B- La méthode Price / Earning

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Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-1
Chapitre 8 :
la valeur des actifs
Références : Levasseur M. et Quintart A.(1992), Finance, Economica (2ème Ed.) ;
Siaens A., monnaie et Finance, 2ème E., De Boeck 1988.
PEROLD, André F. (2004) « The Capital Asset Pricing Model” Journal of Economic Perspectives, 18, 3
(Summer), 3-24,
BROQUET, COBBAUT, GILLET, van den BERG (1997) Gestion de Portefeuille (3e Ed.), De Boeck, 478 pp.
8.1. Actifs monétaires
8.1.1. Valeur future
a) versement initial unique
Le rendement d’un placement est déterminé par sa valeur future. Si nous plaçons M
aujourd’hui à un taux d’intérêt annuel constant i et pour un nombre d’années n, la valeur
future du placement vaut :
V .F .  M (1  i ) n
(8.1)
si le placement dure un nombre entier d'années. Si le nombre d'années n'est pas entier, on
remplace n par le nombre de fractions d'années (7 trimestres : z=7/4) que dure le placement.
Mais si le taux d’intérêt est versé à terme bisannuel, mensuel, hebdomadaire,… alors
on utilise la formule des intérêts composés :
V .F .  M (1 
i nm
)
m
(8.2)
où m est le nombre de fois dans une année que l’intérêt est payé et n est le nombre d'années
entières que la somme a été placée au taux i. Si la durée du placement n'égale pas un nombre
entier d'années on remplace nm par z ou z est le nombre de fractions d'années que dure le
placement. Et si le versement des intérêts est continu, la valeur future du placement devient :
V .F .  Me in
étant donné que lim m (1 
(8.3)
i nm
)  ein
m
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-2
Notons l'importance du rythme de versement de l'intérêt.
Si l'intérêt est versé
plusieurs fois par an, il est possible d'accumuler des intérêts sur l'intérêt versé dans les
premières fractions de l'année. Un taux facial de 10% par an versé par quart chaque trimestre
(taux trimestriel de 2,5%) permettra d'accumuler au bout d'un an plus de 10 centimes par franc
investi au début de l'année. Ainsi, au bout d'un an, le taux d'intérêt annuel effectif k, issu
d'un taux facial i payé m fois dans l'année sera
i 

k  1  
 m
m
1
Notons l'importance de la formule de l'intérêt composé (V.F.) et distinguons-la de
l'intérêt simple ou linéaire (V.L):
V.L. = M (1+ z(i/m))
où z est le nombre de fractions m d'années écoulées (z peut être plus grand que m). Un
graphique peut illustrer la différence entre la forme exponentielle de l'intérêt composé (on
obtient des intérêts sur l'intérêt annuel déjà obtenu) et la forme linéaire de l'intérêt simple (on
obtient autant de fois l'intérêt qu'il y a d'années de placement).
Valeur
V.F.=M(1+i)z
V.L.=M(1+z(i/m))
M
temps = z
1 an
b) placement répété
Une accumulation d’une annuité constante (épargne constante) est le cas où pendant
une certaine période (nombre d’années n), on fait un placement constant et on réinvestit
automatiquement les intérêts qu’il rapporte. La valeur future d’une annuité A se définit de la
manière suivante (Levasseur et Quintart, p.313) et est déduite d’une suite géométrique (cfr.
Partie VIII) :
n
 (1  i ) n  1
VFA1   A1 (1  i ) nt A1 

i
t 1


(8.4)
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-3
Voici un exemple concret d’une annuité de 10 000FB avec un taux d’intérêt annuel de
6% :
Schéma 8.1 : représentation de l’accumulation d’annuités constantes, n=3
Temps 0
Année 1
Temps 1
Temps 2
Année 2
10 000FB
Temps 3
Année 3
10 000FB
10 000FB
10 000 = 10 000 (1+0.06)°
10 600 = 10 000 (1+0.06)
11 236 = 10 000 (1+0.06)²
 (1  0.06)³  1
31836  10000

0.06

Si l'objectif de l'épargnant est d'atteindre une valeur future précise au bout de n années
et qu'il désire connaître le montant A à épargner chaque année et à placer au taux i, il peut
calculer A à partir de 8.4. comme
A1  VFA1
i
(1  i ) n  1
(8.5)
Et le rendement d’un placement se mesure de la façon suivante :
(valeur future  valeur actuelle)
valeur actuelle
(8.6)
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-4
8.1.2 Valeur présente
a) versement final unique
La valeur présente se déduit facilement de ce que nous venons de voir ci-dessus (cfr.
équation 8.2):
V .F .  M (1 
i nm
)  V .P. 
m
V .F .
M
i
(1  ) nm
m
(8.7)
b) versement répété
La valeur présente d’une annuité constante (cfr. 8.4) versée pendant n périodes (du
point de vue du débiteur) ou perçue pendant n périodes (du point de vue du créditeur) c’est à
dire d’une annuité replacée au taux i jusqu’au versement de la tranche n est :
n
VP2  
t 1
A2
1  (1  i)  n

A
2
i
(1  i) t
(8.8.a.)
Pour connaître le montant A que l'on doit verser chaque année pendant n années
compte tenu d'un taux i, on trouve A dans (8.8.a). Par exemple, le remboursement fractionné
par annuités constantes de l’emprunt VP2 est :
i
(8.8.b)
1  (1  i ) n
Enfin, si ce versement du type A2 est une perpétuité P, sa valeur actualisée est :
A2  VP2

VP2  
t 1
P
P

t
i
(1  i)
(8.8.c)
La partie 8 sur les séries géométriques donne une solution pour passer des sommes finies ou
infinies aux formules présentées ici.
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-5
8.2 La valeur d’une obligation
Comment évaluer une obligation coupon zéro ? Ce type d’obligation ne comporte
pas de coupons et donc, le seul flux est le flux final lorsque l’obligation tombe à échéance. Il
suffit de savoir combien un investisseur va accepter de payer pour recevoir un montant
nominal Ft à l’échéance. Cela dépendra de l’horizon qu’il reste à courir et du taux d’intérêt
que l’investisseur exige :
Ft
(1  rt ) t
Ce qui devient en temps continu :
P0 
(8.7' )
P0  Ft e  rt
(8.9)
Quant aux obligations avec coupons, elles sont évaluées de la manière suivante et
leur valeur correspond à la valeur actualisée des flux futurs attendus :
P0 
C
C
C
M

 ... 

2
n
(1  r1 ) (1  r2 )
(1  rn )
(1  rn ) n
(8.10)
Ou
n
C
M

t
(1  rn ) n
t 1 (1  rt )
Avec n = le nombre de périodes ;
P0  
(8.11)
C = le payement périodique du coupon ;
r = le rendement exigé correspondant à la période et à l’horizon (maturité) ;
M = la valeur faciale (nominale) ;
t = la période considérée.
Dans certains cas, le temps restant ne correspond pas exactement avec la fréquence
d’une année. Dès lors, la formule d’évaluation du prix d’une obligation devient (la fraction
d'année est notée v):
n
P
t 1
C
M

t 1
v
(1  r ) (1  r )
(1  r ) (1  r ) n 1
v
(8.12)
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-6
8.3 la valeur d’une action
A- DDM
Le Dividend Discount Model ou modèle des dividendes actualisés est une première
manière d’évaluer le prix d’une action. Il part du principe que les actions ne génèrent que
deux sortes de flux : les dividendes versés à intervalles réguliers et le flux monétaire issu de la
vente de l’action. Le prix d’une action est donc la valeur actualisée des flux futurs attendus
pour une année :
E ( D1 )  E ( P1 )
1 k
avec k = le rendement exigé par l’investisseur.
P0 
(8.13)
Mais nous pouvons substituer E(P1) par sa valeur et ainsi de suite et nous obtiendrons :
P0 
E ( DN )
E ( D1 ) E ( D2 )

 ... 
 ...
1 k
(1  k )²
(1  k ) n
(8.14)
Dès lors, il n’est plus nécessaire de connaître le prix futur mais il faut simplement
évaluer les dividendes futurs. Si ceux-ci ne sont plus constants mais croissent à un taux g, on
obtient :
E ( D1 ) E ( D1 )(1  g ) E ( D1 )(1  g ) 2
E ( D1 )(1  g ) N 1



...

 ...
1 k
(1  k ) 2
(1  k ) 3
(1  k ) N
Et si on simplifie cette suite géométrique, on a (cfr. Partie VIII avec a = (1+g)/(1+k)) :
P0 
1  g 
1 

E ( D1 )
1 k 

P0 

kg
1 k
1 k
(8.15)
N
(8.16)
Et si N   et que nous imposons g<k1, alors :
P0 
E ( D1 )
kg
Condition mathématique d’existence d’une solution finie ou non-négative. L’interprétation économique de la
condition dit que g<k correspond à la situation d'"efficience dynamique". Si g>k, il serait préférable de
consommer plutôt que d'épargner (investir) : le produit des facteurs en place croît plus vite que ce qu'y ajoute du
capital supplémentaire : la valeur présente du produit de l'épargne (consommable dans le futur) est moindre que
celle de la consommation immédiate! Pour un titre particulier g>k semble cependant parfois être observé.
1
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-7
Généralisons et nous avons :
Pt 
E ( Dt 1 )
kg
(8.17)
Le rendement hors dividende d’une action ou taux annuel de plus-value devient alors :
Ri ,t 
Pt 1  Pt E ( Dt 2 )  E ( Dt 1 )

g
Pt
E ( Dt 1 )
(8.18)
Les actions qui présentent un cours plus élevé (bas) que celui évalué par le modèle
DDM (cfr. 8.17), seront vendues (achetées).
Illustration : la bourse japonaise de 1980 à 1997. La baisse du taux de croissance de
l’économie a fortement influencé le cours des actions (graphique 8.1 : extrait du Financiële
Economische Tijd du 30/10/97).
B-
La méthode Price / Earning
Imaginons d’abord que le dividende égale le bénéfice net de l’entreprise (earning) par
action. A partir du prix d’équilibre (8.17), nous avons :
Pt
1

E ( D) k  g
(8.19)
Prenons pour exemple la société ABC qui offre un dividende de 100 sur des actions
dont le rendement exigé par l’investisseur est de 10% et dont la croissance attendue est de 5%.
Le prix, d’après la méthode DDM, est :
P
D
100
100


 2000
k  g 0.1  0.05 0.05
Dès lors, le Price /Earning ratio est : 2000/100 = 20. Donc si P/E > 20, la société ABC est
surévaluée, sinon elle est sous-évaluée.
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-8
Distribution (dividendes et profits) :
Tous les profits ne sont pas distribués. Alors E=D/d où d est le "payout rate"2. La méthode
price-earning donnera, pour un même taux de croissance et taux d'actualisation, un P(E) plus
élevé que la méthode dividend discount, mais ceci est justifié par l'attente de plus-values
réalisable sous une autre forme qu'un dividende ordinaire.
P(E)  D/ d  P(D)/ d  P(D).
k g
P / E
0
k
P / E
0
g
Pour une entreprise dont les bénéfices sont constants g=0. Le "Price/Earning" est alors
l'inverse du rendement exigé (P/E = 1/k). Donc si k=5%, P/E=20. Une hausse des taux
d'intérêt qui porte k à 10%, ramène le P/E à 10, une chute de cours de 50% (et une hausse des
taux k de 2.5 à 5% fera aussi chuter les cours de bourse de moitié).
Normalement, le taux de croissance des bénéfices doit être au moins égal à celui du
PIB et l'intérêt réel d'un placement sans risque doit être comparable au taux de croissance du
PIB. Donc le rendement exigé d'un placement risqué sera normalement supérieur au taux de
croissance du PIB.
Actions de « croissance » :
Les actions dites de croissance ont un P/E ratio plus élevé que les autres à rendement
exigé k égal (or le k des entreprises dites de croissance est souvent plus élevé car elles sont
plus risquées)3.
Evaluation du risque :
Maintenant, nous allons donner une approche explicite du risque en présentant cidessous la méthode CAPM d’évaluation du prix des actions. La méthode permet d'intégrer
deux composantes essentielles du risque : la volatilité des rendements d'une part, mais aussi
leur corrélation avec d'autres rendements d'autre part.
2
Normalement 0<d,<1. Mais certaines entreprises distribuent un dividende une année o: elles ont fait des pertes,
ceci est un "signal" de leur confiance dans un retour à meilleure fortune. Il faut prendre ici une vue "moyenne".
3
Pour les actions de croissance, certains analystes utilisent le rapport (Price/Earning)/Growth (PEG) au lieu de
Price/Earning (P/E) et disent que le (P/E)/G ne peut dépasser 1. Ainsi, ils disent qu’un P/E de 40 n'est justifié que
si une croissance de 40% est attendue (pour le prochain bénéfice et que les bénéfices suivants se maintiendront
au moins à ce nouveau niveau). Un P/E de 100 n'est justifié que par un doublement des bénéfices (croissance de
100%). L'idée est que la hausse des bénéfices (la valeur actualisée du nouveau niveau de bénéfices) se reflète
immédiatement dans le prix, comparé au bénéfice courant. C'est une sorte de limite à l'enthousiasme des
acheteurs. Il est impossible d’imaginer une croissance permanente de 100% par an, ni même de 40% par an. Le
g n’est pas d’application ici, le g s’applique à des croissances reproductibles chaque année : il reste donc de
l’ordre du taux de croissance du PIB.
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-9
C - CAPM
Référence : De Ceuster, Financiële Economie, syllabus TEW, chap.3 ;
Siaens A., Monnaie et Finance, 2ème E., De Boeck 1988, chap.5.
Levasseur et Quintart, Finance, 2e Ed., Economica, Chap. 6
PEROLD, André F. (2004) « The Capital Asset Pricing Model” Journal of Economic Perspectives, 18, 3
(Summer), 3-24,
Le prix d’une action dépend d’un ensemble de variables. Il peut être évalué sur base
du modèle « Capital Asset Pricing Model » (CAPM)4.
“N’est véritablement risqué que le risque pour lequel il n’existe pas de diversification »
« Ne mérite un rendement supérieur à la moyenne que celui qui prend un risque compte
tenu des possibilités de diversification : la rémunération du risque ne compense pas la
renonciation à la diversification, mais la renonciation à la sécurité »
a) objectifs et hypothèses :
objectif 1 : mesurer et choisir le risque et le rendement d’un portefeuille ;
objectif 2 : calculer le rendement exigé (k) d’un titre risqué (une action) en vue de
trouver le prix d’équilibre de ce titre en fonction du profit attendu et du
rendement exigé ; ceci correspond à trouver son prix en fonction de son
rendement attendu à l’équilibre des marchés financiers, de sa volatilité et de la
corrélation de son rendement avec celui d’autres actifs, et en fonction du
rendement alternatif sans risque, dans un contexte d’équilibre général des marchés
financiers.
Hypothèses :

Les marchés sont efficients : ils intègrent toutes les informations disponibles (ou encore,
tous les agents ont toutes les informations pertinentes).
Il n’y a pas de coûts de
transaction, ni d’impôts et les actifs sont divisibles.

4
Il existe un actif sans risque (par exemple, des obligations d’état à 1 an) de rendement R F.
Levasseur et Quintart traduisent CAPM par MEDAF (Méthode d'Evaluation Des Actifs Financiers).
Théorie monétaire (99-2004)

La valeur des actifs 8-10
Les investisseurs maximisent leur utilité qui est fonction croissante du rendement attendu
et décroissante de la volatilité de celui-ci (hypothèse « moyenne-variance »5).
La
volatilité étant mesurée par la variance du rendement attendu :
 R2 
1
( Ri ,t Ri ) 2

n t
où Ri est le rendement moyen de l’actif i (ou portefeuille i).

On supposera que le rendement d’un actif est entièrement distribué en fin de période ou
entièrement capitalisé dans son prix.
b) Volatilité et rendement d’un portefeuille
Composition du portefeuille
Commençons par imaginer un agent qui veut composer un portefeuille P et n’a accès
qu’à deux actifs : un actif sans risque (variance = 0) indicé F et un actif risqué indicé i. On
suppose Ri > RF. On peut composer un portefeuille P avec une proportion q d’actif sans
risque et (1-q) d’actif risqué i. Si l’agent pousse l’audace jusqu'à emprunter au taux sans
risque pour acheter des actifs risqués alors q <0. Voici les caractéristiques du portefeuille :

son rendement attendu est :
RP  qRF  (1  q) Ri

(8.20)
sa variance et son écart-type sont :
 P2  (1  q) 2  i2
(8.21)
 P (1q) i
(8.21)
Parce que RFt =RF,t et donc F = 0.
La variance relative entre le portefeuille P et l’actif risqué i est :
 P2
 (1  q) 2
 i2
ou en termes d’écart-type :
5
P
 (1  q)
i
(8.22)
Cette hypothèse correspond à une fonction d'utilité attendue particulière : la fonction quadratique. Pour une
introduction à l'analyse critique de la spécification d'une fonction d'utilité attendue, voyez Eeckhoudt et Calcoen
(198.), Eléments de Microéconomie, Bruxelles, De Boeck.
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-11
On peut alors présenter le rendement du portefeuille en fonction de sa volatilité
relative et du rendement des 2 actifs ont il est composé. Ceci utilise la relation entre
proportion d’actifs risqués dans ce portefeuille et l’écart-type relatif (substitution de la valeur
de la proportion q trouvée en (8.22) dans l’expression de rendement (8.20)) :
RP  (1 
P

) RF  P Ri
i
i
On peut réécrire :
P
( R  RF )
(8.23)
i i
Comme i est donné par les caractéristiques de l’actif i, il est exogène du point de vue de
l’investisseur, de même que RF et Ri.
RP  RF 
Prime de risque et Ratio de Sharpe
On peut alors trouver une relation entre rendement et risque du portefeuille. En
effet, les portefeuilles que l’investisseur peut composer se trouvent sur une droite de pente
(Ri-RF)/i dans l’espace rendement (RP), écart-type (P) comme le montre le graphique 8.2.
Dans l’espace Volatilité / Rendement du graphique 8.2., l’expression (8.24) montre que la
pente de la droite qui passe par les coordonnées du portefeuille P (membre de gauche) est la
même que la pente de la droite qui passe par les coordonnées de l’actif risqué i (membre de
droite). En outre, pour q=1 la même droite a l’intercept RF.
Rp  RF
P

qRF (1q)Ri  RF
R R
 i F
(1q) i
(1q) i
(8.24)
La pente (8.24) est appelée « Ratio de Sharpe ». Ce ratio donne la relation entre le
rendement supplémentaire ou la prime de risque (RP – RF) exigés pour un portefeuille par
rapport à la volatilité acceptée (P).
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-12
Graphique 8.2. : risque et rendement possibles d’un portefeuille
Préférences d’un
investisseur
RP
Rendement attendu du
portefeuille
Ri  RF
i
= Ratio
de
Sharpe
Ri
Possibilités
RF
Portefeuille à levier (emprunt) q<0
i
écart-type de i
P
écart-type du portefeuille
Budget de l’investisseur et préférences
Les portefeuilles possibles avec les actifs i et F sont sur une droite qu’on peut
comparer à la droite de budget d’un consommateur. Ici on peut parler de droite de budget
d’un investisseur. Cette droite a pour pente le Ratio de Sharpe et pour intercept RF.
L’investisseur cherche le rendement et la stabilité (la réduction de volatilité). La
courbure de ses courbes d’indifférence dit combien de rendement il demande en
compensation d’un peu plus de volatilité. Selon ses préférences (position et courbure des
courbes d’indifférence du graphique 8.2), l’investisseur choisira un point sur la droite des
portefeuilles possibles. Il prêtera (q>0) ou empruntera (q<0) au taux sans risque et placera le
reste dans l’actif i.
Si l’investisseur détient uniquement l’actif i et fixe la proportion q à 0, son rendement
espéré sera Ri>RF , il exigera la prime de risque de l’actif i. On distingue trois types de
portefeuilles par rapport à l’actif i, à partir du rendement (8.20) :
q>0 : RP-RF = (1-q) (Ri-RF) <(Ri-RF)
q=0 : RP-RF = Ri-RF
q<0 : RP-RF = (1-q) (Ri-RF) > Ri-RF
Ces expressions donnent la prime de risque (RP-RF) de trois types de portefeuilles dans
un monde à deux actifs F et i. Il est aussi intéressant de montrer la relation entre la proportion
d’actif risqué (1-q) et la prime de risque du portefeuille. C’est ce que fait le graphique 8.3.
La volatilité P croît avec ces rendements, comme au graphique 8.2.
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-13
RP-RF
8.24
Ri-RF
0
1
1-q
Graphique 8.3. : proportion d’actif risqué et prime de risque
c) Prime de risque : généralisation au « marché »
Si nous prenons un portefeuille P quelconque, la relation (8.23) entre rendement et
risque nous dit que son rendement attendu RP est supérieur au rendement sans risque RF d’un
montant :
RP  RF  1  q RM  RF 
(8.24)
où RM est le rendement du marché des actifs risqués (qui remplace ici l’actif i).
Le portefeuille qui se composerait uniquement d’actifs risqués du marché et aurait
donc une proportion q = 0 d’actifs sans risque, aurait comme prime de risque :
RM - RF
(8.25)
L’intérêt de ce dernier résultat est de montrer que la prime de risque du portefeuille est
une fonction de la prime de risque du marché. Une prime de risque supérieure à celle du
marché s’imposerait pour un portefeuille composé d’emprunts (q<0) au taux sans risque RF
pour financer des placements au taux RM Il nous reste à préciser cette fonction pour un
portefeuille (ou un actif) quelconque et pas seulement pour un portefeuille simple décrit par la
proportion (q, (1-q)).
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-14
d) risque des titres et risque du marché (frontière efficiente de Markowitz)
Le marché est composé de nombreux actifs risqués, chacun d'un rendement propre R i
et d'une variance propre, i2. Entre les rendements de chaque paire d'actifs, il y a une
covariance cov(Ri,Rj) = ij. Nous voulons montrer qu'il est généralement avantageux de
détenir un portefeuille diversifié d'actifs, au sens qu'un investisseur obtiendra un même
rendement avec la diversification pour un moindre risque qu'avec un seul actif.
1e Etape : avantage de la diversification
Diversification à 2 titres :
Pour donner l'intuition de l'avantage de la diversification (mais pas de n’importe quelle
diversification), imaginons un marché qui contient 2 actifs i et j, dans une proportion w, 1-w.
Supposons en outre que les deux actifs ont le même rendement. Le rendement attendu de ce
marché est
RM = w Ri + (1-w) Rj = Ri = Rj
(8.26 )
La variance du rendement du marché est
M2 = w2 i2 + (1-w)2 j2 + 2 w(1-w) cov(Ri,Rj)
(8.27)
où cov(Ri,Rj) = ij = ij i j
Notons que ij est le coefficient de corrélation entre les rendements des actifs i et j. Il
apparaît particulièrement clairement que si cette corrélation (et covariance) est nulle, l'écart
type du portefeuille sera inférieur à l'écart-type (identique) des deux actifs qui le composent
puisque [w2 + (1-w)2] < 1. Si la corrélation est égale à 1, alors pour des variances égales, on
a:
M2 = w2 i2 + (1-w)2 j2 + 2 w(1-w) i j = (w+1-w)2 i2 = i2 .
et les actifs i et j sont trop semblables pour permettre une quelconque diversification6.
Cas particulier : Corrélation  = -1
Dans le cas particulier où  = -1, il est possible d’obtenir une volatilité nulle. C’est le
cas de la couverture parfaite, par exemple, pour une entreprise européenne, la couverture
6
On peut aussi écrire la variance du rendement de marché (8.27) comme :
M2 = [w i + (1-w) j ]2 - 2 w(1-w) (1-ij ) i j
ce qui montre clairement le rôle de la corrélation  entre i et j dans la détermination de la variance du marché.
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-15
d’une dette en dollars (achat de matières premières) par une créance en dollars (vente à
l’exportation) de même montant et de même maturité. On vérifie aisément dans l’expression
8.27 que la pondération w = ½ donne ce résultat pour i = j. Plus généralement pour i =
bj, la variance nulle sera obtenue pour w = 1/(1+b).
Diversification à n titres et variance de marché :
On peut généraliser l'argument pour la diversification à n titres. Pour simplifier,
imaginons que chaque titre a le même poids dans le marché (Levasseur et Quintart p. 358359). La variance sera
n
n n
(8.28)
 2    2 / n2       / n2
M
i
ij i j
i 1
i  j j 1
On peut définir la variance moyenne des i titres comme
 i2
n
   i2 / n
,
i 1
et la covariance moyenne (compte tenu de la répétition de la somme n(n-1) fois) comme :
n n
       / n2 .
ij
ij i j
i  j j 1
On obtient alors la variance du marché comme
2 2 /n  
n(n  1) / n 2
M
i
ij
dont la limite quand n tend vers l'infini est égale à la covariance moyenne des titres du
marché, soit  ij . Le risque d’un portefeuille diversifié infiniment ne dépend pas de la
volatilité i des actifs qui le composent mais seulement de la covarianceij entre ces
actifs. « Le seul vrai risque est le risque pour lequel il n’existe pas de possibilité de
diversification, c'est-à-dire de couverture par un risque opposé »
2e Etape : conditions de détention d’un titre quelconque
Contribution à une réduction de volatilité
Imaginons 2 titres, de variance identique7, mais de rendement différent Ri > Rj. A
quelle condition l’investisseur acceptera-t-il de détenir ne fut-ce que quelques unités du titre j
à rendement plus bas ?
Le rendement d’une combinaison des deux titres sera :
Ri > RM = w Ri + (1-w) Rj > Rj
(8.26’ )
Ce qui, en soi, ne présente pas d’intérêt. Cependant, la variance sera :
M2 = w2 i2 + (1-w)2 j2 + 2 w(1-w) ij i j
(8.27”)
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-16
ce qui peut être plus petit que la variance de chacun des deux titres, en particulier si ij = 0. En
effet [w2 + (1-w)2] < 1. Cette faible variance est intéressante pour composer des portefeuilles.
Elle donne une droite de budget de l’investisseur qui passe par RM et M et qui est au-dessus
des droites qui passent par les coordonnées chacun des actifs risqués individuels i et j (voir
graphique 8.4.).
Ajustement éventuel des rendements
Si le titre j est tellement corrélé avec le titre i qu’il n’offre pas de possibilité de
mélange M intéressant avec le titre i (toute combinaison des deux titres donne un rendement
inférieur et une variance supérieures à ce qu’on peut obtenir en combinant le seul titre i avec
l’actif sans risque sur la droite des portefeuilles possibles), il reste à ajuster le rendement du
titre j à la hausse. Cela peut se faire par une réduction de son prix (à revenu donné). Après
cet ajustement de prix, le rendement sera suffisant pour que le titre j soit détenu, ne fut-ce que
dans une très petite proportion (1-w).
Ajustement des pondérations
En variant la pondération w de chacun des actifs risqués i et j, on obtient un rendement
différent et une variance différente. On peut relier toutes les coordonnées RM(w) et M(w) par
une courbe dans l’espace Volatilité / Rendement. Cette courbe donne la variance minimum
qu’on peut atteindre pour chaque rendement possible du mélange à corrélation donnée entre
les rendements des composantes i et j. Cette courbe est appelée « frontière efficiente de
Markowitz ».
Chaque point de la courbe correspond à une pondération 0<w<1 différente8. Pour
connaître le prix d'équilibre des titres, nous devons donc connaître la pondération qui sera
choisi par les investisseurs sur la frontière d'efficience. Or si les investisseurs ont accès à un
actif sans risque, la pondération w la plus intéressante sur la frontière efficiente est celle qui
donne les coordonnées RM(w) et M(w) du point de tangence entre la droite qui passe par RF ,
0 et la frontière d’efficience (voir graphique 8.4.). Cette droite a le ratio de Sharpe le plus
élevé, donc le meilleur rapport entre prime de risque et volatilité.
La variance identique n’est pas nécessaire pour l’argument, un ratio de Sharpe strictement inférieur suffit.
La pondération w est la pondération en valeur (pq) des titres, si la quantité physique q est donnée, le prix p
ajuste la pondération comme le rendement (ce qui sera expliqué ci-dessous, au point e).
7
8
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-17
RM  RF
M
(M , RM )
pour w 
Ri  RF
i
Ri
R j  RF
j
Rj
RF
0
i = j
Graphique 8.4. Construction de la frontière efficiente
e) Le portefeuille du marché
Pondération : des quantités choisies aux quantités existantes
Pour composer le portefeuille P, nous avons envisagé deux types d’actifs, l’un sans
risque et l’autre risqué. Nous avons découvert ensuite l’avantage de la diversification ; ceci
conduit à détenir un mélange M d’actifs risqués plutôt que le seul actif i, même si l’actif i a le
plus haut rendement et la plus faible volatilité qu’on puisse trouver.
Jusqu’à présent nous
avons conçu la diversification comme un choix de pondération fait par chaque investisseur et
même comme un choix de quantité, sans préoccupation de savoir si ces quantités permettent
l’égalité entre l’offre et la demande de titres. Or il se fait, en réalité, qu’à tout moment, tous
les titres émis doivent se trouver quelque part et donc être détenus par un investisseur ou
l’autre qui s’en trouve satisfait.
Si un investisseur n’est pas satisfait de la pondération des titres i et j dans son mélange
de titres risqués, il voudra vendre le titre dont il juge la pondération excessive et acheter
l’autre, mais il devra trouver un agent avec qui faire l’échange. S’il ne trouve pas, il devra
accepter une baisse de prix et hausse de rendement du titre qu’il veut vendre et le contraire
Théorie monétaire (99-2004)
pour le titre qu’il veut acheter.
La valeur des actifs 8-18
Cette variation de prix est une autre façon d’ajuster la
pondération d’un titre dans un mélange. En effet, la pondération d’un titre dépend de la
quantité physique, matérielle, mais aussi du prix :

wi
pi  qi
n
 pi
i 1
(8.29)
 qi
L’équilibre entre la quantité de titres existants et la quantité de titres désirés pour leur
pondération est donc réalisable par un ajustement de la pondération via le prix de marché des
titres. Ceci entraîne évidemment un changement simultané de rendement des titres dont le
prix change à revenu donné.
Du portefeuille diversifié au portefeuille de marché
Si un agent peut détenir n’importe quel actif risqué i, il peut aussi bien détenir un
ensemble des actifs risqués existants dans la proportion où ceux-ci se présentent sur le
marché. En effet, si tous les agents voulaient détenir seulement l’action de l’entreprise XYZ,
son prix monterait ; ce qui élèverait sa pondération dans le marché (marché = p*q ;
pondération = (pj*qj)/pj*qj ) mais réduirait son rendement attendu (Revenu attendu / prix) et
réduirait son attractivité, tacepa. Les actions non-détenues disparaîtraient du marché. C’est
ici qu’intervient l’hypothèse d’efficience du marché : puisque le marché intègre toutes les
informations sur les rendements futurs dans les prix, il n’est pas intéressant de détenir les
titres dans une autre proportion que le marché.
Pour un marché boursier, le portefeuille de marché est l’ensemble des titres cotés à la
bourse. Le marché boursier devient donc l’actif risqué i du portefeuille P de l’équation 8.20.
Nous remplaçons désormais l’indice i par l’indice M pour souligner le rôle de référence du
marché.
Rôle de l’actif non-risqué
La possibilité de combiner actifs risqués et actif sans risque permet de trouver un point
optimal sur la frontière d'efficience. Il s'agit de relier le rendement sans risque à la frontière
d'efficience par une droite (graphique 8.5). Le point de tangence entre cette droite et la
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-19
frontière d'efficience donne le meilleur rendement des actifs risqués qu'on peut combiner avec
l'actif sans risque (voir graphique 8.2).
R
Portefeuilles
ou Securities market line (SML)
R1
A1
R2
A2
RF
2
22
12
Graphique 8.5. Frontière efficiente et droite de portefeuilles
Sur cette droite, l'investisseur choisira la proportion d'actif sans risque et d'actifs
risqués qui convient à ses préférences sur rendements et variance. Il n'y a donc aucune raison
de privilégier des actifs risqués par rapport à d'autres actifs risqués. Il suffit de combiner les
actifs risqués du marché au prix du marché avec l'actif sans risque9.
Ceci nous donne un équilibre pour le marché et une stratégie de placement. Nous
avons donc atteint l’objectif 1 de cet exposé : mesurer et choisir le risque et le rendement
d’un portefeuille dans un contexte d’équilibre général du marché des titres. Il faut cependant
encore vérifier que chaque actif risqué est correctement évalué (objectif 2, voir point f.).
Variations de l’équilibre
Le paradoxe du marché efficient est qu’il n’y a pas de possibilité d’arbitrage (vente
d’un actif sur-évalué contre un actif sous-évalué), car toute l’information disponible sur les
9
BBL Invest News 33 du 6-4-2001 présente exactement cela. Le portefeuille « agressif » se distingue du
portefeuille « neutre » par la répartition entre actions et obligations, mais pas par la répartition sectorielle ou
géographique des actions entre elles.
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-20
titres est dans les prix, mais en même temps ces prix bougent tout le temps car ils intègrent
précisément constamment de nouvelles informations.
Un premier choc peut être une variation du rendement sans risque RF. Ceci fait baisser
l’intercept de la droite de portefeuille et son point de tangence avec la frontière efficiente des
actifs risqués. On accepte donc des actifs risqués un rendement plus bas et on demande une
volatilité plus faible. Ce rendement plus bas s’obtient par suite d’une hausse de cours de
bourse (prix). Cette hausse de cours est parfaitement compatible avec ce qu’on sait par
ailleurs de la relation entre taux d’intérêt et cours des actions et des obligations. Cependant,
les mouvements de cours ne toucheront pas tous les actifs de la même manière car la théorie
de la diversification nous dit aussi que leur pondération change dans le mélange diversifié des
investisseurs et donc leur poids dans le marché et donc leur prix relatif à quantité donnée.
Un autre choc peut concerner les caractéristiques d’un titre : son rendement attendu, sa
volatilité ou sa corrélation avec les autres actifs risqués. Aussitôt une variation de son prix
devrait lui rendre la pondération souhaitée10.
En même temps, une modification de
corrélation (et parfois aussi de rendement ou de volatilité) modifie la forme de la frontière
efficiente de Markowitz et donc la pondération et le prix de bien d’autres titres.
Voici un exemple de modification de corrélation : imaginez que les constructeurs de
voitures remplacent la voiture en acier par la voiture en plastique. La corrélation entre le prix
des voitures et le prix de l’acier diminuerait, mais celle entre le prix des voitures et celui du
plastique augmenterait encore.
f) Relation entre chaque titre et le marché
1e approche : équivalence entre un titre et un portefeuille
On peut considérer un titre, l’action de l’entreprise RST par exemple, comme un
portefeuille particulier comparable à ou répliquant implicitement un portefeuille composé du
portefeuille du marché et d’une proportion d’actifs sans risque. Cette proportion peut être
négative en cas d’emprunt : q<0.
Quand nous parlons d’une entreprise particulière,
Ce glissement des pondérations en suivant les cours est l’attitude qui peut être prise pour la répartition des
actifs risqués (voir lettre boursière de CBC, No 289 du 16 juillet 2002 et 290 du 6 août 2002).
10
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-21
remplaçons l’indice P par l’indice j. La relation (8.23) entre rendement attendu et risque ou
(8.20) entre rendement attendu et proportion des deux actifs de référence suggère d’écrire :
R j  RF 
j
( RM  RF )  RF  (1 - q)(R M - R F )
M
(8.30)
Mais l’expression 8.30 pose des problèmes : on ne connaît généralement pas (1-q). On
peut essayer d’estimer les écarts-types j et M, mais cette valeur toujours positive (la racine
carrée de la variance des rendements propres à l’entreprise et au marché) poserait alors un
problème si on rencontrait un titre à faible rendement Rj<RF .
Traitons donc la relation entre Rj et (RM-RF) comme une inconnue j propre au titre j.
Cette manière de faire a l’avantage d’avoir une signification économique intéressante.
R j  R F   j ( RM  R F )
(8.31)
Le coefficient j est le rapport entre la prime de risque (Rj-RF) de l’actif j et celle du
marché . Il est la pente d’une droite dans l’espace (E(Rj-RF), E(RM-RF) comme au graphique
8.6.
E(Rj-RF)
j 
R j1  R j 2
RM 1  RM 2
Rj2-RF
2
Rj1-RF
1
RM1-RF
RM2-RF
E(RM-RF)
Graphique 8.6 : primes de risque du marché et d’un actif
La pente () est d’abord une pente théorique ou anticipée entre toutes les réalisations
statistiquement possibles de RM et de Rj. En effet, en utilisant les coordonnées des points 1 et
2 du graphique 8.6. et le fait que RF est supposé constant (puisque sa variance est nulle par
nature et que sa valeur future n’a pas d’autre raison de différer de sa valeur présente de
référence), on a :
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-22
R j 2  R j1
 j
RM 2  RM 1
Cette distribution théorique et future des rendements de M et i ne peut
malheureusement jamais être observée. Avec des observations passées jugées suffisamment
fiables, la pente () de cette droite peut être estimée par régression linéaire.
Quoi qu’il en soit des observations ou d’une simulation, le coefficient de pente du
graphique 8.6. donnant la relation entre la prime de risque du marché et celle du titre j se
calcule de la même façon. Il s’agit d’une expression où apparaît explicitement la covariance
entre le rendement de l’actif et celui du marché (pour rappel, la covariance se calcule comme
[(X-X) (Y-Y) ]/n et la barre indique les moyennesRj et RM ) :
1
 ( R jt  R j )( RMt  RM )
j
cov j , M  j M
n t
j 
 2   jM
1
varM
M
M
( RMt  RM ) 2

n t
(8.32)
Résultat 1 : la prime de risque d’un titre dépend de sa contribution au risque du marché
La valeur (8.32) de j montre que la prime de risque propre à un actif dépend de la
prime de risque du marché (de la volatilité du marché) et de la covariance entre les
rendements de l’actif et ceux du marché. « Le risque d’un actif dépend de sa contribution au
risque du marché ». En effet, nous pouvons donc écrire la prime du risque d’un titre
quelconque comme :
R j  R F   j ( RM  R F )
(8.33)
Résultat 2 : dans le rendement d’un titre, c’est seulement le risque non-diversifiable qui est
rémunéré
Nous pouvons réécrire l’expression 8.33 de la prime de risque comme une expression
du rendement de l’actif j et du rendement du marché :
R j  (1   j ) RF   j ( RM )
(8.33' )
Cette expression présente le rendement de l’actif j comme une moyenne pondérée du
rendement de l’actif sans risque et de l’actif risqué. Le coefficient de pondération est le j qui
donne précisément la contribution (corrélation fois variance relative) de l’actif j à la volatilité
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-23
du marché. Le coefficient de pondération mesure donc précisément le risque qui ne peut pas
être éliminé par la diversification que permet le marché. C’est ce risque non-diversifiable
dans le marché qui justifie le rendement spécifique du titre qui sinon serait simplement le
rendement sans risque.
2e Approche : place d’un titre dans les portefeuilles ou « amélioration de portefeuille »
Imaginons un marché bien étoffé et efficient et un actif sans risque.
A quelle
condition, un investisseur accepte-t-il d’ajouter un titre dans son portefeuille ? A l’équilibre, il
suffit que ce titre soit aussi bon (offre un aussi bon ratio de Sharpe) qu’un des nombreux
portefeuilles que l’agent peut constituer lui-même, donc que le titre soit sur la droite qui passe
par l’actif sans risque et le marché.
Ceci confirme que tout titre que sera détenu correspondra en fait à une combinaison de
l’actif sans risque avec le portefeuille de marché (dont ce titre fait évidemment partie).
Ceci confirme que la prime de risque peut être inférieure ou supérieure à celle du
marché.
Cas particulier j < 0
Enfin, l’estimation non-contrainte du j permet le j < 0. C’est le cas particulier d’une
prime de risque négative ou j < 0 qui montre l’intérêt d’un actif négativement corrélé avec le
reste du marché : il en diminue la volatilité, il étend la frontière de Markowitz vers la gauche.
On appelle ce type d’actifs de « valeurs-refuge », on pense à l’or, aux terres agricoles et
forestières, etc.. Cependant à l’équilibre ce type d’actif est rare et minoritaire, car on ne
conçoit pas que la frontière de Markowitz et les portefeuilles de marché aient une volatilité
globale M < 0.
Interprétation
Notons enfin qu’une relation croissante au rythme (RM-RF) entre les j des différents
titres j et leur prime de risque Rj-RF. Cette relation est présentée au graphique 8.7 dont on
reconnaîtra la similitude avec le graphique 8.3.
La prime de risque (et le j) ainsi estimée sur des observations passées est sujette à un
intervalle de confiance et n'est cependant pas la prime de risque théorique du titre j. Cette
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-24
dernière n'est pas observable et est difficile à déterminer à priori. C'est cependant elle qui est
pertinente pour l'évaluation instantanée de l'actif j.
Le Rj ainsi obtenu peut être utilisé comme facteur d'actualisation kj (rendement exigé)
dans le "Dividend Discount Model" présenté ci-dessus.
Rj-RF
RM-RF
RM-RF
0
1
j
Graphique 8.7 : Relation entre les j et leur prime de risque
g) interprétation pour l’investisseur
Stratégie de placement
Plus le risque d’un actif est élevé, plus le rendement doit être élevé.
Ce risque se décompose en deux parties : un risque de marché et un risque propre
déterminé par la corrélation entre le rendement de l’actif et le rendement du marché (pour
rappel, la corrélation = jj/M) ou plus exactement le rapport entre la covariance des
rendements de l’actif avec ceux du marché et la variance des rendements du marché.
Pratiquement donc, les actifs qui ont tendance à monter plus que le marché risquent
aussi de baisser plus que lui (les portefeuilles plus risqués, q < 0, à fort levier, sont aussi ceux
qui peuvent subir les plus grosses pertes) .
Si un actif a tendance à baisser quand le marché monte, c’est une valeur-refuge.
Il
sera détenu même si son rendement est très faible. Ce pourrait être le cas de l’or, des œuvres
d’art, des terres agricoles, mais peut-être surtout certaines obligations. (Il vaut donc mieux
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-25
passer par la covariance (8.28) que par le rapport des écarts-types (8.24), le second ne pouvant
pas être négatif).
En conséquence, pour avoir un rendement élevé, rien ne sert de surpondérer dans un
portefeuille des actifs particulièrement risqués. Il suffit de détenir une portion faible (ou
négative) d’actifs sans risque et pour le reste de détenir les actifs du marché.
Enfin, on peut estimer le  de diverses façons selon les données dont on dispose (8.30,
8.31) ou une des deux formules suivantes
Rj = aj + jRM
où aj = (1-j)RF,
Rj = j + (1-j )RF
où =RM
Evaluation des titres risqués
Le « Dividend Discount Model » disait d’évaluer le prix Pj d’un titre comme la somme
actualisée au taux kj des revenus futurs Ej qu’il procurera.
Pj



t 0
Ej
(1  k ) t

Ej
kj
Le taux d’actualisation propre à chaque titre restait cependant une inconnue. Il s’agit en fait
du rendement exigé, en effet :
Pj
 kj
Ej
Or le CAPM nous donne une façon d’estimer la prime de risque spécifique qui doit être
contenue dans le taux d’actualisation, et donc le taux d’actualisation devient le rendement
d’équilibre du CAPM :
k j  R j  R F   j ( RM  R F )
(8.33" )
Nous avons donc atteint notre 2e objectif, l’évaluation d’un actif en fonction de son revenu
attendu et des conditions du marché. La 2e approche nous montre en particulier l’intérêt de
ce calcul pour une introduction en bourse.
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-26
h) Prix de l’actif (prix d’une action)11 [hors matière du cours]
La prime de risque (8.29) nous donne le rendement exigé d’une action par rapport au
rendement sans risque. Le prix de cette action en bourse doit être tel que le rendement
attendu Rj soit effectivement assuré.
E ( Dt 1 )
(8.30)
1  RF   ( E ( RM )  RF )
Si nous nous en tenons à l’hypothèse d’absence de distribution de dividende, nous
devons réexprimer le rendement attendu en termes de prix attendus : E(Pjt+1), E(PMt+1), à partir
de l’expression (8.5) du rendement et de la prime de risque :
Pjt 
E ( Pjt1 )
Pjt
 1  RF   j (
E ( PMt 1 )
 1  RF )
PMt
(8.31)
Mais il faut aussi exprimer j en termes de prix attendus et non de rendements attendus (8.28).
Après quelques manipulations algébriques, ceci donne :
Pi ,t 
1
1  RF

 cov( Pi ,t , PM ,t ) 

  E ( Pi ,t 1 )  E ( PM ,t 1 )  (1  RF ) PM ,t  
var(
P
)
M



(8.32)
Avec Pi,t = la valeur actuelle d’une action ;
RF = le rendement d’un placement sans risque ;
E(Pi,t+1) = l’espérance de la valeur de l’action en t+1 ;
M = référence à un portefeuille type : le portefeuille du marché qui est le portefeuille
qui contient de toutes les actions existant sur le marché et ce proportionnellement à leur
capitalisation .
La valeur de l’action est la valeur actualisée des attentes (8.32). Le terme ente les
accolades est constitué de deux parties : d’une part, le prix futur attendu de l’action et d’autre
part, une prime de risque qui en est retranchée.
11
De Ceuster M. (1996), Financiële Economie, syllabus TEW, kursusdienst uitgeverij;
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-27
i) Evaluation et conclusions
Principes
De ce modèle, on peut tirer les implications suivantes qui sont vérifiées
empiriquement : « Les actifs qui présentent un risque systématique plus élevé, ont en
moyenne un rendement plus élevé » et « Les caractéristiques spécifiques des entreprises
n’influencent pas le rendement attendu des actions » (parce que var j n'apparaît pas seul dans
la formule de prime de risque, seulement var j / var M et covar j,M). « Les préférences des
investisseurs se révèlent dans la proportion d’actifs sans risques qu’ils détiennent, pas dans la
répartition de leur portefeuille entre actifs risqués.
Stratégie de « market timing »
Certains analystes pensent qu’une stratégie de « market timing » est une bonne
stratégie de gestion. Cela consiste à exploiter le cycle économique, et à sur-pondérer les
obligations à certains moments (baisse de taux d’intérêt, fin d’un cycle de demande) et à surpondérer les actions ensuite (remontée de taux d’intérêt, reprise de la demande) et à préférer
la liquidité pure (cash) dans la 3e phase où le taux de croissance commence à descendre et où
les taux d’intérêt et les actions ont atteint leur sommet12. Cela peut s’imaginer dans le cadre
des mouvements de la « Securities Market Line » de la figure 8.5. (effet de RF) qui accepte de
payer les actions cher quand le taux d’intérêt est bas.
Cependant, si les marchés sont
efficients, il sera difficile d’en profiter, si ce n’est à la marge (nouveaux placements ou retraits
à cibler selon ce « timing » ou pondérations à laisser évoluer selon l’évolution des cours13).
En outre, il convient de rester attentif aux revenus attendus des entreprises et au lien
entre le cours de bourse et ceux-ci. Acheter bas (c'est-à-dire un P/E faible) et vendre haut (un
P/E élevé) reste une bonne stratégie14. Cette stratégie ne doit pas être confondue avec
« acheter ce qui monte et vendre ce qui baisse », qui pourrait fort facilement se transformer en
« acheter haut » (ce qui a monté) et vendre bas (ce qui a baissé) et causerait des pertes
répétées.
Voyez Trends 10 maart 1994 : Ivan Baldewijns “Beleggingscyclus: Hoe, wat, wanneer?”
Une étude récente ….
13
Ce glissement des pondérations en suivant les cours est aussi l’attitude qui peut être prise pour la répartition
des actifs risqués (voir lettre boursière de CBC, No 289 du 16 juillet 2002 et 290 du 6 août 2002).
14
Certaines etudes empiriques ont essayé de tester des stratégies d’investissment « contraires » et ont parfois
montré des possibilités de gains. Si elles sont confirmées ces études montrent en même temps que les marchés
ne sont pas efficients à tout moment pour tous les titre, mais seulement en moyenne.
12
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-28
Les journaux financiers publient de plus en plus d’information15. La croissance des
bénéfices attendus et leur révision à la hausse sont des signaux d’achat pour autant que le P/E
ne soit pas trop élevé (P/E=1/k). Les betas publiés sont à prendre avec prudence à cause des
difficultés d’estimation, mais s’ils semblent justifiés ou concordants ils sont intéressants. La
diversification théorique de marché étant difficile à atteindre, une diversification sectorielle
est un minimum. La volatilité d’un titre en soi n’est théoriquement pas importante au niveau
du portefeuille, mais une volatilité élevée vous avertit que le cours sera volatil. Si cela se
combine avec un beta élevé soyez prudent avant d’augmenter la cyclicalité de votre
portefeuille.
Investir dans un indice est une bonne approximation d’un portefeuille de
marché, mais l’indice n’est souvent qu’une partie du marché et il connaît des entrées et des
sorties, en outre, les titres qui ont bien monté ont tendance à y être surpondérés (à cause de
leur hausse de prix).
Attention : Prudence
Emprunter pour acheter des actions (ou tout actif risqué) est extrêmement dangereux.
Il faut savoir exactement ce qu’on perd en cas de sinistre : on peut prendre le risque, mais il
ne faut pas le sous-estimer. Le risque est généralement rémunéré, mais pas toujours sinon ce
n’est plus un risque, donc il faut savoir quelle perte de revenu, de capital, de niveau de vie on
et prêt à assumer.
En outre, sur les marchés réels, les coûts de transaction ne doivent pas être sousestimés.
Un problème particulier pour de nombreux titres est le manque de « liquidité » : peu
d’acheteurs et peu de vendeurs. Un gros ordre d’achat ou de vente a un fort effet sur le cours.
Un ordre est vite « gros », on ne travaille donc pas vraiment « à prix donné »
Bulles financières
Ce qui a été vu au chapitre 6 concernant les bulles spéculatives s’applique aux actifs
financiers aussi bien si pas mieux qu’à l’hyperinflation. Les titres ne sont pas toujours sur la
trajectoire fondamentale du prix déterminé par les revenus futurs actualisés au taux approprié.
Notez cependant qu’une bulle spéculative offre une prime de risque importante et la certitude
de son éclatement, mais l’incertitude sur le moment de la réalisation de l’éclatement.
diffère des revenus futurs qui, eux, suivent plutôt une marche au hasard.
15
“De Tijd” (ex- Financiële en Economische Tijd) du lundi est particulièrement fourni.
Ceci
Théorie monétaire (99-2004)
La valeur des actifs 8-29
Extensions
Notons enfin que la recherche continue pour introduire soit des imperfections de
marché, soit des fonctions d’utilité plus riches que notre hypothèse « moyenne-variance », soit
des risques de consommation, soit des risques propres à l’investisseur ou pour améliorer les
estimations économétriques.
Pour en savoir plus sur le lien avec la consommation, vous pouvez consulter : Mehra
& Prescott (1985), « The Equity Premium : a Puzzle », Journal of Monetary Economics, 15,
p.145-161. et Mehra & Prescott (2003) « The Equity Premium in Retrospect » NBER
Working Paper 9525.
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