosent entre elles par l'intermédiaire de l'artère pancréatique transverse. L'artère gastro-épiploique gauche qui naît pratiquement au niveau du hile de la rate et forme le cercle de la grande courbure gastrique (bord gauche de l’estomac) en s’anastomosant à la gastroéplipoïque droie.. Des artères gastrique courtes (gastriques postérieures*) qui montent verticalement du bord supérieur de l'artère splénique au voisinage du hile de la rate et qui est souvent difficile à distinguer des collatérales spléniques. L'artère gastrique gauche (coronaire stomachique*). Naît de la face supérieure du tronc cœliaque près de son origine, elle se dirige en haut et à gauche vers la petite courbure verticale gastrique qu'elle rejoint en-dessous du cardia, puis s'infléchit en bas pour longer la petite courbure. Elle s'anastomose avec l'artère gastrique droite pour constituer le cercle artériel de la petite courbure gastrique (bord droit de l’estomac). En résumé, le T.C. vascularise le foie, - la rate, - l'estomac, - la plus grande partie du pancréas. Les importantes voies collatérales avec la mésentérique supérieure permettent souvent de compenser efficacement une occlusion du tronc coeliaque. B L'artère mésentérique supérieure (A.M.S.) Elle naît de la face antérieure de l'aorte en regard de Ll, l cm en dessous du T.C. environ. Elle descend d'abord derrière l'isthme du pancréas puis se dirige en avant pour passer devant le petit pancréas ou processus uncinatus et le troisième duodénum, puis s'engage ensuite dans la racine du mésentère. Elle se situe à gauche de la veine mésentérique supérieure et comporte trois segments successifs : rétro pancréatique, préduodénal, puis mésentérique. De face, son trajet est dirigé obliquement en bas et à droite vers la fosse iliaque où elle se termine. Elle donne des collatérales pancréatiques ainsi qu'au grêle et au colon. - Collatérales pancréatiques: L'artère pancréatique inférieure est inconstante : elle naît de l'origine de l'artère mésentérique supérieure, et se dirige en haut et à gauche le long du bord inférieur du corps du pancréas. L'artère pancréatico-duodénale inférieure est la plus importante ; elle naît habituellement d'un tronc commun avec la première artère jéjunale donc à gauche du tronc de l'artère mésentérique supérieure, puis elle se dirige vers la droite en croisant le tronc de l'artère et se divise en deux branches qui s'anastomosent respectivement avec les artères pancréatico-duodénales supérieures (branches de la gastro-duodénale) pour former avec elle les deux arcades pancréatico-duodénales postérieure et antérieure. Ce système des arcades pancréatiques constitue donc une anastomose très importante entre l'artère mésentérique supérieure et le T.C. - Collatérales coliques: Elles naissent du bord droit de l'artère mésentérique supérieure. O ERNST 2011 3 L’artère colique moyenne (colique transverse*) qui vascularise l’angle colique gauche. Parfois elle s’anastomose avec l’artère colique gauche provenant de la mésentérique inférieure en formant l’arcade de Riolan. L'artère colique droite (colique supérieure droite*) se dirige vers le colon ascendant. L'artère iléo-colique (iléo-caeco-appendiculaire) se dirige vers le carrefour iléo-cæcal et donne une branche ascendante le long du colon droit, et une branche iléale qui s'anastomose avec la branche terminale de l'artère mésentérique supérieure. Ces différentes branches artérielles sont anastomosées entre elles. Collatérales grêliques De son origine jusqu'à sa terminaison, l'artère mésentérique supérieure donne par son bord gauche toute une série d'artères jéjunales puis iléales superposées et dirigées plus ou moins obliquement en bas et à gauche. En conclusion, l'artère mésentérique supérieure vascularise la totalité du grêle, la moitié droite du colon, et une partie du pancréas. C’est la principale artère du tube digestif. Son occlusion entraîne souvent un infarctus de l’intestin grêle mortel. C L'artère mésentérique inférieure : (AMI.) L'artère mésentérique inférieure beaucoup plus petite naît au niveau de L3 ou du disque L3L4, et suit un trajet oblique en bas et à gauche. Peu après son origine, elle donne une volumineuse collatérale : l'artère colique gauche (colique supérieure gauche*). Cette artère remonte vers l'angle colique gauche où elle se divise en deux branches. Une branche descendante qui forme l'arcade para-colique gauche qui longe le colon gauche, et une branche transverse qui forme la racine gauche de l'arcade de RIOLAN dans le mésocôlon transverse (cette artère colique supérieure gauche constitue donc une importante anastomose entre les artères mésentériques supérieure et inférieure). Après la naissance de l'artère colique supérieure gauche, le tronc de la mésentérique inférieure suit un trajet vertical qui est légèrement oblique en dedans, et se bifurque en regard de L5 en donnant: le tronc des artères