1
Les sciences physico-mathématiques dans l’arbre de la connaissance
1
Irène Passeron, chargée de recherches au CNRS
Le ton lourd et pénible de la vérité
Les historiens de la philosophie n’aiment guère le XVIIIème siècle, et en ce siècle, moins
encore les écrits trop littéraires au goût des philosophes, trop philosophes au goût des littéraires,
du géomètre et encyclopédiste D’Alembert. Philosophe géomètre, encyclopédiste mais pas
encyclopédique pour autant : si la réunion de ces qualificatifs n’a pas déjà incité à la fuite vers
des régions de la connaissance plus clairement balisées, il faut alors s’immerger dans l’exercice
épistémologique délicat qui consiste à penser l’articulation de ces catégories avec les
représentations du monde qu’elles tentent de structurer et de hiérarchiser. Dans l’œuvre de
D’Alembert, pas de "Système", ni même l’amorce d’un “Traité”, inversement, un regard sur le
monde "trop simple" peut-être, au regard de la complexité mise en œuvre, par exemple, dans la
pensée de Diderot. Certains de ses contemporains reprochaient à D’Alembert son "style
géométrique" et de vouloir, en dehors des matières proprement assujetties au règne de la raison,
"assujettir les fictions, les images, la hardiesse, les écarts de la poésie au ton lourd et pénible de
la vérité"
2
. C'est de ce mariage entre la complexité foisonnante du monde et la simplicité austère
de la rigueur mathématique dont il va être question ici, d’un point de vue historique, c'est-à-dire
en explicitant les termes du contrat, et en particulier le contexte de production des définitions
3
.
Seules les sciences physico-mathématiques seront évoquées, pour le rôle ambigu et néanmoins
central qu’elles jouent dans la classification des connaissances auquel D'Alembert s'est exercé
toute sa vie, et pour l’utilisation qu’il en fit, brièvement évoquée, mais indispensable à la
compréhension de sa pensée et de son épistémologie
4
.
I. Géométrie, mécanique et astronomie
L’examen du “Système figuré des connoissances humaines” de Diderot , qui clôt le
discours préliminaire de D’Alembert se heurte au premier coup d’œil à la position
marginale des “sciences physico-mathématiques” [voir fig. 1 et 2], dernière subdivision des
mathématiques en pures, mixtes et “physico-mathématiques”, lesquelles, contrairement aux
deux premières, ne contiennent aucune ramification. Avant même que d’aller quémander
explications auprès des auteurs, nous voilà obligés de gratter le palimpseste, et de remonter au
Prospectus de l’Encyclopédie, paru en octobre 1750, et rédigé par Diderot. Michel Malherbe a
montré très précisément à quelles variations de l’interprétation de Diderot et mieux encore à
quelles divergences entre Diderot et D’Alembert sur la place généalogique et ontologique des
mathématiques dans la connaissance, il fallait rapporter le statut ambigu du “physico-
1
Je tiens à remercier Anne-Marie Chouillet et François De Gandt pour nos discussions et pour
avoir organisé les tables rondes de Münster (“ D’Alembert et l’Encyclopédie ”, publiée dans
Recherches sur Diderot et sur lEncyclopédie, n°21, octobre 1996) et de Dublin (“ Le Milieu
du siècle : science et philosophie 1745-1755”)
2
Les trois siècles de la littérature françoise ou Tableau de l'esprit de nos écrivains depuis
François Ier jusqu'en 1773, [anonyme], 1774, abbé A. Sabatier, de Castres, cité par N.-L.-M.
Desessarts dans Les siècles littéraires de la France, 1800, t. 1, p. 23.
3
Quant au rôle même de la définition chez D’Alembert, voir Véronique Le Ru, Jean Le Rond
d’Alembert philosophe, Vrin, 1994.
4
L’édition des Œuvres complètes de D’Alembert, en 35 volumes, paraîtra aux Éditions du
CNRS à partir de 2001. Chacune des introductions historiques explicitera ce lien et ses
origines.
2
mathématique” vis à vis des mathématiques, des mathématiques mixtes et de la physique
générale et particulière
5
.
Partons donc plutôt de ce qui est sans conteste une préoccupation essentielle de D’Alembert,
“l’ordre généalogique des opérations de l’esprit”
6
, dont la déclinaison du “Discours
préliminaire” privilégie trois formes, la géométrie, la mécanique et l’astronomie : “Rentrés
enfin tout à fait dans le monde corporel, nous apercevons bientôt l’usage que nous pouvons
faire de la Géométrie et de la Mécanique, pour acquérir sur les propriétés des corps, les
connaissances les plus variées et les plus profondes. C’est à peu près de cette manière que sont
nées toutes les sciences appelées physico-mathématiques. On peut mettre à leur tête
l’Astronomie…”
7
Géométrie, Mécanique, Astronomie, trois domaines dans lesquels D'Alembert s'est distingué,
auxquels il faudrait ajouter en termes modernes l'analyse
8
, mais aussi très exactement le nom
des trois catégories de la classe mathématique de l'Académie royale des Sciences de Paris
9
.
Dans le système figuré des connaissances humaines, ce sont trois disciplines différentes,
hiérarchisées dans leur rapport à la certitude et aux faits. Nous allons donner quelques
passerelles qui permettent de circuler de ces sciences à la philosophie de D’Alembert, ou en
terme plus matériels, de naviguer entre les articles de l’Encyclopédie, les préfaces des ouvrages
de D’Alembert, leur contenu et cette œuvre au statut encore plus complexe, les Mélanges, à
proprement parler mélange de textes nouveaux, repris ou remaniés.
En effet, non seulement l’”Essai sur les éléments de philosophie” n’est pas un ouvrage à
proprement parler, puisqu’il constitue le quatrième volume de la seconde édition “revue,
corrie et augmentée très considérablement” des Mélanges de littérature, d’histoire et de
philosophie, non seulement l’historique de cette édition recoupe la crise de l’Encyclopédie, mais
son contenu même utilise, anticipe, complète, modifie d’autres textes de D’Alembert, écrits
dans d’autres contextes, en tant que préfaces de traités scientifiques ou parties constituantes du
Dictionnaire.
Que dit de l’objet de ces disciplines le texte le plus connu, le plus lu et le plus cité des
Mélanges, le “Discours préliminaire”
10
,? Que l’objet de la géométrie est de déterminer les
propriétés de l'étendue, simplement en tant que figurée et d'étudier le mouvement sans tenir
compte de l'impénétrabilité des corps. Cet examen utilise l'arithmétique et sa généralisation,
l'algèbre.
11
L’objet de la Mécanique est de déterminer les lois de l'équilibre et du mouvement,
les corps n'agissant les uns sur les autres qu'en tant qu'ils sont impénétrables.
12
. L'Astronomie,
en tête des sciences physico-mathématiques, consiste en l'usage de la géométrie et de la
mécanique pour acquérir des connaissances sur les propriétés de corps, joignant l'observation au
calcul. Elle est une quintessence de cet usage puisque D’Alembert la considère comme
5
“Mathématiques et Sciences physiques dans le “Discours préliminaire” de l’Encyclopédie,
Michel Malherbe, Recherches sur Diderot et sur l’Encyclopédie, Klincksieck, n°9, octobre
1990, p. 109-146.
6
“Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. xix.
7
“Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. vi.
8
L’analyse, au sens moderne du calcul différentiel et intégral, est une des formes de la
géométrie, dite transcendante ou sublime (article “Géométrie”, Encyclopédie, t. 6,
D’Alembert). Pour un exposé des apports physico-mathématiques de D’Alembert, voir
D’Alembert, Michel Paty, Les Belles-Lettres, 1998).
9
Le guide de recherches Histoire et mémoire de l’Académie des sciences, E. Brian et C.
Demeleunaere, Tec et Doc Lavoisier, 1996, décrit fort bien la constitution de l’Académie et sa
bibliographie.
10
Tellement connu que D’Alembert le reprend dans les Mélanges, avec quelques menues
modifications, voir la réédition faite par F. Picavet, Vrin, 1984.
11
“Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. v.
12
“Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. vi.
3
“l'application la plus sublime de la Géométrie et de la Mécanique réunies”
13
, et nous verrons
que D’Alembert ne pense pas en disant cela aux patients et minutieux relevés d’étoiles et de
planètes collationnés par des générations de Cassini. S’il faut entrer dans le texte des articles du
Dictionnaire pour voir cet enthousiasme à l’œuvre, la mise en garde est déjà présente : “ce n'est
donc point par des hypothèses vagues et arbitraires que nous pouvons espérer de connaître la
Nature, c'est par l'étude réfléchie des phénomènes…”
14
A cela, est subordonné la Physique générale, lorsqu’elle existe
15
et la Physique expérimentale
qui collectionne des faits. L’usage de ces faits dans le calcul, à fin d’interprétation de la Nature,
est toujours présenté par D’Alembert avec beaucoup de circonspection
16
, et ses mises en garde
sur l’abus de l'application de l'algèbre à la physique, prononcée dans de nombreux autres
contextes
17
.
Cette forme non systématisée de scepticisme est également présente dans sa présentation des
études sur la nature de l'homme, dont plutôt que de prescrire ce qu'il faut en dire, D’Alembert
préfère insister sur ce qu'il ne faut pas leur faire dire, si l'on applique une certaine rigueur de
pensée. Mais il ne faudrait pas croire le travail du géomètre se cantonne à l’autre extrémité de
l’échelle des certitudes, dans les sciences mathématiques : si “c'est à la simplicité de leur objet
qu'elles sont principalement redevables de leur certitude”
18
. (moins ces sciences s'appuient sur
les vérités d'expérience, plus elles sont marquées au sceau de l'évidence), elles ne peuvent faire
l’impasse sur la matérialité. Or, et c’est que réside la difficulté et l’intérêt du travail du
géomètre, objet matériel simple ne veut pas dire idée claire, alors que l'abstraction d'une idée est
garante de son évidence. Les vérités primitives sont quasi triviales, mais difficiles à distinguer.
La double et parfois complexe progression dans l’arbre de la connaissance doit être éclairée par
le philosophe : le bon cheminement intellectuel, celui qui pour D’Alembert éviterait les apories
et les vaines spéculations, alternerait ascension et descente des ramures au racines, le savant
éprouvant toujours d’un pied critique la solidité des branches que sont les liaisons causales et
méthodologiques, quitte à redéfinir ramures et racines : “l'esprit de systeme est dans la physique
ce que la metaphysique est dans la geometrie; s'il est parfois necessaire pour nous mettre dans le
chemin de la verité, il est presque toujours incapable de nous y conduire par lui-même”
19
L'“Explication détaillée du système des connaissances humaines” semble justifier que
D’Alembert ajoute une catégorie à la subdivision des mathématiques en pures et mixtes, le
“physico-mathématique”
20
, selon que l’on considère la quantité, objet des mathématiques “seule
ou indépendamment des individus réels, et des individus abstraits dont on en tenait la
connaissance” (mathématiques pures), “ou dans ces individus réels et abstraits” (mathématiques
mixtes), “ou dans leurs effets recherchés d’après des causes réelles ou supposées” (physico-
mathématiques). Dans ce sens, la géométrie fait partie des mathématiques pures car elle est
indépendante des corps, la mécanique (statique et dynamique ) fait partie des mathématiques
mixtes car on y considère la quantité dans les corps en tant que mobiles, de la même façon,
l'astronomie considère la quantité dans les mouvements des corps célestes, l'optique dans la
13
Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. vi.
14
Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. vi.
15
Michel Malherbe a mis en évidence que cest en cette articulation que se joue la cohérence
des constructions épistémologiques faites, dans le cas de D’Alembert sur la base d’une unité
de la science et du savoir marquée au sceau de l’efficacinewtonienne, dans le cas de Diderot
sur la continuité des schémas d’organisation du vivant, Recherches sur Diderot et sur
l’Encyclopédie
16
Le fameux scepticisme que met en scène Diderot dans le Rêve de D’Alembert. Voir le site
internet consacré à son étude :
17
Voir dans le présent recueil de textes, celui de V. Le Ru.
18
Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. viii.
19
Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. xxxi.
20
Discours préliminaire”, Encyclopédie, t. 1, 1751, p. xxxxix.
4
lumière, ce qui donne autant de subdivisions lorsqu'on mesure les effets : par exemple, la
théorie de la figure de la Terre est une science qui relève de l’astronomie, de la géographie
physique et de la mécanique, traitées d’un point de vue physico-mathématique
21
.
Mais cette distinction est trompeuse, car lorsque le lecteur entrait de façon plus détaillée dans le
contenu des articles, il était confronté à plusieurs hiérarchies des sciences, multiplicité de
lectures possibles de l’Encyclopédie dépassant les distinctions qu’avaient faites D’Alembert
dans le Discours préliminaire ”. Il faut maintenant entrer dans l'histoire de ce milieu de
siècle ”, en gardant présentes à l'esprit un certain nombres de questions que les premiers
ouvrages de D’Alembert, comme le Traité de dynamique, posaient sans les expliciter jamais :
qu'est-ce qu'un principe, qu'est-ce qu'une idée simple ? Questions pour lesquelles toute réponse
suppose l’analyse du champ des disciplines et de son éventuelle évolution, du rôle qu’y jouent
les mathématiques, et plus précisément du type de mathématiques convoquées et utilisées
comme substrat de cohérence.
II. Philosophie naturelle et gravitation
Il faut, pour commencer lever l’ambiguïté attachée au terme de “ philosophie naturelle ”,
dont on ne sait s’il est la traduction du terme utilisé par les anglo-saxons, Natural
Philosophy ”, dans un sens assez proche de Physics
22
, ou l’identification d’un contenu
23
,
absent sous ce nom du “ Système figuré ”, et plus généralement rare dans le vocabulaire
descriptif des sciences du XVIIIème siècle. La physique quant à elle, qu’elle soit
générale ou particulière est clairement distincte des mathématiques et ne peut recouvrir,
en France l’usage post-newtonien du terme Natural Philosophy dont on pourrait dire qu’il
recouvre les réflexions sur le mouvement et la matière ayant maille à partir, de façon plus ou
moins proche, avec des principes mathématiques . Si nous projetions de commencer un
inventaire des traductions possibles de Natural Philosophy ”, l’Encyclopédie nous offrirait
déjà une large palette de termes, loin d’être synonymes : philosophie naturelle n’est ni une
entrée ni une catégorie de l’arbre de la connaissance, mais science de la Nature ”,
physique ”, physique expérimentale ”, newtonianisme ou philosophie newtonienne ”,
philosophie mécanique & mathématique ”, mathématiques mixtes ”, sciences physico-
mathématiques ” seraient de bons candidats. Pas d’emploi généralisé du terme dans le corpus du
milieu du siècle, et déjà des singularités d’auteur : L’usage de Diderot n’est pas celui de
D’Alembert, ni même celui de Buffon.
Diderot, comme Montesquieu, utilise le terme de philosophie naturelle dans le sens
qui est le plus simple pourrait-on dire, c’est-à-dire le plus conforme à l’héritage baconien,
comme discipline prenant place à côté de l’histoire et des sciences morales, et comprenant aussi
bien la "philosophie expérimentale" que "la géométrie". Le point de vue de Buffon est plus
particulier, et pour notre propos, plus significatif, lorsque parlant de son tableau des époques
géologiques il dit " Et mes hypothèses fussent-elles contestées et mon tableau ne fut-il qu'une
esquisse très-imparfaite de celui de la nature, je suis convaincu que tous ceux qui de bonne foi
21
Entrée “Figure de la Terre du Dictionnaire, suivie, comme tous les autres articles, du
cheminement dans le “Système” qui y conduit ou du rameau auquel elle appartient. Ici :
Astron., Géog. Physiq., Méch.
22
Au XVIIIème siècle comme aujourd’hui, une interrogation rapide des bases de données
permet de constater que le champ de ces deux “ mots ”clés ” se recouvre.
23
S. Schaffer faisait justement remarquer dans son article Natural philosophy ”, The Ferment
of knowleldge, que les discours classés sous cette rubrique sont hétérogènes mais n’interrogeait
pas le déplacement opéré lorsque les catégories elles-mêmes évoluent.
