07 Partie 2 Banques

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Partie 2 :
Fonctions et Gestion des Banques
Chapitre 1 : Les banques
Section 1 : Les Fonctions des banques
1.1. La gestion du système de paiement
Dans sa phase la plus primitive, l’introduction de la monnaie a constitué une innovation
technique. En effet, elle a permis aux agents de réduire les coûts précédemment liés au troc de
biens comme par exemple, le coût de recherche d’agents prêts à échanger, le coût de stockage
en attendant l’échange ou encore en réduisant le nombre de termes d’échange (il ne faut plus
nécessairement une concordance des biens échangés). La monnaie est en fait un bien
communément accepté dans une économie et qui répond à trois critères : ce bien doit être non
périssable, divisible et suffisamment rare1. Le rôle de la monnaie est triple : elle sert de moyen
d’échange, d’étalon et de réserve de valeur. Dans ce denier rôle de la monnaie, on constate
l’innovation apportée par celle-ci. En effet, c’est l’introduction de la monnaie qui a permis
aux agents de stocker du pouvoir d’achat et donc de désynchroniser les échanges de biens et
services dans le temps. Cependant, la monnaie constitue un actif dominé puisqu’il est en effet
plus intéressant d’investir sur les marchés monétaire, obligataire ou boursier qui rapportent en
général un rendement supérieur à celui de la monnaie. Ce constat est d’autant plus vrai que
l’inflation atténue le pouvoir d’achat de périodes en périodes (dans la zone €, la BCE a pour
objectif de stabiliser l’inflation autour de 2% par an). Il existe cependant un cas où la
détention de monnaie peut être préférée à la détention d’autres actifs : c’est lorsqu’il y a
déflation.
Depuis la chute du système de l’étalon or (c’est-à-dire que la monnaie n’est plus garantie sur
les réserves d’or de la banque centrale), la monnaie ne renvoie plus un bien physique. Elle est
constituée de créances soit sur la banque centrale (monnaie fiduciaire), soit sur des banques
commerciales (monnaie scripturale). Celles-ci ont elles-mêmes comme contrepartie d’autres
créances sur les agents économiques. Les paiements se font par échanges physiques de
1
Pour plus de précisions, consulter le cours de Monsieur G. de Walque, « Théorie monétaire ».
monnaie fiduciaire ou par compensations de créances monétaires scripturales2. On le
constate donc ici, les banques ont entre autres, le rôle d’assurer la gestion du système de
paiement par la compensation des inscriptions monétaires.
1.2. Intermédiation et liquidité
En plus d’assurer le rôle de gestion du système de paiement, les banques ont comme autre
rôle d’assurer l’intermédiation des fonds entre agents en déficit et agents en surplus. Par là
même, les intermédiaires financiers organisent la création de liquidités en mobilisant des
capitaux à court terme via les dépôts bancaires pour les prêter à long terme à des particuliers
ou entreprises.
1.3. Transformations
Les transformations produites par les établissements de crédit sont multiples :
-
Transformation de taille : les banques collectent un ensemble de petits dépôts qu’elles
tentent de transformer en prêts plus importants.
-
Transformation de maturités/de termes : les dépôts bancaires sont en général à court
terme, alors que les crédits octroyés par les banques sont de plus long terme.
-
Transformation de qualité, de risque : puisque les prêts bancaires sont plus risqués que
les dépôts, un des rôles de la banque est aussi celui de tenter de diversifier le risque
auquel elle doit faire face. Il en est de même pour les transformations de taux variables
et taux fixes pratiquées par les banques.
Ces transformations impliquent bien évidemment un certain nombre de risques pour les
banques (voir section 2 sur les risques bancaires).
1.4. Production d’information et de surveillance
Le rôle d’une banque est également de réduire l’asymétrie d’information entre prêteur et
emprunteur. Ainsi, afin d’éviter tout risque de sélection adverse, la banque opère une
sélection (« screening ») des emprunteurs. Ensuite, en vue de prévenir le hasard moral de
ceux-ci, la banque assure un suivi (« monitoring ») des emprunteurs. L’intermédiaire financier
2
Cf. cours de Monsieur O. Lefebvre, « Marchés financiers nationaux et internationaux », chapitre 1 « Système
financier et système économique ».
peut aller jusqu’à créer des contrats discriminants, avec incitants (ex : prêts futurs
conditionnels au remboursement de l’emprunt) ou garanties (sur collatéral) afin de tenter de
réduire les conséquences que pourraient engendrer cette asymétrie d’information.
Chercher de l’information au sujet d’un emprunteur comporte bien évidemment un coût.
