avant-propos - La Gazette des Communes

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RENOVER
L’OBSERVATOIRE DE LA PARITE
Rapport sur la création
d’un Haut Conseil à l’égalité
entre les femmes et les hommes
7 novembre 2012
Rapporteure : Danielle BOUSQUET
AVANT-PROPOS .............................................................................. 3
I. POURQUOI REFONDER L’OBSERVATOIRE DE LA PARITE ? ..................... 7
A. L’Observatoire de la parité : un intitulé et des missions, aujourd’hui trop
restrictifs ..................................................................................... 7
B. Les autres instances consultatives à adapter ....................................... 10
1. Le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle ............................... 10
2. La Commission nationale contre les violences envers les femmes ........... 11
3. Le Conseil supérieur de l’information sexuelle, de la régulation des
naissances et de l’éducation familiale ............................................... 13
4. La Commission sur l’image des femmes dans les médias ...................... 15
C. Un champ inexploré : Droits des femmes et enjeux européens et
internationaux ........................................... Error! Bookmark not defined.
D. Renforcer les liens avec les collectivités territoriales ............................ 17
E. Mutualiser et rationaliser les moyens existants .................................... 19
II. REPONDRE A L’IMPERATIF DE TRANVERSALITE ................................. 21
A. Favoriser l’interministérialité ......................................................... 21
B. Diffuser une approche intégrée de l’égalité dans toutes les sphères de la
société ....................................................................................... 22
C. Enrichir la démarche du Ministère des droits des femmes sur les études
d’impact genrées ........................................................................... 24
III. LE VISAGE DU HAUT CONSEIL A L’EGALITE ENTRE LES FEMMES ET LES
HOMMES ....................................................................................... 27
A. Ses missions .............................................................................. 27
1. Organiser la concertation des acteurs compétents en matière d’égalité
femmes-hommes......................................................................... 27
2. Observer les inégalités dans l’ensemble des champs de la vie sociale ...... 27
3. Analyser et évaluer les politiques publiques – Améliorer la méthodologie
des études d’impact genrées .......................................................... 28
4. Capitaliser les actions des territoires............................................. 28
5. Etre un lieu de veille et de diffusion de l’information ........................ 29
B. Ses champs de compétences .......................................................... 29
1. Parité politique, économique et sociale .......................................... 30
2. Articulation des temps de vie ...................................................... 30
3. Violences de genre ................................................................... 31
4. Socialisation et lutte contre les stéréotypes sexistes .......................... 31
5. Droits des femmes et enjeux internationaux et européens ................... 33
6. Santé des femmes, droits sexuels et reproductifs .............................. 32
C. Son organisation ......................................................................... 35
1. La commission permanente ......................................................... 36
2. Les commissions thématiques ...................................................... 37
3. Les collèges ........................................................................... 37
D. Son fonctionnement .................................................................... 38
1. Les membres et l’organisation du travail ........................................ 38
2. Les ressources humaines ............................................................ 39
CONCLUSION ................................................................................. 40
ANNEXES ...................................................................................... 41
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AVANT-PROPOS
« La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à
ceux de l'homme ». Reconnu dès 1946 dans le préambule de la Constitution, ce
principe fondamental n’a cessé de guider l’action du législateur depuis plus d’un
demi-siècle.
D’abord reconnues à égalité avec les hommes en 1944 avec l’obtention du droit de
vote, dans le monde du travail grâce à la loi de 1972 qui introduit le principe « à
travail égal, salaire égal », puis à égalité avec les hommes dans l’accès aux
responsabilités, dans l’article premier de la Constitution qui inscrit le principe
selon lequel la loi « favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats
électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et
sociales », les femmes voient leurs droits défendus par un arsenal législatif
puissant.
Et cependant, bien qu’elle soit conquise et acquise en droit, l’égalité
entre les femmes et les hommes peine à se concrétiser dans les faits et à se
manifester dans la vie quotidienne des Françaises et des Français. Malgré la loi sur
la parité, seul un quart des représentants de la Nation sont des femmes (26,6 % des
députés et 21,8 % des sénateurs).
Malgré la loi de 1972 sur l’égalité professionnelle complétée par la loi Roudy de
1983 puis la loi Génisson de 2001, aujourd’hui la dure réalité vécue par les
femmes, quel que soit leur niveau de qualification, c’est « à travail égal, salaire
inégal », puisque les écarts de salaires bruts annuels moyens persistent autour de
27 %.
Plus diplômées que les hommes (48 % des femmes de 25 à 34 ans ont fait des
études supérieures contre 39 % des hommes du même âge), les femmes se cognent
toujours au « plafond de verre », restant éloignées des postes de décision aussi
bien dans le secteur privé que dans la fonction publique. Incitées dès la petite
enfance à s’imaginer institutrices ou infirmières, orientées dès l’adolescence vers
des parcours moins scientifiques et moins sélectifs que ceux des hommes, les
femmes devenues adultes choisissent à 88 % d’exercer dans le secteur tertiaire. Or,
les métiers de services sont aussi les plus précaires, puisqu’ils s’exercent en bonne
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partie sous forme de temps partiel. Aussi, 30 % des femmes qui travaillent sontelles à temps partiel contre 6 % des hommes et elles représentent plus de quatre
salariés sur cinq travaillant à temps partiel.
C’est dès l’enfance qu’il faut combattre le déterminisme de genre, en
déconstruisant les stéréotypes sexistes qui conduisent, par exemple, à ce
qu’aujourd’hui, encore, les femmes consacrent, en moyenne, 3h52 par jour aux
tâches domestiques, contre 2h24 pour les hommes.
Enfin, près de 10 % des femmes sont, encore aujourd’hui, victimes de violences
sexistes de la part de leurs compagnons. Alors que 75 000 viols sont commis chaque
année, en France, seul 1 agresseur sur 10 fait l’objet d’une poursuite judiciaire et
2 % des violeurs, seulement, sont in fine condamnés.
La marche a été longue depuis 1945 et elle n’a pas encore atteint son but.
En effet, à toutes les lois adoptées, à toutes les réformes engagées, il a manqué
une cohérence qui aurait exigé des ambitions fortes, des objectifs clairement
identifiés, des actions cordonnées pour parvenir à l’égalité réelle. Il a manqué
une volonté politique soutenue à travers le temps, reconnaissant la situation
d’infériorité et d’infériorisation des femmes comme la résultante d’un système
social, qui a produit les inégalités de genre qui irriguent tous les aspects de la
société.
Aujourd’hui, enfin, dans le nouveau contexte politique, les droits des
femmes sont redevenus un vrai sujet politique.
Le premier changement, et il est majeur, c’est l’engagement du Président de la
République en faveur des droits des femmes, engagement qu’il a concrétisé en 40
propositions :
-L’égalité professionnelle
-La lutte contre la précarité
-L’éducation sexuée et la sensibilisation au sexisme
-Le soutien à la parentalité
-Le renforcement de la parité politique et le partage du pouvoir de décision dans
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toutes les autres sphères
-La lutte contre les violences sexistes
-La consolidation des droits fondamentaux que sont les droits sexuels, l’éducation
sexualisée, la contraception et l’IVG.
Autant d’enjeux qui doivent faire l’objet d’une approche spécifique pour mieux
appréhender le caractère systémique de leur imbrication et l’aspect transversal de
ces questions.
Cet engagement fort du candidat François Hollande sur les droits des femmes a été
immédiatement mis en œuvre par le nouveau Président qui a instauré -moment
historique dans notre République- un gouvernement paritaire et le retour d’un
Ministère des droits des femmes.
Cette nouvelle donne politique et institutionnelle doit conduire, aujourd’hui, à un
saut qualitatif des Pouvoirs publics sur cet enjeu d’exigence d’égalité réelle, enjeu
parfois ignoré, souvent minimisé.
Un engagement plus fort des Pouvoirs publics, la mise en place de politiques
publiques d’égalité, dans tous les domaines, et ce sera l’ensemble de la société
qui, à son tour, sera irriguée et deviendra plus exigeante.
C’est ainsi que, plus on dénoncera les mécanismes de domination, plus justement
on les analysera, et plus les politiques publiques mobiliseront fortement en faveur
de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Alors que cette nouvelle ambition n’est enclenchée que depuis quelques mois,
c’est bien une nouvelle manière d’appréhender les droits des femmes qui se fait
jour.
Les acteurs mobilisés pour l’égalité de genre voient, avec raison, dans la
période qui s’ouvre, une chance historique d’effectuer un bond qualitatif, sans
comparaison avec les politiques menées ces dernières années. Il faut rappeler, en
effet, que la société civile était souvent bien seule à agir –avec parfois le soutien
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de quelques collectivités territoriales- parfois, au coup par coup, contre les
remises en cause des droits des femmes. L’attente et les exigences sont très fortes
Aujourd’hui, c’est avec tous ces acteurs de l’égalité de genre qu’il convient de
construire des politiques cohérentes, transversales, afin de faire progresser
l’égalité dans tous les domaines et sur tous les terrains. Car il existe enfin une
volonté politique affirmée de valoriser les expériences de terrain et les
innovations que, partout, les acteurs et actrices de la société civile mettent en
place, parfois depuis de nombreuses années.
Il faut souligner, par ailleurs, l’immense différence de contexte que porte le
mouvement féministe. Indéniablement, les associations féministes se sont
mobilisées pour que soit créé un Ministère des droits des femmes. Et,
parallèlement, elles expriment la forte attente d’un cadre où elles puissent
prendre la parole, être reconnues, entendues, et travailler avec les autres acteurs
de l’égalité, ainsi qu’avec les représentants des Pouvoirs publics.
La capacité qu’a, d’ores et déjà, montrée la Ministre des droits des femmes à
avancer sur tous les sujets, a contribué à créer la confiance qu’ont, aujourd’hui,
les associations féministes envers l’action du Gouvernement.
Cependant, s’il n’y avait pas un lieu de concertation indépendant, qui rassemble
les associations aux côtés d’autres partenaires, où elles puissent être écoutées, qui
permette une expression forte de leur part, elles seraient contraintes de trouver
d’autres voies et d’autres lieux pour s’exprimer. Elles le feront, alors, de manière
éclatée, et sans que soit créé le rapport de forces nécessaire pour faire avancer
partout l’exigence d’égalité.
Ce nouveau contexte politique et institutionnel demande, à l’évidence, d’imaginer
de nouveaux outils d’information, de réflexion et de concertation. C’est pourquoi,
comme l’indique la lettre de mission de la Ministre des droits des femmes, « le
Gouvernement a décidé de repenser le rôle et les missions de l’Observatoire de la
parité ».
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Ces nouveaux outils joueront le rôle d’interfaces entre la société civile et les
décideurs politiques, apporteront un soutien ambitieux et exigeant aux politiques
menées en matière d’égalité et concourront à renforcer l’exigence de prise en
compte de l’égalité entre les femmes et les hommes.
Aujourd’hui, il existe déjà un certain nombre d’instances de consultation, peu ou
mal identifiées, peu ou pas coordonnées. De l’avis général, l’organisation de ces
instances consultatives en matière de droits des femmes (aux compétences et
statuts divers) doit être optimisée au regard des objectifs que le Gouvernement se
fixe aujourd’hui.
C’est la raison pour laquelle, afin de dégager les principes fondateurs qui serviront
de base à l’édifice d’une nouvelle instance, le choix a été fait d’auditionner, le
plus largement possible, les forces vives du combat pour l’égalité entre les
femmes et les hommes, qu’il s’agisse de chercheu-res, d’associations, des
anciennes Rapporteures de l’Observatoire, d’élus, de juristes, etc…
Ce rapport propose donc de rationaliser et de reconfigurer les instances
existantes dans l’objectif de mettre en place une instance de coordination
indépendante qui rende, enfin, incontournable, la question de l’égalité réelle
entre les femmes et les hommes, notamment en valorisant l’expertise sur ce
sujet.
I. POURQUOI REFONDER L’OBSERVATOIRE DE LA PARITE ?
A.
L’Observatoire
de
la
parité :
un
intitulé
et
des
missions,
aujourd’hui trop restrictifs
L’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes a été fondé en 1995 à
la suite d’une promesse électorale de Jacques Chirac.
Il a pour mission de « centraliser, faire produire et diffuser les données, analyses,
études et recherches sur la situation des femmes aux niveaux national et
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international ; d’évaluer la persistance des inégalités entre les sexes et d’identifier
les obstacles à la parité ; d’émettre des avis sur les projets de textes législatifs et
réglementaires dont il est saisi par le Premier ministre ; de faire toutes
recommandations et propositions de réformes au Premier ministre afin de prévenir
et de résorber les inégalités entre les sexes et promouvoir l'accès à la parité ;
remettre tous les deux ans un rapport général au Premier ministre qui est présenté
au Parlement et publié. »
Présidé par le Premier ministre (ou par délégation par le ou la Ministre des droits
des femmes), il est actuellement composé de 37 membres dont un-e Rapporteur-e
général-e nommé-e pour un mandat de 3 ans renouvelable une fois.
Ses membres sont choisis en raison de leur compétence et de leur expérience.
Aucun collège précis n’est défini par décret. Seul est défini le statut de membres
de droit des Président-es des délégations aux droits des femmes de l’Assemblée
nationale, du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental.
L’Observatoire est né d’une forme de « péché originel » 1 puisqu’il a été créé à un
moment où d’autres structures consultatives existaient déjà comme le « Conseil
supérieur de l’information sexuelle, de la régulation des naissances et de
l’éducation familiale » ou le « Conseil Supérieur de l’égalité professionnelle ». Dès
lors, compte tenu de son intitulé, l’Observatoire de la parité s’est essentiellement
consacré à la parité politique et ne s’est ouvert à d’autres travaux que plusieurs
années après sa création.
Pour autant, cette instance a toujours eu une vocation de transversalité,
notamment réaffirmée dans la modification du décret en 1998 (sous l’impulsion de
Geneviève Fraisse, déléguée interministérielle aux droits des femmes) qui précise
dans son article 2 qu’il s’agit d’identifier «les obstacles à la parité, notamment
dans les domaines politique, économique et social ».
1
Audition Réjane Sénac-Slawinski
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Et c’est précisément, du fait de cette vocation de transversalité, que
l’Observatoire a été institué auprès du Premier ministre et qu’il s’est imposé peu à
peu comme une « instance de référence en matière d’égalité ».2
Aujourd’hui, le premier enjeu est d’étendre les missions de l’Observatoire afin
d’aller vers une réelle approche intégrée de l’égalité de genre. Reconnaître
cette notion de genre3 permet de s’éloigner d’une définition biologique de la
discrimination pour reconnaître qu’il existe un système culturel de domination dans
les relations entre les sexes.
Il s’agit ensuite de mieux faire connaître l’Observatoire de la parité de tous les
acteurs, dans la mesure où l’approche intégrée est constituée principalement
d’actions de sensibilisation qui visent à diffuser une « culture de l’égalité ».4
Au vu des ces objectifs, l’intitulé « Observatoire de la parité » ne semble plus
pertinent, puisque cette instance doit non seulement couvrir un nombre de champs
plus vaste que la seule parité, mais ne peut se limiter à « observer » les inégalités.
Il doit faire vivre le débat sur l’exigence d’égalité femmes-hommes dans la société
et en cela, l’intitulé d’un « Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les
hommes », qui engloberait l’Observatoire de la parité et les autres instances
travaillant sur l’égalité femmes-hommes, semble plus approprié.
Néanmoins, la parité doit rester un champ de compétence majeur de ce Haut
Conseil puisque ce sujet est historiquement identifié à cette structure et n’est
traité par aucune autre instance. Sous l’impulsion de l’actuel Gouvernement, la
parité politique a, indéniablement, progressé, puisque pour la première fois dans
l’histoire de notre République, le Gouvernement compte autant d’hommes que de
femmes. Néanmoins, seuls 25% des députés élus en juin 2012 sont des femmes, un
ratio bien éloigné de ce qu’impose la loi sur la parité de 2000. Alors que le
2
DAUPHIN Sandrine, L’Etat et les droits des femmes, Des institutions au service de l’égalité ?, Presses
Universitaires de Rennes, 2010, p.112
3
Défini comme « la construction historique, culturelle, sociale du sexe, qui l’investit de sens dans un système
à deux termes où l’un (le masculin) ne peut s’envisager sans l’autre (le féminin). Système dissymétrique et
inégal, les hommes ayant longtemps été dans les rapports sociaux en position de domination incontestée et
l’homme ayant servi de référence unique pour penser l’universel humain. » Extrait de la présentation du
colloque interdisciplinaire « Le genre comme catégorie d’analyse ». Colloque organisé par le RING, Université
Paris7-Denis Diderot, les 24 et 25 mai 2002
4 Ibid, p.115
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Président de la République s’apprête à consulter tous les partis politiques pour
recueillir leurs préconisations en la matière, le Haut Conseil à l’égalité doit
poursuivre sa réflexion sur cette question, tant en ce qui concerne la parité
politique que la parité dans les Conseils d’administration, les directions des
grandes centrales syndicales, des ONG etc.
B. Des instances consultatives à adapter et à coordon ner
Expliquer que les différentes instances travaillent de manière éclatée, noncoordonnée, le Haut Conseil doit être cette institution de référence
1. Le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle
Fondé par la Loi n° 83-635 du 13 juillet 1983 portant modification du code du
travail et du code pénal en ce qui concerne l'égalité professionnelle entre les
femmes et les hommes et le décret n° 84-136 du 22 février 1984, le Conseil
supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes « participe à
la définition et à la mise en œuvre de la politique menée en matière d'égalité
professionnelle. Il est consulté sur les projets de lois et de décrets ayant pour objet
d'assurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et les textes
relatifs à des conditions particulières de travail propres à l'un ou l'autre sexe. »
Le Conseil est composé de 37 membres (7 représentants de l'Etat, 3 directeurs
d'établissement public, 9 représentants des salariés désignés sur proposition des
organisations syndicales représentatives au niveau national, 9 représentants des
employeurs, 9 personnalités désignées en raison de leur compétence ou de leur
expérience) nommés pour 3 ans, renouvelable.
Une commission permanente est instituée pour préparer les travaux du Conseil et
peut être consultée, en cas d'urgence, en ses lieu et place. Elle est présidée par le
président du Conseil supérieur et comprend 5 membres choisis parmi les
représentants de l'Etat et les directeurs d'établissement public, 5 représentants des
salariés, 5 représentants des employeurs et 5 personnalités désignées en raison de
leur compétence.
Le Conseil peut constituer des commissions spécialisées et de groupes de travail
pour l'étude des questions relevant de sa compétence.
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Il fait consensus que le CSEP est une instance à dynamiser et à revitaliser. Les
partenaires sociaux doivent pouvoir se retrouver dans un lieu unique qui leur
permette de traiter toutes les questions au cœur de l’égalité professionnelle :
écarts de rémunération, précarité de l’emploi féminin (temps partiel, bas salaires),
conditions de travail, revalorisation des métiers de services majoritairement
féminins etc.
Pour autant, dans le cadre de la reconfiguration de l’Observatoire de la parité
devenu « Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes », il semble
pertinent que le HCEFH se charge, dans une de ses commissions, des questions
périphériques et concomitantes à l’égalité professionnelle. L’équilibre entre vie
professionnelle, vie familiale et vie sociale est un enjeu majeur pour faire
progresser l’égalité entre les femmes et les hommes. La répartition entre le temps
de travail et les temps sociaux ne se fait pas de manière identique pour les
hommes et les femmes : le temps n'est pas neutre en termes de genre. Par
exemple, le temps libéré par la RTT, n'a pas été utilisé de la même façon par les
hommes et par les femmes. Les premiers l’ont consacré aux loisirs, les secondes à
des tâches ménagères. Or, les inégalités qui existent dans la sphère privée
contribuent à entretenir des inégalités dans la sphère professionnelle. C’est un
sujet sur lequel le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes entend
travailler.
2. La Commission nationale contre les violences envers les femmes
Créée par le Décret n°2001-1240 du 21 décembre 2001 portant création d'une
Commission nationale contre les violences envers les femmes, la Commission a vu
son format modifié en 2011 (Décret n° 2011-387 du 12 avril 2011) afin d’être un
véritable organe de gouvernance de la politique de lutte contre les violences faites
aux femmes.
Elle a pour mission « d'organiser la concertation des services de l'Etat avec les
organismes et associations concernés, en matière de prévention, de prise en charge
et de suivi des femmes victimes de violences, de prostitution et de traite ainsi
qu'en matière de formation des professionnels ; de recueillir les données, faire
produire et produire des analyses, études et recherches sur la situation des femmes
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victimes de violences ; de faire toutes recommandations et propositions de nature
législative ou réglementaire ; de préparer une manifestation nationale triennale
contre les violences envers les femmes ; d'animer le réseau des commissions
départementales d'action contre les violences et de remettre tous les trois ans au
Premier ministre un rapport d'activité proposant toutes mesures propres à diminuer
la fréquence et la gravité de ces violences. »
Présidée par le ou la Ministre chargé-e des droits des femmes, la Commission est
composée des Président-es de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée
nationale et du Sénat, de 2 représentants des collectivités territoriales (le
président de l’Association des maires de France et le président de l'Association des
départements de France), de 11 représentants de l'Etat, de 11 représentants
d'associations spécialisées et de 4 personnalités qualifiées nommés pour une durée
de 3 ans, renouvelable.
