Les effets du tabac sur l’appareil respiratoire
Les trois modes d’action de la fumée du tabac
La fumée du tabac agit directement ou indirectement sur presque tous les organes
du corps. Elle agit de trois façons : par la chaleur, par une action directe sur les
voies respiratoires et par passage de certains produits dans le sang.
• La température de combustion du tabac est de l'ordre de 850°C. Lorsque la fumée
de cigarette est inspirée, elle est refroidie par le passage à travers le filtre et par
la partie non consumée de la cigarette si le fumeur laisse un mégot long. Mais, chez
les fumeurs de pipes, la fumée reste très chaude ; la fumée est alors capable de
provoquer des brûlures chroniques. Ces brûlures chroniques, même minimes,
détériorent le goût et favorisent la survenue de cancers, en particulier des lèvres
et de la langue.
• La fumée une fois inhalée par la bouche entre directement en contact avec les
revêtements de la bouche, de la gorge et du poumon. Les composants toxiques se
déposent sur le revêtement muqueux interne qui tapisse l’intérieur du corps. Ils
peuvent y exercer durablement leurs effets, car ils ne sont parfois que
difficilement éliminés.
• Le poumon permet les échanges des gaz, en particulier oxygène et gaz carbonique
entre les voies respiratoires et le sang. Il permet également le passage d'un certain
nombre de substances toxiques inspirées de l’air vers le sang. Les gaz ou les très
fines particules de taille inférieure au dix millième de millimètres sont capables de
passer à travers la membrane air/sang du poumon et gagner le sang. Une fois
passées dans les poumons, ces substances toxiques sont véhiculées par le sang dans
les artères vers tous les organes du corps.
Les deux fumées du tabac sont concernées. Le courant primaire pris par le fumeur
et le courant secondaire qui s’échappe dans l’air ambiant de la cigarette. Une
cigarette quand on la laisse brûler dans un cendrier libère 5 milliards de particules
de 0,1 micron de diamètre. Quand on la fume elle libère 1 milliard de particules de
0,1 micron de diamètre, car la combustion est meilleure avec l’aspiration de la fumée
qui attise le foyer. En fumant dans une voiture de 2 m3 non ventilé, le fumeur
inhalera plus de fumée par tabagisme passif qu’il n’en prend en tirant 15 bouffées
de 45 ml sur sa cigarette. Les effets du tabagisme passif concernent donc aussi
bien les non fumeurs que les fumeurs.
La fumée du tabac agit par 3 mécanismes : sa température élevée, l’effet direct de
la fumée sur les voies respiratoires et par passage dans le sang de certains
composés.
Bouche, nez, gorge et œsophage
• Les lèvres, la langue et les autres parties de la bouche sont les plus exposées à la
fumée du tabac. La bouche est cependant naturellement armée pour se défendre
contre les agressions de la chaleur et les agressions chimiques. Les impuretés et les
produits toxiques en sont généralement rapidement éliminés. Les cancers des lèvres
et de la langue sont cependant plus fréquents chez les fumeurs de cigarettes, mais
ils ne surviennent qu’après de longues années d’exposition. Chez les fumeurs de
pipes, les effets de la chaleur sont souvent rapides et intenses provoquant des
brûlures chroniques des lèvres et du bout de la langue qui font le lit du cancer.
• Les dents n’ont pas de moyens efficaces de défense. Le tabac noircit les dents,
augmente les dépôts de tartre brun. A ces effets esthétiques, on peut associer la
mauvaise haleine des fumeurs, surtout le matin quand l’haleine prend une odeur de
tabac froid. Le tabac est surtout nocif pour les dents du fait de son action sur les
gencives. L’altération des gencives est responsable d’un déchaussement et
d’altérations graves des dents.
• Le nez est peu atteint par la fumée du tabac, sauf chez les patients qui expirent la
fumée par le nez, provoquant alors une irritation du nez (rhinite). Il faut noter que
le nez est spécialement irrité chez les personnes qui prisent le tabac sans le faire
brûler. La « prise » consiste à placer un petit tas de tabac le plus souvent au dos du
pouce. Le priseur « sniff sa prise » en inspirant violemment. La nicotine atteint
rapidement le cerveau à travers la muqueuse du nez, mais les réactions
inflammatoires du nez sont importantes, provoquant souvent des écoulements
nasaux et une sensation de nez bouché.
• Les papilles gustatives sont placées au sein de la muqueuse, dans la partie haute et
postérieure du nez. Ces papilles sont au contact direct de la fumée du tabac.
Progressivement, leurs propriétés gustatives vont s’altérer entraînant une
incapacité à différencier le goût des aliments. Cette perte du goût est dans un
premier temps régressive à l’arrêt du tabac, puis devient définitive.
• Les organes olfactifs sont de véritables excroissances du cerveau, arrivant
directement au contact de la muqueuse de la partie postérieure du nez permettant
d’apprécier bonnes et mauvaises odeurs. Le nombre de vésicules et de cils olfactifs
est modifié par la fumée du tabac. Les altérations sont parallèles à l’ancienneté et à
l’intensité du tabagisme. Le tabac altère ces organes olfactifs, de façon d’abord
transitoire, puis après un certain temps de façon définitive. Si le fumeur quitte
trop tard le tabagisme, il ne retrouvera jamais la possibilité de différencier les
odeurs : c’est l’anosmie.
• Le pharynx (la partie haute de la gorge) et le larynx (la partie basse de la gorge)
sont particulièrement touchés par la fumée du tabac. La fumée du tabac y est très
dense et les grosses particules en suspension de la fumée s’y déposent
préférentiellement. Les cordes vocales sont particulièrement touchées car elles
forment un rétrécissement sur les voies respiratoires, où beaucoup de particules de
la fumée vont s’impacter.
Les modifications de la voix chez les fumeurs sont liées à cette atteinte des cordes
vocales. Les fumeurs et les fumeuses ont un timbre de voix plus rauque que les non
fumeurs. En arrêtant de fumer la voix ne revient pas toujours à la normale.
• l’œsophage, qui conduit les aliments de la bouche à l’estomac, n’est atteint
qu’indirectement. Les produits de la fumée qui se sont déposés dans la bouche et la
gorge sont déglutis vers l’œsophage. L’œsophage irrité est à l’origine de douleurs
d’œsophagite.
• Les gastrites et ulcères de l’estomac sont aussi beaucoup plus fréquents chez les
fumeurs que chez les non-fumeurs.
Action du tabac sur le revêtement muqueux
Les bronches sont revêtues d’une muqueuse constituée d’une couche de cellules qui
les protège. Les cellules des bronches sont pour la plupart des cellules à bordures
ciliées, munies chacune de centaines de petits cils battant ensemble. Ces
battements bien organisés permettent d’éliminer les sécrétions, les poussières et
les microbes, qu’il s’agisse de bactéries ou de virus. Les cellules glandulaires
sécrètent le mucus bronchique qui aide à engluer les impuretés et les éliminer par
un véritable escalator muco-ciliaire.
L'irritation par le tabac du revêtement bronchique a 2 conséquences :
• Dés les premières bouffées de tabac, les cils bronchiques se paralysent.
L'escalator muco-ciliaire devient incapable de faire remonter les particules et les
sécrétions bronchiques vers la bouche. En cas de prolongation du tabagisme, les cils
disparaissent progressivement rendant ces cellules incapables de jouer leur rôle
dans l'évacuation des sécrétions et de toutes les particules polluantes contenues
dans l'air inspiré. La toux devient le seul recours pour éliminer mucus et particules.
• Parallèlement sous l’effet de la fumée du tabac, les cellules glandulaires et les
glandes bronchiques sécrètent des quantités excessives de mucus. En fin de nuit,
au moment du réveil, l'amoncellement de sécrétions dans le poumon durant la nuit
obligera le fumeur à tousser durant quelques temps pour assurer l’évacuation des
crachats permettant une « toilette bronchique ». Cette toilette bronchique
matinale évite l'encombrement, si le fumeur prend soin de bien cracher en toussant.
La poursuite de l'irritation va transformer profondément le revêtement muqueux
bronchique et provoquer une transformation dite « métaplasie » de la muqueuse. Les
cellules au lieu de rester sur une seule couche, vont s’empiler. Cette métaplasie fait
le lit du cancer des bronches (le plus souvent appelé cancer du poumon). La
métaplasie met plus d'un an pour disparaître après l'arrêt total du tabac.
L’altération progressive du revêtement muqueux des bronches par la fumée du
tabac, conduit à paralyser les cils. Avec la poursuite du tabagisme les cils s’altèrent
puis disparaissent. Enfin au dernier stade se produit une transformation métaplasie
de la muqueuse qui fera le lit du cancer.
Action du tabac sur les macrophages alvéolaires pulmonaires
Les macrophages alvéolaires pulmonaires sont les « cellules à poussière » du poumon.
Les macrophages alvéolaires assurent en grande partie l'épuration des particules de
très petite taille (<1 micron) qui arrivent jusqu'aux alvéoles pulmonaires au plus
profond du poumon. Chez les fumeurs, malgré l'augmentation de leur nombre, les
macrophages alvéolaires sont incapables d'assurer correctement leur fonction. Les
tests mesurant l'adhérence et l’habilité des macrophages alvéolaires à digérer les
particules par phagocytose sont très perturbés chez le fumeur.
Le nombre des macrophages alvéolaires est tellement augmenté par la fumée du
tabac qu’il est ainsi impossible d'interpréter correctement le résultat de l’examen
du produit d’un « lavage alvéolaire » pulmonaire sans savoir si le malade est fumeur
ou non fumeur. Il a été établi une norme "fumeur" et une norme "non fumeur" pour
cet examen. Les macrophages alvéolaires, s’ils sont trop enfumés, ne peuvent jouer
leur rôle normal dans l’élimination des poussières. La fumée du tabac est non
seulement toxique en elle-même pour les macrophages alvéolaires, mais elle rend
également le poumon plus sensible aux autres polluants que ces macrophages sont
censés éliminer.
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