« Histoire politique des
combats jaurésiens.
Une approche de la
République en France »
suivi de la visite de
l'exposition du Panthéon
« Jaurès contemporain
1914-2014 »
« Une part d'aventure dont il faut
d'emblée accepter le risque » (3 mai 1914)
Vincent Duclert
Enseignant-chercheur à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (CESPRA)
Inspecteur général de l’Education nationale (groupe Histoire-Géographie)
Introduction
Remerciements à Mme Valérie Dautresme, IA-IPR de l’Académie, et à l’équipe des
Inspectrices présentes.
Présence dans deux lieux directement liés à Jaurès, le lycée Louis-Le-Grand et le
Panthéon. Remerciement à l’équipe de direction du lycée et au proviseur Michel
Bouchaud.
Plaisir de rencontrer et de dialoguer avec des professeurs de la voie générale,
technique et professionnelle de l’académie de Versailles (ancien professeur du lycée
« Jules Ferry »
1
de Conflans Sainte-Honorine et du lycée « Les Pierre-Vives » de
Carrières-sur-Seine).
Mention de l’importance pour un professeur d’histoire, de géographie et d’éducation
civique de se composer son corpus de « bons » textes et documents (images) pour la
classe.
Cet après-midi reposera sur cette perspective de constitution de corpus pour la classe
et l’enseignement, à partir de la thématique croisée « Jaurès-La République »
2
Jaurès et les combats républicains dans les programmes
-scolaires (programmes d’enseignement : histoire, éducation civique et morale) et
dans l’éthique professionnelle (réflexion sur le métier)
-au croisement des deux, savoirs et pratiques : la question de programme du capes
Citoyenneté, République, démocratie en France, 1789-1899 »), agrégations et
agrégation interne ( ? 2016), mais aussi la question aux ENS (« Culture et politique
en France, 1870-1940 »)
Mode d’emploi de ce fichier :
Les textes et documents proposés ici sont à la disposition des professeurs qui
peuvent sans difficulté les extraire de ce fichier.
1
Deux de mes élèves de Terminale B dans ce lycée, devenues professeures, étaient présentes à cet
après-midi, ce qui ne peut que faire plaisir à un enseignant se souvenant de ses débuts au milieu de ses
classes.
2
Les textes proposés ici à la discussion proviennent du recueil Jean Jaurès. La République, édité par
Vincent Duclert, Toulouse, Privat, 2014. Ces textes sont libres de droits.
Plan
I. Jaurès comme inspirateur de pédagogie (des savoirs pour enseigner)
II. Enseigner la République avec Jaurès
Enseigner l’œuvre républicaine de Jaurès et la contribution de cette dernière à
la compréhension de la République (des savoirs à enseigner)
III. Enseigner la publique avec la postérité de Jaurès : l’exposition du
Panthéon
S’intéresser à la postérité de Jaurès pour comprendre la fabrique d’une
mémoire iconique et les imaginaires sociaux de la République, en conséquence
mieux comprendre la République aux XXe et XXIe siècles, dans les temps et les
espaces où se déploie cette mémoire de Jaurès (des savoirs à construire).
ANNEXES
(1) Discours à la jeunesse, lycée d’Albi, 30 juillet 1903
(2) Jaurès. Penser la guerre, défendre la République
(3) Chronologie
(4) Portraits de républicains par Jaurès
I. Jaurès comme inspirateur de pédagogie (des
savoirs pour enseigner)
Jaurès dans la réflexion sur la pédagogie et sur le métier d’enseignant et
d’enseignant d’histoire, de géographie et d’éducation civique (des savoirs singuliers
puisqu’ils concourent à la formation de la conscience publique des élèves).
Ses conseils ont encore une signification pour aujourd’hui même, à condition
toutefois de ne pas s’arrêter à l’expression un peu datée (importance cependant de
travailler l’expression écrite et orale avec les élèves en prenant comme exemple la
pratique de Jaurès, son sens de la formule, de l’image).
Aux instituteurs et aux institutrices
« Aux instituteurs et aux institutrices », La Dépêche, 15 janvier 1888. Lui-même
professeur et pénétré de l’idéal de l’école de République, Jaurès s’adresse à ceux et
celles qui construisent l’avenir en éduquant la jeunesse.
Il ne faut donc pas craindre de leur parler avec sérieux, simplicité et grandeur. Je dis
donc aux maîtres pour me résumer, lorsque d'une part vous aurez appris aux enfants
à lire à fond, et lorsque d'autre part, en quelques causeries familières et graves, vous
leur aurez parlé des grandes choses qui intéressent la pensée et la conscience
humaine, vous aurez fait sans peine en quelques années œuvre complète
d'éducateurs. Dans chaque intelligence il y aura un sommet, et ce jour-là bien des
choses changeront.
Apprentissage de la lecture et enseignement des « grandes causes » (Jaurès), soit
responsabilité envers les programmes et liberté des enseignants, deux valeurs
professionnelles rappelées en préambules des programmes aménagés en 2013.
Démarche philosophique de l’enseignement, enseignants intellectuels
Que sont ces grandes choses ? Qui les enseignent ?
S’élever aux questions supérieures
« La neutralité religieuse à l’école », La Dépêche, 23 juin 1889. La neutralité de
l’école publique ne s’oppose pas à un enseignement philosophique chargé d’éclairer
les consciences individuelles. Il est même indispensable selon Jaurès.
Mais voici un grand problème : est-ce que la neutralité, est-ce que le respect absolu
de toutes les croyances et de toutes les consciences interdit à l’instituteur de s’élever
aux questions supérieures ? Peut-il ou ne peut-il pas, sans manquer à la neutralité,
traiter devant les enfants ces grandes et nécessaires questions : y a-t-il un Dieu et
quel est ce Dieu ? Qu’est-ce que l’âme, qu’est-ce que l’esprit ? D’où vient le monde
et va-t-il? Quelle est sa marche ? Est-il en progrès ou tourne-t-il éternellement
dans le même cercle ? Est-il conduit par la bonté vers la justice et vers la vie, où est-
il conduit par le hasard vers le hasard? Certes, il serait terrible pour les maîtres de
l’enfance d’être obligés de renoncer à ces problèmes. Nous ne nous apercevons pas
trop, dans la fièvre de progrès social et matériel qui nous travaille, de la place que
ces problèmes tiennent dans la vie ; mais la démocratie militante elle-même ne
tardera pas à la sentir. Pour moi, j’ai la conviction absolue, non seulement que ces
problèmes s’imposent, mais qu’ils peuvent être rendus accessibles au peuple et aux
enfants mêmes. L’enseignement public serait singulièrement amoindri s’il n’y
pouvait toucher. Mais est-ce donc impossible, et le respect de la liberté est-il à ce
prix ?
Ah ! oui, si toutes ces choses devaient être enseignées au nom de l’Etat comme des
formules officielles de vérités absolues, comme des dogmes nouveaux ; si les
enfants étaient dressés à s’incliner devant elles comme devant un nouveau
catéchisme, à les murmurer tête basse comme des articles de foi ; oui, il y aurait
atteinte à la liberté ; mais c’est ici que la méthode générale de l’enseignement laïque
trouve sa plus belle application et sa plus belle récompense.
Quelle est cette méthode ? C’est de ne faire appel en toutes choses qu’à la raison et à
la liberté de l’enfant. S’agit-il de science ? Le maître s’applique à mettre l’enfant en
état de vérifier lui-même les résultats obtenus. S’agit- il de morale ? Le maître aide
l’enfant à retrouver dans les inspirations naïves de sa conscience les principes
supérieurs de la conduite humaine.
Par là, l’enfant, jusque dans les vérités qui ne sont pas sujettes à contestation, a le
sentiment de sa liberté ; il comprend ce qu’est la libre recherche de la raison
humaine avec ses chances d’erreur et ses moyens de certitude. Dès lors, le maître
peut s’adresser à des enfants ainsi préparés et leur dire : « Il n’y a pas seulement ces
questions d’arithmétique et de physique, où les mains et les yeux peuvent vérifier ce
que trouve l’esprit ; il n’y a pas seulement ces questions de morale toutes les
consciences sont spontanément d’accord; il y a d’autres questions plus importantes
en un sens, mais les hommes ne sont point d’accord, parce qu’elles ne tombent
pas sous les yeux, et parce qu’il ne suffit pas d’avoir bon cœur pour les résoudre.
Peut-être, à force de chercher en toute liberté et en se respectant les uns les autres,
les hommes finiront-ils par s’accorder dans quelques grandes croyances sur le
monde et sur l’esprit. En attendant, cherchons ensemble ; vous pouvez m’aider
comme je peux vous aider, car toute âme humaine porte en soi des lueurs d’infini.
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