Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-1 Chapitre 8 : la valeur des actifs = Annexe au Chapitre 1 d’Analyse de l’intermédiation financière Références : Hull (2009) Risk Management and Financial Institutions : Chap 1 ; Levasseur M. et Quintart A.(1992), Finance, Economica (2ème Ed.) ; Siaens A., monnaie et Finance, 2ème E., De Boeck 1988. PEROLD, André F. (2004) « The Capital Asset Pricing Model” Journal of Economic Perspectives, 18, 3 (Summer), 3-24, BROQUET, COBBAUT, GILLET, van den BERG (1997) Gestion de Portefeuille (3e Ed.), De Boeck, 478 pp. 8.1. Actifs monétaires 8.1.1. Valeur future a) versement initial unique Le rendement d’un placement est déterminé par sa valeur future. Si nous plaçons M aujourd’hui à un taux d’intérêt annuel constant i et pour un nombre d’années n, la valeur future du placement vaut : V .F . M (1 i ) n (8.1) si le placement dure un nombre entier d'années. Si le nombre d'années n'est pas entier, on remplace n par le nombre de fractions d'années (7 trimestres : z=7/4) que dure le placement. Mais si le taux d’intérêt est versé à terme bisannuel, mensuel, hebdomadaire,… alors on utilise la formule des intérêts composés : V .F . M (1 i nm ) m (8.2) où m est le nombre de fois dans une année que l’intérêt est payé et n est le nombre d'années entières que la somme a été placée au taux i. Si la durée du placement n'égale pas un nombre entier d'années on remplace nm par z ou z est le nombre de fractions d'années que dure le placement. Et si le versement des intérêts est continu, la valeur future du placement devient : V .F . Me in étant donné que lim m (1 (8.3) i nm ) ein m Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » Notons l'importance du rythme de versement de l'intérêt. La valeur des actifs 8-2 Si l'intérêt est versé plusieurs fois par an, il est possible d'accumuler des intérêts sur l'intérêt versé dans les premières fractions de l'année. Un taux facial de 10% par an versé par quart chaque trimestre (taux trimestriel de 2,5%) permettra d'accumuler au bout d'un an plus de 10 centimes par franc investi au début de l'année. Ainsi, au bout d'un an, le taux d'intérêt annuel effectif k, issu d'un taux facial i payé m fois dans l'année sera i k 1 m m 1 Notons l'importance de la formule de l'intérêt composé (V.F.) et distinguons-la de l'intérêt simple ou linéaire (V.L): V.L. = M (1+ z(i/m)) où z est le nombre de fractions m d'années écoulées (z peut être plus grand que m). Un graphique peut illustrer la différence entre la forme exponentielle de l'intérêt composé (on obtient des intérêts sur l'intérêt annuel déjà obtenu) et la forme linéaire de l'intérêt simple (on obtient autant de fois l'intérêt qu'il y a d'années de placement). Valeur V.F.=M(1+i)z V.L.=M(1+z(i/m)) M temps = z 1 an b) placement répété Une accumulation d’une annuité constante (épargne constante) est le cas où pendant une certaine période (nombre d’années n), on fait un placement constant et on réinvestit automatiquement les intérêts qu’il rapporte. La valeur future d’une annuité A se définit de la manière suivante (Levasseur et Quintart, p.313) et est déduite d’une suite géométrique (cfr. Partie VIII) : n (1 i ) n 1 VFA1 A1 (1 i ) nt A1 i t 1 (8.4) Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-3 Voici un exemple concret d’une annuité de 10 000FB avec un taux d’intérêt annuel de 6% : Schéma 8.1 : représentation de l’accumulation d’annuités constantes, n=3 Temps 0 Année 1 Temps 1 Temps 2 Année 2 10 000FB Temps 3 Année 3 10 000FB 10 000FB 10 000 = 10 000 (1+0.06)° 10 600 = 10 000 (1+0.06) 11 236 = 10 000 (1+0.06)² (1 0.06)³ 1 31836 10000 0.06 Si l'objectif de l'épargnant est d'atteindre une valeur future précise au bout de n années et qu'il désire connaître le montant A à épargner chaque année et à placer au taux i, il peut calculer A à partir de 8.4. comme A1 VFA1 i (1 i ) n 1 (8.5) Et le rendement d’un placement se mesure de la façon suivante : (valeur future valeur actuelle) valeur actuelle (8.6) Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-4 8.1.2 Valeur présente a) versement final unique La valeur présente se déduit facilement de ce que nous venons de voir ci-dessus (cfr. équation 8.2): V .F . M (1 i nm ) V .P. m V .F . M i (1 ) nm m (8.7) b) versement répété La valeur présente d’une annuité constante (cfr. 8.4) versée pendant n périodes (du point de vue du débiteur) ou perçue pendant n périodes (du point de vue du créditeur) c’est à dire d’une annuité replacée au taux i jusqu’au versement de la tranche n est : n VP2 t 1 A2 1 (1 i) n A 2 i (1 i) t (8.8.a.) Pour connaître le montant A que l'on doit verser chaque année pendant n années compte tenu d'un taux i, on trouve A dans (8.8.a). Par exemple, le remboursement fractionné par annuités constantes de l’emprunt VP2 est : i (8.8.b) 1 (1 i ) n Enfin, si ce versement du type A2 est une perpétuité P, sa valeur actualisée est : A2 VP2 VP2 t 1 P P t i (1 i) (8.8.c) La partie 8 sur les séries géométriques donne une solution pour passer des sommes finies ou infinies aux formules présentées ici. Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-5 8.2 La valeur d’une obligation Comment évaluer une obligation coupon zéro ? Ce type d’obligation ne comporte pas de coupons et donc, le seul flux est le flux final lorsque l’obligation tombe à échéance. Il suffit de savoir combien un investisseur va accepter de payer pour recevoir un montant nominal Ft à l’échéance. Cela dépendra de l’horizon qu’il reste à courir et du taux d’intérêt que l’investisseur exige : Ft (1 rt ) t Ce qui devient en temps continu : P0 (8.7' ) P0 Ft e rt (8.9) Quant aux obligations avec coupons, elles sont évaluées de la manière suivante et leur valeur correspond à la valeur actualisée des flux futurs attendus : P0 C C C M ... 