Economie Publique Doc. a Le paradoxe de Jevons et le réchauffement climatique Emissions de CO2 rapportées au PIB en kg par dollar constant de 2000 Emissions de gaz à effet de serre liées à la combustion des énergies fossiles en milliards de tonnes de CO2 Doc. b Equilibre partiel d’un marché avec externalités négatives coût, prix CmS CmP Popt P* t Qopt Q* quantité Le coût marginal social (CmS) est supérieur au coût marginal privé (CmP) car il incorpore les externalités négatives. L’équilibre marchand décentralisé (Q*, P*) est sousoptimal car les producteurs se déterminent en fonction du CmP. L’équilibre marchand décentralisé induit une perte sèche (aire grisée). Les pouvoirs publics interviennent pour internaliser les externalités : - Par réglementation en fixant un plafond de production Qopt. (approche par les quantités) - Par une taxe pigouvienne de montant t (approche par les prix) correspondant au coût externe. Doc. c efficacité comparée des instruments de lutte contre la pollution lorsque les coûts de dépollution des entreprises sont différents. Réglementation des quantités Coût marginal de dépollution Taxe Coût marginal de dépollution La taxe est moins coûteuse Coût marginal de dépollution τ τ Entreprise 1 Entreprise 2 Qopt Quantité Q2 Qopt Q1 Quantité Q2 Qopt Q1 Quantité de pollution de pollution de pollution D’après A. BOZIO & J. GRENET (dir), Economie des politiques publiques, pp.60-61 Economie Publique Doc. d L’impact des erreurs d’estimation sur le choix de l’instrument d’internalisation Schéma d1 : Bm, Cm, Bme Cm P+ Poptt B A Bme Bm Q- Qopt Q+ La pollution engendre des coûts représentés par la courbe Cm. Elle engendre également des bénéfices représentés par la courbe Bm : en polluant, on produit à meilleur coût. L’optimum (Qopt, Popt) correspond au niveau de pollution tel que le coût marginal de la pollution est égal au bénéfice marginal de la pollution. Supposons que les pouvoirs publics font une erreur d’estimation des bénéfices de la pollution : ils les sur-estiment par une courbe Bme. L’impact de cette erreur dépendra du choix de l’instrument d’internalisation : - Le quota de droits à polluer sera fixé à un niveau Q+ trop élevé, pour un coût social équivalent à l’aire A. - La taxe sera fixé à un niveau trop élevé P+, engendrant une émission de pollution trop faible Q-, pour un coût social équivalent à l’aire B. quantité de pollution Schéma d2 : Le choix de l’instrument dépend alors de l’élasticité des coûts et des bénéfices de la pollution. Bm, Cm, Bme Cm P+ B A Bme Bm Q- Q+ Le coût peut ainsi être plus élastique que le bénéfice (schéma d2) C’est le cas si les dommages de la pollution croissent à peu près au même rythme que la quantité de pollution, et que du côté des pollueurs il faut par exemple changer radicalement de technologie pour réduire la quantité de pollution émise en deçà d’un certain niveau. La pollution émise par les automobiles peut se ranger dans ce cas. On voit que l’aire A est plus importante que l’aire B : le coût social de l’erreur d’estimation sera plus important si on a choisi le quota comme instrument. La taxe est donc préférable dans ce cas. quantité de pollution D’après Martin L. WEITZMAN, « Prices vs. Quantities », Review of Economic Studies, 1974 Doc. e prix du quota de CO2 sur le marché européen Economie Publique Doc. f Typologie des biens économiques… La typologie standard… Nonexclusion Rivalité Ressources communes Exclusion Biens privés … et selon E. OSTROM Non-rivalité Biens collectifs purs (parfois appelés biens publics) Biens de club D’après Paul SAMUELSON, "The Pure Theory of Public Expenditure", Review of Economics and Statistics, 1954. Source : Conférence donnée par Elinor OSTROM à l’occasion de la remise du prix Nobel, 2009, Traduite dans Revue de l’OFCE n°120, 2012, p.24 http://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/revue/120/revue-120.pdf Doc. g la demande d’un bien collectif et l’équilibre de Lindahl La demande pour un bien collectif est différente de la demande pour un bien privé, en raison de la non-rivalité du bien collectif. Cas d’un bien privé P La demande agrégée d’un bien privé s’obtient en additionnant pour chaque niveau de prix les quantités demandées par les consommateurs. On construit ainsi la demande agrégée DA à partir des demandes individuelles de deux consommateurs D1 et D2, en les sommant horizontalement. Cm D1 D2 DA Q 2Q A Q1 Q Cas d’un bien collectif La demande agrégée d’un bien collectif s’obtient en additionnant pour chaque quantité la disposition à payer cette quantité par les consommateurs. En effet, cette quantité est consommée simultanément par les consommateurs. P Cm On construit ainsi la demande agrégée DA à partir des demandes individuelles de deux consommateurs D1 et D2, en les sommant verticalement. DA P2 P1 D1 QA Ainsi, pour un coût marginal Cm, il est optimal de produire QA = Q1 + Q2, où Q1 et Q2 sont respectivement les quantités demandées par les consommateurs 1 et 2. D2 Q Ainsi, pour un coût marginal Cm, il est optimal de produire QA, dont le prix sera financé par la somme de P 1 et P2, les contributions respectives des consommateurs 1 et 2. On remarque qu’isolément, aucun des consommateurs n’est prêt à financer le bien collectif pour ce prix C m : le bien collectif ne peut être financé que collectivement. Dans le cas d’un bien privé, la quantité optimale est telle que le coût marginal soit égal à la disposition à payer pour chaque individu. Dans le cas d’un bien collectif, la quantité optimale est telle que le coût marginal est égal à la somme des dispositions à payer des différents individus : on a alors un équilibre de Lindahl. Cet équilibre s’obtient par une procédure centralisée dite procédure de Lindahl : chaque consommateur verse une contribution volontaire, une souscription pour la production du bien collectif, et on produit une quantité de bien collectif telle que la somme des souscriptions soit égale au coût de production du bien collectif. D’après Erik LINDAHL, Die Gerechtigkeit der Besteuerung, 1919 Economie Publique Doc. h La tragédie des communs La tragédie des communs se présente ainsi. Imaginez un pâturage ouvert à tous. On doit s'attendre à ce que chaque éleveur essaie de mettre autant de bétail que possible sur le terrain commun. Un tel arrangement peut fonctionner d'une manière raisonnablement satisfaisante pendant des siècles parce que les guerres tribales, le braconnage et la maladie maintiennent le nombre tant des hommes que des bêtes bien au-dessous de la capacité de support de la terre. En tant qu'être rationnel, chaque éleveur cherche à maximiser son gain. Explicitement ou implicitement, plus ou moins consciemment, il se demande "quelle est l'utilité pour moi d'ajouter une bête de plus à mon troupeau ?" Cette utilité a une composante négative et une composante positive. 1. La composante positive est fonction de l'incrément d'une bête. Puisque l'éleveur reçoit tous les revenus de la vente de l'animal additionnel, l'utilité positive est presque +1. 2. La composante négative est fonction du surpâturage additionnel provoqué par la bête supplémentaire. Mais, comme les effets du surpâturage sont partagés par tous les éleveurs, l'utilité négative pour chaque éleveur qui prend une décision est seulement une fraction de -1. En ajoutant les utilités partielles individuelles, l'éleveur rationnel conclut que la seule voie sensée qu'il peut suivre est d'ajouter une autre bête à son troupeau. Et une autre; et une autre.... Mais ceci est la conclusion atteinte par chaque berger rationnel partageant un terrain commun. C'est là que se trouve la tragédie. Chaque homme est enfermé dans un système qui le contraint à augmenter son troupeau sans limite - dans un monde qui est limité. La ruine est la destination vers laquelle tous les hommes se ruent, chacun à la poursuite de son propre meilleur intérêt dans une société qui croit en la liberté des communs. La liberté dans les communs apporte la ruine à tous. Les Parcs nationaux présentent un autre exemple du fonctionnement de la tragédie des communs. À présent, ils sont ouverts à tous, sans limite. Les parcs eux-mêmes sont limités en étendue - il n'y a qu'une Yosemite Valley - alors que la population semble croître sans limite. Les valeurs que les visiteurs recherchent dans les parcs sont constamment érodées. Clairement, nous devrons bientôt cesser de traiter les parcs comme des communs ou ils n'auront plus aucune valeur pour personne. Que devons-nous faire ? Nous avons plusieurs options. Nous pourrions les vendre comme propriété privée. Nous pourrions les conserver comme propriété publique, mais allouer le droit d'y entrer. L'allocation pourrait être basée sur la richesse, par l'utilisation d'un système de vente aux enchères. Elle pourrait être basée sur le mérite, défini à partir de critères reconnus. Elle pourrait être basée sur une loterie. Ou elle pourrait être sur une base premier arrivé, premier servi, administrée par de longues files d'attente. Ce sont toutes, je pense, des possibilités raisonnables. Elles sont toutes discutables. Mais nous devons choisir - ou consentir à la destruction des communs que nous appelons nos Parcs Nationaux. D'une façon inverse, la tragédie des communs réapparaît dans les problèmes de pollution. Ici il n'est pas question d'extraire quelque chose des communs, mais d'y mettre quelque chose - des eaux usées, ou des déchets chimiques, radioactifs et caloriques dans l'eau; des émanations nocives et dangereuses dans l'air et des panneaux publicitaires gênants et désagréables dans le champ de vision. Les calculs d'utilité sont presque les mêmes qu'auparavant. L'homme rationnel constate que sa part du coût des déchets qu'il déverse dans les communs est moindre que le coût d'épurer ses déchets avant de s'en débarrasser. Comme c'est vrai pour chacun, nous sommes enfermés dans un système de "souiller notre propre nid," tant que nous nous comportons seulement comme des libres entreprises indépendantes et rationnelles. La tragédie des communs comme panier à provisions est évitée par la propriété privée, ou quelque chose de formellement équivalent. Mais l'air et les eaux qui nous entourent ne peuvent pas être aisément clôturés et ainsi la tragédie des communs comme fosse d'aisance doit être empêchée par des moyens différents, par des lois coercitives ou des dispositifs fiscaux qui rendent plus économique pour le pollueur de traiter ses polluants que de les décharger non traités. Nous n'avons pas progressé aussi loin dans la résolution de ce problème que dans celle du premier. En fait, notre concept particulier de propriété privée, qui nous dissuade d'épuiser les ressources positives de la terre, favorise la pollution. Le propriétaire d'une usine sur la berge d'une rivière - dont la propriété s'étend jusqu'au milieu de la rivière, a souvent du mal à voir pourquoi ce n'est pas son droit naturel de troubler les eaux qui coulent devant sa porte. La loi, toujours en retard sur l'époque, nécessite des adaptations complexes pour prendre en compte ce nouvel aspect des communs. Garett HARDIN, « The Tragedy of the Commons », Science, 1968 Doc. i Le théorème de Bowen – Lindahl – Samuelson La condition « BLS » ou de Bowen-Lindahl-Samuelson est la condition d’optimalité collective dans une économie où les ressources sont utilisées pour produire un bien privé X et un bien collectif G. Comment allouer ces ressources de façon Pareto-efficace à la production des deux biens ? On montre que c’est le cas lorsque le taux marginal de transformation entre bien privé et bien public est égal à la somme des taux marginaux de substitution entre bien privé et bien public des différents individus. Le taux marginal de transformation entre X et G est le nombre d’unités de X auquel il faut renoncer pour obtenir une unité supplémentaire de G. NB : dans le cas de deux biens privés, l’allocation des ressources est Pareto-efficace si le taux marginal de transformation est égal au taux marginal de substitution pour chaque individu. Economie Publique Démonstration graphique du théorème « BLS » : Individu 1 On considère l’ensemble des paniers de consommation (G, X), dans une économie composée de deux individus 1 et 2. X est un bien privé, G un bien collectif consommé simultanément par les deux individus. Soit f la frontière des possibilités de production entre X et G. f est déterminée par la technologie. Les paniers de consommation accessibles à l’individu 1 sont situés en dessous de f. f est concave sous hypothèse de rendements décroissants. En effet, il devient alors de plus en plus difficile de produire une unité supplémentaire de G quand G augmente. Il faut donc sacrifier une quantité de plus en plus forte de X pour produire une unité supplémentaire de G quand G augmente. f a pour pente le taux marginal de transformation (TMT) entre X et G. Soit U1 une courbe d’indifférence de l’individu 1. U1 a pour pente le taux marginal de substitution entre X et G pour l’individu 1 (TMS1). X f X1opt U1 G Individu 2 Soit f2 la frontière des possibilités de production pour l’individu 2 lorsqu’on maintient l’utilité de l’individu 1 au niveau correspondant à U1. f2 s’obtient comme la différence entre f et U1. Sa pente est donc égale à TMT - TMS1. On a optimum au sens de Pareto si on maximise l’utilité de 2 pour un niveau donné d’utilité de 1. L’optimum correspond donc au point situé sur la courbe d’indifférence de 2 la plus élevée, à l’intérieur des possibilités de production pour 2. Il s’agit ici de la courbe U2, qui a pour pente le taux marginal de substitution entre X et G pour l’individu 2 (TMS2). X U2 X2opt f2 Gopt En ce point optimum, on a : G L’optimum de Pareto correspond donc à une production de bien collectif Gopt, le consommateur 2 consomme X2opt et le consommateur 1consomme X1opt TMS2 = TMT - TMS1 TMT = TMS1 + TMS2 Doc. j Le dilemme du prisonnier Prisonnier 2 Coopération Opportunisme (se tait) (dénonce) Prisonnier 1 Deux prisonniers ayant commis un délit sont interrogés séparément par la police, sans possibilité de communication. Chacun des prisonniers a le choix entre deux stratégies : - La stratégie de coopération consiste à se taire. - La stratégie opportuniste consiste à dénoncer l’autre pour lui faire porter la responsabilité du crime. Ce choix relève d’un jeu simultané qui peut se représenter par la matrice des paiements ci-contre. Si les deux prisonniers se taisent, leur culpabilité restera douteuse, ils écoperont sans doute d’une peine minime (paiement de -1 pour chacun d’entre eux) Coopération (se tait) (-1 ; -1) (-3 ; 0) Opportunisme (dénonce) (0 ; -3) (-2 ; -2) Si l’un se tait et l’autre dénonce, le prisonnier qui a “balancé” sortira libre, tandis que l’autre écopera d’une lourde peine (paiement de 0 pour le prisonnier opportuniste, de -3 pour le prisonnier coopératif). Si les deux prisonniers se dénoncent mutuellement, ils écoperont tous deux d’une lourde peine (-2 ; -2) Quelle issue de ce jeu est optimale au sens de Pareto ? L’équilibre de Nash se définit comme la combinaison de stratégies telle qu’aucun joueur ne souhaite changer de stratégie. Quelle issue du jeu est un équilibre de Nash ? D’après John F. NASH, 1950 Economie Publique Doc. k Le marché des “Lemons” Akerlof étudie le cas du marché des voitures d’occasion. Sur ce marché s’échangent des voitures de plus ou moins bonne qualité. Pour simplifier, supposons qu’il existe deux types de voitures : les « bonnes » voitures, qui ont une valeur vb, et les « lemons », qui sont ici des voitures d’occasion de mauvaise qualité, et ont une valeur v m. La valeur des « bonnes » voitures est plus élevée que celle des « lemons » : vb > vm Les acheteurs connaissent par ailleurs la probabilité p qu’une voiture soit « bonne » (0 < p < 1). On suppose que