«Aujourd'hui en Libye, c'est le chaos total. Les populations franchissent les frontières sans aucun contrôle –ou
presque. Et la Tunisie est en train de souffrir de cette situation», rappelle-t-elle.
Les récents attentats terroristes, qui ont porté gravement atteinte à l'industrie tunisienne du tourisme, ont obligé
le pays à accroître sensiblement ses budgets de la défense et de la sécurité, a-t-elle poursuivi: «ces dépenses ont
enregistré des bonds vertigineux depuis le déclenchement du Printemps arabe. Certes, ces investissements sont
indispensables et cruciaux, mais ils ont ravi la priorité de rang aux dépenses sociales, à un moment où les
jeunes Tunisiens, que le rêve démocratique avait enthousiasmés, revendiquent le droit à l'emploi et à un
mieux-vivre», indique-t-elle.
«Un des principaux facteurs de la Révolution a été le déséquilibre économique entre les régions. Ainsi, les
populations espéraient que des investissements plus importants allaient être faits dans le développement des
régions marginalisées. Bien sûr, cela est en train de se réaliser, mais le problème c'est qu'une partie non-
négligeable de ces dépenses est allouée au renforcement des contrôles frontaliers. Par conséquent, nous
faisons face à une situation où il s'agit pour nous de résoudre un problème dont nous ne sommes d'aucune
manière responsables», explique-t-elle. Et d'insister : «La reconnaissance internationale est une chose
agréable. Elle nous procure une énorme joie, mais c'est d'un soutien concret dont notre transition
démocratique a besoin pour qu'elle réussisse entièrement.»
Invitation à Obama à visiter la Tunisie
Lors de son séjour à Washington, Mme Bouchamaoui a eu, notamment, l'occasion de s'entretenir avec Erik
Paulsen, le représentant républicain du Minnesota qui a introduit, en mai dernier, une motion auprès de la
Chambre des représentants pour entamer des négociations en vue de conclure un accord de libre-échange avec
la Tunisie.
Commentant cette initiative du représentant Paulsen, la présidente de l'Utica a fait observer que pareil accord,
s'il obtenait l'aval des législateurs américains, stimulerait les exportations de produits tunisiens vers les Etats-
Unis et renforcerait encore plus la réputation de la Tunisie à l'échelle mondiale, ajoutant qu'une telle mesure
n'aurait pas sur l'économie des Etats-Unis le type d'impacts qui compliquent la conclusion de traités
commerciaux plus ambitieux avec l'Union européenne et les pays d'Asie et du Pacifique.
«Nous souhaitons être un vrai partenaire des Etats-Unis, et non pas simplement un sous-traitant», dit-elle
avec beaucoup d'insistance.
Le court séjour américain de Mme Bouchamaoui a été intensément meublé par des rencontres multiples et
variées, notamment avec des responsables de la Banque mondiale et du département d'Etat, ainsi que le conseil
d'administration de l'Overseas Private Investment Corporation (OPIC)(2) et des représentants du US Institute
of Peace (l'Institut des États-Unis pour la paix, une institution du Congrès des États-Unis).
Une dame au franc-parler, Wided Bouchamaoui a également engagé les Etats-Unis à offrir aux jeunes
Tunisiens des bourses d'études supérieures plus nombreuses et de longue durée. Elle a appelé à plus
d'investissements américains en Tunisie et joint sa voix à celle de ceux qui demandent au président Barack
Obama – «un camarade lauréat du Nobel de la Paix», fait-elle remarquer au passage – d'entrer dans l'histoire
en étant le premier président des Etats-Unis en exercice à visiter la Tunisie, depuis Dwight Eisenhower en sa
dernière année à la Maison Blanche.
«Franchement, j'estime que nous méritons bien une visite présidentielle. Depuis la Révolution, nous avons
l'honneur de recevoir des chefs de gouvernement du monde entier», conclut-elle cet entretien.
Notes: