CONGRÉGATION POUR L’ÉDUCATION CATHOLIQUE
(Pour les Séminaires et les Institutions d’Enseignement)
ÉDUQUER ENSEMBLE DANS L’ÉCOLE CATHOLIQUE
MISSION PARTAGÉE PAR LES PERSONNES CONSACRÉES ET LES FIDÈLES LAÏCS
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION 1 à 7
I. LA COMMUNION DANS LA MISSION ÉDUCATIVE
L’Église : mystère de communion et de mission 8 à 11
Éduquer en communion et à la communion 12 à 14
Les personnes consacrées et les fidèles laïcs ensemble dans l’école 15 à 19
II. UN PARCOURS DE FORMATION POUR ÉDUQUER ENSEMBLE
La formation professionnelle 20 à 25
La formation théologique et spirituelle 26
La contribution des personnes consacrées à la formation partagée 27 à 29
La contribution des laïcs à la formation partagée 30 à 33
La formation à l’esprit de communion pour éduquer 34 à 37
Témoignage et culture de la communion 38 à 39
Communauté éducative et pastorale des vocations 40 à 42
III. LA COMMUNION POUR S’OUVRIR AUX AUTRES
Fondements anthropologiques et théologiques 43 à 46
Bâtisseurs d’une communion ouverte 47 à 53
CONCLUSION 54 à 56
INTRODUCTION
1. L’évolution extrêmement rapide et parfois contradictoire de notre temps suscite, dans le
domaine éducatif, des défis qui interpellent le monde de l’école et l’incitent à trouver des réponses
adaptées non seulement au niveau des contenus et des méthodes didactiques, mais aussi sur le
plan de l’expérience communautaire propre à l’action éducative. L’importance de ces défis vient
du contexte de complexité sociale, culturelle et religieuse dans lequel grandissent en fait les
jeunes générations et qui influe d’une manière significative sur ce qu’elles vivent. Il s’agit de
phénomènes largement répandus, tels le désintérêt pour les vérités fondamentales de la vie
humaine, l’individualisme, le relativisme moral et l’utilitarisme, qui imprègnent surtout les
sociétés riches et développées. À ces phénomènes s’ajoutent les mutations structurelles rapides, la
mondialisation et l’application des nouvelles technologies au domaine de l’information, qui ont
toujours davantage de répercussions dans la vie quotidienne et dans les parcours de formation. De
plus, avec le processus du développement, l’écart entre pays riches et pays pauvres grandit, le
phénomène des migrations s'accroît, accentuant la diversité des identités culturelles sur un même
territoire national avec les conséquences qui en découlent pour l’intégration. Dans une société à la
fois globale et diversifiée, locale et planétaire, ouverte à des modes divers et conflictuels
d’interprétation du monde et de la vie, les jeunes sont confrontés à toutes sortes de propositions
de valeurs ou contre-valeurs, toujours plus mobilisatrices, mais également toujours moins
partagées. À cela s’ajoutent les difficultés venant des problèmes de stabilité familiale, des
situations de gêne et de pauvreté, qui créent un sentiment diffus de désarroi sur le plan
existentiel et affectif, à un moment délicat de leur croissance et de leur épanouissement, les
exposant au péril d’être « secoués et menés à la dérive par tous les courants d’idées » (Ep 4, 14).
2. Dans ce contexte, il devient particulièrement urgent d’offrir aux jeunes un parcours de
formation scolaire qui ne se réduise pas à l’utilisation individualiste et institutionnelle d’un service
qui aurait pour but la seule obtention d’un diplôme. Outre l’apprentissage des connaissances, il
est nécessaire que les étudiants fassent l’expérience d’un partage approfondi avec leurs
éducateurs. Pour l’heureuse réalisation d’une telle expérience, les éducateurs eux-mêmes doivent
être des interlocuteurs accueillants et bien préparés, capables de susciter et d’orienter chez les
étudiants le meilleur de leurs énergies, en vue de la recherche de la vérité et du sens de
l’existence, en vue d’une réelle construction de la personne et d’une approche positive de la
vie, dans l’optique d’une formation intégrale. Du reste « une véritable éducation n’est pas
possible […] sans la lumière de la vérité » (1).
3. Cette perspective interpelle toutes les institutions scolaires, mais encore plus directement
l’école catholique, qui prête constamment attention aux instances de formation de la société, parce
que « le problème de l’instruction a toujours été étroitement lié à la mission de l’Église » (2). À
cette mission, l’école catholique participe en tant qu’authentique protagoniste ecclésial d’un service
éducatif vivifié par la vérité de l’Évangile. En effet, fidèle à sa vocation, l’école catholique se
présente « comme lieu d’éducation intégrale de la personne humaine à travers un projet
éducatif clair qui a son fondement dans le Christ » (3), projet destiné à opérer une synthèse
entre la foi, la culture et la vie.