les acheteurs comme les vendeurs sont neutres au risque. Si l’information est parfaite : le marché se segmente en un marché des « bonnes » voitures qui s’échangent à un prix vb, et un marché des « lemons » qui s’échangent à un prix vm. Si l’information est imparfaite et symétrique : les vendeurs et les acheteurs ne connaissent pas le type de leur voiture. Ils s’accordent alors sur un prix d’échange correspondant à la moyenne de la valeur des « bonnes » voitures et des « lemons », pondérées par la probabilité d’appartenance du véhicule échangé à chaque catégorie : p v b + (1 – p) vm Si l’information est imparfaite et asymétrique : les vendeurs connaissent le type de leur voiture, mais pas les acheteurs. Les acheteurs sont prêts à acheter un véhicule au prix p vb + (1 – p) vm, mais à ce prix seuls les vendeurs de « lemons » sont prêts à vendre leur véhicule. Comme acheteurs et vendeurs sont conscients de cette défaillance du marché, seules les mauvaises voitures s’échangent à un prix vm! Les « bonnes » voitures sont évincées du marché, on a bien anti-sélection. D’après George AKERLOF, « The market for Lemons : Quality Uncertainty and the Market Mechanism », Quaterly Journal of Economics, 1970 Doc. l : l’éducation comme signal : le modèle de Spence Supposons que sur les travailleurs appartiennent à deux catégories : les plus talenteux sont plus productifs, les peu talentueux sont moins productifs. Les employeurs sont prêts à rémunérer les plus talentueux à un salaire w b, et les moins talentueux à un salaire wm, avec wb > wm Si les employeurs ne peuvent pas repérer à l’embauche le talent des travailleurs, on est dans un cas d’antisélection, le marché du travail aboutit à un équilibre pooling : les employeurs n’accepteront pas de rémunérer les travailleurs au-dessus d’un salaire p wb + (1 – p) wm. L’équilibre pooling se définit ici comme un équilibre qui regroupe les travailleurs quelque soit leur productivité. Cependant le diplôme peut jouer le rôle d’un signal de la qualité du travailleur. Supposons que le diplôme s’obtienne à un coût cb pour le « bon » travailleur et à un coût cm pour le « mauvais » travailleur. On peut avoir alors un équilibre séparateur si le « bon » travailleur se diplôme pour être reconnu et toucher un salaire w b , et que le mauvais travailleur préfère ne pas se diplômer. Les conditions d’un équilibre séparateur s’écrivent donc : wb – cb > wm (le « bon » travailleur se diplôme) wb – cm < wm (le « mauvais » travailleur ne se diplôme pas) Ces conditions sont vérifiées si : cb < wb – wm < cm Il faut donc que la prime salariale des diplômés soit suffisamment attrayante pour motiver les « bons » travailleurs. Cependant, une prime salariale des diplômés trop élevée inciter les « mauvais » à se diplômer, et fait perdre au diplôme son pouvoir de signal. D’après Michael SPENCE, Market Signaling, 1974 Doc. m Le paternalisme libertaire Nous sommes bien conscients que cette formulation n’enthousiasmera pas nos lecteurs, de prime abord. Les deux mots qui la constituent sont un peu rebutants, lourds de stéréotypes issus d’une politique et d’une culture populaire surannées. Pire encore, sur le fond, ils semblent contradictoires. Pourquoi, dès lors, combiner deux concepts honnis et contradictoires ? Nous pensons pour notre part que si chacun des deux termes est bien compris, les deux concepts qu’ils résument sont l’incarnation du bon sens – en outre, ils sont beaucoup plus séduisants ensemble que séparés. Le problème, c’est que les dogmatistes se sont appropriés ces termes – mais cela ne veut pas dire qu’il faille les leur laisser ! L’aspect libertaire de nos stratégies résulte d’un principe simple : selon nous, d’une manière générale, les gens doivent être libres de faire ce qu’ils veulent – et de changer d’avis s’ils en ressentent la nécessité. Pour reprendre une expression du regretté Milton Friedman, les paternalistes libertaires sont favorables à la « liberté de choix » pour tous. Nous nous efforçons de concevoir des politiques susceptibles de maintenir et même d’accroître cette liberté de choix. Quand nous utilisons l’adjectif « libertaire » pour qualifier le mot paternalisme, nous l’employons au sens de « respectueux de la liberté ». Et nous le pensons vraiment. Les paternalistes libertaires veulent aider les gens à faire ce qu’ils veulent vraiment et non imposer un carcan à ceux qui souhaitent exercer leur liberté. L’aspect paternaliste de notre concept résulte de la conviction qu’il est légitime d’influencer, comme tentent de le faire les architectes du choix, le comportement des gens afin de les aider à vivre plus longtemps, mieux et en meilleure santé. Autrement dit, nous souhaitons que les institutions publiques et privées s’efforcent délibérément d’aiguiller les individus vers des décisions susceptibles d’améliorer leur qualité de vie. Au sens où nous l’entendons, une politique est « paternaliste » si elle s’efforce d’influencer les choix de façon à promouvoir les intérêts des gens, tels qu’ils les conçoivent eux-mêmes. Nous montrerons, en nous appuyant sur des découvertes confirmées des sciences sociales, que dans de nombreux cas, les individus prennent d’assez mauvaises décisions – qu’ils n’auraient pas prises s’ils y avaient consacré