TRACE D`APPRENTISSAGE AUTEUR: TUIL ILLAN RECIT Mlle V

TRACE D’APPRENTISSAGE
AUTEUR: TUIL ILLAN
RECIT
Mlle V. âgée de 17 ans accompagnée de sa mère s'est présentée le 5 Février 2007 vers 19h00 au
cabinet du Dr Tondowski ou j'ai consulté seul durant mon stage ambulatoire de Niveau 1, pour une
asthénie et une douleur abdominale prédominant à droite évoluant depuis la veille.
J'ai débuté mon examen clinique en interrogeant la jeune fille sur ses antécédents médicaux et
chirurgicaux. Avant de me répondre, la mère me tendit le carnet de santé de sa fille. Je l'ai ouvert
pour l'observer et me suis aperçu que la jeune fille avait présenté une amygdalectomie à l'âge de 10
ans suite à des angines à répétition, des otites aiguës, et comme la plupart des enfants des
rhinopharyngites.
Une fois l'interrogatoire terminé, j'ai proposé à la jeune fille de monter sur la table d'examen afin de
pouvoir l'examiner correctement. J'ai demandé a la mère de bien vouloir m'attendre dans la salle
d'attente le temps de l'examen. Celle-ci m'a répondu qu'elle avait l'habitude de rester dans la salle
lors de l'examen de sa fille avec le Dr Tondowski. Pour préserver une bonne relation, j'ai accepté la
présence de la mère. Je commençais à prendre les constantes de la jeune fille dont le visage me
paraissait un peu pâle et surtout douloureux:
- TA=115/82
- =37°8
- FC=75/min
Le reste de l'examen retrouvait:
- une auscultation cardio-pulmonaire normale
- une sensibilité à la palpation abdominale prédominante en Fosse iliaque droite
sans défense franche, le reste de l’abdomen était souple, dépressible et indolore sans masse
palpable, pas de trouble du transit. Par contre des nausées étaient ressenties chez la patiente.
-L’examen ORL à savoir la gorge et les tympans était normal
-L'examen neurologique était normal en particulier pas de raideur de nuque, pas
de signe de localisation
PROBLEMATIQUE
1- Fallait-il adresser la patiente aux urgences pour éliminer une appendicite aigüe ?
2- Pouvait on attendre jusqu'au lendemain en prescrivant un bilan biologique ou une échographie
abdominale ?
3- Quelles sont les hypothèses diagnostiques à évoquer devant une douleur en FID chez une jeune
fille ?
DISCUSSION
Devant ce tableau de douleur abdominale en FID, les hypothèses diagnostiques pouvaient être
discutées sont les suivantes :
- Une colique néphrétique « il manquait le caractère brutal d'installation de la
douleur, et l'absence de position antalgique »
- Une pyelonéphrite aigüe « s'accompagne en générale d'une douleur du Flanc droit
avec une fièvre élevée »
- Un kyste de l'ovaire droite « fréquent chez les jeunes filles »
- Une maladie de Crohn « peu probable car il n'y avait pas d'autres symptômes que la
douleur en FID »
- Une infection bactérienne digestive tel qu'une yersiniose « infection digestive liée à
une bactérie souvent en cause dans les toxi-infection-alimentaire-commune (TIAC) pouvant
entraîner des douleurs en FID »
- Une constipation « diagnostic d'élimination »
- Une salpingite aigüe « il n'y avait pas de leucorrhée ni de fièvre élevée »
- Une appendicite aigüe « l'urgence à éliminer »
L'urgence à éliminer était le diagnostic d'appendicite aigüe. Je me suis décidé à prendre conseil
auprès de mon maître de stage qui m'avait laissé son numéro de téléphone en cas de doute. J'ai
décroché mon téléphone pour l'appeler afin de discuter du problème. Je lui ai expliqué ce que j'avais
retrouvé au cours de mon examen clinique. Je lui ai proposé deux options pour la prise en charge de
cette patiente: 1) soit de l'envoyer aux urgences, 2) soit de lui prescrire un bilan biologique à
réaliser le lendemain. Il m'a répondu que si j’avais peu d’argument pour une appendicite aigüe, je
pouvais prescrire un bilan en ville à réaliser le lendemain. Toutefois en fonction de l'évolution
clinique et les résultats du bilan biologique, je prescrirai à la patiente une échographie abdominale.
Cependant, il m'a expliquai qu'au moindre doute, je devais adresser la patiente aux urgences.
J’ai expliqué à la patiente ainsi qu'à sa mère, que je sentais un peu anxieuse, que j’allais prescrire un
bilan inflammatoire pour le lendemain. En fonction des résultats, je la rappellerai pour lui expliquer
la conduite à tenir. Bien entendu, j’ai précisé à la patiente de se rendre aux urgences si durant la nuit
la douleur s’aggravait ou l'apparition d'autres symptômes (vomissement, fièvre à 38°5, arrêt des
matières et des gaz) survenait.