4. Le projet de l’école catholique est convaincant seulement s’il est réali par des personnes
profondément motivées, parce que témoins d’une rencontre vivante avec le Christ, car « le
mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe incarné » (4). Des
personnes qui, par conséquent, se reconnaissent dans l’adhésion personnelle et communautaire au
Seigneur, choisi comme fondement et référence constante de la relation interpersonnelle et de la
collaboration mutuelle entre l’éducateur et celui qui doit être éduqué.
5. La réalisation d’une véritable communauté éducative sur la base de valeurs et de projets
partagés représente pour l’école catholique une tâche importante à accomplir. En effet, la présence,
au sein de la communauté, d’élèves et aussi d’enseignants provenant de contextes culturels et
religieux différents, requiert un engagement de discernement et d’accompagnement accrus.
L’élaboration d’un projet partagé est comme un appel impérieux qui pousse l’école catholique
à se qualifier comme lieu d’expérience ecclésiale. Sa force de rassemblement et ses capacités de
relations découlent d’un ensemble de valeurs et d’une communion de vie enracinées dans la même
appartenance au Christ et dans la reconnaissance des valeurs évangéliques, prises comme règles
éducatives, comme motivations et, en définitive, comme buts du parcours scolaire. Certes, le degré
de participation variera en fonction de l’histoire personnelle de chacun, mais cela exige des
éducateurs une disponibilité à un engagement de formation et d’autoformation permanentes,
en considération du choix de valeurs culturelles et du mode de vie dont la communauté éducative
devra témoigner (5).
6. La Congrégation pour l’Éducation Catholique, après avoir déjà traité en deux documents le thème
de l’identité et de la mission dans l’école respectivement du laïc catholique et des personnes
consacrées, considère dans le présent document les aspects pastoraux se rapportant à la
collaboration entre fidèles laïcs et consacrés (6) dans la même mission éducative. Dans cette
mission, se rencontrent le choix des fidèles laïcs de vivre la tâche éducative « comme une
vocation personnelle dans l’Église et pas seulement comme l’exercice d’une profession » (7) et
le choix des personnes consacrées, en tant qu’appelées « à vivre les conseils évangéliques et à
porter l’humanisme des béatitudes dans le champ de l’éducation et de l’école » (8).
7. Ce document se situe dans la continuité des textes précédents de la Congrégation pour
l’Éducation Catholique concernant l’éducation et l’école (9). Il tient clairement compte des diverses
situations dans lesquelles se trouvent les institutions scolaires catholiques dans les différentes
régions du monde. Il entend attirer l’attention sur trois aspects fondamentaux qui regardent la
collaboration entre les fidèles laïcs et les personnes consacrées dans l’école catholique : la
communion dans la mission éducative, le chemin nécessaire de formation à la communion
pour la mission éducative partagée et, enfin, l’ouverture aux autres comme fruit de la
communion.
I. LA COMMUNION DANS LA MISSION ÉDUCATIVE
8. Tout être humain est appelé à la communion en vertu de sa nature créée à l’image et à la
ressemblance de Dieu (cf. Gn 1, 26-27). C’est pourquoi, dans la perspective de l’anthropologie
biblique, l’homme n’est pas un individu isolé, mais une personne : un être essentiellement
relationnel. La communion à laquelle l’homme est appelé implique toujours une double dimension,
à savoir une dimension verticale (communion avec Dieu) et une dimension horizontale (communion
entre les hommes). Il est essentiel de reconnaître la communion comme don de Dieu, comme fruit
de l’initiative divine accomplie dans le mystère pascal (10).
L'Église : mystère de communion et de mission
9. Le projet initial de Dieu a été compromis par le péché qui a blessé toute relation : entre l’homme
et Dieu, entre l’homme et l’homme. Pourtant, Dieu n’a pas abandonné l’homme dans sa solitude et,
à la plénitude des temps, il a envoyé son Fils, Jésus-Christ, comme Sauveur (11), afin que l’homme
puisse retrouver, dans l’Esprit, la pleine communion avec le Père. À son tour, la communion avec la
Trinité, rendue possible par la rencontre avec le Christ, unit les hommes entre eux.