Plus ambitieux est le projet « d’Observatoire contre les violences », l’un des 40
engagements de François Hollande pour l’égalité femmes-hommes. Cette instance
sera en charge du suivi spécifique des violences faites aux femmes, de
l’accompagnement des victimes dans leurs démarches, de la formation des
professionnels, de l’organisation d’enquêtes d’envergure nationale en lien avec
l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) et de
l’INSEE
sur
les
violences
faites
aux femmes
et
de
la
formulation
de
recommandations pour orienter l’action publique.5 En lien avec les Observatoires
départementaux pour coordonner et développer des plans d’action efficaces,
« l’Observatoire des violences» élaborera un programme interministériel de lutte
contre les violences.
S’il est donc nécessaire qu’un « Observatoire des violences », voie le jour comme
structure autonome et identifiée, afin de mieux connaître la réalité et la
spécificité des violences de genre, il apparaît difficile d’en faire une « structure »
qui travaille de manière isolée. Le ou la directeur-trice sera membre de droit du
Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, de manière à entretenir
des liens étroits avec la Commission « Violences de genre »
5
Engagement n°29, 40 engagements pour l’égalité femmes-hommes, campagne présidentielle 2012
Page | 12
3. Le Conseil supérieur de l’information sexuelle, de la régulation des
naissances et de l’éducation familiale
Créé par la Loi n° 73-639 du 11 juillet 1973, portant création d'un Conseil supérieur
de l'information sexuelle de la régulation des naissances et de l'éducation familiale,
le CSIS assure la liaison entre les associations et les organismes qui contribuent à
ces missions d'information et d'éducation.
« Il effectue, fait effectuer et centralise les études et recherches en matière
d'information sexuelle, de régulation des naissances, d'éducation familiale, de
formation et de perfectionnement d'éducateurs qualifiés. Il propose aux pouvoirs
publics les mesures à prendre en vue de favoriser l'information des jeunes et des
adultes sur les problèmes de l'éducation familiale et sexuelle, de la régulation des
naissances, de l'adoption et de la responsabilité des couples, de
promouvoir
l'éducation sexuelle des jeunes, dans le respect du droit des parents et de soutenir
et promouvoir des actions de formation et de perfectionnement d'éducation
qualifiée en ces matières. »
« La vocation initiale du CSIS est donc davantage sanitaire que sociale. L’objectif
visé n’est pas le public « femmes » mais les jeunes et les adultes et il apparaît
difficile de le considérer comme une structure dont l’amélioration de la condition
féminine serait une finalité. »6
Présidé par le ou la Ministre chargé-e des droits des femmes, le ou la Ministre
chargé-e de la Santé et le ou la Ministre chargé-e de la famille, le Conseil est
composé de 51 membres : 17 représentants des ministres et organismes sociaux
concernés,
24
représentants
des
associations,
unions,
fédérations
ou
confédérations représentatives dans le domaine du conseil familial, de la
planification ou de l'éducation familiale, de l'information des couples et de
l'information sexuelle, 8 représentants des organisations syndicales de salariés et
d'employeurs, un représentant du Conseil national de la jeunesse, un représentant
du fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les
discriminations, des personnalités qualifiées.
6
DAUPHIN Sandrine, Ibid. p.25
Page | 13
Une commission permanente comprend un représentant de chacun des ministres
concernés et six personnes désignées pour 3 ans parmi les représentants des
associations et organismes sociaux.
A partir de la séance plénière, la commission permanente définit deux groupes de
travail.
Le CSIS est une instance en suspens, voire sans existence légale, dans la mesure où
les dernières nominations auraient dû intervenir en août 2011, mais n’ont toujours
pas été effectuées. Il serait pertinent à ce titre de repenser sa composition,
aujourd’hui déséquilibrée, afin de mieux représenter la pluralité des approches en
termes de santé sexuelle et reproductive et des droits qui y sont rattachés.
Toujours dans l’optique de valoriser les bonnes pratiques des territoires, il serait
judicieux d’y intégrer les communes, départements et régions qui se sont investis
dans ce sujet (par exemple, les régions ayant mis en place le « Pass
contraception »).
Le CSIS doit être reconnu comme le lieu qui connaît la situation sur le terrain et
comme la structure dont la mission est de suivre tout ce qui, dans l’action
publique, concerne de près ou de loin le droit à l’information, à l’éducation en
matière de sexualité, de contraception, d’IVG, de prévention des IST. 7
Revitalisé, il peut être un précieux outil d’aide à la prise de décision par la mise en
synergie des expériences de terrain menées par les associations qui en sont
membres.
C’est cet aspect qu’il faut renforcer aujourd’hui en intégrant le CSIS, en tant que
commission permanente, « Commission Santé des femmes, droits sexuels et
reproductifs» dans le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Identifié comme l’instance de dialogue sur la santé des femmes, il serait en
capacité de faire des préconisations et surtout d’évaluer leur mise en œuvre par un
suivi régulier des politiques publiques sur le sujet.
7
Audition Françoise Laurant
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4. La Commission sur l’image des femmes dans les médias
Faisant suite à un rapport de la délégation sénatoriale aux droits des femmes
publié, en juillet 2007, Valérie Létard, Secrétaire d’Etat à la solidarité, confie à
Michèle Reiser, réalisatrice et membre du CSA, une mission de réflexion sur l’image
des femmes dans les medias. La Commission est institutionnalisée en 2010 par
Roselyne Bachelot-Narquin, Ministre des solidarités et de la cohésion sociale, qui
lui donne pour mission de « proposer une méthodologie et des indicateurs de suivi
de l’image des femmes et de leur représentation dans les médias, d’engager une
démarche d’autorégulation avec leurs responsables et de publier un rapport annuel
des avancées observées. »
La Commission est composée de personnalités choisies en raison de leur expérience
dans le secteur de la télévision, de la presse, de la radio, d'Internet, ainsi que des
spécialistes du genre, nommées par le ou la Ministre en charge des droits des
femmes, sur avis du président de la Commission. Les membres de la Commission
sont nommés pour une durée de trois ans
La Commission se réunit au moins deux fois par an, sur convocation de son
président ou à la demande d'un cinquième de ses membres.
Elle constitue en son sein des groupes de travail et s'adjoint le concours d'experts.
La Rapporteure publie deux rapports et démissionne en avril 2012. Un rythme de
travail difficile à trouver et une composition assez peu lisible ont conduit à ce que
cette commission n’ait plus aujourd’hui, dans les faits, d’existence réelle.
On ne peut se satisfaire de cette situation car les stéréotypes sexistes
continuent d’imprégner notre environnement.
Les médias, quels qu’ils soient (presse, radio, télévision), confortent, voire
accentuent, l’invisibilité des femmes. Or, ils sont des moyens de socialisation
privilégiés, notamment des plus jeunes, et participant à la diffusion de valeurs, de
normes et de conduites, ils contribuent de ce fait à la construction des identités de
chacun et de chacune.
Certes, il y a d’incontestables avancées des médias en termes de représentations
des femmes, mais les stéréotypes sont toujours légion, tant par la place
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professionnelle qu’elles occupent que dans le contenu des messages et images
renvoyés par les médias. Selon l’enquête mondiale, Global Media Monitoring
Project8, « un quart / trois quarts : tel est le ratio femmes / hommes dans la
« média-réalité » française ».9 Le monde des informations, tant dans la presse
audiovisuelle que dans la presse écrite, reste un monde masculin où les hommes
sont présentés comme des experts et les femmes souvent comme des victimes. 10
Il faut insister sur le fait que c’est dès leur plus jeune âge que les filles et les
garçons sont confrontés à une vision sexuée du monde : les catalogues de jouets
reproduisent eux aussi des clichés symbolisés par des couleurs et des présentations
d’univers masculin ou féminin.
Plus tard, ce sont les manuels scolaires qui véhiculent une représentation
stéréotypée du monde. Une étude de la HALDE11, portant sur toutes les disciplines
du collège et du lycée, a confirmé cette résistance des stéréotypes de genre : Sur
1387 illustrations montrant des individus dans leur milieu professionnel, 1046
présentent des hommes et 341 des femmes, soit plus de trois hommes pour une
femme. Plus d’un homme sur quatre est présenté en position supérieure ou
occupant la fonction la plus prestigieuse d’un secteur d’activités.
Tout cet environnement contribue à la construction d’identités sexuées, fondée sur
un système hiérarchisé de normes de masculinité / féminité et agit presque
mécaniquement sur les choix d’orientation des filles et des garçons. Comme le
précise Françoise Vouillot, spécialiste du genre dans le champ scolaire, « le poids
du genre est une donnée fondamentale des inégalités scolaires. »12
8
Le Global Monitoring Media Project est une enquête réalisée tous les 5 ans, depuis la Conférence de Pékin de
1995, sur les médias dans le monde. L’enquête couvre 85% des territoires habités. Tous les résultats à l’échelle
mondiale et nationale se trouvent sur whomakesthenews.org
9
« Qui figure dans les nouvelles ? », Projet mondial de monitorage des médias (GMMP) 2010, Rapport national,
France, p.5
10
Ibid, p.5, « 22% des experts sont des expertes »
11
« Place des stéréotypes et des discriminations dans les manuels scolaires ». Université Paul Verlaine, Metz.
Rapport réalisé pour le compte de la HALDE, octobre 2008
12
« Le genre, angle mort des discriminations à l’école », Mediapart, 2 juillet 2012
Page | 16
Un exemple parmi d’autres : 14,5 % des filles s’orientent vers une première
littéraire contre 4,3 % des garçons tandis que 27,5 % des filles choisissent la série
scientifique contre 39,5 % des garçons.13
A l’évidence, il manque aujourd’hui, dans notre pays, une « instance » reconnue,
du fait notamment de la pluralité de ses membres (professionnels, chercheur-es
spécialistes de la question de la construction du genre, associations luttant contre
le sexisme ordinaire) qui soit force de propositions dans la lutte contre les
stéréotypes à tous les âges de la vie et vienne en soutien au Ministère des droits
des femmes, au Ministère de la Culture, au Ministère de l’Education nationale et
au Ministère de l’Enseignement supérieur en leur apportant recommandations,
avis et conseils. C’est ce que se propose de faire le Haut Conseil à l’égalité entre
les femmes et les hommes en créant en son sein une Commission « Socialisation et
lutte contre les stéréotypes de genre».