2 n (1 r1 ) (1 r2 ) (1 rn ) (1 rn ) n (8.10) Ou n C M t (1 rn ) n t 1 (1 rt ) Avec n = le nombre de périodes ; P0 (8.11) C = le payement périodique du coupon ; r = le rendement exigé correspondant à la période et à l’horizon (maturité) ; M = la valeur faciale (nominale) ; t = la période considérée. Dans certains cas, le temps restant ne correspond pas exactement avec la fréquence d’une année. Dès lors, la formule d’évaluation du prix d’une obligation devient (la fraction d'année est notée v): n P t 1 C M t 1 v (1 r ) (1 r ) (1 r ) (1 r ) n 1 v (8.12) Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-6 8.3 la valeur d’une action A- DDM Le Dividend Discount Model ou modèle des dividendes actualisés est une première manière d’évaluer le prix d’une action. Il part du principe que les actions ne génèrent que deux sortes de flux : les dividendes versés à intervalles réguliers et le flux monétaire issu de la vente de l’action. Le prix d’une action est donc la valeur actualisée des flux futurs attendus pour une année : E ( D1 ) E ( P1 ) 1 k avec k = le rendement exigé par l’investisseur. P0 (8.13) Mais nous pouvons substituer E(P1) par sa valeur et ainsi de suite et nous obtiendrons : P0 E ( DN ) E ( D1 ) E ( D2 ) ... ... 1 k (1 k )² (1 k ) n (8.14) Dès lors, il n’est plus nécessaire de connaître le prix futur mais il faut simplement évaluer les dividendes futurs. Si ceux-ci ne sont plus constants mais croissent à un taux g, on obtient : E ( D1 ) E ( D1 )(1 g ) E ( D1 )(1 g ) 2 E ( D1 )(1 g ) N 1 ... ... 1 k (1 k ) 2 (1 k ) 3 (1 k ) N Et si on simplifie cette suite géométrique, on a (cfr. Partie VIII avec a = (1+g)/(1+k)) : P0 1 g 1 E ( D1 ) 1 k P0 kg 1 k 1 k (8.15) N (8.16) Et si N et que nous imposons g<k1, alors : P0 E ( D1 ) kg Condition mathématique d’existence d’une solution finie ou non-négative. L’interprétation économique de la condition dit que g<k correspond à la situation d'"efficience dynamique". Si g>k, il serait préférable de consommer plutôt que d'épargner (investir) : le produit des facteurs en place croît plus vite que ce qu'y ajoute du capital supplémentaire : la valeur présente du produit de l'épargne (consommable dans le futur) est moindre que celle de la consommation immédiate! Pour un titre particulier g>k semble cependant parfois être observé. 1 Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-7 Généralisons et nous avons : Pt E ( Dt 1 ) kg (8.17) Le rendement hors dividende d’une action ou taux annuel de plus-value devient alors : Ri ,t Pt 1 Pt E ( Dt 2 ) E ( Dt 1 ) g Pt E ( Dt 1 ) (8.18) Les actions qui présentent un cours plus élevé (bas) que celui évalué par le modèle DDM (cfr. 8.17), seront vendues (achetées). Illustration : la bourse japonaise de 1980 à 1997. La baisse du taux de croissance de l’économie a fortement influencé le cours des actions (graphique 8.1 : extrait du Financiële Economische Tijd du 30/10/97). B- La méthode Price / Earning Imaginons d’abord que le dividende égale le bénéfice net de l’entreprise (earning) par action. A partir du prix d’équilibre (8.17), nous avons : Pt 1 E ( D) k g (8.19) Prenons pour exemple la société ABC qui offre un dividende de 100 sur des actions dont le rendement exigé par l’investisseur est de 10% et dont la croissance attendue est de 5%. Le prix, d’après la méthode DDM, est : P D 100 100 2000 k g 0.1 0.05 0.05 Dès lors, le Price /Earning ratio est : 2000/100 = 20. Donc si P/E > 20, la société ABC est surévaluée, sinon elle est sous-évaluée. Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-8 Distribution (dividendes et profits) : Tous les profits ne sont pas distribués. Alors E=D/d où d est le "payout rate"2. La méthode price-earning donnera, pour un même taux de croissance et taux d'actualisation, un P(E) plus élevé que la méthode dividend discount, mais ceci est justifié par l'attente de plus-values réalisable sous une autre forme qu'un dividende ordinaire. P(E) D/ d P(D)/ d P(D). k g P / E 0 k P / E 0 g Pour une entreprise dont les bénéfices sont constants g=0. Le "Price/Earning" est alors l'inverse du rendement exigé (P/E = 1/k). Donc si k=5%, P/E=20. Une hausse des taux d'intérêt qui porte k à 10%, ramène le P/E à 10, une chute de cours de 50% (et une hausse des taux k de 2.5 à 5% fera aussi chuter les cours de bourse de moitié). Normalement, le taux de croissance des bénéfices doit être au moins égal à celui du PIB et l'intérêt réel d'un placement sans risque doit être comparable au taux de croissance du PIB. Donc le rendement exigé d'un placement risqué sera normalement supérieur au taux de croissance du PIB. Actions de « croissance » : Les actions dites de croissance ont un P/E ratio plus élevé que les autres à rendement exigé k égal (or le k des entreprises dites de croissance est souvent plus élevé car elles sont plus risquées)3. Evaluation du risque : Maintenant, nous allons donner une approche explicite du risque en présentant cidessous la méthode CAPM d’évaluation du prix des actions. La méthode permet d'intégrer deux composantes essentielles du risque : la volatilité des rendements d'une part, mais aussi leur corrélation avec d'autres rendements d'autre part. 2 Normalement 0<d,<1. Mais certaines entreprises distribuent un dividende une année o: elles ont fait des pertes, ceci est un "signal" de leur confiance dans un retour à meilleure fortune. Il faut prendre ici une vue "moyenne". 3 Pour les actions de croissance, certains analystes utilisent le rapport (Price/Earning)/Growth (PEG) au lieu de Price/Earning (P/E) et disent que le (P/E)/G ne peut dépasser 1. Ainsi, ils disent qu’un P/E de 40 n'est justifié que si une croissance de 40% est attendue (pour le prochain bénéfice et que les bénéfices suivants se maintiendront au moins à ce nouveau niveau). Un P/E de 100 n'est justifié que par un doublement des bénéfices (croissance de 100%). L'idée est que la hausse des bénéfices (la valeur actualisée du nouveau niveau de bénéfices) se reflète immédiatement dans le prix, comparé au bénéfice courant. C'est une sorte de limite à l'enthousiasme des acheteurs. Il est impossible d’imaginer une croissance permanente de 100% par an, ni même de 40% par an. Le g n’est pas d’application ici, le g s’applique à des croissances reproductibles chaque année : il reste donc de l’ordre du taux de croissance du PIB. Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-9 C - CAPM Référence : De Ceuster, Financiële Economie, syllabus TEW, chap.3 ; Siaens A., Monnaie et Finance, 2ème E., De Boeck 1988, chap.5. Levasseur et Quintart, Finance, 2e Ed., Economica, Chap. 6 PEROLD, André F. (2004) « The Capital Asset Pricing Model” Journal of Economic Perspectives, 18, 3 (Summer), 3-24, Le prix d’une action dépend d’un ensemble de variables. Il peut être évalué sur base du modèle « Capital Asset Pricing Model » (CAPM)4. “N’est véritablement risqué que le risque pour lequel il n’existe pas de diversification » « Ne mérite un rendement supérieur à la moyenne que celui qui prend un risque compte tenu des possibilités de diversification : la rémunération du risque ne compense pas la renonciation à la diversification, mais la renonciation à la sécurité » a) objectifs et hypothèses : objectif 1 : mesurer et choisir le risque et le rendement d’un portefeuille ; objectif 2 : calculer le rendement exigé (k) d’un titre risqué (une action) en vue de trouver le prix d’équilibre de ce titre en fonction du profit attendu et du rendement exigé ; ceci correspond à trouver son prix en fonction de son rendement attendu à l’équilibre des marchés financiers, de sa volatilité et de la corrélation de son rendement avec celui d’autres actifs, et en fonction du rendement alternatif sans risque, dans un contexte d’équilibre général des marchés financiers. Hypothèses : Les marchés sont efficients : ils intègrent toutes les informations disponibles (ou encore, tous les agents ont toutes les informations pertinentes). Il n’y a pas de coûts de transaction, ni d’impôts et les actifs sont divisibles. 4 Il existe un actif sans risque (par exemple, des obligations d’état à 1 an) de rendement RF. Levasseur et Quintart traduisent CAPM par MEDAF (Méthode d'Evaluation Des Actifs Financiers). Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-10 Les investisseurs maximisent leur utilité qui est fonction croissante du rendement attendu et décroissante de la volatilité de celui-ci (hypothèse « moyenne-variance »5). La volatilité étant mesurée par la variance du rendement attendu : R2 1 ( Ri ,t Ri ) 2 n t où Ri est le rendement moyen de l’actif i (ou portefeuille i). On supposera que le rendement d’un actif est entièrement distribué en fin de période ou entièrement capitalisé dans son prix. b) Volatilité et rendement d’un portefeuille Composition du portefeuille Commençons par imaginer un agent qui veut composer un portefeuille P et n’a accès qu’à deux actifs : un actif sans risque (variance = 0) indicé F et un actif risqué indicé i. On suppose Ri > RF. On peut composer un portefeuille P avec une proportion q d’actif sans risque et (1-q) d’actif risqué i. Si l’agent pousse l’audace jusqu'à emprunter au taux sans risque pour acheter des actifs risqués alors q <0. Voici les caractéristiques du portefeuille : son rendement attendu est : RP qRF (1 q) Ri (8.20) sa variance et son écart-type sont : P2 (1 q) 2 i2 (8.21) P (1q) i (8.21) Parce que RFt =RF,t et donc F = 0. La variance relative entre le portefeuille P et l’actif risqué i est : P2 (1 q) 2 i2 ou en termes d’écart-type : 5 P (1 q) i (8.22) Cette hypothèse correspond à une fonction d'utilité attendue particulière : la fonction quadratique. Pour une introduction à l'analyse critique de la spécification d'une fonction d'utilité attendue, voyez Eeckhoudt et Calcoen (198.), Eléments de Microéconomie, Bruxelles, De Boeck. Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-11 On peut alors présenter le rendement du portefeuille en fonction de sa volatilité relative et du rendement des 2 actifs ont il est composé. Ceci utilise la relation entre proportion d’actifs risqués dans ce portefeuille et l’écart-type relatif (substitution de la valeur de la proportion q trouvée en (8.22) dans l’expression de rendement (8.20)) : RP (1 P ) RF P Ri i i On peut réécrire : P ( R RF ) (8.23) i i Comme i est donné par les caractéristiques de l’actif i, il est exogène du point de vue de l’investisseur, de même que RF et Ri. RP RF Prime de risque et Ratio de Sharpe On peut alors trouver une relation entre rendement et risque du portefeuille. En effet, les portefeuilles que l’investisseur peut composer se trouvent sur une droite de pente (Ri-RF)/i dans l’espace rendement (RP), écart-type (P) comme le montre le graphique 8.2. Dans l’espace Volatilité / Rendement du graphique 8.2., l’expression (8.24) montre que la pente de la droite qui passe par les coordonnées du portefeuille P (membre de gauche) est la même que la pente de la droite qui passe par les coordonnées de l’actif risqué i (membre de droite). En outre, pour q=1 la même droite a l’intercept RF. Rp RF P qRF (1q)Ri RF R R i F (1q) i (1q) i (8.24) La pente (8.24) est appelée « Ratio de Sharpe ». Ce ratio donne la relation entre le rendement supplémentaire ou la prime de risque (RP – RF) exigés pour un portefeuille par rapport à la volatilité acceptée (P). Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-12 Graphique 8.2. : risque et rendement possibles d’un portefeuille Préférences d’un investisseur RP Rendement attendu du portefeuille Ri RF i = Ratio de Sharpe Ri Possibilités RF Portefeuille à levier (emprunt) q<0 i écart-type de i P écart-type du portefeuille Budget de l’investisseur et préférences Les portefeuilles possibles avec les actifs i et F sont sur une droite qu’on peut comparer à la droite de budget d’un consommateur. Ici on peut parler de droite de budget d’un investisseur. Cette droite a pour pente le Ratio de Sharpe et pour intercept RF. L’investisseur cherche le rendement et la stabilité (la réduction de volatilité). La courbure de ses courbes d’indifférence dit combien de rendement il demande en compensation d’un peu plus de volatilité. Selon ses préférences (position et courbure des courbes d’indifférence du graphique 8.2), l’investisseur choisira un point sur la droite des portefeuilles possibles. Il prêtera (q>0) ou empruntera (q<0) au taux sans risque et placera le reste dans l’actif i. Si l’investisseur détient uniquement l’actif i et fixe la proportion q à 0, son rendement espéré sera Ri>RF , il exigera la prime de risque de l’actif i. On distingue trois types de portefeuilles par rapport à l’actif i, à partir du rendement (8.20) : q>0 : RP-RF = (1-q) (Ri-RF) <(Ri-RF) q=0 : RP-RF = Ri-RF q<0 : RP-RF = (1-q) (Ri-RF) > Ri-RF Ces expressions donnent la prime de risque (RP-RF) de trois types de portefeuilles dans un monde à deux actifs F et i. Il est aussi intéressant de montrer la relation entre la proportion d’actif risqué (1-q) et la prime de risque du portefeuille. C’est ce que fait le graphique 8.3. La volatilité P croît avec ces rendements, comme au graphique 8.2. Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-13 RP-RF 8.24 Ri-RF 0 1 1-q Graphique 8.3. : proportion d’actif risqué et prime de risque c) Prime de risque : généralisation au « marché » Si nous prenons un portefeuille P quelconque, la relation (8.23) entre rendement et risque nous dit que son rendement attendu RP est supérieur au rendement sans risque RF d’un montant : RP RF 1 q RM RF (8.24) où RM est le rendement du marché des actifs risqués (qui remplace ici l’actif i). Le portefeuille qui se composerait uniquement d’actifs risqués du marché et aurait donc une proportion q = 0 d’actifs sans risque, aurait comme prime de risque : RM - RF (8.25) L’intérêt de ce dernier résultat est de montrer que la prime de risque du portefeuille est une fonction de la prime de risque du marché. Une prime de risque supérieure à celle du marché s’imposerait pour un portefeuille composé d’emprunts (q<0) au taux sans risque RF pour financer des placements au taux RM Il nous reste à préciser cette fonction pour un portefeuille (ou un actif) quelconque et pas seulement pour un portefeuille simple décrit par la proportion (q, (1-q)). Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-14 d) risque des titres et risque du marché (frontière efficiente de Markowitz) Le marché est composé de nombreux actifs risqués, chacun d'un rendement propre Ri et d'une variance propre, i2. Entre les rendements de chaque paire d'actifs, il y a une covariance cov(Ri,Rj) = ij. Nous voulons montrer qu'il est généralement avantageux de détenir un portefeuille diversifié d'actifs, au sens qu'un investisseur obtiendra un même rendement avec la diversification pour un moindre risque qu'avec un seul actif. 1e Etape : avantage de la diversification Diversification à 2 titres : Pour donner l'intuition de l'avantage de la diversification (mais pas de n’importe quelle diversification), imaginons un marché qui contient 2 actifs i et j, dans une proportion w, 1-w. Supposons en outre que les deux actifs ont le même rendement. Le rendement attendu de ce marché est RM = w Ri + (1-w) Rj = Ri = Rj (8.26 ) La variance du rendement du marché est M2 = w2 i2 + (1-w)2 j2 + 2 w(1-w) cov(Ri,Rj) (8.27) où cov(Ri,Rj) = ij = ij i j Notons que ij est le coefficient de corrélation entre les rendements des actifs i et j. Il apparaît particulièrement clairement que si cette corrélation (et covariance) est nulle, l'écart type du portefeuille sera inférieur à l'écart-type (identique) des deux actifs qui le composent puisque [w2 + (1-w)2] < 1. Si la corrélation est égale à 1, alors pour des variances égales, on a: M2 = w2 i2 + (1-w)2 j2 + 2 w(1-w) i j = (w+1-w)2 i2 = i2 . et les actifs i et j sont trop semblables pour permettre une quelconque diversification6. Cas particulier : Corrélation = -1 Dans le cas particulier où = -1, il est possible d’obtenir une volatilité nulle. C’est le cas de la couverture parfaite, par exemple, pour une entreprise européenne, la couverture 6 On peut aussi écrire la variance du rendement de marché (8.27) comme : M2 = [w i + (1-w) j ]2 - 2 w(1-w) (1-ij ) i j ce qui montre clairement le rôle de la corrélation entre i et j dans la détermination de la variance du marché. Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-15 d’une dette en dollars (achat de matières premières) par une créance en dollars (vente à l’exportation) de même montant et de même maturité. On vérifie aisément dans l’expression 8.27 que la pondération w = ½ donne ce résultat pour i = j. Plus généralement pour i = bj, la variance nulle sera obtenue pour w = 1/(1+b). Diversification à n titres et variance de marché : On peut généraliser l'argument pour la diversification à n titres. Pour simplifier, imaginons que chaque titre a le même poids dans le marché (Levasseur et Quintart p. 358359). La variance sera n n n (8.28) 2 2 / n2 / n2 M i ij i j i 1 i j j 1 On peut définir la variance moyenne des i titres comme i2 n i2 / n , i 1 et la covariance moyenne (compte tenu de la répétition de la somme n(n-1) fois) comme : n n / n2 . ij ij i j i j j 1 On obtient alors la variance du marché comme 2 2 /n n(n 1) / n 2 M i ij dont la limite quand n tend vers l'infini est égale à la covariance moyenne des titres du marché, soit ij . Le risque d’un portefeuille diversifié infiniment ne dépend pas de la volatilité i des actifs qui le composent mais seulement de la covarianceij entre ces actifs. « Le seul vrai risque est le risque pour lequel il n’existe pas de possibilité de diversification, c'est-à-dire de couverture par un risque opposé » 2e Etape : conditions de détention d’un titre quelconque Contribution à une réduction de volatilité Imaginons 2 titres, de variance identique7, mais de rendement différent Ri > Rj. A quelle condition l’investisseur acceptera-t-il de détenir ne fut-ce que quelques unités du titre j à rendement plus bas ? Le rendement d’une combinaison des deux titres sera : Ri > RM = w Ri + (1-w) Rj > Rj (8.26’ ) Ce qui, en soi, ne présente pas d’intérêt. Cependant, la variance sera : M2 = w2 i2 + (1-w)2 j2 + 2 w(1-w) ij i j (8.27”) Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-16 ce qui peut être plus petit que la variance de chacun des deux titres, en particulier si ij = 0. En effet [w2 + (1-w)2] < 1. Cette faible variance est intéressante pour composer des portefeuilles. Elle donne une droite de budget de l’investisseur qui passe par RM et M et qui est au-dessus des droites qui passent par les coordonnées chacun des actifs risqués individuels i et j (voir graphique 8.4.). Ajustement éventuel des rendements Si le titre j est tellement corrélé avec le titre i qu’il n’offre pas de possibilité de mélange M intéressant avec le titre i (toute combinaison des deux titres donne un rendement inférieur et une variance supérieures à ce qu’on peut obtenir en combinant le seul titre i avec l’actif sans risque sur la droite des portefeuilles possibles), il reste à ajuster le rendement du titre j à la hausse. Cela peut se faire par une réduction de son prix (à revenu donné). Après cet ajustement de