CHI 013a – J. Kerlouégan – Décembre 2005
légendes autour de sa naissance. Il fait partie d’une des ethnies qui peuplent la steppe, l’ethnie
mongole, établie entre les rivières Onan et Kerulen, dans une région de collines et de prairies, au sud
de la forêt sibérienne et au nord de la capitale actuelle de la Mongolie, Oulan Bator. Cette ethnie vit
entourée d’autres ethnies, tantôt rivales tantôt amies (les alliances se font et se défont au gré des
circonstances, et les revirements sont les prétextes de campagnes punitives). Ces ethnies sont divisées
en tribus, elles-mêmes divisées en lignages et clans. Temüjin fait partie du clan des Bordjigin. C’est
un chef très charismatique, à l’œil de chat, au physique imposant, au mode de vie frugal (il n’aimait
pas le luxe chinois), aussi généreux avec ses loyaux serviteurs ou compagnons d’armes que violent et
sans pitié pour ses ennemis ou ceux qui l’ont trahi.
Le thème de la vengeance est très important dans la culture mongole. Enfant, Temüjin tue un
de ses demi-frères qui lui a volé un butin de chasse. On le voit ensuite participer à l’expédition
punitive contre les Merkits (1184), qui avaient enlevé sa future épouse, Börte (la fille d’un chef
Onggurat), à laquelle il avait été fiancé dès son plus jeune âge; puis écraser les Tatars, qui avaient
empoisonné son père (vers 1174-1175); exécuter son vieil ami d’enfance Jamuga, coupable d’être
passé plusieurs fois chez l’ennemi (1205). C’est souvent par vengeance (et par esprit conquérant) que
les Mongols rayent de la carte des territoires entiers, rasent les villes, massacrent leurs habitants. Les
soldats mongols coupent les têtes ou les oreilles pour avertir la population de leur passage, dressent
des pyramides de têtes (voir les témoignages horrifiés de chroniqueurs de la chrétienté occidentale).
GK a passé presque toute sa vie à faire la guerre.
En une vingtaine d’années, Temüjin, qui est fait khan au quriltai de 1187 ( ?), commence par
mettre sous sa tutelle les peuples de la steppe (prairies ou forêts), dont certains étaient bien plus
nombreux que les Mongols :
- les Tatars sont battus en 1196 (Temüjin s’allie pour cela aux Jin, qui le récompensent de
titres honorifiques).
- les Kereits, longtemps alliés de Temüjin (son père avait aidé un chef Kereit), nestoriens, sont
battus en 1203. Temüjin se proclame leur chef.
- les Naimans (peuple lettré, d’origine turque, ayant adopté une écriture ouïghoure,
bouddhistes et nestoriens), sont vaincus en 1204.
L’une des clés du succès est un nouveau type d’organisation militaire, fondé sur un système
décimal : des unités de 10, 100, 1000 (mingghan) ou occasionnellement 10 000 hommes (tümen). Ces
armées sont mobiles, souples, disciplinées. Genghis veille à répartir le commandement, de façon à
éviter qu’un chef d’armée prenne trop de pouvoir. Il n’hésite pas à promouvoir les soldats du rang. Les
chefs d’armée disposent de gardes personnelles, les kesig, qui servent en même temps d’intendance
personnelle mobile. Ce système d’organisation militaire permet aussi de briser les liens tribaux.
Devenu le maître de la Mongolie, le khan Temüjin reçoit son nom de Cinggis
(« l’océanique », « l’universel » ? ou « le grand », « le brave » ?) au quriltai de 1206. Entre temps, il
commence à promulguer des lois, notamment sur la discipline militaire, par exemple sur l’exécution
des déserteurs, la responsabilisation des chefs. Ces lois deviendront eu fil du temps le yasaq, un code
politique et moral plein de traditions ancestrales, réservé aux Mongols (cf. 3.4). Il dote la langue
mongole d’un alphabet, adapté de l’alphabet ouïghour (1204)(c’est ce même alphabet ouïghour que
les Mandchous utiliseront au 17e siècle pour créer leur alphabet).
Plusieurs peuples se soumettent de leur plein gré, comme les tribus de la forêt sibérienne
(1207), les Kirghizes (1207) et surtout les Ouïghours (1209). Les Ouighours, peuple lettré, de langue
turque, descendants des puissants Ouïghours de l’époque des Tang, avaient été repoussés vers l’ouest
(dans les oasis du Xinjiang) au 9e siècle et s’étaient sédentarisés. Ils devaient avoir une profonde
influence culturelle sur les Mongols et s’avérer plus tard des intermédiaires précieux avec les Chinois.
Au 13e siècle, ils sont de plus en plus bouddhisés (mais pas encore Musulmans comme aujourd’hui).
Première victoire sur un peuple sédentaire. GK s’attaque ensuite au vaste État Tangut (dynastie
appelée Xixia par les Chinois), dans la région des Ordos, et conclut une paix avec lui en 1210.
GK peut ensuite s’attaquer aux Jin, en Chine du nord. La première attaque contre eux, en
1211, ne sert qu’à rapporter du butin. Le blocus de Pékin, en 1213-1214, est levé car Pékin ne tombe
pas : les Mongols concluent des accords de paix avec les Jin. Mais ceux-ci fuient, dans la foulée, en
lieu plus sûr, à Kaifeng (où ils tiendront encore 20 ans). Furieux, GK revient, et cette fois prend Pékin
désertée, détruisant une bonne partie de la ville. Il faut noter que le pouvoir Jin était contesté en son