5
voudront examiner cette esquisse et la comparer avec le modèle, trouveront assez de
ressemblance pour pouvoir au moins satisfaire leurs yeux et fixer leurs idées sur les plus grands
objets de la philosophie naturelle." Il est question ici d’une représentation du monde dont la
légitimité puise directement sa force dans une proximité avec des objets de connaissance
privilégiée, les grands objets de la philosophie naturelle ”. Ces grands objets sont explicités à
la fin du siècle par un attentif lecteur de D’Alembert, Laplace pour qui "rien n'est mieux
démontré dans la philosophie naturelle, que le mouvement de la Terre, et le principe de la
gravitation universelle, en raison des masses et [raison] réciproque des quarré des distances"
24
Laplace, comme D’Alembert, se désintéressait de l'examen de l'origine de cette gravitation pour
n’examiner que "la manière dont le principe de la gravitation a été employé par les géomètres".
Je vais donc décrire rapidement la trame des discours et des pratiques qui ont fait de
l'attraction universelle le cœur du travail de la philosophie naturelle, et ce dans l’univers
académique continental. Cette philosophie naturelle, qui est pratiquée par des géomètres
D’Alembert, Clairaut, Euler– et non par des philosophes naturels - ce que pourrait être le
Buffon auteur des “ époques de la nature ”. est intimement liée à une pratique mathématique qui
n’est que partiellement celle des Principia. Cet usage renvoie souvent la physique au peu de
fiabilité de ses développements spéculatifs, à sa manie de tout expliquer
25
. et valorise au
contraire les sublimes recherches mathématiques des Principia, résumant la cohérence
probatoire du système du monde newtonien en ces termes : le grand principe sur lequel est
fondé toute cette philosophie, c’est la gravitation universelle
26
Insistons sur le fait que nous suivons le fil tiré par D'Alembert au long des renvois de
l’Encyclopédie, repris ou anticipé dans ses traités de mécanique céleste ou des fluides, explicité
dans les Eléments de philosophie, et se développant avec une relative indépendance vis à vis des
nombreuses autres acceptions, et même des autres utilisations du terme newtonianisme en
France, pour d'autres types d'attractions ou de débats que D’Alembert rejette dans les limbes du
momentanément indécidable
27
. D’Alembert recentre la philosophie naturelle (“ voyez Soleil,
Lune, Planète, Comète, Terre, Milieu, Matière ” dit l’article “ Philosophie newtonienne ”) sur ce
qui est fait à partir de la gravitation universelle. La force de son propos tient à ce qu’il possède,
lorsque paraissent les Eléments de philosophie, toutes les preuves nécessaires à sa conviction et
à celle des ses lecteurs, et qu’il s’agit d’un moment clé de construction de sa pensée, sans qu’il
éprouve le besoin de lui donner la forme d’une synthèse cohérente et fermée.
III. 1757, La crise de l’Encyclopédie - 1759, les Mélanges
D’Alembert a énon des propositions, mathématiques ou épistémologiques continuellement
réajustées, dont il aimait donner immédiatement le dernier état à imprimer, quitte à bousculer
quelques convenances éditoriales. Il faut donc avoir présent à l’esprit la chronologie de ses
publications, historique auquel les volumes de l’Encyclopédie n’échappent pas, et le lien
permanent avec les recherches mathématiques qu’il menait de front - lesquelles ne s'arrêtent pas
24
Laplace, Exposition du système du monde,1796.
25
Voir l’article de V. Le Ru dans le présent recueil qui s’ouvre en citant le texte extrait de
l’Essai sur les éléments de philosophie, chapitre XX, Physique gÉnÉrale ”, Paris, Fayard, pp.
184-185, exemple identique à celui illustrant cette manie de tout expliquer dans l’article
Physique ” de l’Encyclopédie, XII, 539a-540a, 1765.
26
Encyclopédie, “ Newtonianisme ou philosophie newtonienne ”, XI, 122b-123b, 1765.
27
D’Alembert répète sans cesse dans l’Encyclopédie qu’il faut se méfier des applications de la
géométrie (article “ Applications ”) et savoir attendre et douter (article “ Figure de la Terre ”).
1 / 9 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !