
Bien qu’il s’agisse d’un outil de planification stratégique d’une importance majeure pour la
prise de décision, l’évaluation de la performance économique demeure une pratique sous-
utilisée en milieu insulaire. Pourtant, cette évaluation doit permettre de poser un jugement
objectif, en rapport avec une politique, un programme ou une stratégie, et de s’interroger sur
les mesures à prendre et les conditions à satisfaire pour bâtir une économie viable, compte
tenu des contraintes qui entravent les efforts de croissance économique, de création d’emplois
productifs et de bien-être social pour la majorité de la population. Cette évaluation doit
s’appuyer sur des buts clairement déterminés, sur des indicateurs pertinents et sur des sources
d’information multiples, en observant quatre principes intangibles: efficacité (faire les bonnes
choses), efficience (faire les choses bien), pertinence (qui est approprié), et cohérence
(comportant des liaisons logiques). Aussi, afin d’apprécier en termes de performance
l’efficacité de la politique économique conduite dans les DROM, le présent document se
propose de décrire, d’analyser et de comparer par rapport à d’autres petites économies
insulaires en développement, les mécanismes de croissance de ces régions d’outre-mer, d’en
comprendre les sources, d’évaluer les effets au plan socio-économique, pour ensuite être en
mesure de mettre en place des stratégies de résilience et de formuler des recommandations
susceptibles de mettre ces territoires sur une voie de croissance autoentretenue et durable.
La compréhension de la croissance, de ses mécanismes, de ses déterminants et de ses sources
a toujours été une préoccupation majeure pour la plupart des décideurs et des concepteurs de
politiques économiques à travers le monde. Si la croissance pour certains ne peut être
considérée comme une panacée dans la résolution des principaux problèmes sociaux tels le
chômage, pour d’autres elle facilite leur implémentation. Elle est donc une condition
nécessaire mais non suffisante pour assurer le bien-être social des individus.
La nécessité de réaliser une croissance économique durable devient donc un impératif pour
tout pays, quelque soit sa taille, son statut politique, et son stade de développement.
Les solutions conjoncturelles ou partielles ne peuvent suffire. Il importe de traiter les
problèmes à la source qui les génèrent. En conséquence, la réalisation de ce diagnostic
comparatif entre régions insulaires est une démarche indispensable pour tenter de comprendre
les raisons qui font que, au plan économique certains territoires réussissent mieux que
d’autres.
Ceci étant, la question essentielle qui émerge dès maintenant de cette réflexion est : quelles
sont les mesures à entreprendre pour faire en sorte que la croissance économique ici ou là soit
effective et qu’elle se traduise en développement durable ? Cette question est pertinente car
rappelons, que dans toute économie, il peut y avoir croissance sans développement comme il
peut y avoir développement sans croissance, et que l’on peut même être en présence d’une
croissance appauvrissante au sens de Jagdish Baghwati (1968, 1995).
L’expérience montre que la croissance n’est pas une fatalité et qu’elle n’est pas tributaire
uniquement des dotations factorielles dont peut disposer un pays donné mais qu’elle dépend
également en grande partie des politiques et des choix effectués par les autorités en place.
En bref, la croissance économique est un objectif de long terme, et seules les réformes
structurelles peuvent conduire à son amélioration, d’où la nécessité d’analyser les choix
effectués par les décideurs en termes de réformes et d’évaluer l’impact de ces dernières en
matière de croissance et de développement.
Dans ce contexte, le cas des DROM est intéressant à analyser à double titre : d’une part, il
permet d’aborder la théorie et la pratique de ces petites économies insulaires dépendantes dont
la croissance est impulsée de l’extérieur par une rente publique que représentent les transferts
publics financiers, rente administrative qui tire la croissance de ces régions par un effet
multiplicateur de la demande, en créant selon M. Dimou (2004) un « effet d’éviction » des
activités tournées vers l’exportation et la compétitivité, car ce sont les choix des ménages qui, de