toute leur attention, s’ils avaient possédé une information complète, des aptitudes cognitives illimitées et une totale maîtrise de soi. Economie Publique Le paternalisme libertaire est une variété relativement bénigne et non intrusive du paternalisme : en effet, il n’enferme pas les gens dans des choix irréversibles, pas plus qu’il ne les pénalise en cas d’erreur. S’ils veulent fumer ou se gaver de sucreries, s’ils optent pour une couverture maladie insuffisante ou se refusent à épargner en vue de leur retraite, les paternalistes libertaires ne les contraindront pas à changer de comportement – ils ne mettront pas d’obstacles à celui qu’ils ont choisi. L’approche que nous recommandons doit tout de même être considérée comme paternaliste, car les architectes du choix, privés et publics, ne se contentent pas d’anticipe les décisions des individus ou de s’y conformer. Bien au contraire, ils tentent délibérément de les orienter dans des directions susceptibles d’accroître leur bien-être. Ils emploient la méthode douce, le nudge. Tel que nous les utiliserons, ces termes désignent tout aspect de l’architecture du choix qui modifie de façon prévisible le comportement des gens sans interdire aucune option ou modifier de façon significative les incitations financières. Pour être considérée comme un simple nudge, l’intervention doit pouvoir être évitée facilement et à moindres frais. Les nudges n’ont aucun caractère contraignant. Mettre les fruits à la hauteur des yeux des enfants, cela compte comme un nudge. Mais certainement pas interdire les snacks, confiseries et sucreries. Richard H. THALER & Cass R. SUNSTEIN, Nudge, la méthode douce pour inspirer la bonne décision. 2012 [2008], Vuibert Pocket, pp.23-25 Doc. n Vu depuis notre canapé... Les pauvres semblent enfermés dans le même type de problème que ceux qui nous affectent tous, notamment le manque d'information, des croyances infondées et la procrastination. Il est vrai que nous, qui ne sommes pas pauvres, sommes relativement plus instruits et mieux informés, mais la différence est faible car, au final, nous en savons en fait très peu, et certainement moins que nous l'imaginons. En réalité, notre avantage vient de tout ce que nous considérons comme évident. Nous vivons dans des maisons où arrive une eau propre et nous n'avons donc pas à nous souvenir chaque matin d'y ajouter du chlore. Nos eaux usées s'en vont d'elles-mêmes, sans que nous sachions exactement comment. Nous pouvons (généralement) faire confiance à nos médecins pour faire de leur mieux et nous pouvons nous en remettre au système de santé public pour déterminer ce que nous devons ou ne devons pas faire. Nous n'avons pas d'autre choix que de faire vacciner nos enfants -sans quoi les écoles publiques ne les acceptent pas- et même si, pour une raison ou une autre, nous ne le faisons pas, nos enfants seraient quand même en sécurité parce que tout le monde autour d'eux est vacciné. Nous recevons des bonus de notre assurance santé lorsque nous nous inscrivons à un club de gym, parce que nous ne le ferions pas sans cela. Et -ce qui est peut-être le plus important- nous n'avons pas, pour la plupart d'entre nous, à nous soucier de savoir comment nous allons nous procurer notre prochain repas. Autrement dit, nous avons rarement besoin de recourir à nos ressources limitées en discipline et en volonté, tandis que les pauvres sont obligés de le faire continuellement. Il est important de reconnaître que personne n'est assez sage, assez patient ni assez informé pour assumer la pleine responsabilité des décisions concernant sa propre santé. De même que les habitants des pays riches sont sans cesse entourés d'incitations invisibles, le but premier des politiques de santé dans les pays pauvres devrait être de rendre aussi facile que possible aux pauvres de bénéficier de soins préventifs et de réglementer la qualité des soins que les gens reçoivent. Etant donné l'extrême sensibilité des gens au prix, l'une des premières choses à faire est bien sûr d'assurer gratuitement des services de prévention, voire de récompenser les foyers qui y recourent et de faire si possible que cela devienne un choix naturel, une option par défaut. Il faut installer des distributeurs de chlore gratuits à proximité des sources d'eau ; récompenser les parents qui vaccinent leurs enfants ; donner aux enfants scolarisés des vermifuges et des compléments nutritionnels ; enfin, le réseau d'eau et les infrastructures sanitaires doivent faire l'objet d'investissements publics, en tout cas dans les zones densément peuplées. Il s'agit là d'investissements en santé publique et une bonne partie des sommes ainsi allouées engendreront des bénéfices bien supérieurs à leur coût, en termes de réduction des maladies et de la mortalité, ainsi que d'augmentation des salaires – les enfants qui sont moins souvent malades vont plus régulièrement à l'école et ont des revenus plus élevés à l'âge adulte. Nous ne devons pas supposer, cependant, que ces effets seront automatiques et ne nécessiteront aucune intervention. Le manque d'informations sur les avantages des différentes mesures et l'importance majeure que les gens accordent au présent immédiat limitent les efforts et les sommes que les gens sont prêts à consacrer à des stratégies préventives, même lorsqu'elles sont très peu chères. Et quand ces stratégies sont plus coûteuses, le problème financier se pose également. En ce qui concerne le traitement des maladies, le défi est double : s'assurer que les gens peuvent acheter les médicaments dont ils ont besoin […], mais aussi limiter l'accès aux médicaments dont ils n'ont pas besoin afin de prévenir le développement des résistances. Puisqu'il semble qu'il soit trop compliqué pour la plupart des Etats des pays en développement de contrôler qui s'établit comme médecin, la seule façon d'endiguer le développement de résistances aux antibiotiques est de limiter l'abus de médicaments puissants et sans doute de règlement strictement leur vente. Tout ceci peut paraître paternaliste -et, en un sens, ça l'est effectivement-. Mais il est facile de discourir sur les dangers du paternalisme et la nécessité d'assumer la responsabilité de sa vie depuis notre canapé, à l'abri de nos confortables maisons. Nous qui vivons dans les pays riches, ne bénéficions-nous pas à chaque instant d'un paternalisme aujourd'hui si ancré dans le système que nous ne le remarquons plus ? Non seulement il garantit que nous prenions soin de nous-mêmes mieux que si nous avions à décider seuls de tout, mais, en nous épargnant d'avoir à réfléchir sur ces questions, il nous fournit l'espace mental nécessaire pour nous concentrer sur le reste de notre vie. Cela ne nous rend pas quittes pour autant de la responsabilité d'éduquer les gens à la santé. Nous devons effectivement à tout le monde, y compris aux pauvres, une explication aussi claire que possible de l'importance de la vaccination et des raisons pour lesquelles un traitement antibiotique ne doit pas être interrompu avant la fin. Nous devons cependant reconnaître que l'information à elle seule ne suffira pas et en assumer les conséquences. Cela tient à notre nature humaine, que nous soyons pauvres ou moins pauvres. Abhijit V. BANERJEE & Esther DUFLO, Repenser la pauvreté, Seuil, 2011, pp.118-120 Economie Publique Doc. o le paradoxe de Condorcet Soit 3 électeurs devant choisir entre les alternatives entre G, C, D, dont les préférences individuelles obéissent à : Electeur 1 : Electeur 2 : Electeur 3 : G≻C≻D C≻D≻G D≻G≻C (électeur de gauche) (électeur de centre-droit) (électeur adverse au centre) Si on soumet au vote ces alternatives par paires, on obtient les relations de préférence collective suivantes : D’après Nicolas de CONDORCET, Essai sur l'application de l'analyse à la probabilité des décisions rendues à la pluralité des voix, 1785 Doc. p Le théorème d’impossibilité d’Arrow Pour être satisfaisante, une procédure de choix collectif doit respecter les conditions suivantes : - - condition d’universalité (U) : On doit pouvoir former des préférences collectives cohérentes à partir de n'importe quel ensemble de préférences individuelles cohérentes. La relation de préférences collective doit donc être transitive, complète, réflexive. condition de monotonie (M) : si tous les individus préfèrent y à x, alors la collectivité doit aussi préférer y à x. Il s’agit donc d’une condition d’unanimité, qui correspond à l’optimalité au sens de Pareto. condition d’indépendance (I) par rapport aux alternatives extérieures. La préférence collective entre x et y ne doit pas dépendre d’options extérieures. Condition de non-imposition (N) : le domaine des choix possibles ne doit pas être a priori restreint. C’est une condition de souveraineté. Condition de non-dictature (D) : il ne faut pas qu’un individu soit dictateur, c’est-à-dire que les préférences collectives répliquent ses préférences individuelles. On montre par l’absurde que ces cinq conditions ne peuvent être simultanément réunies. Une procédure de choix respectant les conditions U, M, I, N implique la présence d’un dictateur. D’après Kenneth ARROW, Choix collectif et préférences individuelles, 1951 Doc. q Le paradoxe du libéral parétien Soit 2 individus P et L et le livre L’Amant de Lady Chatterley. Qui va lire le livre ? On a 3 alternatives : X : aucun des deux ne lit le livre. Y : P lit le livre mais pas L. Z : L lit le livre mais pas P. Les préférences individuelles sont : P: X≻Y≻Z Le Puritain préfère que le livre ne soit pas lu, et pense que si le livre doit être lu, il vaut mieux que ce soit par lui que par le Libertin. L: Y≻Z≻X Le Libertin préfère que le livre soit lu, et plutôt par le Puritain que par lui. Comment dégager des préférences collectives ? Le critère de Pareto nous donne : Le critère du libéralisme exige que le choix entre deux alternatives qui ne se différencient que pour un individu revienne à cet individu. On ne peut pas décider pour autrui : Le critère du libéralisme appliqué à P nous donne : Le critère du libéralisme appliqué à L nous donne : D’après Amartya SEN, "The impossibility of a Paretian Liberal", Journal of Political Economy, 1972 Economie Publique Doc. r La justice sociale, une chimère ? L’égalité formelle devant la loi est en contradiction, voire incompatible, avec tout effort gouvernemental tendant à réaliser l’égalité matérielle ou concrète entre les hommes. En d’autres termes, toute politique qui veut mettre en pratique l’idéal de justice distributive doit