le mystère de l’Église. Toute tentative d’opposer ces approches ou de valoriser une au
détriment de l’autre trahit les intentions mêmes du Concile
.
Depuis le Synode des évêques de 1985, qui a identifié le thème de la communion
comme l’intuition majeure de l’ecclésiologie de Vatican II, la théologie de l’Église
comme peuple de Dieu a été quelque peu négligée.
Certains ont délibérément évité
d’y recourir par crainte qu’elle n’entraîne une fausse démocratisation de l’Église.
Kenan Osborn a noté une tendance, dans le discours post-conciliaire, à utiliser le
terme « peuple de Dieu » d’une manière incorrecte, comme désignant d’une manière
exclusive les laïcs, ou pour faire contrepoids à la hiérarchie. Voilà qui contredit
clairement l’intuition conciliaire sur le peuple de Dieu comme matrice commune de
tous les baptisés qui ont part, de différentes manières, aux tria munera, la mission
sacerdotale, prophétique et royale du Christ.
Je soumets à votre attention qu’il nous
faut travailler encore pour recevoir plus pleinement, dans notre théologie et dans notre
pratique, cette intuition du concile Vatican II.
Il nous faut nous approprier d’une manière plus adéquate la théologie du peuple de
Dieu afin d’approfondir notre appréciation de la dignité égale de tous les chrétiens
baptisés et de jeter les bases d’une évaluation correcte de leurs différents charismes.
Alors que Vatican II invitait les ministres ordonnés à se redécouvrir comme frères de
ceux qui sont l’objet de leur ministère
et comme membres, comme eux, du peuple de
Dieu, il ne semble pas que cette conscience ait vraiment pénétré profondément dans la
culture du clergé. Peut-être avons-nous besoin d’une théologie du ministère enracinée
plus solidement dans une théologie du peuple de Dieu et du sacerdoce universel de
tous les baptisés. Une telle réflexion se centrerait davantage sur la complémentarité
des dons et sur la nécessaire collaboration de tous les fidèles à la mission de l’Église.
Nous avons commencé à soulever quelques questions ecclésiologiques vraiment
fondamentales : qu’est-ce qui constitue une communauté chrétienne ? Et nous avons
commencé à réfléchir à quelques éléments fondamentaux constitutifs de la vie
ecclésiale : la présence et l’action de l’Esprit, la place centrale de la Parole de Dieu, la
célébration de l’eucharistie, le besoin de ministères diversifiés pour habiliter la
communauté à discerner l’Esprit de Dieu, à écouter la Parole de Dieu et à la
proclamer, à être nourrie et à rendre grâce dans la grande prière de louange de
l’Église. Nous avons identifié un besoin de repenser notre théologie et nos structures
du ministère, particulièrement en ce qui concerne la relation entre le ministère
Joseph A. Komonchak, “The Significance of Vatican Council II for Ecclesiology” in The Gift of the
Church. Publié par Peter C. Phan (Collegeville: Liturgical Press, 2000) 69-92, at 76-77. Cf. Acta
Synodalia Sacrosancti Concilii Oecumenici Vaticani II, Vol. 3:1 (Typis Polyglottis Vaticanis, 1973)
209-210.
Pour une réflexion plus poussée, voir José Comblin, The People of God. Edited and Translated by
Phillip Berryman (Maryknoll, NY: Orbis, 2004). Original version: Povo de Deus (Sao Paulo: Paulus
Editora, 2002).
Voir Ministry: Lay Ministry in the Roman Catholic Church: Its History and Theology (New York:
Paulist Press, 1993) 531-533. Comme cette intuition-clé du Concile a été vite oubliée ! « Tout ce qui a
été dit sur le peuple de Dieu s’applique également aux laïcs, aux religieux et aux clercs ». “Dogmatic
Constitution on the Church” in Norman P. Tanner, ed. Decrees of the Ecumenical Councils (London:
Sheed &Ward / Georgetown: Georgetown UP, 1990) par. 30, 874.
“Au milieu de tous les baptisés, les prêtres sont des frères parmi leurs frères, membres de l’unique
Corps du Christ dont la construction a été confiée à tous”. Décret sur le ministère et la vie des prêtres,
9.