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ANALYSE DES EFFETS DE L’ADHESION DE LA GUINEE-BISSAU A L’UEMOA
DEGOL MENDES
CEIDET Centro de Estudos em Inovação, Dinâmicas Empresariais e Territoriais
Departamento de Ambiente e Ordenamento da Universidade de Aveiro
Campus Universitário de Santiago, 3810-193 Aveiro (Portugal)
Tel.: +351 234 370005
Fax: +351 234 429290
Résumé
L’adhésion de la Guinée-Bissau à l’UEMOA, en mai 1997, a été marquée par un déficit de débat au niveau
national. Ce débat devrait porter sur les conditions requises pour que le pays puisse se joindre à une union économique
et monétaire afin de bénéficier de ses effets au nombre desquels se trouve la convergence macroéconomique.
Dans le premier cas, il s’agit de savoir si, à lumière de la théorie des zones monétaires optimales, la Guinée-
Bissau et les autres pays membres remplissent les critères d’appartenance à un même espace d’intégration monétaire.
Dans le deuxième cas, il s’agit de savoir si l’appartenance à une zone monétaire peut, d’une manière endogène,
provoquer des ajustements structurels conduisant le ou les pays à satisfaire, au bout de quelques années ou décades, les
dits critères d’optimalité.
En se basant sur la théorie des zones monétaires optimales, notre propos est d’analyser l’opportunité de
l’adhésion de la Guinée-Bissau à l‘UEMOA, évaluer les effets de son appartenance à la zone franc et l’évolution de sa
convergence macroéconomique vers ses partenaires dans l’union.
Les analyses entreprises montre que l’adhésion de la Guinée-Bissau à l’UEMOA a permis l’intensification des
courants d’échanges commerciaux avec les autres pays membres de l’UEMOA, en augmentant le dégrée d’ouverture
de l’économie Bissau guinéenne sur l’UEMOA. Malgré l’accélération du processus de convergence de certaines
variables macroéconomiques vers la moyenne de l‘union, notamment l’inflation, on constate encore la persistance de
divergence de la performance macroéconomique de la Guinée-Bissau vis-à-vis de l’ensemble de l’union.
Mots clés: Zone franc, intégration monétaire, UEMOA, Guinée-Bissau
Classification JEL: F15, F33, O11, O23, O55.
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INTRODUCTION
L’adhésion de la Guinée-Bissau à l’UEMOA, en mai 1997, a été marquée par un déficit de débats au niveau
national. Ce débat devrait porter sur les conditions requises pour que le pays puisse se joindre à une union
économique et monétaire afin de bénéficier de ses effets au nombre desquels se trouve la convergence
macroéconomique.
Dans le premier cas, il s’agit de savoir si, à lumière de la théorie des zones monétaires optimales, la Guinée-
Bissau et les autres pays membres remplissent les critères d’appartenance à un même espace d’intégration
monétaire. D’après cette théorie développée par Mundell (1961), McKinnon (1963) et Kenen (1969), la
formation d’une union monétaire par un ensemble de pays doit être précédée d’un ensemble de conditions,
stipulées comme suit : la mobilité des facteurs de production, un degré élevé d’ouverture entre les économies
des pays candidats, la diversification de leurs appareils productifs, et la sensibilité commune aux chocs.
Dans le deuxième cas, il s’agit de savoir si l’appartenance à une zone monétaire peut, d’une manière
endogène, provoquer des ajustements structurels conduisant le ou les pays à satisfaire, au bout de quelques
années ou décades, les dits critères d’optimalité.
C’est vrai que l’adhésion de la Guinée-Bissau à l’UEMOA l’a permis d’intensifier les courants d’échanges
commerciaux avec les autres pays membres de l’UEMOA, en augmentant le degré d’ouverture de l’économie
Bissau guinéenne sur l’UEMOA. Deux types d’effets ont été attendus sur les échanges commerciaux entre la
Guinée-Bissau et les autres pays de l’union. Le premier type d’effets est celui dénommé, création de
commerce. Il se traduit par l’apparition de nouveaux courants commerciaux, résultant de l’abandon par les
pays membres de certaines productions pour s’approvisionner auprès de leurs nouveaux partenaires sur la
base soit d’avantages comparatifs, soit de décisions volontaristes concertées et réciproques. Le deuxième
type d’effets est celui qualifié d’effets de détournement de commerce qui se caractérise par l’application de la
préférence communautaire suite à un redéploiement au profit des pays de la zone de certaines importations
précédemment effectuées par la Guinée-Bissau auprès de pays tiers (Diaw, 1997). Ce dernier type d’effets a
été vérifié avec la montée de la part des échanges extérieurs de la Guinée-Bissau avec le Sénégal.