Ainsi, un des problèmes auxquels peut être confrontée la banque est celui du « free riding »,
c’est-à-dire qu’un intermédiaire financier concurrent peut sur base d’un crédit octroyé par la
première banque en juger que l’emprunteur est fiable : il sera donc prêt à octroyer à ce même
emprunteur un crédit dans le futur, et ce sans avoir dû subir un coût de recherche
d’information trop important. Cependant, il se peut également que l’intermédiaire financier
concurrent attire sans le savoir, un agent mauvais payeur que sa banque d’origine aura chassé
sans qu’il n’en sache quelque chose. Ce dernier pensant tomber sur une aubaine prêtera en fait
à un emprunteur douteux, augmentant donc son risque de non-rembousement : il s’agit de la
« malédiction du gagnant ». Afin d’éviter tout risque en matière d’information des
emprunteurs, il existe, à la banque nationale, à disposition des banquiers, des listes blanches et
noires qui reprennent respectivement l’ensemble des bons et mauvais payeurs.
N.B. : Pour évaluer les capacités de remboursement de grosses entreprises et d’emprunteurs
institutionnels (états), il existe également des agences de rating telles Standard & Poors ou
encore Moody’s.
1.5. Services non spécifiquement bancaires
En dehors de leurs quatre rôles traditionnels, les banques effectuent un ensemble de services
non spécifiquement bancaires. On peut en outre y compter la création d’information (non liée
à l’asymétrie d’information) comme par exemple l’analyse de conjonctures économiques.
Elles procèdent également à l’étude de plans d’affaires, organisent des formations (en
comptabilité par exemple). Elles se permettent aussi de pratiquer de l’intermédiation
professionnelle (entre agents institutionnels). De plus les banques effectuent du conseil en
placement, en trésorerie et en financement. Et enfin, les intermédiaires financiers se
diversifient de plus en plus en acquérant des parts de marché dans le monde des assurances.
Section 2 : Le modèle de fourniture de liquidité de Diamond et Dibvyg
Un des rôles de la banque est d’être fournisseur de liquidités. Or, cela peut poser problème car
fournir de la liquidité peut dans certains cas mener à une crise bancaire. Il faut donc pouvoir
assurer ce risque par l’assurance dépôt. Le travail de Douglas Diamond et Philip Dybvig 3 est
à l’origine de la construction d’un cadre d’analyse des ruées bancaires dites auto-réalisatrices.
Situation de référence sans banques :
Considérons un modèle à 3 périodes :
T=0
T=1
T=2
-1
0
R > 1 (R= 1 +r)
1
0
En T=0, les agents déposent leur argent en banque. Ensuite, ils peuvent choisir de retirer leur
dépôt soit en T=1 ou T=2. S’ils choissent de retirer en première période, ils recevront 1. S’ils
privilégient la seconde période, ils recevront un revenu certain R.
Or, en T=0, les déposants ne savent pas s’ils auront ou non un besoin urgent de fonds avant
T=2.
Considérons à présent qu’il y a deux types d’individus. Les agents de type 1 retireront l’argent
en T=1. Réciproquement, les agents de type 2 retireront en T=2.
Les agents de type 1 consomment
C
1
1
=1 tandis que ceux de type 2 consomment
C
2
2
= R.
Leur utilité U sont respectivement U( C1 ) et ρU( C1 + C 2 )
Il y a en réalité, deux hypothèses d’information sur les types d’individus :

La proportion des deux types est connue en T=0. Dans ce cas, la banque sait combien
retireront en T=1, elle fixera donc r en connaissance de cause. Elle est donc en mesure
de détenir ce qu’il faut d’actifs liquides pour satisfaire les retraits en période 1. Elle
place alors le reste de ses ressources en actifs illiquides, destinés à satisfaire le retrait
des individus de type 2.
3
Diamond Douglas & Dybvig Philip (1983) « Bank runs, Deposit insurance and liquidity » Journal of Political
Economy, 91, 3, 401-419.

La proportion des deux types est inconnue en T=0. La banque ne sait donc pas
combien retireront, soit parce que les déposants ne le savent pas eux-mêmes, soit
parce qu’ils ne peuvent donner d’une manière certaine, cette information.
Introduction d’une banque :
Une moyen d’améliorer le bien-être des agents par rapport à la situation de base serait de
considérer que les agents qui choisissent de retirer en période en 1 reçoivent alors r1>1 et ceux
qui retirent en période 2 reçoivent r2>1 mais r2 est inférieur à R. Ainsi, les agents de type 2
reçoivent tout de même plus en période 2 que s’ils avaient choisi la période 1 pour leur retrait.
Il y a donc un avantage à laisser son argent plus longtemps. De plus, les agents de type 1
peuvent bénéficier d’un montant supérieur à ce qu’ils auraient reçu normalement (r1>1). Il y a
donc moyen de faire mieux que la situation initiale.
Si la banque connaît la proportion de chaque type, elle pourra déterminer r1 et r2. r1 sera
d’autant plus proche de 1 que la proportion de type 1 sera grande. Si celle-ci est faible, on
donnera en T=1 un intérêt relativement élevé.
On a donc un transfert de revenu de la période 2 vers la période 1.
U(C)
Utilité décroissante due à l’aversion au risque
1
r1
Graphique I.2.1
Risque d’illiquidité par panique:
r2
R
C
Or, il y a un risque à l’opération, celui que de très nombreux agents viennent en période 1
pour retirer. Par conséquent, le risque de ne plus pouvoir retirer leur argent ultérieurement va
augmenter pour les agents patients. Diamond et Dybvig montrent bien que les individus de
type 2 ont intérêt à se livrer à une ruée de « panique pure » à partir du moment où les autres
font de même. Les individus mentent alors sur leur type.
Le rôle de la banque qui est donc d’augmenter l’utilité des agents avers au risque est donc lié
à la liquidité. Or, comme nous venons le montrer, en fournissant ce service, la banque court
un risque : la perte de confiance des agents les uns envers les autres.
On pourrait faire une analogie avec une banque distribuant des graines de blé. Le risque est
alors qu’il n’y ait plus assez de graines en période 2. La méfiance des agents peut s’expliquer
par le fait que les intérêts promis supposent une récolte en 2 qui n’a pas encore eu lieu.
Le danger de « bank run » c’est donc justement que tous les agents viennent chercher leurs
liquidités au même moment. Il s’agit donc bien ici d’un risque de liquidité et non de
solvabilité.
Remèdes au risque d’illiquidité en T=1 :
Supposons à présent que la banque puisse fermer ses portes à un moment donné. Elle
distribue les liquidités, puis, après un certain temps, elle décide de stopper la distribution.
Ainsi, l’équilibre est rétabli, car ne se présenteront que ceux qui ont réellement besoin de leur
argent. Les autres agents attendront la période ultérieure, bénéficiant ainsi d’un montant
supérieur et d’une utilité plus élevée garantie. Ils savent que tout n’a pas été distribué en
période 1 et ne viendront donc pas de manière anticipée.
Une autre alternative est la création de monnaie par la Banque Centrale. Toutefois, si on
imprime trop de billets, le pouvoir d’achat d’un billet va diminuer. Ce qui va alors décourager
les agents de retirer leur argent prématurément. Si on reprend l’exemple de la banque de
graines de blé, les agents ayant davantage de billets vont vouloir acheter des graines. Or, suite
à l’augmentation du nombre de billets, pour un même nombre de graines, il faudra fournir
davantage de billets que précédemment.
On constate donc que la panique peut être évitée si on supprime le risque d’illiquidité de la
banque. C’est l’objet selon Diamond et Dybvig de l’assurance-depôt qu’ils assimilent à une
taxe qu’imposerait l’Etat aux agents qui retirent avant terme. Le produit de cette taxe serait
versé aux agents qui n’ont pas paniqué. Ce faisant, les agents qui ne sont pas soumis à un
besoin de liquidité ne paniqueront plus. Généralement, l’annonce de la taxe suffisant, sa mise
en oeuvre n’a pas lieu.
Selon Diamond et Dybvig, l’assurance-dépôt financée par une taxe sur les retraits effectifs
aurait un avantage sur la fermeture : il ne faut pas connaître la proportion d’agents de type 1 et
de type 2. Il suffit d’observer l’ensemble des retraits. Cet avantage théorique ne règle
cependant un problème pratique : le calcul de la taxe devrait se faire après l’enregistrement de
toutes les demandes de prélèvement.
En pratique, l’assurance-dépôt limite son intervention à un certain montant par déposant dans
chaque banque. En outre, elle est souvent gérée par un organisme d’Etat qui a certains droits
de contrôle sur la gestion des banques.4
En conclusion, la banque assure donc un rôle de fournisseur de liquidité. Mais, en assurant ce
service, elle court un risque de liquidité ; risque qui peut être couvert par l’assurance dépôt ou
la création de monnaie.
Section 3 : les risques bancaires
-
Gestion du risque : les risques auxquels doivent faire face les intermédiaires financiers
sont de:
o Crédit, risque que l’emprunteur ne rembourse pas. Si les cas de nonremboursement se multiplient ou persistent, la banque elle-même court un
risque de solvabilité : la valeur récupérable de ses créances (actifs) est
inférieure à celle de ses dépôts et autres engagements. Tout l’art du banquier
est de discerner entre agents non solvables lesquels sont encore à soutenir
financièrement ou pas, c’est-à-dire de repérer lesquels seront capables de le
rembourser ou pas dans le futur.
o Liquidité : La partie immédiatement disponible (liquide) de l’actif est
insuffisante pour faire face aux retraits de dépôts à vue ou à échéance. Si la
4
Dewatripont & Tirole, 1994, « The Prudential Regulation of Banks », MIT Press, 262 pp.
banque est solvable, elle peut alors récupérer les liquidités en vendant des
créances de qualité ou en les touchant à l’échéance. Un manque de liquidités
peut engendrer un mouvement de panique générale débouchant sur un retrait
massif des déposants dans le secteur (bank run) et sur des ventes forcées qui
réduisent la valeur des créances et débouchent sur un problème de solvabilité.
o Risque de change, risque de taux d’intérêt, risque que n’intervienne une
variation du cours de change d’un actif, par rapport à une autre devise,
résultant d’une variation du taux de change. Risque que les taux débiteurs et/ou
créditeurs du marché ne se modifient.
o Risque opérationnel technique : risque lié au personnel, aux équipements, aux
procédures…
o Risque légal ou systémique : risque provenant de l’environnement légal et
économique de la banque.
Il existe différents moyens pour les banques de se prémunir contre l’ensemble de ces risques
via la diversification, l’exigence de la banque envers les emprunteurs que ceux-ci prennent
une assurance ou encore via des garanties solides des emprunteurs envers la banque.
Ces risques seront étudiés plus spécifiquement au chapitre 2 « Gestion bancaire »
Section 4 : Types de banques
Voir HULL, John C. (2009) « Risk Management and Financial Institutions », chap. 2.
4.1. Banques commerciales ou de dépôts
Ce type de banques emprunte et prête à court terme (essentiellement des comptes à vue). Elles
ajoutent en général à cette activité un ensemble de services pour les clients tels que la gestion
de fonds ou la gestion de fortune.
Exemples : Dexia, ING, Fortis, CBC,…
Remarque : Dexia, anciennement Crédit communal, est toujours actuellement le principal
prêteur des communes, ce qui l’oblige dans ce cas à faire des prêts à plus long terme. De plus,
Dexia ayant racheté la BACOB, banque du réseau syndical chrétien, la banque est également
là aussi obligée de faire des prêts à plus long terme.
4.2. Banques universelles
Il s’agit d’intermédiaires financiers ayant les activités de banque commerciale et de
financement à long terme d’entreprises via détention d’obligations ou d’actions sur ces
sociétés. La détention de capital à risque se fait à long terme dans les banques universelles.
Ces banques ayant de fortes relations avec l’économie réelle, le législateur a préféré, dans la
plupart des pays occidentaux dans les années 1930, séparer les deux activités qui la
composent pour éviter une reproduction de la crise de 1929. Ceci n’a tout de même pas
empêché la subsistance de ce type de banques au Japon et en Allemagne.
Exemple : Daimler-Benz était auparavant détenu par la Deutsche Bank.
Il arrive que la relation soit parfois inversée, à savoir que ce sont les banques qui sont créées
ou détenues par des entreprises. Ces dernières y voient évidemment une source de crédit à
meilleur marché.
4.3. Banques d’investissement
Les banques d’investissement se spécialisent essentiellement dans le financement à long
terme d’entreprises. Ces banques détiennent rarement des actions à long terme, mais souvent
de manière temporaire, le temps de les placer le plus judicieusement possible auprès
d’investisseurs finaux. Elles s’occupent également d’assurer les entrées en bourse
d’entreprise, s’engageant même parfois à racheter les titres invendus sur le marché primaire.
En outre, ces banques pratiquent également la gestion de fonds de pension, de placement,
institutionnels (assureurs), …
Exemples : JP Morgan, Degroof, Petercam, …
4.4. Caisses d’épargne
Les caisses d’épargne sont quant à elles spécialisées dans la collecte de fonds à long terme
émanant de petits déposants. Une parfaite illustration de ce type de banque a été donnée par
les Savings & Loans aux Etats-Unis. Ces banques étaient essentiellement spécialisées dans
l’immobilier et les dépôts à long terme. Cependant, la « Regulation Q », qui limitait la
concurrence entre dépôts en fixant des plafonds maximaux de rémunération de ces comptes de
dépôts, ayant été levée, la concurrence entre caisses d’épargne américaines a augmenté,
poussant les taux de rémunérations à la hausse. Les banques drainant moins de revenus ont
donc été contraintes dans ce contexte de devenir plus rentables, ce qui les a donc poussées à
accorder des prêts à rémunération plus importantes, mais plus risqués également. Le choc fut
tel sur ces caisses d’épargne que la Federal Savings & Loans Insurance Company s’est vue
mise en faillite. Les caisses d’épargne ont maintenant pratiquement disparu. Cette disparition
s’explique également par un faible multiplicateur de crédit de ce type de banques.
4.5. Banques coopératives ou mutuelles
Les banques mutuelles ou coopératives sont basées sur une toute autre relation entre prêteur
ou emprunteur et intermédiaire financier. En effet, il faut tout d’abord être membre de la
banque pour pouvoir lui prêter ou lui emprunter. Cette conception de la banque a parfois
permis de contourner la réglementation sur l’appel public d’épargne des banques dans le but
honorable de toucher plus facilement une clientèle que les banques classiques refusent. Elle
évite également au banquier la demande d’une licence de pratique bancaire à l’autorité
compétente. Dans ces banques, le déposant est plus qu’un « bailleur de fonds », il est
coopérateur et bénéficie à ce titre d’informations différentes d’un déposant d’un autre type
d’établissement de crédit. Ainsi, cela lui permet de gérer son argent différemment. Ce type de
banque a également existé chez nous. Il est toujours présent en Allemagne.
Exemples : Banques agricoles comme le Boeren Bond, les Credit Unions aux Etats-Unis,
Raiffeisen en Allemagne
4.6. Banques-assurances
Voir HULL, John C. (2009) « Risk Management and Financial Institutions », Chap. 3 sur
l’assurance.
Il s’agit de banques ayant également une activité dans le monde des assurances. Ce modèle
mixte possède beaucoup d’avantages et d’inconvénients, mais est cependant fort contesté : il
peut créer de la valeur ou en détruire5.
4.7. Micro-banques et groupes informels
Ces établissements de crédit sont semblables aux banques coopératives ou mutuelles. Elles
ont permis l’accès au crédit à de nombreux petits emprunteurs dans les pays en voie de
développement6.
Section 5 : les 4D des années 1980
Les tendances évolutives du système bancaire depuis le début des années 1980 peuvent se
résumer à travers 4D :
-
Déspécialisation :
Les intermédiaires financiers tentent de se ressembler de plus en plus.
-
Désintermédiation :
La désintermédiation se caractérise par un accès de plus en plus direct au marché tant
pour les agents en déficit qu’en surplus sans avoir nécessairement recours aux
banques. Les banques sont en effet de plus en plus concurrencées par des véhicules
financiers tels les hedge funds, les SICAV, les SICAF ou encore les fonds communs
de placement. Afin de contrer cette tendance, les banques ont de plus en plus tendance
à titriser leurs fonds (titrisation de créances)7. Toutefois, cette titrisation comportant
certains risques, les acheteurs de ces titres refusent de les endosser, ce qui les laisse
donc à la charge des banques.
-
Dérégulation, déréglementation :
Le législateur accorde de plus en plus de libertés légales aux banques via suppression
des barrières entre activités (et donc déspécialisation des banques) et abrogation des
réglementations tarifaires. Ceci s’est traduit aux Etats-Unis d’abord, par l’« interstate
banking », qui permet maintenant aux banques d’avoir des établissements bancaires
au-delà des frontières de chaque état (interdit auparavant) et ensuite par l’abrogation
5
Cf. Partie 1, Chapitre 1, section 4.
Cf. Partie 2, chapitre 5
7
Cf. Annexes à la partie 3
6
par le président Clinton le 12 Novembre 1999 du « Second Glass-Steagal Act » (datant
de 1933) qui limitait les activités des différents types de banques.
-
Diversification :
Les banques offrent de plus en plus de services différents à leurs clients.
Chapitre 2 : Gestion Bancaire
Section 1 : Gestion bancaire : indicateurs
1.1. Indicateurs comptables
• Analyse des activités bancaires
-
Analyse de l’actif
L’actif d’une banque est composé de :
o Crédits à la clientèle (tant entreprises que personnes physiques)
o
Portefeuilles de titres
o Créances sur établissements de crédit (prêts inter banques)
o Réserves, liquidités
o Immeubles et équipement
-
Analyse du passif
Le passif, lui, est constitué de :
o Dépôts à vue
o Dépôts à terme
o Dettes envers des établissements de crédit (contrepartie des créances à l’actif)
o Dettes subordonnées (dettes intéressantes pour le prêteur, car elles sont
déductibles fiscalement. Le problème est qu’elles sont les dernières dettes à
être remboursées en cas de faillite. Intéressantes pour les banques, elles
peuvent être assimilées aux fonds propres sous certaines conditions, ce qui est
non-négligeable au niveau des règles prudentielles imposées aux banques en
matière de crédits octroyés)
o Fonds propres
o Profits reportés, réserves pour actifs incertains
-
Analyse des activités hors bilan
Les activités hors bilan constituant une part importante des activités bancaires, il nous semble
intéressant de les mentionner ici :
o Cautions et garanties (garanties bancaires, lettres de crédit,…)
o Engagements non révocables (engagement d’achats à terme, lignes de change
à terme, facilités de crédit non utilisées,…)
o Services de conseil et de gestion (gestion de titres, souscriptions de titres,…)
o Les opérations sur taux de change et taux d’intérêt (swaps de taux et de
devises, options de change et de taux, contrats à terme et futures sur taux
d’intérêt,…)8
• Les indicateurs de performance
Afin de contrôler l’efficacité de leurs activités, les banques ont à leur disposition un ensemble
d’indicateurs de performance :
-
Rendement sur actif (ROA) : Profits/Actif
-
Rendement sur fonds propres (ROE) : Profits/Fonds propres
-
Marge de fonds propres ; equity multiplier (EM) : Actif/Fonds propres
ROE = ROA*EM
-
Marge9 d’intérêt (d’intermédiation) (IM) : Recettes d’intérêt – Charges d’intérêt
Actif
Ratio coût-revenus (C/R) : Coûts/Revenus
-
Revenus hors intérêts=Non-interest income, il s’agit de revenus essentiellement
-
expliqués par les activités hors bilan10
• Gestion des liquidités par les organismes de crédit
Il est possible que les banques arrivent parfois à court de liquidités, ce qui peut avoir des
répercussions importantes sur l’ensemble de l’économie si l’on ne s’en préoccupe pas. Etant
donné le rôle de gestion de paiement occupé par les banques, on assisterait en effet à un
« bank run », c’est-à-dire à une panique générale des déposants de l’économie, qui retireraient
en catastrophe leur dépôts. Heureusement, il y a à disposition de la banque certains outils lui
permettant de faire face à ce manque de liquidités. Ci-dessous se trouvent ces moyens cités du
moins coûteux au plus coûteux pour les banques :
8
-
Emprunt sur le marché monétaire (emprunt inter bancaire)
-
Vente de titres (réduction d’actifs)
Cf. cours de Monsieur O. Lefebvre, « Marchés financiers nationaux et internationaux », chapitre 4 « Le
système bancaire ».
9
On peut aussi calculer une marge sur dépôts et une marge sur prêts. Dans ce cas on divise les recettes
(dépenses) d’intérêt par les prêts (dépôts) et on compare le taux obtenu au taux interbancaire.
10
Cf. infra, tarification des services.
-
Réescompte à la Banque Centrale (taux pénalisateurs)
-
Réduction de prêts
1.2. Rémunération des banques
• Marges d’intérêt
Il s’agit d’un taux moyen représentant la différence entre le taux moyen perçu par les banques
dans le cadre de leurs prêts et le taux moyen versé sur les dépôts. Celle-ci est fonction des
coûts des fonds, auxquels s’ajoutent :
o La prime de risque
o La prime de liquidité
o Les frais opérationnels
o La marge bénéficiaire (économies d’échelle individuelles (pas seulement globales), de
portefeuille, de savoir-faire…)
• Tarification des services
Aujourd’hui, la tarification est de plus en plus une source de rémunération. Auparavant, toutes
les opérations bancaires étaient gratuites car les banques comptaient principalement sur une
marge d’intérêt. Mais, ensuite, elles ont constaté que leur marge d’intérêt n’était plus
suffisante pour les services. C’est ainsi, qu’à présent, les banques tarifient leurs services. Il en
existe plusieurs tels que :
o Le conseil
o Le dossier administratif
o Les transactions
• Tarification des risques
Les banques doivent pouvoir couvrir toute une série de risques de l’activité financière.
Certaines sont assurées spécifiquement. Dans ce cas, les agents paient des primes
proportionnelles spécifiques au risque en question.
Il existe deux types de rémunération des risques :
o L’assurance
o Les garanties
Pour les banques, l’idée c’est qu’il y a moyen de jouer le rôle d’intermédiaire financier tout en
ne supportant pas tous les risques de l’activité bancaire. Certains seront gardés par la banque.
Elle en revendra d’autres comme par exemple, ceux liés à la macroéconomie, au marché et
donc non propre à l’activité bancaire.
Cependant, certains risques sont échangeables. Dans ce cas, on met ensemble des risques
complémentaires. C’est le mécanisme du Swap.
Section 2 : Gestion Bancaire : instruments
Voir HULL, John C. (2009) « Risk Management and Financial Institutions », Chap. 5.
• Swap
-
Swap de devises
Cette forme de swap est notamment utilisée pour profiter d’un différentiel attractif entre le
marché domestique et un marché étranger. Les flux étant libellés dans deux monnaies
différentes, il s’agit d’une opération d’échange d’un endettement ou placement dans une
devise contre un endettement ou un placement dans une autre devise.
Les hypothèses d’un swap de devise relèvent souvent d’une même situation initiale
problématique :

Deux entreprises ont chacune un avantage comparé pour un financement différent.

Ce financement ne correspond pas au profil de revenus de l’entreprise.

Il y a un risque excessif (de taux d’intérêt ou de change) par cette non correspondance,
mais renoncer à l’avantage comparé dans le financement crée un coût élevé pour éviter
le risque de taux de change.
Le swap de devise permet d’apporter une solution à cette situation.

Il va y avoir un échange des obligations financières contractées par chaque entreprise
dans une devise selon un avantage comparé sur le marché financier, mais payées par
chacune dans l’autre selon la correspondance avec la devise de sa source de revenu.

Le risque de taux de change est alors diminué par la mise en concordance du profil des
charges financières avec le profil des revenus.

Chaque entreprise reste responsable de son risque de solvabilité qui lui a
précédemment permis d’obtenir ses conditions de financement.
Le swap de devise est donc gagnant pour les trois agents, à savoir les deux entreprises
concernées et l’intermédiaire financier lui-même. Les deux firmes vont pouvoir bénéficier
d’une charge financière moindre que si elles avaient dû elles-mêmes signer un contrat plus en
concordance avec leur profil de revenus. L’intermédiaire, lui, va pouvoir bénéficier de la
marge d’intermédiation.
Exemple 1 : Devises : entreprise et banque
La situation initiale est celle d’une entreprise japonaise émettant des obligations en Yens à un
taux donné mais qui investit en Europe. Elle reçoit dès lors des revenus libellés en Euros. De
l’autre côté, une banque européenne emprunte en Euros à taux donnés.
A travers le swap, la firme japonaise paie l’intérêt et le principal en Euros à la banque qui en
échange lui paie en Yens (intérêt et principal). Les deux agents peuvent alors bénéficier
d’avantages. En effet, la firme japonaise accède ainsi à des Euros à meilleur prix (càd à un
moindre taux) que si elle devait emprunter elle-même. La banque diversifie ses dettes ou se
couvre en plaçant en Yens (par un swap avec une firme européenne qui veut rembourser en
Yens alors qu’elle emprunte en Euros, par exemple).
Exemple 2 : Devises : Deux entreprises
Considérons à présent deux entreprises. La première est belge, elle est donc connue sur notre
marché mais a toutefois des revenus en dollars aux USA où elle n’est pas connue. Elle ne peut
ainsi bénéficier d’un taux avantageux sur le marché US et devrait donc y emprunter à un taux
de 7% alors qu’elle emprunte sur le marché belge à du 6%.
D’autre part, une entreprise américaine ayant des revenus en Euros est dans la situation
inverse. Connue du marché US, elle y emprunte à 6,5% contre 6,4% en Euros sur le marché
européen. On voit donc que les firmes ont un meilleur taux dans leur pays d’origine 11 mais ce
taux est cependant problématique car l’emprunt est en discordance avec la devise des recettes.
En faisant un échange de leur taux d’intérêts, elles vont y gagner car elles pourront ainsi payer
leurs intérêts dans la même devise que celle de leurs revenus. Le swap semble donc une
bonne solution.
11
En Belgique en euros, la firme belge emprunte à 6% et la firme américaine à 6,4%.
Aux USA en dollars, la firme US emprunte à 6,5% et la firme belge à 7%.
Le tableau I.2.1 reprend les différents échanges. L’entreprise belge paie alors l’intérêt de la
firme US en passant par l’intermédiation financière. Elle paie donc 6,8% en Dollars. Elle y
gagne donc 0 ,2%. De son côté, la société américaine paie 6,3% au lieu des 6,4% sans
l’intervention de l’intermédiaire. Ses gains sont donc de 0,1%. Et l’intermédiaire financier y
trouve un bénéfice également de l’ordre de 0,6 % (6,8% -6,5%) + (6,3% - 6%). On peut donc
noter que l’intermédiaire y gagne plus que chacun des autres agents.
SWAP de Devises
Si emprunt EUR
direct : €
6,4%>6,3%
Recettes USD
€ 6,0%
€ 6,3%
Intermédiaire
Financier
Firme Belge
$ 6,8%
Emprunt 6% en
euro à Banque
Belge
Recettes en
euros
Firme US
$ 6,5%
Si emprunt USD
direct :
$ 7,0% > 6,8%
Emprunt 6,5% en
USD à Banque US
Avantage firme belge : 0,2% par an,
Avantage firme US : 0,1%,
Avantage banque (intermédiaire) : 0,3 + 0,3 = 0,6% par an.
Tableau I.2.1
Il faut toutefois préciser que l’intermédiaire financier doit assurer un certain « matching »,
c’est-à-dire que les emprunts doivent porter sur les mêmes montants.
-
Swap d’intérêt
Un swap d’intérêt (Interest Rate Swap : IRS) est un swap portant sur deux références de
taux, l’une variable, l’autre fixe. Le principe d’un swap d’intérêt est de comparer un taux
variable et un taux garanti et de se verser mutuellement les différentiels de taux d’intérêt sans
échange en capital.
Exemple 1 : Swap d’intérêt entre une société immobilière et une entreprise bancaire12
Considérons une banque dont les emprunts sont à taux fixes sous forme de dépôts. Celle-ci
peut donc emprunter à meilleur prix que tout autre entreprise. Considérons ensuite, une
société immobilière qui contrairement à la banque reçoit des recettes fixes mais rembourse un
emprunt à taux variable. Le swap de taux d’intérêt va permettre à ces deux agents, via
l’intermédiation financière, de pouvoir améliorer leur situation en permettant une concordance
de taux entre leurs recettes et leur paiement d’intérêt.
SWAP d’intérêt
Gain banque :
0,25% + (0,3%)
=0,55%
Recettes fixes
Euribor0,75%
Firme
Immo
Intermédiaire
Financier
Si emprunt direct :
$ 6,0% > 5,65% :
gain immo 0,35
Tableau I.2.2
Source: Financiële en Economische Tijd, 17 Aug. 1999.
Firme
Banque
Fixe 4,5%
Intermédiaire : frais 0,75 – (-0,3) = 1,05
Gain 5.65 – 4,5 = 1,15
Différence : 0,10
12
Recettes:
euribor
Euribor0,3%
Fixe 5,65%
Emprunt A :
euribor +0,75
Emprunt AAA:
euribor +0,25
Carnets de
dépôt :
fixe 4,5%
Gains en taux13 :
La banque emprunte fixe, car c’est elle qui peut emprunter le moins cher (4,5% au lieu de
6%). La banque paie e-0,3% à l’intermédiaire et gagne ainsi e + 0,25% – (e – 0,3%) = 0,55%
par rapport à un paiement d’intérêt variable au marché. La firme Immo emprunte variable, car
son désavantage (0,75%-0,25%) est moins grand qu’en fixe (6%-4,5%) et paie 5,65% fixe à
l’intermédiaire au lieu de 6% au marché et gagne 0,35%.
L’intermédiaire utilise ses 5,65% à payer l’intérêt fixe de la banque soit 4,5%, ce qui lui laisse
1,15% et il paie aussi l’intérêt variable de l’emprunt A de e+0,75% pour lequel il a perçu e0,3% de la banque, donc il paie net e+0,75% - (e-0,3%) =1,05% sur la dette variable. Il lui
reste 1,15% – 1,05% = 0,10%.
Couverture des risques de taux :
La banque ne court aucun risque de taux pour ses dépôts car elle reçoit aussi 4,5% fixe de
l’intermédiaire et elle s’arrange pour gagner plus que e-0,3% sur le principal des dépôts
(normalement elle peut gagner au moins e par définition de l’Euribor). L’intermédiaire ne
court aucun risque de taux car il a une source de fonds égale à e-0,3% qui fluctue au même
rythme que ses paiements à e+0,75%, et une autre source de fonds à taux fixe (de l’Immo) qui
correspond à ses paiements à taux fixe à la banque. Par hypothèse, l’Immo préfère un taux
fixe qu’un taux variable et préfère 5,65% à 6%.
Alternative avec swap de capital :
La banque emprunte à e+0,25% et prête à e+0,3%. Le gain pour la banque se réduit à 0,05%.
Les autres acteurs sont en situation inchangée. Les risques sont couverts.
Section 3 : Gestion Bancaire : Estimation et Gestion des Risques
Voir HULL, John C. (2009) « Risk Management and Financial Institutions »
13
On peut aussi travailler sans intermédiaire. La banque a un avantage absolu par rapport à la firme sur tous les
marché, mais elle a un avantage comparé sur le taux fixe (6-4,5=1,5 > 0,75-0,25=0,5). Elle emprunte au taux
fixe aux déposants et la firme immobilière emprunte à taux variable à e+0,75. Grâce au swap, la firme paie 5,65
fixe à la banque, ce qui est mieux que 6 sur le marché. La banque reçoit 5,65 dont elle utilise 4,5 pour payer ses
déposants. Il lui reste 1,15 pour payer le taux variable de la firme e+0,75. Pour cela, elle emprunte à e+0,25 et
utilise 0,5 des 1,15 qu’il lui restait. Il reste finalement 0,65 de gain pour la banque d’avoir monté l’opération.
La firme gagne en stabilité. La banque est doublement couverte : ses obligations à taux fixe sont payées par la
firme à taux fixe. Ses obligations à taux variables sont financées à taux variable.
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