mener tout droit à la destruction de la règle de la loi. Pour obtenir de gens différents des résultats identiques, il faut les traiter différemment. Offrir à des hommes différents la même possibilité objective c’est ne pas leur accorder la même chance subjective. On ne peut pas contester que la règle de la loi produise une inégalité économique ; cependant cette inégalité n’affecte pas particulièrement une catégorie de gens déterminée. Il est significatif et caractéristique que les socialistes (et les nazis) ont protesté contre la justice « purement » formelle, contre les lois qui ne tiennent pas compte de la situation matérielle des gens, tout en demandant la « socialisation du droit » et en attaquant l’indépendance des juges. Friedrich von HAYEK, La route de la servitude, P.U.F, 1993 [1944], p.63 Doc. s l’approche par les capabilités La liberté est précieuse pour au moins deux raisons distinctes. D'abord, plus de liberté nous donne plus de possibilités d'oeuvrer à nos objectifs – à ce que nous valorisons. Cela nous permet, par exemple, de décider de vivre comme nous l'entendons et de travailler aux fins que nous souhaitons promouvoir. Tel est ce premier aspect de la liberté : la possibilité d'accomplir ce que nous valorisons, quelle que soit la façon dont cela se produit. Deuxièmement, il est possible que nous attachions de l'importance au processus de choix lui-même. Nous voulons, par exemple, être certains de ne pas être mis dans telle ou telle situation en raison de contraintes imposées par d'autres. La distinction entre la dimension de possibilité et la dimension procédurale de la liberté a une importance certaine et des conséquences de très grande portée. Commençons par donner un exemple simple de ce qui les différencie. Kim décide, un dimanche, qu'il préfère rester chez lui plutôt que sortir se livrer à une activité quelconque. S'il parvient à faire exactement ce qu'il veut, nous appellerons cela le « scénario A ». Autre possibilité : des voyous font irruption dans sa vie, le traînent dehors et le jettent dans le caniveau. Cette situation terrible sera le « scénario B ». Dans un troisième cas de figure, le « scénario C », les voyous restreignent les mouvements de Kim en lui ordonnant de ne pas sortir de chez lui sous peine de dures représailles. On voit aisément que, dans le scénario B, la liberté de Kim est très compromise : il ne peut pas faire ce qu'il voulait (rester chez lui) et sa liberté de décider par lui-même a également disparu. Il y a donc violation à la fois de la dimension de possibilité de la liberté de Kim (ses possibilités se trouvent gravement réduites) et de sa dimension procédurale (il ne peut pas décider lui-même de ce qu'il va faire). Et le scénario C ? Manifestement, la dimension procédurale de la liberté de Kim est compromise (même s'il fait sous la contrainte ce qu'il aurait fait de toute façon, ce n'est plus lui qui choisit) : il ne peut pas faire autre chose sans être cruellement puni. La question intéressante concerne la dimension de possibilité de la liberté de Kim. Puisqu'il fait la même chose dans les deux cas, avec ou sans contrainte, peut-on dire que cette dimension est la même dans les deux scénarios ? Quand on juge les possibilités dont disposent les gens en se demandant uniquement si, en fin de compte, ils font bien ce que, hors de toute contrainte, ils auraient choisi de faire, on doit conclure qu'il n'y a aucune différence entre les scénarios A et C. Dans cette vision étriquée des « possibilités », la dimension de possibilité de la liberté de Kim n'est pas modifiée puisque, dans les deux cas, il peut rester chez lui, exactement comme il l'avait prévu. Mais cette conception reflète-t-elle convenablement ce que nous entendons par le mot « possibilité » ? Pouvons-nous juger les possibilités que nous avons sur le seul constat que nous nous trouvons, finalement, dans la situation que nous aurions choisie, sans nous demander s'il y avait ou non d'autres options de valeur que nous aurions pu choisir si nous l'avions voulu ? Pouvions-nous choisir d'aller faire une belle promenade ? Ce n'était pas l'option préférée de Kim ce dimanche-là, mais c'était une possibilité assez intéressante, sûrement préférable à la chute dans le caniveau. Et la possibilité de changer d'avis ? Ou, plus directement peut-être, la possibilité de choisir librement de rester chez soi, à distinguer de la possibilité de rester chez soi (et rien d'autre) ? Il y a ici une distinction entre les scénarios C et A, même en termes de possibilités. Si ces préoccupations sont sérieuses, il sembe plausible de soutenir que, dans le scénario C, la dimension de la possibilité de liberté de Kim est compromise aussi, bien que moins radicalement que dans le scénario B. […] La distinction entre les visions étroite et large de la possibilité se révèle tout à fait centrale quand nous passons de l'idée fondamentale de liberté à des concepts plus spécifiques, tels les capabilités d'un individu. Dans ce contexte, il nous faut nous demander s'il est bon d'évaluer la capabilité d'une personne de mener le type de vie qu'elle valorise à l'aune de la seule option qui s'est finalement concrétisée ou s'il vaut mieux recourir à une approche plus large qui tient compte de la