Par ailleurs et malgré l’accélération de la convergence de l’inflation vers la moyenne de l‘union, on constate
une divergence de la performance macroéconomique de la Guinée-Bissau par rapport à l’ensemble de
l’union.
L’article comporte trois sections. Après la caractérisation sommaire de l’économie Bissau guinéenne à la
veille de son adhésion à l’UEMOA dans la première section, nous allons consacrer la deuxième partie à
l’analyse de la rationalité de l’adhésion de la Guinée-Bissau à la lumière de la théorie des zones monétaires
optimales. La troisième partie sera consacrée à l’analyse des effets de l’adhésion de la Guinée-Bissau à
l’UEMOA. Finalement, une conclusion.
2. La Guinée-Bissau et l’UEMOA en perspective historique
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2.1. Caractérisation sommaire de l’économie de la Guinée-Bissau
La Guinée-Bissau c’est une enclave lusophone en Afrique occidentale avec 36 125 Km2, habité par environ
1,2 million d’âmes, en 2001. Elle est limitée au Nord par le Sénégal, à l’Est et Sud par la République de la
Guinée et l’Ouest par l’Océan Atlantique.
Indépendant depuis 1973, la Guinée-Bissau a choisi de bâtir sa propre monnaie, le Peso Guinéen. En effet, il
a été crée la Banco Nacional da Guiné(BNG), que fonctionnait comme une banque centrale, la caisse de
trésor et Banque universel. Suite, par la reforme monétaire intervenue en mars 1976, le Peso Guinéen a été
crée en substitution d’Escudo Portugais. Cette dernière dont l’émission a été confiée au Banco Nacional
Ultramarino (BNU) circulait dans le territoire, que est devenue Guinée-Bissau, depuis 1902. Ainsi par
l’accord entre les autorités portugais et Bissau guinéennes établie le 21 juin 1976, ratifié par la décision du
Conseil d’Etat n. º 13/76 de 31 décembre, l’actif et passive de la filial du BNU de Bissau ont été transferts au
BNG (Gomes, 1997).
À l’essuie de la réforme de 1983 la BNG a été divien deux département : Département Monétaire avec les
attributions d’une Banque Centrale et Département Bancaire avec les attributions d’une commerciale et de
développement (Gomes, 1997).
Malheureusement l’histoire monétaire du pays a été caractérisée par la dépréciation constante du Peso
Guinéen et par conséquent une instabilité des prix. Si on ajoute ces facteurs au fait que la monnaie nationale
était inconvertible, on peut facilement envisager les difficultés que ce pays a peux fait face, notamment dans
les domaines du commerce internationale et de l’investissement étrangers.
Pour remédier ces situations, mais aussi participer dans le processus de l’intégration sous-régionale, la
Guinée-Bissau a demandé son adhésion à l’UMOA au milieu des années quatre vingt. Les négociations
visant son adhésion ont commencés en septembre 1987 à Dakar
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, mais pour des raisons que nous ignorons
ces négociations ont été échouées. Après cet échec et suite à la volonté manifestée depuis 1984 par les
autorités Bissau guinéennes, la Guinée-Bissau a entamé des gociations avec le Portugal en 1987 pour
l’établissement d’un accord de coopération monétaire avec les deux pays. Cet accord a été signé le 21 mars
1991 visant obtenir la stabilité de taux de change et la convertibilité limitée du Peso guinéen par rapport au
Escudo portugais. Vue les conditions restrictives d’applications cet accord, notamment l’exigence d’un
programme monétaire approuvé par le FMI et la banque Mondiale, la garantie de remboursement jusqu’à 31
décembre des crédits utilisés etc
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.
Recommencées le 21 mars 1994, les négociations visant l’adhésion de la Guinée-Bissau ont abouti à un
accord que a donné le feu vert pour joindre leurs voisins dans l’UMOA, transformée dans une union
économique et monétaire. En effet, la Guinée-Bissau est devenue le 8eme membre de l’UEMOA le 5 mars
1997.
2.2. Qu’attendait la Guinée-Bissau de son adhésion à L’UEMOA ?
L’adhésion de la Guinée-Bissau ne visait pas seulement sa participation au processus de l’intégration sous
régionale. Les autorités Bissau guinéennes cherchaient surtout la réduction de l’inflation et la fin de la
dépréciation constante de sa monnaie. Etant donnée la manque de crédibilité de la Banque Centrale, la
réduction de l’inflation passait par l’adoption de mesure monétaires extrême, que consistait à l’abandonne de
sa monnaie nationale. En le faisant ce pays attendait réduire l’inflation comme un préalable pour une
croissance économique, spécialement par le voie de développement du marché des capitaux.
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Compte Rendu de la deuxième rencontre UMOA/Guinée-Bissau 22 et 23 octobre, 1987 à Dakar in Dossier UEMOA.
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Pour savoir plus sur les conditions de cet accord voir, par exemple Gomes (1997):
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Le contexte économique et sous-régional dans lequel se trouvait la Guinée-Bissau a été aussi un élément
déterminant du choix du franc CFA pour substituer le Peso. D’une part, la faiblesse du secteur industriel
oblige le pays à importer presque tous les biens dont il a besoin. D’une autre part, la faiblesse des
infrastructures a favorisé la séparation des centres urbains du reste de l’économie nationale. Ce dualisme
oblige le pays à satisfaire les besoins des citadines avec les importations, mêmes si quelques biens importés
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sont excédentaires ailleurs dans l’intérieur du pays, et favorise le commerce transfrontière. Ce sont les djilas
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qui assurent ce genre de commerce fait sur une base de troc direct ou sur une base monétaire. Cette
intervention du djila et les circuits d’échange avec les pays voisins créent une situation monétaire qui fait du
franc CFA une monnaie centrale. La plupart des commerçants ont recours à cette monnaie régional pour
effectuer leurs échanges, dû à la faiblesse et la dévalorisation permanente du peso guinéen (PNUD, 1996).
Par conséquent, l’adoption de franc CFA permettrait, non seulement de stabiliser le prix des biens
alimentaires, mais aussi le renforcement des rapports commerciaux avec les pays voisins. Cela parce que,
selon les diverses études sur le sujet, le commerce entre les pays avec une monnaie commune est plus fort
que ceux entre les pays avec monnaies nationales. McCallum (1995) a démontré que les provinces
canadiennes commercent 20 fois plus entre eux qu’avec les états frontaliers des EUA. Selon Rose et
Wincoop (2001) 50% des effets frontaliers typique sont due à l’utilisation des différentes monnaies.
Dans le plan monétaire, la Guinée-Bissau a connue la phénomène de la substitution monétaire pendant les
années 90, communément appelé de la dollarisation, vue le rôle internationale du dollar américain. Dans le
cas guinéen et pour les rapports officieux, c’était le franc CFA qui substitua partiellement le peso au moins
dans ses fonctions d’instrument de réserve de valeur et d’instrument d’échange. Officiellement, c’était le
dollar américain qui substitua partielle la monnaie Bissau guinéenne dans son système monétaire. Ainsi
l’adoption officielle du franc CFA n’est que la reconnaissance de cette réalité contre laquelle aucune loi ne
peut combattre.
La crise économique profonde que traversait la Guinée-Bissau au moment de son adhésion à l’UEMOA et à
la Zone franc la poussé a prendre cette décision drastique, dont les limites à l’action du Gouvernement en
matière de politique économique et monétaire et par conséquent de régulation de l’activité économique sont
considérables. La volonté d’adhérer à un union économique et monétaire structuré et réelle, en limitant
l’exercice du pouvoir, représente un coût dont la prisse en charge exprime la volonté politique réelle de
participer dans le processus de l’intégration sous-régionale (PNUD, 1993).
2.3. Origine et évolution de l’UEMOA
Le 12 janvier 1994 marque une date importante dans le processus d’intégration économique en Afrique
Occidentale. A cette date, les Chefs d’Etats et de Gouvernement du Bénin, du Burkina Faso, de la Côté
d’Ivoire, du Niger, du Mali, du Sénégal et du Togo ont complété l'Union Monétaire Ouest Africaine
(UMOA), instituée entre elles depuis 1962, de manière à la transformer en Union Economique et Monétaire
Ouest Africaine (UEMOA). Ainsi les autorités communautaires ont ajouté le volets économique à l’antérieur
volet monétaire et ont ouvert la possibilité d’adhésion aux autres pays de la sous région. Cette ouverture a
permis l’adhésion de la Guinée- Bissau en mai 1997.
L’UEMOA « se caractérise par la reconnaissance d’une même unité monétaire dont l’émission est confiée à
un institut d’émission commun, [la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest], prêtant son concours
aux économies nationales, sous le contrôle des Gouvernements » (article 1 du Traité de L’UMOA), par la
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Malgré le haut pourcentage de la contribution de secteur premier au PIB supérieur 50%et les bonnes conditions agricoles dont
jouit le pays, environ 33% des importations de la Guinée-Bissau sont constituées par des produits alimentaires, dont 22% le riz.
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Djila c’est le nom attribut au petit commerçant en Guinée-Bissau.