prix, le rendement sera suffisant pour que le titre j soit détenu, ne fut-ce que dans une très petite proportion (1-w). Ajustement des pondérations En variant la pondération w de chacun des actifs risqués i et j, on obtient un rendement différent et une variance différente. On peut relier toutes les coordonnées RM(w) et M(w) par une courbe dans l’espace Volatilité / Rendement. Cette courbe donne la variance minimum qu’on peut atteindre pour chaque rendement possible du mélange à corrélation donnée entre les rendements des composantes i et j. Cette courbe est appelée « frontière efficiente de Markowitz ». Chaque point de la courbe correspond à une pondération 0<w<1 différente8. Pour connaître le prix d'équilibre des titres, nous devons donc connaître la pondération qui sera choisi par les investisseurs sur la frontière d'efficience. Or si les investisseurs ont accès à un actif sans risque, la pondération w la plus intéressante sur la frontière efficiente est celle qui donne les coordonnées RM(w) et M(w) du point de tangence entre la droite qui passe par RF , 0 et la frontière d’efficience (voir graphique 8.4.). Cette droite a le ratio de Sharpe le plus élevé, donc le meilleur rapport entre prime de risque et volatilité. La variance identique n’est pas nécessaire pour l’argument, un ratio de Sharpe strictement inférieur suffit. La pondération w est la pondération en valeur (pq) des titres, si la quantité physique q est donnée, le prix p ajuste la pondération comme le rendement (ce qui sera expliqué ci-dessous, au point e). 7 8 Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-17 RM RF M (M , RM ) pour w Ri RF i Ri R j RF j Rj RF 0 i = j Graphique 8.4. Construction de la frontière efficiente e) Le portefeuille du marché Pondération : des quantités choisies aux quantités existantes Pour composer le portefeuille P, nous avons envisagé deux types d’actifs, l’un sans risque et l’autre risqué. Nous avons découvert ensuite l’avantage de la diversification ; ceci conduit à détenir un mélange M d’actifs risqués plutôt que le seul actif i, même si l’actif i a le plus haut rendement et la plus faible volatilité qu’on puisse trouver. Jusqu’à présent nous avons conçu la diversification comme un choix de pondération fait par chaque investisseur et même comme un choix de quantité, sans préoccupation de savoir si ces quantités permettent l’égalité entre l’offre et la demande de titres. Or il se fait, en réalité, qu’à tout moment, tous les titres émis doivent se trouver quelque part et donc être détenus par un investisseur ou l’autre qui s’en trouve satisfait. Si un investisseur n’est pas satisfait de la pondération des titres i et j dans son mélange de titres risqués, il voudra vendre le titre dont il juge la pondération excessive et acheter l’autre, mais il devra trouver un agent avec qui faire l’échange. S’il ne trouve pas, il devra accepter une baisse de prix et hausse de rendement du titre qu’il veut vendre et le contraire Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » pour le titre qu’il veut acheter. La valeur des actifs 8-18 Cette variation de prix est une autre façon d’ajuster la pondération d’un titre dans un mélange. En effet, la pondération d’un titre dépend de la quantité physique, matérielle, mais aussi du prix : wi pi qi n pi i 1 (8.29) qi L’équilibre entre la quantité de titres existants et la quantité de titres désirés pour leur pondération est donc réalisable par un ajustement de la pondération via le prix de marché des titres. Ceci entraîne évidemment un changement simultané de rendement des titres dont le prix change à revenu donné. Du portefeuille diversifié au portefeuille de marché Si un agent peut détenir n’importe quel actif risqué i, il peut aussi bien détenir un ensemble des actifs risqués existants dans la proportion où ceux-ci se présentent sur le marché. En effet, si tous les agents voulaient détenir seulement l’action de l’entreprise XYZ, son prix monterait ; ce qui élèverait sa pondération dans le marché (marché = p*q ; pondération = (pj*qj)/pj*qj ) mais réduirait son rendement attendu (Revenu attendu / prix) et réduirait son attractivité, tacepa. Les actions non-détenues disparaîtraient du marché. C’est ici qu’intervient l’hypothèse d’efficience du marché : puisque le marché intègre toutes les informations sur les rendements futurs dans les prix, il n’est pas intéressant de détenir les titres dans une autre proportion que le marché. Pour un marché boursier, le portefeuille de marché est l’ensemble des titres cotés à la bourse. Le marché boursier devient donc l’actif risqué i du portefeuille P de l’équation 8.20. Nous remplaçons désormais l’indice i par l’indice M pour souligner le rôle de référence du marché. Rôle de l’actif non-risqué La possibilité de combiner actifs risqués et actif sans risque permet de trouver un point optimal sur la frontière d'efficience. Il s'agit de relier le rendement sans risque à la frontière d'efficience par une droite (graphique 8.5). Le point de tangence entre cette droite et la Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-19 frontière d'efficience donne le meilleur rendement des actifs risqués qu'on peut combiner avec l'actif sans risque (voir graphique 8.2). R Portefeuilles ou Securities market line (SML) R1 A1 R2 A2 RF 2 22 12 Graphique 8.5. Frontière efficiente et droite de portefeuilles Sur cette droite, l'investisseur choisira la proportion d'actif sans risque et d'actifs risqués qui convient à ses préférences sur rendements et variance. Il n'y a donc aucune raison de privilégier des actifs risqués par rapport à d'autres actifs risqués. Il suffit de combiner les actifs risqués du marché au prix du marché avec l'actif sans risque9. Ceci nous donne un équilibre pour le marché et une stratégie de placement. Nous avons donc atteint l’objectif 1 de cet exposé : mesurer et choisir le risque et le rendement d’un portefeuille dans un contexte d’équilibre général du marché des titres. Il faut cependant encore vérifier que chaque actif risqué est correctement évalué (objectif 2, voir point f.). Variations de l’équilibre Le paradoxe du marché efficient est qu’il n’y a pas de possibilité d’arbitrage (vente d’un actif sur-évalué contre un actif sous-évalué), car toute l’information disponible sur les 9 BBL Invest News 33 du 6-4-2001 présente exactement cela. Le portefeuille « agressif » se distingue du portefeuille « neutre » par la répartition entre actions et obligations, mais pas par la répartition sectorielle ou géographique des actions entre elles. Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-20 titres est dans les prix, mais en même temps ces prix bougent tout le temps car ils intègrent précisément constamment de nouvelles informations. Un premier choc peut être une variation du rendement sans risque RF. Ceci fait baisser l’intercept de la droite de portefeuille et son point de tangence avec la frontière efficiente des actifs risqués. On accepte donc des actifs risqués un rendement plus bas et on demande une volatilité plus faible. Ce rendement plus bas s’obtient par suite d’une hausse de cours de bourse (prix). Cette hausse de cours est parfaitement compatible avec ce qu’on sait par ailleurs de la relation entre taux d’intérêt et cours des actions et des obligations. Cependant, les mouvements de cours ne toucheront pas tous les actifs de la même manière car la théorie de la diversification nous dit aussi que leur pondération change dans le mélange diversifié des investisseurs et donc leur poids dans le marché et donc leur prix relatif à quantité donnée. Un autre choc peut concerner les caractéristiques d’un titre : son rendement attendu, sa volatilité ou sa corrélation avec les autres actifs risqués. Aussitôt une variation de son prix devrait lui rendre la pondération souhaitée10. En même temps, une modification de corrélation (et parfois aussi de rendement ou de volatilité) modifie la forme de la frontière efficiente de Markowitz et donc la pondération et le prix de bien d’autres titres. Voici un exemple de modification de corrélation : imaginez que les constructeurs de voitures remplacent la voiture en acier par la voiture en plastique. La corrélation entre le prix des voitures et le prix de l’acier diminuerait, mais celle entre le prix des voitures et celui du plastique augmenterait encore. f) Relation entre chaque titre et le marché 1e approche : équivalence entre un titre et un portefeuille On peut considérer un titre, l’action de l’entreprise RST par exemple, comme un portefeuille particulier comparable à ou répliquant implicitement un portefeuille composé du portefeuille du marché et d’une proportion d’actifs sans risque. Cette proportion peut être négative en cas d’emprunt : q<0. Quand nous parlons d’une entreprise particulière, Ce glissement des pondérations en suivant les cours est l’attitude qui peut être prise pour la répartition des actifs risqués (voir lettre boursière de CBC, No 289 du 16 juillet 2002 et 290 du 6 août 2002). 10 Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-21 remplaçons l’indice P par l’indice j. La relation (8.23) entre rendement attendu et risque ou (8.20) entre rendement attendu et proportion des deux actifs de référence suggère d’écrire : R j RF j ( RM RF ) RF (1 - q)(R M - R F ) M (8.30) Mais l’expression 8.30 pose des problèmes : on ne connaît généralement pas (1-q). On peut essayer d’estimer les écarts-types j et M, mais cette valeur toujours positive (la racine carrée de la variance des rendements propres à l’entreprise et au marché) poserait alors un problème si on rencontrait un titre à faible rendement Rj<RF . Traitons donc la relation entre Rj et (RM-RF) comme une inconnue j propre au titre j. Cette manière de faire a l’avantage d’avoir une signification économique intéressante. R j R F j ( RM R F ) (8.31) Le coefficient j est le rapport entre la prime de risque (Rj-RF) de l’actif j et celle du marché . Il est la pente d’une droite dans l’espace (E(Rj-RF), E(RM-RF) comme au graphique 8.6. E(Rj-RF) j R j1 R j 2 RM 1 RM 2 Rj2-RF 2 Rj1-RF 1 RM1-RF RM2-RF E(RM-RF) Graphique 8.6 : primes de risque du marché et d’un actif La pente () est d’abord une pente théorique ou anticipée entre toutes les réalisations statistiquement possibles de RM et de Rj. En effet, en utilisant les coordonnées des points 1 et 2 du graphique 8.6. et le fait que RF est supposé constant (puisque sa variance est nulle par nature et que sa valeur future n’a pas d’autre raison de différer de sa valeur présente de référence), on a : Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-22 R j 2 R j1 j RM 2 RM 1 Cette distribution théorique et future des rendements de M et i ne peut malheureusement jamais être observée. Avec des observations passées jugées suffisamment fiables, la pente () de cette droite peut être estimée par régression linéaire. Quoi qu’il en soit des observations ou d’une simulation, le coefficient de pente du graphique 8.6. donnant la relation entre la prime de risque du marché et celle du titre j se calcule de la même façon. Il s’agit d’une expression où apparaît explicitement la covariance entre le rendement de l’actif et celui du marché (pour rappel, la covariance se calcule comme [(X-X) (Y-Y) ]/n et la barre indique les moyennesRj et RM ) : 1 ( R jt R j )( RMt RM ) j cov j , M j M n t j 2 jM 1 varM M M ( RMt RM ) 2 n t (8.32) Résultat 1 : la prime de risque d’un titre dépend de sa contribution au risque du marché La valeur (8.32) de j montre que la prime de risque propre à un actif dépend de la prime de risque du marché (de la volatilité du marché) et de la covariance entre les rendements de l’actif et ceux du marché. « Le risque d’un actif dépend de sa contribution au risque du marché ». En effet, nous pouvons donc écrire la prime du risque d’un titre quelconque comme : R j R F j ( RM R F ) (8.33) Résultat 2 : dans le rendement d’un titre, c’est seulement le risque non-diversifiable qui est rémunéré Nous pouvons réécrire l’expression 8.33 de la prime de risque comme une expression du rendement de l’actif j et du rendement du marché : R j (1 j ) RF j ( RM ) (8.33' ) Cette expression présente le rendement de l’actif j comme une moyenne pondérée du rendement de l’actif sans risque et de l’actif risqué. Le coefficient de pondération est le j qui donne précisément la contribution (corrélation fois variance relative) de l’actif j à la volatilité Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-23 du marché. Le coefficient de pondération mesure donc précisément le risque qui ne peut pas être éliminé par la diversification que permet le marché. C’est ce risque non-diversifiable dans le marché qui justifie le rendement spécifique du titre qui sinon serait simplement le rendement sans risque. 2e Approche : place d’un titre dans les portefeuilles ou « amélioration de portefeuille » Imaginons un marché bien étoffé et efficient et un actif sans risque. A quelle condition, un investisseur accepte-t-il d’ajouter un titre dans son portefeuille ? A l’équilibre, il suffit que ce titre soit aussi bon (offre un aussi bon ratio de Sharpe) qu’un des nombreux portefeuilles que l’agent peut constituer lui-même, donc que le titre soit sur la droite qui passe par l’actif sans risque et le marché. Ceci confirme que tout titre que sera détenu correspondra en fait à une combinaison de l’actif sans risque avec le portefeuille de marché (dont ce titre fait évidemment partie). Ceci confirme que la prime de risque peut être inférieure ou supérieure à celle du marché. Cas particulier j < 0 Enfin, l’estimation non-contrainte du j permet le j < 0. C’est le cas particulier d’une prime de risque négative ou j < 0 qui montre l’intérêt d’un actif négativement corrélé avec le reste du marché : il en diminue la volatilité, il étend la frontière de Markowitz vers la gauche. On appelle ce type d’actifs de « valeurs-refuge », on pense à l’or, aux terres agricoles et forestières, etc.. Cependant à l’équilibre ce type d’actif est rare et minoritaire, car on ne conçoit pas que la frontière de Markowitz et les portefeuilles de marché aient une volatilité globale M < 0. Interprétation Notons enfin qu’une relation croissante au rythme (RM-RF) entre les j des différents titres j et leur prime de risque Rj-RF. Cette relation est présentée au graphique 8.7 dont on reconnaîtra la similitude avec le graphique 8.3. La prime de risque (et le j) ainsi estimée sur des observations passées est sujette à un intervalle de confiance et n'est cependant pas la prime de risque théorique du titre j. Cette Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-24 dernière n'est pas observable et est difficile à déterminer à priori. C'est cependant elle qui est pertinente pour l'évaluation instantanée de l'actif j. Le Rj ainsi obtenu peut être utilisé comme facteur d'actualisation kj (rendement exigé) dans le "Dividend Discount Model" présenté ci-dessus. Rj-RF RM-RF RM-RF 0 1 j Graphique 8.7 : Relation entre les j et leur prime de risque g) interprétation pour l’investisseur Stratégie de placement Plus le risque d’un actif est élevé, plus le rendement doit être élevé. Ce risque se décompose en deux parties : un risque de marché et un risque propre déterminé par la corrélation entre le rendement de l’actif et le rendement du marché (pour rappel, la corrélation = jj/M) ou plus exactement le rapport entre la covariance des rendements de l’actif avec ceux du marché et la variance des rendements du marché. Pratiquement donc, les actifs qui ont tendance à monter plus que le marché risquent aussi de baisser plus que lui (les portefeuilles plus risqués, q < 0, à fort levier, sont aussi ceux qui peuvent subir les plus grosses pertes) . Si un actif a tendance à baisser quand le marché monte, c’est une valeur-refuge. Il sera détenu même si son rendement est très faible. Ce pourrait être le cas de l’or, des œuvres d’art, des terres agricoles, mais peut-être surtout certaines obligations. (Il vaut donc mieux Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-25 passer par la covariance (8.28) que par le rapport des écarts-types (8.24), le second ne pouvant pas être négatif). En conséquence, pour avoir un rendement élevé, rien ne sert de surpondérer dans un portefeuille des actifs particulièrement risqués. Il suffit de détenir une portion faible (ou négative) d’actifs sans risque et pour le reste de détenir les actifs du marché. Enfin, on peut estimer le de diverses façons selon les données dont on dispose (8.30, 8.31) ou une des deux formules suivantes Rj = aj + jRM où aj = (1-j)RF, Rj = j + (1-j )RF où =RM Evaluation des titres risqués Le « Dividend Discount Model » disait d’évaluer le prix Pj d’un titre comme la somme actualisée au taux kj des revenus futurs Ej qu’il procurera. Pj t 0 Ej (1 k ) t Ej kj Le taux d’actualisation propre à chaque titre restait cependant une inconnue. Il s’agit en fait du rendement exigé, en effet : Pj kj Ej Or le CAPM nous donne une façon d’estimer la prime de risque spécifique qui doit être contenue dans le taux d’actualisation, et donc le taux d’actualisation devient le rendement d’équilibre du CAPM : k j R j R F j ( RM R F ) (8.33" ) Nous avons donc atteint notre 2e objectif, l’évaluation d’un actif en fonction de son revenu attendu et des conditions du marché. La 2e approche nous montre en particulier l’intérêt de ce calcul pour une introduction en bourse. Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-26 h) Prix de l’actif (prix d’une action)11 [hors matière du cours] La prime de risque (8.29) nous donne le rendement exigé d’une action par rapport au rendement sans risque. Le prix de cette action en bourse doit être tel que le rendement attendu Rj soit effectivement assuré. E ( Dt 1 ) (8.30) 1 RF ( E ( RM ) RF ) Si nous nous en tenons à l’hypothèse d’absence de distribution de dividende, nous devons réexprimer le rendement attendu en termes de prix attendus : E(Pjt+1), E(PMt+1), à partir de l’expression (8.5) du rendement et de la prime de risque : Pjt E ( Pjt1 ) Pjt 1 RF j ( E ( PMt 1 ) 1 RF ) PMt (8.31) Mais il faut aussi exprimer j en termes de prix attendus et non de rendements attendus (8.28). Après quelques manipulations algébriques, ceci donne : Pi ,t 1 1 RF cov( Pi ,t , PM ,t ) E ( Pi ,t 1 ) E ( PM ,t 1 ) (1 RF ) PM ,t var( P ) M (8.32) Avec Pi,t = la valeur actuelle d’une action ; RF = le rendement d’un placement sans risque ; E(Pi,t+1) = l’espérance de la valeur de l’action en t+1 ; M = référence à un portefeuille type : le portefeuille du marché qui est le portefeuille qui contient de toutes les actions existant sur le marché et ce proportionnellement à leur capitalisation . La valeur de l’action est la valeur actualisée des attentes (8.32). Le terme ente les accolades est constitué de deux parties : d’une part, le prix futur attendu de l’action et d’autre part, une prime de risque qui en est retranchée. 