C. Renforcer les liens avec les collectivités territoriales
L’Observatoire de la parité, de par sa composition notamment, n’est pas parvenu à
tisser des liens solides et pérennes avec les territoires.
Or, sur toutes les thématiques relatives à l’égalité entre les femmes et les
hommes, les collectivités territoriales (qu’il s’agisse des régions, des départements
ou des villes) apportent des réponses multiples, innovantes, souvent élaborées avec
les associations de terrain. C’est toute cette richesse d’expériences multiples qu’il
s’agit de mieux connaître, de mutualiser et de valoriser.
Les violences sont un cas d’école de la nécessaire synergie entre les territoires et
l’Etat (et entre les territoires eux-mêmes) pour construire une culture et une
politique communes de lutte contre les violences.
La Seine-Saint-Denis fait figure de modèle dans ce domaine. Par son engagement
précurseur et les résultats incontestables obtenus par son Observatoire des
violences faites aux femmes, elle est devenue source d’inspirations pour d’autres
territoires, puisque la Ville de Paris a, par exemple, très récemment repris le
dispositif « Téléphone. Femmes en danger ».
Chiffres-clés 2011, « L’égalité entre les femmes et les hommes », source : Ministère de l’Éducation
nationale, Repères et références statistiques, 2010.
13
Page | 17
C’est aujourd’hui à l’échelon national que doivent être mises en œuvre les mesures
initiées localement. Les enquêtes pionnières réalisées sous l’impulsion de
l’Observatoire de Seine-Saint-Denis doivent maintenant être d’envergure nationale
- car les enquêtes locales peuvent ne refléter qu’une réalité partielle, ce qui n’est
pas forcément représentatif de la situation nationale C’est le rôle qui incombe au futur Observatoire national des violences faites aux
femmes : recueillir les dispositifs innovants, généraliser ces mesures partout sur le
territoire, suivre les évaluations et orienter les pouvoirs publics dans leur prise de
décisions.
En matière de santé des femmes, les régions sont aussi des laboratoires d’idées. Le
« Pass contraception » en est une illustration parmi d’autres. Initié par la région
Poitou-Charentes en 2009, il est destiné aux jeunes filles, y compris en zone rurale,
là où il n’y a que très difficilement accès à un centre de planification. Aujourd’hui,
plusieurs autres régions l’ont également adopté, ce qui est l’exemple même d’un
échange de bonnes pratiques. Il faut franchir, dorénavant, un pas supplémentaire
et institutionnaliser ces échanges afin que les bonnes idées soient relayées partout
sur le territoire.
Un autre exemple, à partager également, celui de la lutte contre les stéréotypes.
C’est l’un des six principes fondamentaux portés par la Charte européenne pour
l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale »14 , élaborée en 2006, et
dont 77 communes, 17 départements, 14 régions et 10 structures intercommunales
françaises sont signataires, ce qui les engage à mettre en place un « plan
d’action » sur leur territoire.
Là encore, des idées, des actions, des innovations qui méritent d’être diffusées
largement dans tous les territoires.
Cette nouvelle orientation est d’autant plus pertinente que l’actuel Observatoire
de la parité s’est déjà inscrit dans cette démarche de valorisation des actions
Charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale, 2006, p.9 : « L’élimination
des stéréotypes sexués est indispensable pour l’instauration de l’égalité des femmes et des hommes : Les
autorités locales et régionales doivent promouvoir l’élimination des stéréotypes et des obstacles sur lesquels se
fondent les inégalités du statut et de la condition des femmes, et qui conduisent a l’évaluation inégale des
rôles des femmes et des hommes en matière politique, économique, sociale et culturelle. »
14
Page | 18
locales par la mise en place du DOVALE (Document de valorisation des actions
locales pour l’égalité entre les femmes et les hommes).
Présenté lors de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars 2012,
cet outil a pour objectifs d’interroger les élus des territoires sur les politiques
d’égalité de genre qu’ils mènent –ou non- , de recenser les actions entreprises, de
leur donner des outils –si besoin est- pour mieux en mesurer l’efficacité.
Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes doit poursuivre ce
travail, ce qui sera facilité par la présence en son sein de ces élus-es- des
territoires.
Le Haut conseil se doit d’avoir cette fonction de capitalisation de l’action locale,
en étant le lieu de rencontre des acteurs locaux de l’égalité. C’est pourquoi il est
nécessaire de renforcer le lien avec les élu-es des territoires en les intégrant parmi
les membres de cette instance -alors qu’aujourd’hui n’y siègent que les élu-es
nationaux.
D. Mutualiser et rationaliser les moyens existants
En 2003, le gouvernement Raffarin avait souhaité réduire les comités consultatifs,
dans un souci d’économie budgétaire de rationalisation des moyens. Plaidant pour
une absorption de l’Observatoire de la parité en même temps que d’autres
instances, la Ministre en charge de la parité et de l’égalité professionnelle, Nicole
Ameline, avait proposé la création d’un Conseil national de l’égalité, composé
d’une soixantaine de membres issus des différentes instances consultatives :
Observatoire de la parité, Conseil supérieur de l’information sexuelle, de la
régulation des naissances et de l’éducation familiale, Conseil supérieur de l’égalité
professionnelle, Commission nationale contre les violences envers les femmes.
Présidé par le Premier ministre, ce Conseil national de l’égalité aurait eu une
fonction de consultation et de propositions. Le fait qu’il soit placé auprès du
Premier
ministre
aurait
renforcé
stratégiquement
la
transversalité
et
l’interministérialité.
Cette proposition n’avait pas été suivie d’effet, tout simplement parce que l’action
de la Ministre s’était recentrée sur la « Charte de l’égalité ».15
15
DAUPHIN Sandrine, L’Etat et les droits des femmes, p.100
Page | 19
Au vu du contexte économique actuel et du récent rapport de l’Inspection
générale des finances sur « l’Etat et ses agences » qui met en cause un
« phénomène qui s’est développé sans stratégie d’ensemble, inflationniste en
termes de moyens humains et financiers »16, il n’est plus opportun de conserver
un nombre pléthorique d’instances concernant l’égalité entre les femmes et les
hommes. Toutefois, les moyens et les coûts de l’Observatoire de la parité restent
modestes en comparaison avec d’autres instances consultatives, notamment
certaines autorités administratives indépendantes.17
La réflexion menée autour des missions de chacune des instances amène à la
conclusion qu’il n’est nul besoin de créer une instance ex-nihilo, énième « Comité
Théodule » aux contours juridiques flous, puisque la structure actuelle de
l’Observatoire de la parité lui permet parfaitement, une fois ses missions
redéfinies et ses champs de compétences élargis, d’avoir cette force
d’interpellation nécessaire pour éclairer et appuyer l’action gouvernementale.
De
surcroît,
il
n’est
plus
cohérent,
dans
une
démarche
de
gendermainstreaming, d’avoir une multiplicité d’instances autonomes qui
travaillent chacune de façon sectorielle et de manière relativement étanche sur
la question de l’égalité femmes-hommes.
SYNTHESE
-Proposition n°1 : Changer l’intitulé. L’actuel Observatoire de la parité doit devenir le « Haut
Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes » pour mieux rendre compte des inégalités
de genre dans toutes les sphères de la société et élargir ses missions.
-Proposition n°2 : Rassembler les instances consultatives en matière de droits des femmes,
aujourd’hui peu coordonnées, pour n’avoir qu’une institution de référence, plus efficace et plus
visible.
-Proposition n°3 : Capitaliser l’action des territoires pour permettre une montée en puissance
des actions locales et donner des outils aux collectivités qui souhaitent mener des politiques
pour l’égalité femmes-hommes
16
Rapport sur l’Etat et ses agences, Inspection générale des finances, mars 2012, p.3
17
L’Observatoire de la parité dispose de 3 Equivalents temps plein
Page | 20
II. REPONDRE A L’IMPERATIF DE TRANVERSALITE
A. Favoriser l’interministérialité
S’inscrivant pleinement dans la démarche de la Ministre des droits des femmes, les
différentes personnalités auditionnées s’accordent toutes sur un point : il manque
en France une structure institutionnelle, forte, dédiée aux droits des femmes
qui pourrait venir en soutien à l’action de la Ministre. Cette institution doit être
un lieu de rencontre de toutes les sphères de la société : politique (gauche comme
droite), associative, universitaire, syndicale, économique, etc.
Par leur liberté de ton, les membres apportent une parole forte et légitime, qui
permet d’être un soutien, plus efficace parce qu’il est extérieur, au Ministère
des droits des femmes.
En cela, le rattachement au Premier ministre, qui est le statut actuel de
l’Observatoire de la parité, est une garantie, puisqu’il confère à l’Institution une
visibilité propre, renforçant ipso facto les politiques menées par le Ministère des
droits des femmes.
Comme le précisait Maxime Forest, Enseignant chercheur spécialiste des politiques
publiques d’égalité de genre au niveau européen, ayant collaboré au projet
européen QUING (Quality in Gender Equality Policies, 6e PCRD), lors de son
audition, au niveau européen, « le rattachement au Premier ministre est vu d’un
bon œil puisqu’il se situe au plus haut niveau politique ».18
18
Audition de Maxime Forest
Page | 21
C’est, en effet, un acte politique fort que de renforcer une structure dédiée à
l’égalité femmes-hommes dans tous les champs de la vie sociale.
Cela consolide la démarche de gendermainstreaming défendue par le Ministère des
droits des femmes puisque le rattachement au Premier ministre permet
l’interministérialité et la dimension transversale.
Parmi les Etats-membres, la Belgique est l’un des Etats les plus avancés en matière
de promotion de l’égalité femmes-hommes puisqu’elle a créé, en 2002, l’Institut
pour l’Egalité des Femmes et des Hommes. C’est une bonne illustration des
avancées que permet la collaboration entre la Ministre et l’institution dédiée aux
droits des femmes. Cette instance publique fédérale est chargée de garantir et de
promouvoir l’égalité des femmes et des hommes et de combattre toute forme de
discrimination et d’inégalité basée sur le sexe. Cet Institut est subdivisé en
différentes cellules qui travaillent chacune dans des domaines d’action variés :
gendermainstreaming, prise de décision, emploi, lutte contre la violence, relations
internationales, aide aux associations et mission juridique.
L’Institut et la vice-Première ministre, ministre de l’Egalité des chances, Joëlle
Milquet, travaillent de concert, collaborant, par exemple, pour la mise en œuvre
d’un plan fédéral de gendermainstreaming. L’Institut pour l’égalité des femmes et
des hommes a travaillé à l’élaboration du projet de plan fédéral de
gendermainstreaming qu’il a soumis au Gouvernement. Les membres du
Gouvernement, sur proposition de la Ministre, ont sélectionné quarante politiques
devant faire l’objet d’une intégration de la dimension de genre. In fine, il revient à
l’Institut de faire un rapport de fin de législature, transmis au Parlement,
concernant l’effectivité de la mise en place de ce plan de gendermainstreaming.
C’est un rôle analogue que pourrait tenir en France le Haut Conseil à l’égalité
entre les femmes et les hommes en France.
B. Diffuser une appro che intégrée de l’égalité dans toutes les sphères
de la société
Page | 22
Le gendermainstreaming est un « processus technique et politique qui exige des
changements de la part de tous les protagonistes, tant au niveau de la culture des
organisations et des modes de pensée que du point de vue des objectifs, des
structures et de l’allocation de ressources».19 Porter cette démarche, comme le
fait aujourd’hui le Ministère des droits des femmes, demande d’avoir des appuis
solides, des relais institutionnels puissants.
Le Haut Conseil à l’égalité, en étant à la fois un lieu de rencontre des différents
acteurs de l’égalité et un lieu de veille et de diffusion de l’information, est ce
partenaire indispensable, à même d’irriguer la société, à l’instar de l’Institut de la
femme en Espagne. + CONCERTATION + PRODUCTION DE RECOMMANDATIONS
Créé en 1983, l’Institut de la femme est né de la convergence de politiques
d’égalité, d’abord élaborées dans les régions, qui ont été, ensuite, reprises à
l’échelon national. L’Institut de la femme est actif dans de nombreux champs :
éducation, santé, monde du travail, communication et publicité, culture, sport,
discrimination multiple, mise en réseau, « programme de mainstreaming de
genre ».
Certaines régions espagnoles ont adopté, plus tôt que d’autres, une approche
intégrée de l’égalité, et sont devenues une source d’inspiration pour les régions
voisines. Et c’est à mettre à l’actif de la gauche espagnole que d’avoir repris ces
innovations régionales pour créer cet Institut de la femme, à vocation nationale.
Comme l’indique Maxime Forest, « quand vous avez une institution dédiée, comme
l’Institut de la femme qui existe depuis 1983, sans discontinuer, qui a voix au
chapitre médiatiquement, qui diffuse cette manière d’envisager le problème et des
éléments de langage, cela finit par irriguer l’ensemble de la société. »20 Et de
poursuivre : « En Espagne, cela s’est traduit par l’usage du terme « genre » qui n’a
pas connu les mêmes résistances qu’en France, mais qui n’était pas répandu,
auparavant, non plus. Il est devenu d’usage transversal. Quand on dit « violences
19
FERREIRA Viriginia, « La mondialisation des politiques d’égalité : du réformisme social au réformisme
d’Etat », Cahiers du Genre, n°33/2002, p.69
20
Audition Maxime Forest
Page | 23
de genre » en Espagne, cela signifie « violences liées à une inégalité structurelle
entre les hommes et les femmes, qui commence avec l’éducation etc. ».21
En Espagne, depuis les années 2000, cette approche est partagée par tous les
Gouvernements, de gauche comme de droite, et n’a jamais été remise en
cause, parce que l’Institut qui a porté cette vision s’est imposé dans le paysage
institutionnel.
C’est ce qui lui permet, aujourd’hui, d’avoir toujours voix au chapitre, en dépit des
coupes budgétaires drastiques dont il fait l’objet.
C. Enrichir la démarche du Ministère des droits des femmes sur les
études d’impact genrées
Sandrine Dauphin le résume en quelques mots, « le défi de la période est de
mesurer et évaluer les actions en faveur des femmes et plus globalement pour
l’égalité des sexes ».22
L’heure n’est plus à la construction d’un arsenal législatif, mais à l’évaluation des
effets des politiques publiques sur les femmes.
L’évaluation peut intervenir à différents moments dans l’élaboration et la mise en
œuvre d’une politique publique :
-En amont, pour étudier ses impacts éventuels et sa faisabilité.
-Au cours du débat, pour évaluer les ajustements nécessaires.
-Et enfin, en aval, pour estimer l’efficience de la politique entrée en vigueur.
L’Observatoire de la parité, a, depuis sa création, réalisé des évaluations à chacun
de ces cycles. Comme l’explique son actuelle Secrétaire générale, « les membres
ont largement contribué aux réformes constitutionnelles instituant le principe de
parité.
Ils ont
analysé
les projets de
lois en
cours et
présenté
des
recommandations, dès qu’ils le jugeaient nécessaire, pour améliorer le texte en
21
Ibid
22
DAUPHIN Sandrine, L’Etat et les droits des femmes, p.77
Page | 24
vue d’une meilleure prise en compte ou de besoins spécifiques ou des droits des
femmes. L’expertise de l’Observatoire s’est beaucoup fait connaître ces dernières
années pour ses évaluations, ex-post, de la mise en œuvre des lois dites sur la
parité, après chaque élection. » 23
Aujourd’hui, comme l’indique la lettre de mission24, le Haut Conseil à l’égalité doit
étendre
cette
fonction
« d’assurance-qualité »
à
l’ensemble
des
champs
d’intervention qui lui sont dévolus. Il doit accompagner le Ministère des droits des
femmes dans sa démarche d’études d’impact genrées, en apportant avis et
recommandations comme le précise la circulaire du 23 août 2012 relative à la prise
en compte dans la préparation des textes législatifs et réglementaires de leur
impact en termes d'égalité entre les femmes et les hommes : « la grille d’analyse
sera
enrichie
et
précisée
(…)
grâce
à
des
travaux
méthodologiques
complémentaires, menés à l'initiative du Ministère des droits des femmes,
associant les experts et les organismes de recherche compétents en matière
d'égalité entre les femmes et les hommes. » 25
Cette démarche innovante est en complète rupture avec la vision du précédent
Gouvernement qui -bien qu’il fût à l’origine d’une réforme constitutionnelle
obligeant le gouvernement à assortir tout projet de loi d’une étude d’impact-26
n’avait pas jugé nécessaire, par exemple, de s’assurer que les dispositions du
projet de loi portant réforme des retraites n’accroissaient pas les inégalités entre
hommes et femmes (en particulier, les articles 5 et 6 portant sur le relèvement des
âges de liquidation de la retraite -âge de départ et âge sans décote).
C’est au Haut Conseil qu’incombe cette mission de vigilance. Il s’agit de pointer les
éventuelles carences, tant sur les conclusions des études d’impact, que sur leur
23
RESSOT Caroline, « L’évaluation genrée des politiques publiques par l’Observatoire de la parité : vers une
égalité réelle ? », 2012
24
Voir annexe n°1, Lettre de mission
Circulaire du 23 août 2012 relative à la prise en compte dans la préparation des textes législatifs et
réglementaires de leur impact en termes d'égalité entre les femmes et les hommes, JORF n°0196 du 24 août
2012 page 13760, texte n° 3
25
Par renvoi de l’article 39 alinéa 3, la loi organique du 15 avril 2009 précise, article 8 : « Les projets de loi
font l’objet d’une étude d’impact. Les documents rendant compte de cette étude d’impact sont joints aux
projets de loi dès leur transmission au Conseil d’État. »
26
Page | 25
méthodologie et de travailler, en lien avec le Ministère, à leur amélioration en
lien.
Il doit, notamment, être attentif à la question des moyens et des ressources
nécessaires aux politiques envisagées, ce
que
l’on
appelle
le
« gender
budgeting »27.
Dans ce cadre, il peut notamment se charger d’analyser le « Document de politique
transversale sur la politique d’égalité entres les femmes et les hommes » annexé
chaque année, depuis 2009, au Projet de loi de finances. Ayant pour objectif de
« rendre compte de la mobilisation des politiques sectorielles dont l’Etat a la
charge »28, ce document présente la politique transversale interministérielle, la
liste des programmes qui y participent, la stratégie globale d’amélioration de ses
performances et les principales dépenses fiscales concourant à la mise en œuvre de
cette politique.
Ainsi, pour le PLF 2013, ce sont près de 192 millions d’euros qui seront mobilisés en
faveur de la politique d’égalité entre les femmes et les hommes.29
Voilà une application concrète de la démarche d’évaluation des politiques de
gendermainstreaming qu’aura à mener le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes
et les hommes.
Parce qu’il sera une institution indépendante, quelque soient les orientations
politiques, le Haut Conseil devra également s’assurer, que, dans le cadrage général
de l’action de l’Etat, les plans mis en œuvre et les objectifs fixés sur le long
terme, relèvent bien de la même approche intégrée de l’égalité femmes-hommes.
Il devra être une vigie, un instrument de contrôle des résultats de l’action publique
et garantir une continuité. J’expliciterai un peu en repartant de l’audition de M. Forest et
en donnant un exemple. élaborer un paradigme transversal de l'action publique en faveur de
l'égalité f/h, ancré dans une argumentation scientifique solide, susceptible de structurer dans la
durée l'action des pouvoirs publics, et permettant d'étalonner tout changement de cap ou
d'approche
dans
les
différentes
problématiques
relevant
de
l'égalité.
Application de l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le processus
budgétaire. Cela implique une évaluation dans une perspective de genre des budgets existants à tous les
niveaux du processus budgétaire ainsi qu’une restructuration des revenus et des dépenses afin de promouvoir
l’égalité entre les femmes et les hommes.
27
Document de politique transversale, Projet de loi de finances pour 2013, Politique de l’égalité entre les
femmes et les hommes, p. 61
28
29
Ibid, p.84
Page | 26
Approche cognitive des politiques publiques : pol publiques ne servent pas seulement à
résoudre des problèmes mais construisent aussi des 'cadres d'interprétation du monde' qui
peuvent déconstruire ou au contraire renforcer l'ordre sexué. Ex: le scrutin binominal proposé
pour les cantonales. Certes cela entraînerait une stricte parité, mais cela risquerait dans le
même temps de renforcer l'ordre sexué en confortant l'idée de complémentarité f/h avec ces
couples de candidat-e-s, et de laisser la place à l'expression de rapports dissymétriques à
l'intérieur de ces couples, la femme pouvant être vue comme la suppléante de l'homme (le
candidat homme mis en avant au détriment de la candidate femme : sur affiche, dans la prise
de parole, etc..).