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coordination des politiques budgétaires et par l’existence d’une politique commerciale unique. Cette union
constitue, avec la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale, la République des Comores
et la République Française, la Zone franc. Née de la volonté d’isoler l’empire français après la crise de 1929,
la Zone franc a survécu à la décolonisation. Depuis lors, la zone a évolué en s’adaptant au multiples
bouleversements. Cependant, le “Compte d’opérations” constitue encore le socle de l’association entre ces
pays africains et la France, à travers laquelle celle-ci garantit la convertibilité “illimitée” du franc CFA. En
contrepartie, les pays africains membres s’engagent à déposer dans ce compte 65% de leurs avoirs en devises
et à respecter un ensemble de principes, notamment le maintien d’une parité fixe entre le franc CFA et l’Euro
et la libéralisation des transferts des capitaux à l’intérieur de la Zone franc [(Semedo et Villieu (1997),
Hugon (1999)].
C’est à la veille de l’indépendance des anciens territoires coloniaux que le franc de la Communauté
Financière Africaine (franc CFA) a succédé au franc des colonies françaises de l’Afrique. La parité établie
alors, 1 FRF = 50 franc CFA, n’a changé qu’en 1994, date à partir de laquelle un franc français est passé à
valoir 100 franc CFA. Avec l’entrée en vigueur de l’euro et suite à la cision du Conseil européen du 23
novembre 1998, le franc CFA est depuis janvier 1999 lié à l’euro (1 euro =655,970 franc CFA).
Avant janvier 1994 l’UMOA était caractérisée par une dichotomie institutionnelle qui se traduisait par la co-
existence d’une politique monétaire commune et d’autres politiques économiques autonomes gérées par les
Etats membres. La persistance de cette dichotomie qui ne prenait pas en compte les exigences liées à
l’appartenance à la même union monétaire « avait favorisé la persistance de divergences importantes entre
les performances macroéconomiques des Etats membres, de nature à fragiliser la monnaie commune et à
compromettre la viabilité de l’union Monétaire » (Banny, 2000). Afin d’assurer la convergence des
performances et des politiques économiques des Etats membres par l'institution d'une procédure de
surveillance multilatérale (Article 4-c) du Traité de l’UEMOA
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) il fut instit une Commission de
surveillance de Politiques Macroéconomiques dont la fonction est de surveiller le respect des critères de
convergence définis pour les autorités communautaires. Le dispositif de surveillance macroéconomique a été
renforcé avec l’adoption du Pacte de Convergence, de Stabilité, de Croissance et de Solidarité en vigueur
depuis janvier 2000.
La réalisation de l’union douanière dans l’UEMOA est due à la nécessité de créer entre les Etats membres un
marché commun, basé sur la libre circulation des biens, des services, des facteurs de productions, ainsi que
sur un tarif extérieur commun et une politique commerciale commune. En effet, de nombreuses dispositions
légales ont été prise.La première fut l’acte additionnel n. º 04/96, instituant un régime tarifaire préférentiel
transitoire des échanges au sein de l'UEMOA et son mode de financement. Ce régime consacre la franchise
totale des droits et taxes d'entrée pour les produits du cru, les produits de l'artisanat traditionnel et les produits
industriels originaires
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conformément à lacte additionnel 04/98. Ce dernier a institué une architecture
tarifaire qui simplifiant les catégorisations de produits de sept à quatre avec un plafonnement du niveau
maximum des droits de douane applicables aux produits importés à 35% contre 65% avant. En effet, la
première et la deuxième catégorie regroupant les produits prioritaires et ceux de première nécessité en plus
des biens d’équipement et des matières premières brutes bénéficient des droits de douanes plus bas soit 0% et
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Le Traité de l’UEMOA vise aussi la réalisation des objectifs ci-après (Article 4 du Traité de l’UEMOA) : « a) renforcer la
compétitivité des activités économiques et financières des Etats membres dans le cadre d'un marché ouvert et concurrentiel et d'un
environnement juridique rationalisé et harmonisé ;(…)
d) instituer une coordination des politiques sectorielles nationales, par la mise en oeuvre d'actions communes et éventuellement de
politiques communes notamment dans les domaines suivants : ressources humaines, aménagement du territoire, transports et
télécommunications, environnement, agriculture, énergie, industrie et mines ;
e) harmoniser, dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement du marché commun, les législations des Etats membres et
particulièrement le régime de la fiscalité. »
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La liste des produits industriels agréés est annexée aux décisions suivantes : Décision 03/98/COM/UEMOA du 12 mars 1998,
Décision 04/98/COM/UEMOA du 03 juin 1998, Décision 01/99/COM/UEMOA du 11 janvier 1999 et la Décision
01/2000/COM/UEMOA du 07 janvier 2000.
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