Existe-t-il un lien entre le taux de propriétaires en résidentiel et la
performance économique d'un pays ?
A priori, la performance économique d'un pays mesurée par la croissance de son PIB, permet
l'augmentation du taux de propriétaires. En effet, quand la croissance est au rendez-vous, les
agents ont confiance en l'avenir, le revenu disponible est en augmentation, les ménages ont
recours aux crédits, la demande et la consommation de biens et de services augmentent, tout
comme les prix de l'immobilier, l'économie tourne à plein régime.
Ce raisonnement économique simple et rationnel ne permet toutefois pas d'expliquer les
différences de taux de propriétaires en Europe, alors que les situations économiques des pays
concernés sont différentes.
La croissance économique reste faible pour les pays moteurs de l'Europe, la cession et la
croissance nulle touchent un certain nombre de pays qui ont les taux de propriétaires les plus
élevés.
Cette note de synthèse présentera les constats chiffrés sur les différences de taux en
comparant les situations économiques, et fournira les explications synthétiques justifiant les
écarts remarqués. Pour établir une analyse synthétique, nous comparerons l'Europe du Nord et
l'Europe du Sud.
Pourquoi les pays ont-ils des taux de propriétaires différents, quels facteurs peuvent
l'expliquer ?
La moyenne européenne de ménages propriétaires de leur logement est de 62.7 % , 57 % pour
la France et 44.3 % pour l'Allemagne. Ces deux pays sont les moteurs de la croissance
économique européenne, ils ne sont pourtant pas dans le haut du tableau.
D'un autre côté, l'Espagne qui se remet doucement de la crise, présente un taux de 83 %. La
Grèce se situe à 73 %, pourtant elle vient tout juste d'émettre à nouveau des obligations sur les
marchés, sa situation s'améliore mais reste toujours préoccupante.
Globalement, nous pouvons constater que les pays de l'Europe du Sud voir de l'Europe
Centrale, ont les taux de propriétaires les plus élevés.
Des facteurs économiques, sociaux, démographiques peuvent expliquer ces différences.
En France, la progression des encours de crédits est significative depuis 10 ans, alors que le
taux de propriétaires n'a que peu augmenté sur la même période. On peut penser que les
propriétaires ont revendu pour racheter, ou que les agents économiques déjà propriétaires ont
racheté des biens immobiliers pour préparer la retraite ou pour défiscaliser. Autrement dit, les
propriétaires sont "secundo accédants ", ou multipropriétaires, les nouveaux primo accédants
sont faibles.
L'Allemagne, "peuple de locataires", a capitalisé sur son industrie plutôt que sur le
"propriétaire à tout prix".
Dans les grandes agglomérations de Paris ou de Berlin, les particuliers ne peuvent plus
acheter, ils préfèrent louer "plus grand" que devenir propriétaire d'un bien ne correspondant
pas à leur besoin.
Aujourd'hui, le travail exige d'être mobile et de pouvoir déménager en fonction des emplois
disponibles. Détenir un bien serait un frein en cas de vente forcée sur un marché immobilier
baissier.
Certains pays comme le Danemark ont un faible taux de propriétaire de 57 %, mais une
banque danoise demande 20 % d'apport en moyenne pour un financement immobilier. Donc
la politique des banques d'un pays, même en bonne santé économique, peut aussi jouer sur le
taux de propriétaires.
Les pays majeurs de l'Europe du Nord ont aussi une fiscalité importante sur le travail et le
capital. Acquérir un bien est synonyme d'un charge fiscale supplémentaire qui est dissuasive.
Nous pouvons évoquer à présent le cas de l'Europe du Sud.
Avant la crise de 2008, certains pays comme l'Espagne ont beaucoup misé sur la construction
immobilière pour bâtir leur croissance, les particuliers ont eu recours aux emprunts
immobiliers facilités par les allongements de la durée des prêts. Le marché immobilier était en
hausse, les banques complaisantes, les taux variables très bas....tous ses facteurs ont favorisé
la croissance du pays. L'Espagne a un des taux de propriétaires les plus élevés. Elle est
pourtant la première victime de l'éclatement de la bulle immobilière. Dans ces années de
croissance forte avant 2008, la performance économique a clairement permis d'augmenter ce
taux de propriétaires.
Plus généralement, dans les pays d'Europe du Sud, la structure de la société et de la famille
explique aussi le fort taux de propriétaires, les biens se transmettent de génération en
génération, la famille est sacrée, il est important de vivre ensemble.
Les pays qui ont bâti leur développement avant la crise sur le développement immobilier
comme l'Espagne et dans une certaine mesure la France, paient le prix fort aujourd'hui.
En conclusion, nous pouvons donc affirmer que la performance économique permet
l'augmentation du taux de propriétaire et que le développement de la croissance n'est pas le
seul justificatif. Des écarts entre les pays sont bien présents, chaque pays ayant des facteurs
différents.
Faute de croissance significative dans l'avenir proche, on ne voit pas comment le taux de
propriétaires pourrait augmenter globalement dans toute l'Europe.
Pour finir cette synthèse sur une note optimiste, nous pouvons évoquer le cas de l'Irlande et
l'Islande qui ont aussi utiliser le développement économique grâce à l'immobilier et aux
banques. elles ont connu un éclatement de la bulle financière et immobilière, elles ont fait des
sacrifices pour sortir de la crise, et cela semble porter ces fruits, ce qui est de bonne augure
pour les peuples qui souffrent de la crise et qui en sortiront à leur tour.
Arnaud TROUCHE
SOURCES : Eurostat, Joseph Eugene Stiglitz -"Triomphe de la Cupidité", imf.org, INSEE,
Banque de France.
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