III. LE VISAGE DU HAUT CONSEIL A L’EGALITE ENTRE LES FEMMES ET
LES HOMMES
A. Ses missions
1. Organiser la concertation des acteurs compétents en matière d’égalité
femmes-hommes
Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes doit être le lieu
d’expression de la société civile et de rencontre des acteurs de l’égalité entre les
femmes et les hommes. Mobilisées sur le terrain, les associations, les collectivités
locales souhaitent travailler de concert avec les universitaires et les
Pouvoirs
publics pour construire des politiques cohérentes, transversales qui fassent
progresser l’égalité dans tous les domaines et sur tous les terrains. Parce que la
concertation y serait organisée et encadrée, le Haut Conseil peut travailler à faire
converger les positions pour que s’exprime une voix forte des acteurs et actrices
engagés sur l’égalité femmes/hommes, nécessaire à une meilleure prise en compte
de l’exigence d’égalité dans l’ensemble des politiques publiques. Il jouerait ce rôle
de caisse de résonnance des aspirations de tous les acteurs de l’égalité.
2. Observer les inégalités dans l’ensemble des champs de la vie sociale
Afin de rendre compte des situations d’inégalités entre les femmes et les hommes,
le Haut Conseil doit réunir des données, faire produire et produire des analyses,
Page | 27
études et recherches sur la situation des femmes, aux niveaux national et
international. Ce travail d’observation reste indispensable pour rendre, aux yeux
de tous, visible l’invisible. Par la publication de rapports reprenant ces travaux, le
Haut Conseil aura vocation à éclairer les Pouvoirs publics dans leur prise de
décision. La publication de chiffres-clés percutants sera également un support utile
pour les associations dans leur double démarche de sensibilisation aux inégalités
entre les femmes et les hommes et d’action pour les combattre.
3. Analyser et évaluer les politiques publiques – Améliorer la méthodologie des
études d’impact genrées
Le Haut Conseil aura pour mission d’analyser et d’évaluer à tous les « temps
politiques » les politiques publiques mises en œuvre. En lien avec le Ministère des
droits des femmes, il contribuera, a priori, aux études d’impact genrées des
projets de loi, en apportant avis et recommandations, afin d’identifier les
éventuelles répercussions négatives sur l’un ou l’autre sexe.
A posteriori, il évaluera l’effet des lois adoptées et les écarts entre les objectifs
poursuivis par les grandes législations pour l’égalité femmes-hommes et leur
réalisation concrète. Afin d’en mesurer les effets dans le temps, d’un point de vue
quantitatif, le Haut Conseil mettra en place des indicateurs. Pour apprécier la
progression d’un point de vue plus qualitatif, le Haut Conseil pourra convier à ses
travaux toute personne qualifiée dont l’audition lui paraitra utile. A partir de ces
évaluations et analyses, le Haut Conseil fera, au Premier ministre, toutes
préconisations et propositions innovantes de réformes pour prévenir et résorber les
inégalités entre les sexes. Le Haut Conseil émettra, également, des avis sur les
projets de textes législatifs et réglementaires dont il sera saisi par le Premier
ministre ou la Ministre des droits des femmes.
4. Capitaliser les actions des territoires
Parce qu’elles sont en prise avec la réalité du terrain et souvent plus libres
d’imaginer des dispositifs originaux et innovants, les collectivités locales sont
pionnières dans la lutte contre les inégalités entre femmes et hommes. Le Haut
Conseil doit capitaliser ces actions novatrices et efficaces, en travaillant plus
étroitement avec les élus locaux. Il doit devenir un laboratoire d’idées qui fait
Page | 28
essaimer partout sur le territoire les bonnes pratiques et favorise les liens entre le
niveau national et les territoires.
5. Etre un lieu de veille et de diffusion de l’information
Le Haut Conseil doit avoir une fonction de veille juridique. Au-delà de la
publication d’une synthèse factuelle des directives adoptées au niveau européen ou
des lois votées en France, une note juridique doit mettre en perspective ces
décisions. Cette vigilance juridique permettra non seulement à tous les membres
d’être informés et accompagnés dans leurs travaux, entre autres, mais aussi
d’alerter l’opinion publique. En diffusant largement l’information, sur son site
Internet, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes deviendra le
repère de l’information en matière de droits des femmes.
Toujours dans cette optique, le site Internet pourrait, également, servir de recueil
des cas de discriminations. Chaque internaute pourrait déposer son témoignage,
dans un espace dédié du site Internet. L’objectif n’est pas alors de traiter chaque
cas individuellement, mais de créer une base de données des discriminations les
plus fréquentes et d’informer les citoyen-nes, en lien avec le Défenseur des droits,
de leurs droits et des recours possibles. Ce recueil de témoignages serait aussi un
outil précieux pour une approche qualitative des discriminations entre les femmes
et les hommes, du fait qu’ils viendraient en complément des données statistiques.
B. Ses champs de compétences
Le gendermainstreaming, d’abord expérimenté dans les pays nordiques, puis
intégré dans le corpus communautaire européen, a toujours été pensé et mis en
œuvre en sédimentant les différentes thématiques qui ont trait à l’égalité entre les
femmes et les hommes. Si la mission première du Haut Conseil à l’égalité entre les
femmes et les hommes est d’intervenir sur l’ensemble des champs de la vie
sociale, il devra également adopter une démarche transversale et identifier, au
préalable, des thèmes spécifiques. C’est pourquoi, six champs de compétences
particuliers ont été identifiés, qui feront l’objet de commissions thématiques au
sein du Haut Conseil.
Page | 29
1. Parité politique, économique et sociale
Définie comme le « partage à égalité du pouvoir »30, la parité n’est toujours pas
une réalité en France, loin s’en faut. Aussi, le Haut Conseil à l’égalité entre les
femmes et les hommes doit avoir une fonction de vigilance et d’alerte sur la
progression des femmes dans l’accession aux postes à responsabilités. L’un de ses
travaux pourrait consister à communiquer, chaque semaine, sur les nominations de
femmes en Conseil des ministres. En effet, si l’actuel gouvernement est, pour la
première fois dans l’histoire de notre République, strictement paritaire, il n’en
demeure pas moins que les femmes sont sous-représentées dans les nominations
effectuées en Conseil des ministres, chaque mercredi. Seules 11% de femmes ont
été nommées à des postes de hauts dirigeants de l’administration, depuis mai
2012, sur les seize Conseils des ministres qui ont eu lieu entre le 23 mai 2012 et le
19 septembre 2012, malgré les directives de la circulaire du 23 août 2012, relative
à la mise en œuvre de la politique interministérielle en faveur de l'égalité entre les
femmes et les hommes.31 En lien avec le Ministère des droits des femmes qui dresse
un tableau de bord de ces nominations, le Haut Conseil pourrait en publier un bilan
commenté.
2. Articulation des temps de vie
L’articulation entre vie professionnelle et vie personnelle est un enjeu majeur pour
parvenir à l’égalité femmes-hommes. Il faut, en effet, remettre en cause les
représentations stéréotypées d’une répartition « naturelle » des rôles dans
l’exercice de la responsabilité familiale et permettre, ainsi, aux pères d’exercer
pleinement leur parentalité. Aujourd’hui, l’arrivée d’un enfant marque le plus
souvent une rupture dans les trajectoires professionnelles des femmes. Plus d’un
quart des femmes arrêtent de travailler à l’arrivée d’un enfant contre 2,6% des
hommes. La moitié d’entre elles déclarent qu’elles auraient souhaité continuer si
leurs conditions d’horaires de travail, de garde des enfants et la répartition des
30
SENAC-SLAWINSKI Réjane, La parité, Que sais-je ?, PUF, 2008, p.3
« Après la composition du premier gouvernement paritaire de notre pays, cette exigence d'exemplarité doit
se traduire à tous les niveaux de décision et dans toutes les actions de l'Etat. L'ensemble des administrations
et opérateurs qui relèvent de votre autorité ou sont placés sous votre tutelle ont en la matière un devoir
d'impulsion et d'exemplarité », Circulaire du 23 août 2012 relative à la mise en œuvre de la politique
interministérielle en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes, JORF n°0196 du 24 août 2012 page
13761, texte n°4
31
Page | 30
tâches au sein du ménage avaient été autres.32 Ce constat alarmant conduit à
envisager au moins trois pistes de réflexion et de travail :
-Sur le congé paternité. Le Haut Conseil pourra recenser toutes les bonnes
pratiques des entreprises qui donnent, par exemple, la possibilité aux pères de
transformer leur 13ème mois en jours de congés supplémentaires.
-Sur l’aménagement et l’organisation des horaires de travail qui bénéficieraient à
tous les salariés et amélioreraient les conditions globales de travail.
-Sur les modes de garde. La France peut se targuer d’avoir le taux de fécondité le
plus élevé d’Europe, après l’Irlande, avec 2,07 enfants par femme depuis 2008.33
Pourtant, il manque entre 300 000 et 500 000 places en crèche. Le développement
des modes de garde diversifiés (crèche municipale, halte-garderie, crèche
d’entreprises etc.) est un élément majeur pour faire progresser l’égalité
professionnelle entre les femmes et les hommes.
3. Violences de genre
C’est encore aujourd’hui un enjeu majeur que de faire reconnaître les violences
envers les femmes comme des violences spécifiques, des « violences de genre ». La
dernière enquête de l’ONDRP évalue à 400 000 le nombre de femmes « victimes
déclarées » de violences physiques ou sexuelles de la part de leur conjoint ou exconjoint.34 Ce chiffre alarmant incite à repenser la question des violences dites
conjugales ou intrafamiliales, loin des idées préconçues, véhiculées par les médias
dans les pages « Faits divers ». Ces violences sont la conséquence d’un système de
domination masculine qui prévaut dans l’organisation sociale et, de ce fait, doivent
être reconnues, partout, comme telles. C’est ce qu’a fait le Gouvernement
espagnol, pionnier dans la lutte contre les violences, en faisant voter la loi de 2005
contre la « violencia de género ». En lien étroit avec le futur « Observatoire des
violences », le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les
hommes doit
produire des rapports sur les pans de violences faites aux femmes peu explorés
32
MEDA Dominique, SIMON Marie-Odile, WIERINK Marie, « Pourquoi certaines femmes s’arrêtent de travailler à
la naissance d’un enfant ? », Premières informations et premières synthèses n°29-2 DARES, 2003
33
Chiffres INSEE, Population – Bilan démographique 2011, janvier 2012
Enquête ONDRP, « Le profil des personnes de 18 à 75 ans s’étant déclarées victimes de violences physiques
ou sexuelles par conjoint ou ex-conjoint sur 2 ans lors des enquêtes « Cadre de vie et sécurité » INSEE-ONDRP
de 2008 à 2012 », Repères n°18, Octobre 2012
34
Page | 31
jusqu’à présent comme les violences au travail, les mariages forcés, les violences
commises à l’encontre des jeunes filles.
4. Santé des femmes, droits sexuels et reproductifs
Ainsi que l’explique Françoise Héritier, « si la fécondité est le lieu central de la
domination masculine, il s'ensuit que la prise par les femmes du contrôle de leur
fécondité revient pour elles à sortir du lieu de la domination. Là est le levier d'un
changement majeur pour l'humanité toute entière ».35 Les droits sexuels et
reproductifs des femmes, et en particulier, des jeunes femmes sont, en effet, un
enjeu majeur de politique publique sur les plans tant éducatif que sanitaire. Bien
que la France présente l’un des taux de couverture contraceptive les plus élevés au
monde (90,2% des femmes sexuellement actives de 15-49 ans utilisent une
contraception moderne), deux tiers des grossesses non prévues ont lieu sous
contraception.36 Le poids des tabous, des stéréotypes, des interdits culturels et
religieux sont autant d’obstacles à une éducation sexualisée, nécessaire pour
consolider le droit fondamental des femmes à disposer de leur corps.
5. Socialisation et lutte contre les stéréotypes sexistes
Partageant le constat de la Commission sur l’image des femmes dans les médias
d’une « ignorance massivement partagée de la réalité et de la force des
stéréotypes » 37, le Haut Conseil entend lutter contre le sexisme à la racine, diffusé
par tous les moyens de socialisation (école, médias, publicité).
Plusieurs pistes de réflexions et de travail peuvent déjà être avancées parmi
lesquelles :
-Redéfinir les contrats d’objectifs conclus entre l’Etat et les chaînes de télévision
et radios publiques afin d’établir des règles de bonne conduite.
-Constituer un « annuaire » d’expertes à destination des médias pour que leurs
travaux soient enfin visibles du grand public et suscitent des vocations chez les plus
jeunes.
35
HERITIER Françoise, Masculin/Féminin II, Dissoudre la hiérarchie, Editions Odile Jacob, Paris, 2002
Baromètre Santé 2010 de l’INPES
REISER Michèle, GRESY Brigitte, « Rapport sur L’image des femmes dans les médias », 25 septembre 2008,
p.87
36
37
Page | 32
-Mieux communiquer sur le travail mené par des associations comme les Chiennes
de garde ou La Meute qui décerne chaque année son « prix macho » de la publicité
la plus sexiste et son « prix femino » pour récompenser les publicités
déconstruisant les stéréotypes sexistes. De la même manière, le « Prix d'excellence
égalitaire Hubertine Auclert » qui récompense, chaque année, le caractère
égalitaire d'une action ou d'un support (comme les manuels scolaires, par exemple)
doit être mieux connu du grand public.
-Dans le cadre des nouvelles orientations annoncées par la Ministre des Droits des
femmes et le Ministre de l’Education, contribuer à la réflexion sur les contenus de
formation des personnels de l’Education nationale et sur les méthodologies de suivi
et d’évaluation de cette nouvelle politique.
La priorité est d’associer tous les acteurs concernés – enseignants, journalistes,
conseillers d’orientation, publicitaires, administrations de l’Education nationale
etc. afin qu’ils réfléchissent au sexisme, à leur propre sexisme inconscient,
généralement développé par simple méconnaissance. C’est grâce à cette prise de
conscience collective qu’enfin, femmes et hommes pourront progresser.
6. Droits des femmes et enjeux internationaux et européens
Les politiques de l’égalité entre les femmes et les hommes conduites par les
différents gouvernements s’inscrivent dans le cadre d’engagements internationaux
pris par la France : d’une part, la Convention des Nations Unies « sur l’élimination
de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes » (CEDAW) signée le
17 janvier 1980 et ratifiée le 14 décembre 1983. En application de cette
Convention, la France est tenue d’adapter sa législation interne pour la rendre
conforme aux dispositions de la Convention et de prendre des mesures concrètes
pour l’appliquer (en 2013, la France doit, d’ailleurs, présenter son septième
rapport sur l’application de la convention).
Elle doit le faire également, aussi, depuis la déclaration et le programme de Pékin
de 1995 qui a fixé douze domaines d’actions prioritaires et défini une méthode
d’action, le « Gender mainstreaming »38 (dite « approche intégrée de l’égalité »)
Défini par le Conseil Economique et Social des Nations Unies (ECOSOC) en 1997 comme suit : «L’intégration
des questions de genre consiste à évaluer les implications des femmes et des hommes dans toute action
planifiée comprenant la législation, les procédures ou les programmes dans tous les domaines et à tous les
niveaux. Cette stratégie permet d’intégrer les préoccupations et les expériences des femmes et des hommes à
la conception, à la mise en œuvre, au contrôle et à l’évaluation des procédures et des programmes dans toutes
38
Page | 33
dans le cadre de laquelle s’inscrit l’action de l’Union européenne en adoptant des
indicateurs de suivi pour chacun des 12 domaines d’actions.
C’est dans le droit fil de la Conférence de Pékin de 1995 que Jacques Chirac a tenu
à ce que soit créé l’Observatoire de la parité pour répondre à la nécessité d’avoir
un « mécanisme national situé au niveau le plus élevé possible de l’Etat et relevant
directement d’un ministre, qui dispose de ressources financières et humaines
suffisantes et qui a le pouvoir d’influer sur l’élaboration de toutes les politiques du
gouvernement ».39
Au sein de l'Union européenne, la France, en tant qu’État membre, se doit
d’intégrer la totalité de l’acquis communautaire en matière d’égalité entre les
femmes et les hommes, ce qui constitue un important corpus de textes juridiques
transposés dans le droit interne.
Malgré l’importance de ces dispositifs, aucun Conseil, aucune Commission n’existe
pour veiller à la mise en œuvre de ces textes. C’est ce que se propose de faire le
Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes en créant en son sein une
Commission « Droits des femmes et enjeux européens et internationaux ».
Le premier objectif de cette commission est de veiller à ce que les textes
européens en matière d’égalité entre les femmes et les hommes soient intégrés au
droit français. Il s’agit de s’assurer de la transposition des directives et règlements
européens dans le droit français (dispositions législatives et réglementaires) et de
la mise en œuvre des mesures de transposition.
La Commission doit effectuer un vrai travail de suivi, en concentrant
particulièrement son attention sur les crédits engagés et les objectifs chiffrés
définis par la loi afin d’en évaluer les effets sur le long terme.
La Commission doit également faire un travail de veille de l’actualité européenne
en matière de droits des femmes afin que la France transpose, plus rapidement
qu’elle ne le fait déjà, les dispositions européennes. Le récent séisme autour de
les sphères politiques, économiques et sociétales pour qu’ils en bénéficient de manière égale et que l’inégalité
actuelle ne soit pas perpétuée»
Déclaration de Pékin, septembre 1995, « Objectif stratégique G.2 : « Donner aux femmes les moyens de
participer à la prise de décisions et d’exercer des responsabilités », principe 201 : « Tout Etat devrait avoir un
mécanisme chargé de la promotion de la femme, qui soit la principale entité de coordination des politiques
nationales. De tels mécanismes ont pour tâche essentielle d’appuyer l’intégration de la problématique
hommes-femmes dans tous les secteurs et dans toutes les entités de l’Etat », p.90
39
Page | 34
l’abrogation du délit de harcèlement sexuel est venu nous rappeler que la France
avait parfois un temps de retard, puisque la notion de « harcèlement sexuel » avait
été définie de manière relativement exhaustive dès 2002 dans la Directive
2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil.40 Une transposition plus rapide
de cette directive dans le droit français aurait permis d’éviter l’abrogation du
délit, certes éphémère, grâce à la réactivité du nouveau gouvernement, pour
« inconstitutionnalité ».41
Le deuxième champ d’action de la Commission est un travail de méthodologie sur
l’aide au développement. En s’inspirant de ce que peuvent faire d’autres Etats
membres, il s’agira d’élaborer une méthodologie permettant de mettre en place
des indicateurs qui mesure l’impact sur la vie des femmes et des populations de la
mise en œuvre d’un programme de développement. Grâce à cette méthodologie,
on peut penser que l’aide au développement serait, à terme, mieux ciblée donc
plus efficace.
La France doit être promotrice de l’amélioration de la situation des femmes au
niveau national, en étant des plus réactives dans la transposition des directives
européennes favorables à l’égalité de genre, au niveau européen, en étant
extrêmement volontariste dans la définition de politiques publiques européennes
favorables aux droits des femmes (comme sur l’IVG et la contraception, ou encore
sur les congés maternité, paternité et parental partagé à égalité), et enfin au
niveau
international,
en
défendant
une
approche
genrée
de
l’aide
au
développement.
C. Son organisation
Le Haut Conseil est présidé par le Premier ministre, et par délégation, par le ou la
Président-e du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Directive 2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002 modifiant la directive
76/207/CEE du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et
femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les
conditions de travail
40
41
Décision du Conseil Constitutionnel, n°2012-240 QPC du 4 mai 2012
Page | 35
1. La commission permanente
A la tête du Haut Conseil siège une commission permanente dirigée par la
Présidente déléguée du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes,
nommée par le Premier ministre, pour un mandat de cinq ans, irrévocable et
non-renouvelable. Afin d’assurer l’indépendance du Haut Conseil, il semble
préférable que cette personnalité ne soit pas un parlementaire en fonction.
Cette Présidente anime une commission permanente composée de 14 personnes :
-Les Président-es des trois délégations aux droits des femmes de l’Assemblée
nationale, du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental,
actuellement membres de droit, afin d’assurer le lien entre tous les acteurs
institutionnels sur la question
-Le Défenseur des droits
*
-Le ou la Directeur-trice de l’Observatoire national des violences
-Le ou la Secrétaire général-e du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle
-Le ou la Président-e du Haut Conseil de la Famille
-Les Président-es des commissions thématiques du Haut Conseil
*
Il est important que le Défenseur des droits et le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les
hommes travaillent de concert car, comme l’indique le rapport annuel du Défenseur des droits de
2011, les réclamations enregistrées sur le critère du sexe sont passées de 668 en 2009 à 567 en 2010
puis à 303 en 2011 pour ne représenter donc que 3,7% du nombre total de saisines en 2011. 42
Si le rapport estime que « le sentiment de résignation a reculé »43 , notamment pour les
discriminations en raison de grossesse, il est nécessaire que les deux institutions se fassent le relais
des actions menées par l’une et l’autre. D’un côté, le Défenseur des droits doit avoir parfaite
connaissance des enjeux et des problématiques de genre en participant aux travaux menés par le
Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes pour mieux sensibiliser à cette
discrimination. Symétriquement, le traitement des plaintes ne rentrant pas dans le champ de
compétences du Haut Conseil contrairement à ce que peut faire, par exemple, l’Institut pour
42
BAUDIS Dominique, Rapport annuel du Défenseur des droits, 2011, p.103
43
Ibid, p.109
Page | 36
l’Egalité des femmes et des hommes en Belgique, il doit être au fait des avancées dans le
traitement de ce cas de discrimination.
