Le « Manifeste POUR la Culture chinoise et le monde

LE « MANIFESTE POUR LA CULTURE CHINOISE ET LE MONDE »
(1958)
TABLE DES MATIERES
Le Titre
Les signataires
La formation du texte
Publications du texte
Les principales positions du Manifeste
L'importance historique du Manifeste
Les Divisions du texte
Le Paradigme lexical
Le titre
Les titres donnés par les signataires sont
wei zhongguo wenhua jinggao shijie renshi xuanyan : women dui zhongguo xueshu yanjiu ji
zhongguo wenhua yu shijie wenhua qiantu zhi gongtong renshi
为中国文化敬告世界人士宣言: 我们对中国学术研究及中国文化与世界文化前途之共同认识。
et
“A Manifesto to the World on Chinese Culture: Our Common Understanding of Chinese
Scholarship Research and of the Future of Chinese Culture and World Culture.”
Le titre de la version anglaise de Carsun Chang est :
« A Manifesto for a Re-appraisal of Sinology and Reconstruction of Chinese Culture »
Diverses formules abrégées sont utilisées:
“Manifesto to the World Concerning the Future of Chinese Culture”
la plus fréquente étant : “le Manifeste pour la Culture chinoise et le monde
Nous le désignerons ci-dessous par le “Manifeste”
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Les signataires
Tang Junyi (Tang Chun-I) 唐君毅 Philosophe 1909-1978
Mou Zongsan (Mou Chung-san) 牟宗三 Philosophe 1909-1995
Xu Fuguan (Hsu Foo-kwan) 徐复观 Historien 1902-1982
Zhang Junmai (Carson Chang) 张君劢 Philosophe et politique 1886-1969
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La formation du texte
En 1957, Tang Junyi, en visite aux États-Unis, parla avec Zhang Junmai des approches
biaisées de la culture chinoise de la part des Européens et Américains et ils se proposèrent
de publier conjointement un document pour corriger les préjugés des chercheurs
occidentaux sur ces questions.
Zhang Junmai écrivit à Mou Zong-san et Xu Fuguan qui étaient à Taïwan pour les
informer de leur projet et Tang Junyi se chargea de rédiger un projet de texte qu’il envoya
dans un premier temps à Zhang Junmai et Mou Zong-san pour qu’ils le parcourent ; ces
derniers le signèrent sans commentaires. Par contre, Xu Fuguan qui le reçut plus tard
apporta au texte des amendements sur deux points.
Tout d’abord, sur le plan politique, Xu Fuguan estimant qu’il fallait faire ressortir de
l’esprit de la culture chinoise ce qui pouvait être en accord avec la démocratie et favoriser sa
promotion en Chine. Le projet lui semblait ne pas être suffisant sur ce plan et Xu modifia une
partie du texte en ce sens.
Ensuite sur le plan de la religiosité de la culture chinoise : comme Tang Junyi était
attaché au caractère religieux, il avait mis l'accent ce plan. Xu Fuguan estimait que, si la
culture chinoise à l’origine avait aussi présenté un caractère religieux et si elle n’avait aucun
caractère anti-religieux, elle s’était progressivement éloignée de la religion dès la période
des Printemps et Automnes (dont la fin est au IIIème siècle avant notre ère), elle s’était
réalisée dans l’existence humaine et il n'y avait pas à revenir en arrière. Xu Fuguan corrigea
aussi cette partie du projet, puis le renvoya à Tang Junyi.
Tang Junyi accepta la première proposition de Xu Fuguan sur le plan politique, mais la
deuxième ne fut pas acceptée.
Le texte était destiné aux intellectuels occidentaux, mais finalement il ne fut publié qu’en
chinois. Les échanges entre les quatre signataires avaient déjà pris beaucoup de temps, la
traduction en anglais aurait encore retardé la publication. L’introduction au Manifeste ajoute
que les signataires pensèrent qu’un texte ne pouvait pas suffire pour réduire des préjugés et
qu’il valait mieux dans un premier temps réfléchir entre chinois pour se rapprocher vers une
expression commune de leur foi dans l’avenir de la culture chinoise.
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Publications du texte ?
Le texte du « Manifeste » a été publié début 1958 à Hong-Kong et à Taiwan dans deux
revues
‘Critique démocratique’ (minzhu pinglun 民主评论) et ‘Renaissance’ (zaisheng 再生).
Il a été repris sous le titre ‘la Culture chinoise et le monde’ (zhongguo wenhua yu shijie
中国文化与世界) dans :
Tang Junyi, shuo zhonghua minzu zhi huaguo piaoling
说中华民族之花果飘零
(Errance
parmi les fleurs de la nation chinoise), Taibei : sanmin shuju, 1974, pp.125s
Tang Junyi, zhonghua renwen yu dangjin shijie
中华人文与当今世界
(Humanités chinoises et
monde contemporain), Taibei, Xuesheng Shuju, 1975, 1978, pp.864,929
et encore dans
Tang Junyi, Œuvres complètes de Tang Junyi (Tang Junyi quanji), vol.4, part.2, Taibei,
Taiwan xuesheng shuju, 1991)
Zhang Junmai, Recueil de textes philosophiques de Chine, d’Occident et d’Inde (zhong-xi-yin
zhexue wenji) , Taibei, Taiwan xuesheng shuju, 1991)p.849
Le texte complet de ce texte peut être trouvé en chinois sur Internet
http://www.readfree.net/htm/200605/174478.html
http://daoli.getbbs.com/Post/Topic.aspx?TID=203109
Il en existe une traduction abrégée :
Carsun Chang, The development of neo-confucian thought , vol.2,
Bookman Associates, New York 1962, pp.455-483.
Commentaires récents :
Umberto Bresciani, Reinventing Confucianism, Taipei Ricci Institute, Taipei, 2001, pp.21-22,
37-54
Joël Thoraval, Introduction de Mou Zongsan, Spécificités de la philosophie chinoise, Le Cerf,
Paris, 2003, pp.25-29.
Lauren Pfister, “The different faces ot contemporary religious Confucianism: an account of
the diverse approaches of some major twentieth century Chinese Confucian scholars”,
Journal of Chinese Philosophy 22 (1995), pp.5-79.
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Les principales positions du Manifeste
Les signataires protestent contre les diverses mésinterprétations occidentales de la culture
chinoise ; aucun des groupes d’Occidentaux qui ont écrit sur ce sujet, que ce soit les
missionnaires jésuites, les sinologues ou les diplomates n’ont eu l’approche sympathique
et respectueuse qui leur aurait permis de la comprendre non pas comme un objet, voire
comme un fossile, mais dans une perspective de communication avec le cœur et la
racine de la culture chinoise. Celui qui entre dans une telle perspective seul peut
authentiquement comprendre que la culture chinoise n’est pas morte et qu’elle a encore
un avenir.
La difficulté d’appréhender la réalité chinoise pour les Occidentaux vient de ce que l’Occident
est un monde diversifié (diversité des peuples, de leurs cultures, culture européenne
recueillant des éléments de divers mondes) alors que la culture chinoise a une seule
racine et qu’elle a toujours présenté un caractère de système.
En particulier, comme la Chine ne connaît ni église institutionnalisée, ni religion distincte
de la vie sociale, ils ne perçoivent pas la religiosité de la culture chinoise.
Contrairement à ce que les Occidentaux s’imaginent, la culture chinoise ne vise pas
essentiellement à l’harmonie de la société, mais à l’accomplissement véritable de la
personnalité, accomplissement qui peut aller jusqu’au sacrifice de sa vie pour le sens de
l’humanité ou la justice, manifestation de transcendance s’il en est.
La racine de la culture chinoise est la doctrine xin-xing (cœur/esprit nature foncière). La
nature foncière de l’homme est bonne, elle est à mettre en œuvre dans une pratique, une
pratique qui permet de la comprendre. Celui qui entre dans ce mouvement comprend
que son cœur a un potentiel infini, que l’horizon des choses et des évènements qui le
préoccupent ne cesse de s’étendre, de la famille au pays, et jusqu’au monde entier ; au
terme il se sent ne faire qu’un avec le Ciel.
Cette morale conduit ainsi à un sentiment de transcendance religieuse ; il contient aussi
implicitement une métaphysique, mais entendue comme la métaphysique surgissant de
la pratique morale (comme la Métaphysique des Mœurs de Kant).
Les signataires, dans une fidélité au mouvement de 4 mai 1919, affirment la nécessité pour
les Chinois d’assimiler la science moderne et d’établir un gouvernement démocratique.
L’Occident a beaucoup à apprendre de la culture chinoise, et plus largement orientale
(sagesse, douceur, compassion, capacité à durer).
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L’importance historique de ce Manifeste
Le Manifeste a eu assez peu de retentissement sur le moment auprès des intellectuels
occidentaux auxquels il était originellement destiné, mais aussi en Chine.
Ce qui est sans doute le plus important, c’est qu’il a été signé par quatre intellectuels, ce qui
a permis dans les années 70 de trouver un point d’ancrage à ce qui commençait à être perçu
comme un mouvement qui fut appelé « Nouveau Confucianisme ».
C’est Tang Junyi qui en a été le principal rédacteur et qui en a imposé un certain nombre de
positions et notamment la religiosité de la culture chinoise.
L’œuvre de Mou Zongsan va considérablement changer d’orientation après ce Manifeste,
comme il le reconnaissait volontiers, déconseillant de lire ce qu’il avait écrit avant cinquante
ans, c’est-à-dire avant 1959.
Ses œuvres des années 1960, notamment « Spécificités de la Philosophie chinoise » et
« Cœur et Nature », sont des développements de plusieurs thèmes, certains implicites, du
Manifeste :
1. existence d’un esprit qui donne à une culture son unité historique ; pour la Chine, c’est
essentiellement la pensée confucéenne, pour l’Occident, le christianisme ;
2. la véritable pensée confucéenne est le néo-confucianisme idéaliste (en chinois l’école du
Cœur-Esprit) de Lu Xiangshan 陆象山 (1139-1193) et Wang Yangming 王阳明 (1472-1529) ;
3. la pensée confucéenne présente un caractère religieux, en ce sens qu’elle affirme que la
vie du sage montre que le Ciel et l’homme font un, le Ciel descendant en l’homme et
l’homme s’élevant vers le Ciel ;
4. affirmation de la nécessité pour les Chinois d’assimiler les sciences modernes et la
démocratie de l’Occident ;
5. le Confucianisme a un message pour l’Occident (invitation à acquérir la sagesse et
proposition de syncrétisme au christianisme).
Les frontières du « Nouveau Confucianisme » vont plus ou moins implicitement prendre
comme critère d’appartenance les choix du Manifeste de 1958 :
1. le Nouveau Confucianisme peut et doit donner une place à la science moderne et à la
démocratie ;
2. il a une contribution particulière à faire à la pensée occidentale ;
3. il est interprété selon les lignes générales du Néo-confucianisme « idéaliste ».
Sous un angle négatif, des affirmations approximatives, voire caricaturales, du Manifeste sur
la civilisation occidentale vont être reprises presque sans examen dans les cinquante
années qui suivront. Il s’agit notamment de la caractérisation de l’Occident par l’extériorité :
aucune intériorisation de la moralité, divinité purement transcendante et extérieure, etc..
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Les divisions du texte
Le texte chinois de 40000 caractères environ (52 pages dans une édition imprimée) est
divisé en 12 sections :
1. 前言─我们发表此宣言之理由。
Introduction : Les raisons
pour lesquelles nous publions
ce manifeste.
2. 世界人士研究中国学术文化之三种动机与道路及其缺点。
Trois motivations dans
l’approche de la culture
chinoise par les sinologues
étrangers, leurs méthodes et
insuffisances.
3. 中国历史文化之精神生命之肯定
Une prise de position en
faveur de la vie spirituelle de
la culture historique chinoise.
4.
中国哲学思想在中国文化中之地位及其与西方文化之不同。
La place de la pensée
philosophique chinoise dans
la culture chinoise et ce en
quoi elle diffère de la culture
occidentale.
5. 中国文化之伦理道德与宗教精神
La morale éthique et l’esprit
religieux de la culture
chinoise.
6. 中国心性之学的意义。
Le sens de l’Etude Xin-Xing
(Esprit-Nature humaine)
7. 中国历史文化所以长久之理由。
La raison pour laquelle la
culture chinoise a perduré.
8. 中国文化之发展与科学。
Le développement de la
culture chinoise et la science.
9. 中国文化之发展与民主建国。
Le développement de la
culture chinoise et la
construction démocratique du
pays.
10. 我们对中国现代政治史之认识
Ce que nous connaissons de
l’histoire politique chinoise
contemporaine.
11.
我们对于西方文化之期望,及西方所应学习于东方之智慧者
Ce que nous attendons de la
culture occidentale et ce que
l’Occident doit apprendre de
la sagesse orientale.
12. 我们对于世界学术思想之期望
Ce que nous attendons de la
pensée académique
étrangère.
La version anglaise de Carsun Chang de 10500 mots tient dans l’ouvrage cité ci-dessus en
29 pages. C’est à la fois un allègement du style dans toutes les parties du texte et le
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