sigmoïdiennes qui forme une arcade vasculaire le long du sigmoïde En fin elle se divise en 2 artères rectales supérieures (hémorroïdales supérieures*) verticalement descendantes qui se terminent au niveau de l'ampoule rectale où elles s'anastomosent avec les artères rectales moyennes et inférieures qui sont des branches de l'artère iliaque interne (hypogastrique*). En résumé, l'artère mésentérique inférieure vascularise essentiellement le côlon gauche, le sigmoïde et le rectum. Du fait des anastomoses au niveau du colon transverse et du rectum une occlusion ostiale est le plus souvent bien compensée. Il LES ANASTOMOSES. l) Les trois grandes artères digestives sont reliées par des anastomoses capables de devenir très fonctionnelles en cas de sténose ostiale de l'une d'entre elles. Une sténose isolée de l'une des trois artères digestives est donc habituellement bien tolérée et n'a en principe aucun retentissement sur la vascularisation de l'appareil digestif : c'est la règle classique de MIKKELSEN, qui dit que pour qu'il existe une ischémie intestinale il faut que deux au moins des trois artères digestives soient touchées. Il existe cependant de nombreuses exceptions, en particulier quand la thrombose survient au niveau de l’AMS qui est l’artère principale. L’occlusion de cette seule artère entraîne souvent un infarctus mortel de l’intestin grêle. Ces anastomoses se font : - entre le T.C. et la M.S. par les arcades pancréatico-duodénales (rio branco) surtout, et l'artère pancréatique dorsale accessoirement (Kirk). - entre l'A.M.S. et la A.M.I. par l'arcade de RIOLAN - entre l'A.M.I. et l'artère iliaque interne par les artères rectales. O ERNST 2011 4 2) Au niveau des branches du T.C. lui-même, il existe également des anastomoses qui peuvent devenir importantes entre l'A.Hépatique. et l’artère splénique. par l'intermédiaire des cercles artériels de la petite et de la grande courbure gastrique. III. VARIATIONS ANATOMIQUES, A côté de cette disposition classique de nombreuses variations anatomiques peuvent s'observer. Les plus fréquentes sont les suivantes 1) Le tronc commun coelio-mésentérique (rare) Après une naissance commune, tronc cœliaque et artère mésentérique supérieure retrouvent chacun leur individualité. 2) Au contraire les A.H, et spléniques (rare) peuvent naître séparément de l'aorte. 3) Les anomalies de l'A.H fréquentes : Il est fréquent en effet de constater la persistance de deux artères hépatiques embryonnaires qui normalement disparaissent : - L’artère hépatique droite est une A.H. qui naît de l'origine de l'A.M.S. dans son segment rétro-pancréatique. Elle chemine donc derrière la tête du pancréas obliquement en haut et à droite pour rejoindre le hile du foie, et vasculariser la partie droite du foie. Il existe une artère hépatique commune qui nait du tronc coeliaque et donne l’artère gastro-duodénale et l’hépatique moyenne qui vascularise alors le foie gauche. - L’artère hépatique gauche est une A.H. qui naît d'un tronc commun avec l'artère gastrique gauche et vascularise le lobe gauche du foie. Il existe une artère hépatique commune qui nait du tronc coeliaque et donne l’artère gastro-duodénale et l’hépatique moyenne qui vascularise alors le foie droit. - L’artère hépatique commune naissant le l’atère mésentrique supérieure. Le tronc coeliaque ne donne alors que l’artère gastrique gauche et la splénique. Toutes ces combinaisons sont possibles entre ces trois artères hépatiques, droite, gauche et propre, qu'elles soient toutes les trois associées elles se partagent la vascularisation. VEINES 1. LES VEINES NORMALES CONSTITUENT LE SYSTÈME PORTE, Elles sont représentées par l'axe veineux splénoportal qui chemine le long du bord supérieur du pancréas depuis le hile de la rate, puis dans le pédicule hépatique avant de se diviser en deux branches au niveau du hile du foie. Les principaux affluents de l'axe veineux splénoportal sont ou non satellites des artères digestives: - la veine splénique - la veine mésentérique inférieure qui se réunissent pour former en regard du bord gauche du rachis en projection de face le tronc veineux splénomésaraique - la veine M.S. rejoint le tronc veineux splénomésaraique en regard du bord droit du rachis pour former la veine porte. - la veine gastrique gauche se jette au niveau du bord supérieur de l'origine du tronc porte à peu près en regard de la V.M. S. - la veine gastro-épiploique gauche se jette au niveau de l'origine de la veine splénique O ERNST 2011 5 - la veine gastro-épiploique droite s'abouche au niveau de la terminaison de la V.M.S. ou à l’origine de la veine porte avec les veines coliques droites (tronc gastro-colique de Henlé), ou directement dans la VMS. La veine gastrique droite (pylorique*) se jette dans la veine porte, ou dans sa branche gauche. II. VOIES COLLATÉRALES DE DÉRIVATION PORTO-CAVES. En cas d’obstacle au retour veineux portal, lors d’une cirrhose ou d’une thrombose porte par exemple, se développe de des voies de dérivation porto-cave par l’intermédiaire de veines de petit calibre pré-existantes qui se dilatent. Si ces voies de dérivations porto caves sont à proximité d’une lumière elle peuvent alors se rompre en aboutissant à une hémorragie digestive grave. Voici les principales voies de dérivations. 1 Oesophagienne Le réseau veineux gastrique alimenté par les veines gastriques gauche, droite, postérieures s’anastomose au réseau veineux périoesophagien qui est drainé par les veines azygos. Risque important d’hémorragie digestive en cas d’hypertension portale. 2 Spléno-rénale La veine splénique à un trajet rétropéritonéal et passe à proximité de la veine rénale gauche. Souvent la voie de dérivation ne nait pas du tronc de la v splénique mais des veines gastriques postérieures. En ce cas risque d’hémorragie digestive en cas d’hypertension portale. 3 Ombilicale Il s’agit d’une reperméabilisation de la veine ombilicale ou d’une veine paraombilicale. Elle nait de la branche gauche de la v porte et rejoint le réseau cutané au niveau de l’ombilic. Le réseau veineux ombilical est drainé par les 2 veines épigastriques qui d’anastomosent en bas avec les iliaques externes et en haut avec les thoracique (mamaires*) internes. Le risque hémorragique est faible n’étant pas à proximité des lumières digestives. 4 Retropéritonéales Certaines branches des veines mésentériques supérieures et inférieures ont un trajet postérieur, juste devant les psoas. Il peut donc se développer des anastomosent avec les veines lombaires ascendantes ou les gonadiques (anastomose mésentérico-gonadique). Faible risque hémorragique. 5 Rectales Il s’agit des anastomoses entre les veines rectales supérieures et les v rectales moyennes et inférieures qui proviennent des iliaques internes. REMARQUES SUR LA VASCULARISATION DU FOIE : Le foie posséde 2 vascularisations afférentes : l'artère hépatique pour le 1/3 du flux et la veine porte pour les 2/3. Au niveau microsopique du lobule hépatique le réseau veineux et le réseau artériel s'anastomosent pour former les capillaires sinusoïdes qui traversent le lobule hépatique de la périphérie vers le centre. Au centre du lobule hépatique les capillaires sinusoïdes s'anastomosent pour former les veines hépatiques (sushépatiques*) s'abouchent dans la veine cave inférieure. En cas de cirrhose, l'installation de la fibrose “comprime” les capillaires sinusoïdes. Leur résistance au flux sanguin augmente, seul le sang artériel à haute pression peut encore les traverser. Le sang veineux à basse pression ne peut les traverser, les anastomoses porto-caves extrahépatiques se développent alors. O ERNST 2011 6 TECHNIQUES D’EXPLORATION EN IMAGERIE : Le scanner multibarrette permet une bonne étude de la vascularisation du tube digestif. Il est possible d’étudier la totalité de l’abdomen en moins de 10 secondes. On obtient des images axiales de moins de 2 mm d’épaisseur qui permettent de reconstruire des images frontales ou dans n’importe quel autre plan. Après injection d’un produit de contraste iodé au pli du coude, en choisissant un délais adéquat, il est ainsi possible d’obtenir une acquisition quand ce produit est dans les artères (phase artérielle) ou dans les veines (phase veineuse). On peut ainsi obtenir de véritable planches « anatomiques » in vivo et détecter les occlusion artérielles ou veineuses. Les structures osseuses refètent aussi les ultrasons complétement ne permettant pas une étude postérieure. L’IRM permet une étude similaire après injection d’un produit de contraste à base de gadolinium. Sa résolution spatiale est cependant moins bonne que celle du scanner et doit doit donc plutôt être reservée aux contre-indications du scanner. L’artériographie consiste à injecter directement un produit de contraste dans l’artère qui doit être étudiée. Il faut donc faire une ponction artérielle et une montée de sonde dans les artères. Durant l’injection on réalise des radiographies. Cet examen invasif est aujourd’hui obsolète. Il permet par contre parfois un traitement en dilatant des sténoses artérielles. L’échographie par l’effet doppler permet d’étudier le perméabilité d’un vaisseaux. Toutefois, l’air reflète la totalité des ultrasons et ne permet pas une étude des structures sous jacentes. Il existe à l’état normal de l’air dans le tube digestif. Les vaisseaux digestifs sont en arrière des structures digestives et donc très mal étudiés en doppler. La veine porte est une exception étant en arrière du foie. La seule application de l’échographie est de montrer la perméabilité du tronc porte. Les examens de médecine nucléaire ne permettent pas une étude des vaisseaux. Au total le scanner est actuellement l’examen non invasif le plus performant pour l’étude des vaisseaux digestifs. L’arétriographie doit être réservé aux gestes thérapeutiques.