2. Les commissions thématiques

Commission Parité politique, économique et sociale

Commission Violences de genre

Commission Articulation des temps de vie

Commission Socialisation et lutte contre les stéréotypes de genre

Commission Droits des femmes et enjeux internationaux et européens

Commission Santé des femmes, droits sexuels et reproductifs
Chaque Commission élit en son sein 2 rapporteur-es – coprésident-es qui se font le
relais des travaux menés en commissions.
3. Les collèges
Ils seraient fixés par décret :

Un collège de 12 « Personnalités qualifiées »

Un collège de 12 « Associations »

Un collège de 12 « Elus locaux et nationaux »

Un collège de 12 « Administration»

Un collège de 12 « Chercheur-es en étude de genre »
Les nominations des membres se feront sur proposition de la Présidente du Haut
Conseil au Premier ministre qui les nomme par décret.
Les membres seront choisis nominativement, intuitu personae, au sein de leur
organisation.
Page | 37
Chaque membre sera affecté à une commission lors de sa nomination, en fonction
de sa compétence et de son expertise, afin de faire vivre toutes les commissions
thématiques du Haut Conseil : Il s’agit d’éviter à la fois les fluctuations de mode et
les dilutions, c'est-à-dire éviter le fait qu’un thème fasse converger tous les
travaux au détriment de tous les autres.
Comme l’indique Réjane Sénac-Slawinski, le risque « si le Haut Conseil dilue
complètement les thèmes, c’est que la société civile pense que l’on tue les
politiques d’égalité (…) En France, sous l’impulsion de la Charte de l’égalité, on
s’est passé des acteurs spécifiques, des formations, des référents. En défendant
l’idée que l’égalité allait se répandre partout et que chacun allait la répandre, il
ne s’est rien passé. Cela, c’est le pas d’après que l’on fait quand l’approche
intégrée est acceptée par tous ».44
Le Haut Conseil sera composé de 60 personnes émanant de 5 collèges et de 6
personnes membres de droit.
D. Son fonctionnement
1. Les membres et l’organisation du travail
Le Haut Conseil a une vocation de transversalité, c’est pourquoi il sera important
que les membres, une fois affectés dans leurs commissions thématiques, puissent
participer aux travaux des autres commissions. Si l’on ne peut faire du transversal
sans faire également du spécifique, il faut néanmoins décloisonner les thèmes
lorsque c’est nécessaire et faire en sorte que chacun puisse travailler en toute
souplesse.
Le travail s’organise donc à la fois en interne de chaque commission, et en travail
commun de l’ensemble du Haut Conseil, sur un thème transversal.
C’est ainsi que, chaque année, la Commission permanente définit un thème de travail qui recouvre
les différents champs de l’égalité femmes-hommes, qui, la première année, par exemple, pourrait
être celui de « Femmes et laïcité en 2013 en France » « impact du temps partiel sur l’égalité entre les
femmes et les hommes » (tant d’un point de vue matériel (précarité, violences, etc.) que sur les représentations)
ou « ruralité » ou « genre et services à la personne »
. En parallèle, la Commission permanente choisit pour chaque commission le thème
de travail spécifique de l’année.
44
Audition de Réjane Sénac-Slawinski
Page | 38
Le rapport remis au Premier ministre et présenté devant le Parlement rendra
compte à la fois des conclusions du thème de travail du Haut Conseil, ainsi que des
travaux effectués au sein de chaque Commission.
La diversité des contenus des travaux effectués par tous les acteurs de l’égalité
entre les femmes et les hommes doit conduire à mieux les faire connaître. C’est la
raison pour laquelle il apparaît indispensable d’organiser, chaque année, un
« grand événement » qui permette à la fois de sensibiliser le grand public et de
renforcer les liens avec les territoires.
2. Les ressources humaines
En l’état actuel, le Haut Conseil dispose de 3 équivalents temps plein ; ce qui peut
sembler largement insuffisant pour que cette structure tienne tout son rôle, à la
hauteur de ses missions.
*
*A titre de comparaison, l’Observatoire interministériel de la sécurité routière dispose de plusieurs
statisticiens professionnels, l’Observatoire national de la fin de vie est composé d’une équipe de six
personnes (sociologue, médecin, infirmier etc.) et la Commission nationale consultative des droits
de l’Homme s’appuie régulièrement sur huit postes de permanents et au-delà régulièrement sur des
étudiants en thèse qui font des recherches pour son compte, ce qui renforce la capacité d’expertise
de l’institution.
C’est pourquoi, il faudrait envisager à terme un quatrième poste de catégorie A.
A l’heure actuelle, la répartition des postes est la suivante :
-L’un est affecté au poste de Coordinateur-trice des travaux et d’animation des
groupes de travail, en collaboration avec la Présidente et est, également, chargé
de la veille juridique.
-Le deuxième au poste de Chargé-e de mission de communication et relations
presse pour faire connaître le Haut Conseil et ses travaux, alimenter le site
Internet quotidiennement et travailler à l’élaboration des grands événements
annuels, en relation avec les partenaires.
Page | 39
-Le troisième au poste d’évaluateur/évaluatrice des opérateurs et des politiques
publiques chargé-e de mettre en place des indicateurs et de réaliser une étude
critique des études d’impact, en collaboration avec le Cabinet et le SDFE.
Il faut, par ailleurs, lorsque les services des administrations ne peuvent fournir les
éléments nécessaires, missionner des chercheur-es sur une étude précise lorsque
les travaux du Haut Conseil le nécessitent.
De la même manière, il apparaît nécessaire de bénéficier de la collaboration
d’étudiants en thèse sur des études et des missions ciblées.
CONCLUSION
Avec le rétablissement d’un Ministère des droits des femmes de plein exercice, un
immense espoir s’est levé parmi les militantes associatives et les élu-es des
territoires qui rivalisent d’imagination, depuis des années, pour sensibiliser aux
inégalités entre les femmes et les hommes et lutter contre les discriminations
sexistes. Enfin, la nouvelle page politique qui s’ouvre va permettre de faire
progresser dans tous les champs de la vie sociale et dans toutes les sphères de la
société l’exigence d’égalité. Mais, un tel combat ne peut être mené sans réunir
d’une même voix tous les acteurs engagés, associations, élu-es locaux et
nationaux, chercheur-es en étude de genre, expert-es de terrain. C’est pourquoi un
Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, reconstruit sur les bases
de l’Observatoire de la parité, doit devenir ce lieu de concertation et de diffusion
d’une approche intégrée de l’égalité. Confortant la démarche des études d’impact
genrées, il mettra son expertise au service du Ministère des droits des femmes pour
améliorer ce dispositif innovant. Reprenant les dispositifs pensés localement, le
Haut Conseil se donnera les moyens d’agir globalement et pourra devenir, à son
tour, une référence en Europe dans la promotion de l’égalité entre les femmes et
les hommes.
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ANNEXES
-Annexe n°1 : La lettre de mission
-Annexe n°2 : La liste des personnes auditionnées
-Annexe n°3 : L’organigramme du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les
hommes
-Annexe n°4 : Le décret portant création d’un Observatoire de la parité entre les
femmes et les hommes
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Annexe n°1 – La lettre de mission
Page | 42
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Annexe n°2 – La liste des personnes auditionnées
-Mme Geneviève Bel, Présidente de la Délégation aux droits des femmes du Conseil économique,
social et environnemental
-Mme Jocelyne Bougeard, Présidente de la Commission Femmes élues locales du Conseil des
communes et régions d’Europe
-Mme Thalia Breton, Porte-parole d’Osez le féminisme !
-Mme Sandrine Dauphin, Docteure en sciences politiques, auteure de L’Etat et les droits des
femmes
-M. Maxime Forest, Docteur en sciences politiques, spécialiste des politiques d’égalité et de lutte
contre les discriminations en Europe, de l’européanisation des politiques d’égalité et de la
participation des femmes en politique
-M. Michel Frost, Secrétaire général de la Commission nationale consultative des droits de
l’Homme
-Mme Catherine Génisson, Sénatrice, ancienne Rapporteure générale de l’Observatoire de la
parité (1999-2002)
-Mme Brigitte Gonthier-Maurin, Présidente de la Délégation aux droits des femmes du Sénat
-Mme Brigitte Grésy, Ancienne rapporteure de la Commission sur l'image des femmes dans les
médias, membre de l’Observatoire de la parité
-Mme Françoise Laurant, Ancienne Présidente du Mouvement français pour le Planning familial,
membre du Conseil supérieur de l’information sexuelle, de la régulation des naissances et de
l’éducation familiale
-Mme Caroline Ressot, Secrétaire générale de l’Observatoire de la parité entre les femmes et les
hommes
-Mme Ernestine Ronai, Présidente-fondatrice de l'Observatoire départemental des violences
faites aux femmes de Seine-Saint-Denis
-Mme Réjane Sénac-Slawinski, Docteure en sciences politiques, ancienne Secrétaire générale de
l’Observatoire (2001-2003)
-Mme Cécile Sportis, Conseillère honoraire des affaires étrangères, chargée de mission pour
l'égalité femme-homme
-Mme Martine Storti, Philosophe, journaliste, présidente de l’Association féministe « 40 ans de
mouvement »
-Mme Maya Surduts, Membre du Collectif National pour les Droits des Femmes (CNDF), Secrétaire
générale de la Coordination des Associations pour le Droit à l’Avortement et à la Contraception
-Mme Nathalie Tournyol du Clos, Cheffe du service des droits des femmes et de l’égalité
-Mme Olga Trostiansky, Présidente de la Coordination française pour le lobby européen des
femmes, membre de l’Observatoire de la parité
-Mme Marie-Jo Zimmermann, Députée, ancienne Rapporteure générale de l’Observatoire de la
parité (2002-2005, 2006-2009)
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Annexe n°3 – L’organigramme du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes
COMMISSION
PERMANENTE
DU HAUT
CONSEIL
Parité politique,
économique et
sociale
Violences de
genre
Articulation des
temps de vie
Socialisation et
lutte contre les
stéréotypes de
genre
Droits des
femmes et
enjeux
internationaux
et européens
Santé des
femmes, droits
sexuels et
reproductifs
Page | 45
Annexe n°4 – Le décret portant création d’un Observatoire de la parité entre les femmes et les
hommes
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