procédure de choix, en particulier des autres solutions qu'elle aurait pu choisir, dans les limites de sa capacité réelle à le faire. Toute théorie concrète de l'éthique et de la philosophie politique, notamment toute théorie de la justice, doit choisir une base informationnelle, c'est-à-dire décider sur quels aspects du monde se concentrer pour juger une société et mesurer la justice et l'injustice. Il est particulièrement important, dans ce contexte, d'avoir une idée de la façon dont il convient d'estimer l'avantage global d'un individu ; par exemple, l'utilitarisme, inauguré par Jeremy Bentham, se concentre sur le bonheur ou le plaisir individuel (ou une autre version de « l'utilité individuelle »), car ce plan-là lui paraît le meilleur pour mesurer l'avantage d'une personne et le comparer à celui des autres. Une autre méthode, employée dans de nombreux travaux d'ordre pratique en économie, évalue l'avantage d'un individu à son niveau de revenu, de fortune ou de ressources. Ces exemples font apparaître le contraste entre les approches fondées sur l'utilité et les ressources, et l'approche par les capabilités, fondée sur la liberté. Amartya SEN, L'idée de justice, Flammarion, 2010, pp 281-284. Economie Publique Doc. t Quelle majorité ? Ce modèle résoud le problème de constitutionnalistes qui s’interrogent sur le seuil de majorité optimal pour prendre des décisions au sein d’une collectivité. Il s’agit de minimiser le coût de décision. Coûts de décision Or, le coût de décision se décompose : - En un coût interne qui correspond au coût des négociations, des efforts de persuasion pour convaincre la majorité. Ce coût est fonction du seuil de majorité : il est croissant et convexe. Coût total - En un coût externe qui correspond au coût infligé à la minorité. Ce coût est fonction du seuil de majorité : il est décroissant et convexe. Coût interne Coût externe 0 100 Seuil de majorité D’après James M. BUCHANAN et Gordon TULLOCK, The Calculus of Consent, Logical Foudations of Constitutional Democracy, 1962 Doc. u un exemple de logrolling Soit une collectivité locale qui examine deux projets de bien collectifs : une bibliothèque et une piscine. Supposons que les membres de cette collectivité se répartissent en trois groupes de taille identique : Lecteurs Nageurs Ni lecteurs ni nageurs Collectivité Bibliothèque 3 -2 -2 -1 Piscine -2 3 -2 -1 Un vote à la majorité rejetterait les deux projets, ce qui est d’ailleurs Pareto-optimal. Cependant, les lecteurs et les nageurs peuvent faire alliance pour renverser le vote. Doc. v Le cumul des mandats Laurent BACH, Faut-il abolir le cumul des mandats ?, 2012. http://www.cepremap.ens.fr/depot/opus/OPUS27.pdf Economie Publique Doc. w L’économie de la bureaucratie Ce modèle décrit les relations entre des politiciens bienveillants, c’est-à-dire qui cherchent à maximiser le bien-être collectif, et des bureaucrates opportunistes. Les bureaucrates aiment disposer d’un budget important, et aussi produire beaucoup. Cm, Um Soit un bien collectif G. Cm Son coût de production se représente par la courbe de coût marginal Cm. Son utilité pour la collectivité se représente par la courbe d’utilité marginale Um. La quantité optimale Gopt est telle que le coût marginal est égal à l’utilité marginale. C’est ce que souhaite produire des politiciens bienveillants. Um G Gopt Budget discrétionnaire Les politiciens ne connaissent pas bien le coût du bien collectif, en revanche ils en connaissent l’utilité. Ils sont donc prêts à verser aux bureaucrates un budget équivalent à l’utilité dégagée par le bien collectif. La production du bien collectif permet alors aux bureaucrates de dégager un budget discrétionnaire égal à la différence entre le budget qui lui est alloué et le coût de production du bien collectif. G Le budget discrétionnaire est donc maximal en Gopt. Gopt Budget Discrétionnaire courbe d’indifférence du bureaucrate Le bureaucrates valorisent à la fois le budget discrétionnaire et la quantité de bien collectif G. Ces deux « biens » sont pour lui imparfaitement subtituables. Il produira alors une quantité G* supérieure à Gopt. Il y a surproduction de bien collectif. Gopt G* G D’après William J. NISKANEN, « Deficits, Government Spending and Inflation : What is the Evidence », Journal of Monetary Economics, 1978 Doc. x Le concept de polycentrisme Le terme ‘polycentrique’ caractérise une situation dans laquelle de nombreux centres de prise de décision sont formellement indépendants les uns des autres. Qu'ils fonctionnent réellement de manière indépendante, ou au contraire forment un système interdépendant de relations, est une question empirique qui doit être étudiée pour des cas particuliers. Dans la mesure où elles se prennent mutuellement en compte dans leurs rapports de concurrence, entrent en relation dans divers engagements contractuels et coopératifs ou ont recours à des mécanismes centralisés pour résoudre leurs conflits, les différentes juridictions politiques d’une zone métropolitaine peuvent fonctionner d'une manière cohérente et selon des logiques de comportements d’interaction prévisibles. Dans la mesure où ces traits sont rassemblés, on peut dire qu’elles fonctionnent comme un ‘système’. Conférence donnée par Elinor OSTROM, ibid.