Après la consultation, je comprenais la différence entre la prise en charge en milieu hospitalier et
celle de la ville. Jusque là, le diagnostic d'appendicite ne me posait pas de difficultés à l'hôpital. En
effet, des moyens tel que la réalisation d'un bilan biologique ou d'une échographie abdominale
étaient mis à notre disposition aux urgences. De plus, je n'avais jamais été vraiment seul et je
pouvais demander l'avis d'un senior ou d'un chirurgien. L''équipe paramédicale présente aux
urgences me donnait une certaine assurance. En ambulatoire, se retrouvait seul face à un patient
reste difficile et le diagnostic n'est pas toujours évident.
J'ai réellement compris qu'une décision médicale devait être bien réfléchie. Elle pouvait conduire à
demander des avis à d'autres professionnels de santé permettant de travailler en équipe afin
d'assurer une meilleure prise en charge pour le patient.
RECHERCHE DOCUMENTAIRE
Le soir en rentrant chez moi, j'ai réfléchi sur la différence existant entre la prise en charge de
certaines situations d’urgences en ville et en milieu hospitalier, en particulier les diagnostics
douteux. J’ai recherché dans les quelques revues que je possédais, un ou des articles pouvant
m’aider sur la conduite à tenir devant une suspicion d’appendicite en ville. J’ai trouvé un article sur
la revue du praticien intitulé: « Douleur de la fosse iliaque droite, éviter les appendicectomies
inutiles sans prendre de risque ».
L’objectif de cet article visait à démontrer que l’appendicite aiguë nécessitait une prise en charge
rigoureuse pour éviter les retards diagnostics et les appendicectomies inutiles. D’autant plus, que
dans la pratique quotidienne, les douleurs en fosse iliaque droite étaient un motif fréquent de
consultation avec des facteurs de gravité si celle-ci n'est pas diagnostiquée à temps. En effet, le
risque était d'abord la formation d'un abcès appendiculaire, voir une péritonite aigüe. Cette dernière
peut engager le pronostic vital et nécessitait une intervention chirurgicale en urgence.
Il était important de bien connaître les aspects cliniques de cette infection et les examens
complémentaires à réaliser en cas de suspicion ou absence de parallélisme anatomoclinique. La
prise en charge en urgence d’un syndrome douloureux aigu de la fosse iliaque droite était d’une
grande importance médico-économique et justifiait une démarche rigoureuse, au moindre coût. J’ai
répertorié les aspects cliniques retenus dans cet article:
- La fièvre aux alentours de 38°5: non retrouvé chez ma patiente car sa T°=37°8
- Les troubles du transit inconstants et non spécifiques: non retrouvés
- La douleur est d’abord épigastrique ou péri-ombilicale puis se localise en fosse iliaque
droite (attention la douleur peut débuter aussi en fosse iliaque droite, ou peut varier selon la
localisation dans les formes atypiques): sensibilité de la FID sans défense était présent chez la jeune
fille
- A la palpation, on sent une défense des muscles abdominaux et une contracture en cas de
péritonite: non retrouvé
- Le toucher rectal peut mettre en évidence un épanchement collecté dans le cul de sac de
Douglas: Je n'avais pas réalisé le toucher rectal, peut-être par gène vis à vis de la mère
- Et enfin un aspect saburral de la langue et la rougeur des pommettes: non retrouvé
Les examens complémentaires à réaliser sont: une NFS, une CRP pour rechercher un syndrome
inflammatoire et une échographie abdominale ou un scanner abdomino-pelvien pour rechercher
une inflammation de l’appendice.
Dans mon cas, j’avais peu d’argument en faveur d’une appendicite aiguë, car les symptômes
n’étaient pas tous présents. De plus le doute persistait dans ma tête. Cela m’a conduit à prescrire un
bilan en ville dès le lendemain et à ne pas l’adresser aux urgences.
Il était vrai que j’avais déjà vu des appendicites aux urgences mais la prise en charge était plus
rapide car je pouvais réaliser un bilan inflammatoire, une échographie abdominale sur place en cas
de doute et demander un avis chirurgical.
Cependant, si la patiente s’était présentée dans la journée, j'avais la possibilité d'obtenir un bilan
rapidement en appelant un laboratoire d’analyse médical, voir même une échographie abdominale
qui est un examen peu invasif mais très opérateur dépendant. Bref, ma situation était particulière en
raison de l’heure ce qui m'arrivera fréquemment dans ma future pratique.
Malgré l'expérience que j'avais acquise au cours de mon cursus, j'ai ressentis des difficultés à gérer
une urgence en ville. Tout cela pouvait s'expliquer par le peu d'expérience que j'avais en
ambulatoire. Tout mes stages avaient été réalisés en milieu hospitalier et la prise en charge n'était
pas la même.
J'ai trouvé un 2ème article sur la revue du praticien intitulé: « Un stage en médecine générale aux
cours du 2e cycle ».
Il s’agissait d’une expérimentation à la faculté de médecine de Rennes ayant pour but de faire
découvrir un stage en médecine de ville aux étudiants en médecine autre que l’hôpital. Cela
permettra aux étudiants de choisir leur spécialité en toute connaissance de cause. D’autre part, cette
expérience avait pour but de mieux gérer son exercice médical futur en cas d’éventuelle installation
en ville comme généraliste. Ce qui permettait de se préparer à l'exercice professionnel.
Les étudiants inclus dans l’étude avaient été satisfait d'avoir découvert un exercice extra hospitalier
de la médecine. Ils avaient eu une meilleure approche de la notion des soins envers les personnes et
de leur prise en charge globale. Il s'agissait d'un stage concret, intellectuellement motivant. Pour les
maîtres de stages l'expérience avait été aussi bénéfique et tous envisageait de la renouveler.
D'ailleurs ils avaient été impressionnés par la qualité des connaissances des externes.
« Pour moi, je pense qu'un stage en ville en tant qu'externe peut s'avérer formateur et permettre de
voir une autre approche de la médecine »
RETOUR AU RECIT
Pour revenir à mon cas, le lendemain en retournant au cabinet, j’ai reçu un coup de téléphone vers
15h30 du laboratoire me disant que la NFS retrouve une discrète anémie (hb=11,9), des leucocytes
à 10000, et une CRP légèrement augmenté a 9. Comme les résultats étaient peu concluants, j’ai
rappelé Mlle V. pour les lui communiquer. Je lui ai demandé si elle présentait toujours des douleurs
localisées en fosse iliaque droite. Elle m'a répondu qu’elle ressentait encore une légère douleur,
mais qu’elle avait eu des difficultés pour aller à la selle. Elle a continué en m'informant que sa mère
avait réussi à obtenir un rendez-vous d’échographie ce jour vers 16h30, grâce à la mention sur
l'ordonnance: « examen à réaliser en urgences». Les autres hypothèses diagnostiques évoquées au
début du récit pouvaient être recherchées. Toutefois, j'attendais, le résultat de l'échographie pour
orienter mon diagnostic.
A 18h, entre deux patients, j’ai appelé le centre d’imagerie médicale afin qu'il me communique les
résultats de l’examen. Au bout de 5 minutes, je me suis mis en relation avec le radiologue qui m'a
répondu que l’examen n’avait pas montré d'aspect inflammatoire de l’appendice, et qu’il n’y avait
pas d’épanchement dans le péritoine. Les autres structures visibles tel que les reins, les ovaires et les
trompes utérines, paraissaient normales. Par contre il y avait la présence de gaz de façon importante.
J’ai rappelé la jeune fille en lui communiquant les résultats et en lui disant que pour l’instant il n’y
avait pas d’indication à opérer ni à aller aux urgences, car il s’agissait probablement d’une
constipation. Je lui ai dis de continuer le traitement pendant 48 heures et de revenir si les
symptômes persistaient ou s’aggravaient. Mlle V. ne m’ayant pas rappelé, j’en ai conclu que les
symptômes s’étaient probablement améliorés.
SYNTHESE
Je pense que l’appendicite reste un diagnostic essentiellement clinique et que les examens
complémentaires doivent être réalisés uniquement en cas de doute diagnostic. Par ailleurs, la prise
en charge d’une appendicite aiguë est plus rapide en milieu hospitalier, surtout lorsque les centres
d’imagerie ou les laboratoires d’analyse en ville sont fermés. Par conséquent, si l’on est devant un
tableau typique d’appendicite, il ne faut pas hésiter à adresser la patiente aux urgences. Par contre,
en cas de doute diagnostic, et si l’état général de la patiente est conservé, je pense que l’on peut se
laisser un jour pour pouvoir conclure au diagnostic d’appendicite ou pas. Bien entendu, il faut
toujours penser aux autres hypothèses diagnostiques d'une douleur en FID et les éliminer.
Il ne faut pas hésiter à demander l'avis d'un confrère que ce soit un médecin de ville, un urgentiste
ou un chirurgien. Le travail en équipe permet d'éviter bien des erreurs diagnostics surtout que la vie
du patient en dépend. Il n'y a pas de honte à hésiter avant d'affirmer un diagnostic. Mais par contre
si le doute persiste je pense qu'il vaut mieux adresser aux urgences une patiente pour éliminer un
diagnostic urgent plutôt que de perdre du temps à vouloir la prendre en charge seul.
BIBLIOGRAPHIE
- Revue du praticien janvier 2007: Appendicitis. Recommandation and médical références. Agence
Nationale pour le développement de l’évaluation médicale. Gastroentérologie clin biol 1997
- Revue du praticien Avril 2007: Un stage en médecine générale au cours du 2e cycle
Compétence abordée: 3: Prendre une décision adaptée en situation d'urgence
mais aussi : - compétence 5: Travailler en équipe au sein du système de santé lors de situations
complexes aiguës ou chroniques
- compétence 7: Prendre des décisions fondées sur les données actuelles de la science,
et adaptées aux besoins et à la situation, négociées avec et acceptées par le patient, et acceptables
par le médecin
- compétence 9: Se préparer à l'exercice professionnel
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