10. Quand les chrétiens parlent de communion, ils se réfèrent au mystère éternel, révélé dans le
Christ, de la communion d’amour qui est la vie même du Dieu-Trinité. Dans le même temps, on dit
aussi que le chrétien est coparticipant de cette communion dans le corps du Christ qui est l’Église
(cf. Ph 1, 7 ; Ap 1, 9). La communion est, par conséquent, « essence » de l’Église, fondement et
source de sa mission d’être dans le monde « la maison et l’école de la communion » (12), pour
conduire tous les hommes et toutes les femmes à entrer toujours plus profondément dans le mystère
de la communion trinitaire et, tous ensemble, à étendre et renforcer les relations à l’intérieur de la
communauté humaine. En ce sens, « l’Église est comme une famille humaine, mais elle est aussi, en
même temps, la grande famille de Dieu, par laquelle Il forme un espace de communion et d’unité
dans tous les continents, dans toutes les cultures et dans toutes les nations » (13).
11. Il en résulte donc que dans l’Église, sous son aspect d’icône de l’amour incarné de Dieu, « la
communion et la mission sont profondément unies entre elles, elles se compénètrent et s’impliquent
mutuellement, au point que la communion représente la source et tout à la fois le fruit de la mission
: la communion est missionnaire et la mission est pour la communion » (14).
Éduquer en communion et à la communion
12. L’éducation, précisément parce qu’elle tend à rendre l’homme plus homme, ne peut se réaliser
authentiquement que dans un contexte relationnel et communautaire. Ce n’est pas un hasard si, à
l’origine, le premier milieu éducatif est constitué par cette communauté naturelle qu’est la famille
(15). L’école, à son tour, se situe aux côtés de la famille comme lieu éducatif communautaire,
voulu et organisé. Elle en soutient la tâche éducative dans une logique de subsidiarité.
13. L’école catholique, qui se caractérise principalement comme communauté éducative, se
présente comme école de la personne et des personnes. En effet, elle vise à former la personne
dans l’unité intégrale de son être, intervenant avec les moyens de l’enseignement et de
l’apprentissage se forment « les critères de jugement, les valeurs déterminantes, les
points d’intérêt, les lignes de pensée, les sources inspiratrices et les modèles de vie » (16). Mais
surtout en l’impliquant dans la dynamique des relations interpersonnelles qui constituent la
communauté scolaire et en sont la sève vivifiante.
14. D’autre part, cette communauté, en raison de son identité et de sa base ecclésiale, doit aspirer à
se constituer en communauté chrétienne, c’est-à-dire en communauté de foi, capable de créer des
rapports de communion, éducatifs en eux-mêmes et toujours plus profonds. Et c’est justement la
présence et la vie d’une communauté éducative, dans laquelle tous les membres participent à une
communion fraternelle, nourrie de la relation vivante avec le Christ et l’Église, qui fait de l’école
catholique le cadre d’une expérience authentiquement ecclésiale.
Les personnes consacrées et les fidèles laïcs ensemble dans l'école
15. « Ces dernières années, la doctrine de l’Église comme communion a permis notamment de
mieux comprendre que ses diverses composantes peuvent et doivent unir leurs forces, dans un esprit
de collaboration et d’échange des dons, pour participer plus efficacement à la mission ecclésiale.
Cela contribue à donner une image plus juste et plus complète de l’Église, et surtout à rendre plus
vigoureuse la réponse aux grands défis de notre temps, grâce à l’apport concerté des divers dons »
(17). Dans ce contexte ecclésial, la mission de l’école catholique, accomplie par une communauté
constituée de personnes consacrées et de fidèles laïcs, prend une signification toute particulière et
manifeste une richesse qu’il convient de savoir reconnaître et mettre en valeur. Cette mission exige,
de la part de tous les membres de la communauté éducative, la prise de conscience qu’il revient aux
éducateurs, comme personnes et comme communauté, d’assumer la responsabilité, à laquelle on
ne peut renoncer, de produire la marque originale d’un style chrétien. Cela requiert de leur part
d’être des moins de Jésus-Christ et de manifester que la vie chrétienne est porteuse de
lumière et de sens pour tous. De même que la personne consacrée est appelée à témoigner de sa
vocation particulière à la vie de communion dans l’amour (18), pour être dans la communauté
scolaire signe, mémoire et annonce prophétique des valeurs de l’Évangile (19), de même est-il
demandé à l’éducateur laïc d’exercer « sa mission dans l’Église en vivant par la foi sa vocation
séculière dans la structure communautaire de l’école » (20).
16. Ce qui rend vraiment efficace ce témoignage, c’est la promotion, à l’intérieur même de la
communauté éducative de l’école catholique, de cette spiritualité de la communion qui a été
désignée comme la grande perspective largement ouverte à l’Église du troisième millénaire. Une
spiritualité de la communion, cela veut dire « la capacité d’être attentif, dans l’unité profonde du
Corps mystique, à son frère dans la foi, le considérant donc comme "l’un des nôtres" » (21) ; cela
signifie aussi « la capacité de la communauté chrétienne de donner une place à tous les dons de
l’Esprit » (22) dans une relation de réciprocité entre les différentes vocations ecclésiales. Dans cette
expression particulière de l’Église qu’est l’école catholique, la spiritualité de la communion doit
devenir la respiration de la communauté éducative, le critère pour la pleine valorisation ecclésiale
de ses composantes et le point de référence essentiel pour la mise en œuvre d’une mission
authentiquement partagée.
17. Ainsi, dans les écoles catholiques nées à l’initiative des familles religieuses, des diocèses, des
paroisses ou des fidèles, et se signale aujourd’hui la présence de mouvements ecclésiaux, cette
spiritualité de communion devra se traduire par un comportement de grande fraternité évangélique
entre les personnes qui se reconnaissent respectivement dans les charismes des Instituts de vie
consacrée, dans ceux des mouvements ou des communautés nouvelles, et chez les autres fidèles qui
travaillent dans l’école. De cette manière, la communauté éducative fait place aux dons de l’Esprit
et reconnaît ces diversités comme une richesse. Une authentique maturité ecclésiale, alimentée par
la rencontre du Christ dans les sacrements, permettra de donner « que ce soit par les formes plus
traditionnelles ou par celles plus nouvelles des mouvements ecclésiaux […] une vivacité qui est un
don de Dieu » (23) à toute la communauté scolaire et au parcours éducatif lui-même.
18. Les associations catholiques catégorielles constituent une autre instance de « communion », une
aide apportée à la mission éducative et elles sont un espace de dialogue entre les familles, les
institutions du territoire et l’école. Ces associations, par leurs articulations au niveau local, national
et international, sont une richesse qui apporte une contribution particulièrement féconde au monde
éducatif sur le plan des motivations et du professionnalisme. De nombreuses associations réunissent
des enseignants et des responsables présents tant dans l’école catholique que dans d’autres réalités
scolaires. Grâce au pluralisme des appartenances, elles peuvent remplir un rôle important dans le
dialogue et la coopération entre des institutions diverses, mais ayant en commun la même visée
éducative. Ces réalités associatives sont appelées à tenir compte du changement des situations,
adaptant ainsi leur structure et leur mode d’agir, pour continuer à être une présence efficace et
incisive dans le secteur éducatif. Elles doivent également intensifier leur collaboration réciproque,
surtout pour garantir la réalisation des objectifs communs, dans le plein respect de la valeur et de la
spécificité de chaque association.
19. Il est, en outre, d’une importance fondamentale que le service assuré par les associations se
fasse sous l’impulsion d’une entière participation à l’activité pastorale de l’Église. C’est aux
Conférences Épiscopales et à leurs organismes continentaux qu’est confiée la tâche de promouvoir
et de valoriser les spécificités de chaque association, en favorisant et en encourageant un travail plus
coordonné dans le secteur scolaire.
II. UN PARCOURS DE FORMATION POUR ÉDUQUER ENSEMBLE
20. Éduquer les jeunes générations à la communion et dans la communion, dans l’école
catholique, est une tâche sérieuse qui ne s’improvise pas. Elle doit être préparée et soutenue grâce
à un projet de formation initiale et continue, capable d’accueillir les défis éducatifs du moment
présent et de fournir les instruments les plus efficaces pour pouvoir les affronter, dans la ligne de la
mission partagée. Ceci implique chez les éducateurs une disponibilité à l’apprentissage et au
développement des connaissances, au renouvellement et à la mise à jour des méthodes
d’enseignement, mais aussi à la formation spirituelle, religieuse et au partage. Dans le contexte
actuel, ceci est particulièrement requis pour répondre aux demandes qui viennent d’un monde en
évolution continuelle et rapide, dans lequel il devient toujours plus difficile d’éduquer.
La formation professionnelle
21. Une des conditions fondamentales requises de l’éducateur de l’école catholique est la
possession d’une solide formation professionnelle. La mauvaise qualité de l’enseignement, due
à l’insuffisante préparation professionnelle ou à l’inadaptation des méthodes pédagogiques, se
répercute inévitablement au détriment de l’efficacité de la formation intégrale de l’élève et du
témoignage culturel que doit offrir l’éducateur.
22. La formation professionnelle de l’éducateur implique non seulement un vaste éventail de
compétences culturelles, psychologiques et pédagogiques, caractérisées par l’autonomie, la
capacité de faire des projets et de les évaluer, la créativité, l’ouverture à l’innovation,
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