
PHIPOL1314.01.Intro 3
structurés par des institutions (l’école, l’entreprise, l’hôpital, la famille, la sécurité
sociale, etc.) qui forment système et qui assignent des rôles. On entend par institution
sociale, une réalité sociale, propre à une société ou à un groupe, relativement autonome,
stable ou régulière, contraignant les individus par des règles et ayant une fonction
sociale spécifique.
Un rapport social est donc différent d’une relation interpersonnelle. Dans la simple
relation interpersonnelle, l’autre m’apparaît comme une personne singulière que je
rencontre et qui a un visage. En revanche, dans un rapport social, l’autre m’apparaît
comme un socius, qui a un statut, un rôle social. Distinguant le prochain et le socius, P.
Ricœur écrit: “le socius, c’est celui que j’atteins à travers sa fonction sociale; la relation
au socius est une relation médiate; elle atteint l’homme en tant que...”
. C’est ainsi que
je puis avoir un rapport social avec un individu sans avoir de relation interpersonnelle
avec lui. En tant que salarié, je cotise à la sécurité sociale et j’entre ainsi dans un rapport
avec toutes les personnes qui cotisent et sont assurées par la sécurité sociale comme
institution. Mais il est évident que je n’ai pas de relations personnelles avec la plupart
de ces individus et, si j’en ai éventuellement, ces relations n’ont rien à voir avec notre
affiliation à la sécurité sociale. La solidarité sociale ainsi instituée n’est pas réductible à
un lien de sympathie interpersonnelle. Une société est donc toujours donc plus qu’un
ensemble d’individus.
Un animal politique
L’expression est d’Aristote (384-324 av. JC). En quoi l’homme est-il un animal
politique ?
Une première réponse, qui semble à première vue la plus évidente, consisterait à
considérer le politique comme un sous-ensemble du social. Parmi les institutions qui
règlent les rapports entre les hommes, il y en a d’une espèce particulière : les
institutions politiques, institutions qui forment un système que l’on a pris coutume
d’appeler « Etat » dans les sociétés modernes. On pourrait ainsi étudier les institutions
politiques comme on étudie d’autres types d’institutions (scolaires, économiques,
religieuses, etc.).
Pourtant, on aurait tort de réduire la politique à des institutions ou au fonctionnement
de l’Etat. La politique peut aussi, et avant tout, se caractériser par des pratiques. Celles
de l’Etat bien sûr, mais aussi celle des citoyens. Car l’Etat lui-même n’est qu’un
instrument au moyen duquel les êtres humains visent à agir de manière collective sur
leurs conditions sociales d’existence. On peut donc définir la politique (certains diront
plutôt « le politique ») par les pratiques par lesquelles des êtres humains visent à agir de
manière concertée sur leurs conditions sociales d’existence. Ces pratiques s’opèrent le
plus souvent, mais pas toujours, dans le cadre d’institutions politiques qui sont censées
être des moyens au service de cette action. La politique c’est donc l’action délibérée sur
le social, la pratique auto-instituante de la société.
3. Qu’est-ce que la philosophie politique ?
3.1. La vie sociale et l’agir politique en questions
La vie sociale et l’agir politique nous confrontent à des questions. Nous pouvons
faire appel à notre intelligence, à notre raison, pour tenter d’y répondre de manière
adéquate. On peut distinguer différents types de question. Selon le type de la question,
P. RICŒUR, Histoire et vérité, Paris, Seuil, 1955, p. 102.