11 De Ceuster M. (1996), Financiële Economie, syllabus TEW, kursusdienst uitgeverij; Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-27 i) Evaluation et conclusions Principes De ce modèle, on peut tirer les implications suivantes qui sont vérifiées empiriquement : « Les actifs qui présentent un risque systématique plus élevé, ont en moyenne un rendement plus élevé » et « Les caractéristiques spécifiques des entreprises n’influencent pas le rendement attendu des actions » (parce que var j n'apparaît pas seul dans la formule de prime de risque, seulement var j / var M et covar j,M). « Les préférences des investisseurs se révèlent dans la proportion d’actifs sans risques qu’ils détiennent, pas dans la répartition de leur portefeuille entre actifs risqués. Stratégie de « market timing » Certains analystes pensent qu’une stratégie de « market timing » est une bonne stratégie de gestion. Cela consiste à exploiter le cycle économique, et à sur-pondérer les obligations à certains moments (baisse de taux d’intérêt, fin d’un cycle de demande) et à surpondérer les actions ensuite (remontée de taux d’intérêt, reprise de la demande) et à préférer la liquidité pure (cash) dans la 3e phase où le taux de croissance commence à descendre et où les taux d’intérêt et les actions ont atteint leur sommet12. Cela peut s’imaginer dans le cadre des mouvements de la « Securities Market Line » de la figure 8.5. (effet de RF) qui accepte de payer les actions cher quand le taux d’intérêt est bas. Cependant, si les marchés sont efficients, il sera difficile d’en profiter, si ce n’est à la marge (nouveaux placements ou retraits à cibler selon ce « timing » ou pondérations à laisser évoluer selon l’évolution des cours13). En outre, il convient de rester attentif aux revenus attendus des entreprises et au lien entre le cours de bourse et ceux-ci. Acheter bas (c'est-à-dire un P/E faible) et vendre haut (un P/E élevé) reste une bonne stratégie14. Cette stratégie ne doit pas être confondue avec « acheter ce qui monte et vendre ce qui baisse », qui pourrait fort facilement se transformer en « acheter haut » (ce qui a monté) et vendre bas (ce qui a baissé) et causerait des pertes répétées. Voyez Trends 10 maart 1994 : Ivan Baldewijns “Beleggingscyclus: Hoe, wat, wanneer?” Une étude récente …. 13 Ce glissement des pondérations en suivant les cours est aussi l’attitude qui peut être prise pour la répartition des actifs risqués (voir lettre boursière de CBC, No 289 du 16 juillet 2002 et 290 du 6 août 2002). 14 Certaines etudes empiriques ont essayé de tester des stratégies d’investissment « contraires » et ont parfois montré des possibilités de gains. Si elles sont confirmées ces études montrent en même temps que les marchés ne sont pas efficients à tout moment pour tous les titre, mais seulement en moyenne. 12 Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-28 Les journaux financiers publient de plus en plus d’information15. La croissance des bénéfices attendus et leur révision à la hausse sont des signaux d’achat pour autant que le P/E ne soit pas trop élevé (P/E=1/k). Les betas publiés sont à prendre avec prudence à cause des difficultés d’estimation, mais s’ils semblent justifiés ou concordants ils sont intéressants. La diversification théorique de marché étant difficile à atteindre, une diversification sectorielle est un minimum. La volatilité d’un titre en soi n’est théoriquement pas importante au niveau du portefeuille, mais une volatilité élevée vous avertit que le cours sera volatil. Si cela se combine avec un beta élevé soyez prudent avant d’augmenter la cyclicalité de votre portefeuille. Investir dans un indice est une bonne approximation d’un portefeuille de marché, mais l’indice n’est souvent qu’une partie du marché et il connaît des entrées et des sorties, en outre, les titres qui ont bien monté ont tendance à y être surpondérés (à cause de leur hausse de prix). Attention : Prudence Emprunter pour acheter des actions (ou tout actif risqué) est extrêmement dangereux. Il faut savoir exactement ce qu’on perd en cas de sinistre : on peut prendre le risque, mais il ne faut pas le sous-estimer. Le risque est généralement rémunéré, mais pas toujours sinon ce n’est plus un risque, donc il faut savoir quelle perte de revenu, de capital, de niveau de vie on et prêt à assumer. En outre, sur les marchés réels, les coûts de transaction ne doivent pas être sousestimés. Un problème particulier pour de nombreux titres est le manque de « liquidité » : peu d’acheteurs et peu de vendeurs. Un gros ordre d’achat ou de vente a un fort effet sur le cours. Un ordre est vite « gros », on ne travaille donc pas vraiment « à prix donné » Bulles financières Ce qui a été vu au chapitre 6 concernant les bulles spéculatives s’applique aux actifs financiers aussi bien si pas mieux qu’à l’hyperinflation. Les titres ne sont pas toujours sur la trajectoire fondamentale du prix déterminé par les revenus futurs actualisés au taux approprié. Notez cependant qu’une bulle spéculative offre une prime de risque importante et la certitude de son éclatement, mais l’incertitude sur le moment de la réalisation de l’éclatement. diffère des revenus futurs qui, eux, suivent plutôt une marche au hasard. 15 “De Tijd” (ex- Financiële en Economische Tijd) du lundi est particulièrement fourni. Ceci Théorie monétaire (99-2004) Annexe ECON M831 partie 1 « Financement » La valeur des actifs 8-29 Extensions Notons enfin que la recherche continue pour introduire soit des imperfections de marché, soit des fonctions d’utilité plus riches que notre hypothèse « moyenne-variance », soit des risques de consommation, soit des risques propres à l’investisseur ou pour améliorer les estimations économétriques. Pour en savoir plus sur le lien avec la consommation, vous pouvez consulter : Mehra & Prescott (1985), « The Equity Premium : a Puzzle », Journal of Monetary Economics, 15, p.145-161. et Mehra & Prescott (2003) « The Equity Premium in Retrospect » NBER Working Paper 9525.