Aide-mémoire No 218 avril 1999 LA CHARGE « CACHÉE ET INDÉTERMINÉE » DES PROBLÈMES DE SANTÉ MENTALE La charge indéterminée évoque le poids économique et social pour les familles et les collectivités. Bien qu'on la considère comme élevée, on n'a pas fait de mesures de grande envergure. La charge cachée évoque celle associée à la stigmatisation et aux violations des droits et des libertés humaines. Bien qu'il s'agisse là d'un problème majeur dans le monde entier, celui-ci se déroule à huis clos dans bien des cas. La charge indéterminée La maladie mentale touche le fonctionnement psychosocial et cognitif de l'individu, diminuant ainsi de manière importante son rôle social et sa productivité dans la communauté. En outre, du fait que les maladies mentales sont incapacitantes et se prolongent pendant de nombreuses années, elles prélèvent un tribut énorme sur les ressources émotionnelles et socio-économiques des parents qui s'occupent du patient, notamment si le système de santé est incapable de proposer des traitements et une aide à un stade précoce. On retrouve plus précisément dans les coûts économiques et sociaux : o les pertes de production dues aux décès prématurés par suicide (dont le nombre équivaut en général à celui des morts par accident de la circulation, ou le dépasse même dans certains pays) ; o les pertes de production du fait de l'incapacité des personnes atteintes de travailler, à court, moyen ou long terme ; o la perte de productivité des membres de la famille s'occupant de la personne atteinte ; o la productivité réduite des personnes malades au travail ; o le coût des accidents provoqués par des personnes psychologiquement perturbées, ce qui est particulièrement dangereux chez les conducteurs de train, les pilotes d'avions et les ouvriers d'usine ; o l'appui à ceux qui sont dépendants de la personne malade ; o les dépenses directes et indirectes pour les familles s'occupant du malade ; o le chômage, l'aliénation et la criminalité des jeunes dont les problèmes dans l'enfance (dépression, troubles du comportement par exemple) n'ont pas reçu une attention suffisante pour leur permettre de bénéficier pleinement de l'éducation disponible ; o le développement cognitif insuffisant des enfants de personnes mentalement malades ; o la charge émotionnelle et la qualité de vie diminuée pour les membres de la famille. Stigmatisation On peut définir la stigmatisation comme une marque de honte, de disgrâce, de désapprobation conduisant un individu à être évité et rejeté par les autres. La stigmatisation accompagne toutes les formes de maladie mentale, mais elle est en général d'autant plus marquée que le comportement de l'individu diffère davantage de ce qui est « normal ». Les personnes souffrant de maladies mentales sont en conséquence souvent : o rejetées par les amis, les parents, les voisins et les employeurs, ce qui aggrave leur sentiment de rejet, de solitude et de dépression ; o empêchées de participer à part égale à la vie de la famille, aux réseaux sociaux normaux et d'avoir un emploi productif. La stigmatisation a un effet nocif sur la guérison de la personne, sur sa possibilité d'accéder aux services, sur le type de traitement, l'appui qu'elle pourra recevoir et sur son acceptation dans la communauté. Le rejet des personnes souffrant de troubles mentaux affecte également leur famille et ceux qui s'en occupent en provoquant aussi l'isolement et l'humiliation. Les mythes, les idées erronées et les stéréotypes négatifs sur les troubles mentaux que bien des gens véhiculent au sein des collectivités constituent des causes importantes de stigmatisation. Il est possible de diminuer ce phénomène en : o o parlant ouvertement des troubles mentaux dans les collectivités ; donnant une information exacte sur les causes, la prévalence, l'évolution et les effets des maladies mentales; o combattant les stéréotypes négatifs et les idées erronées sur le sujet ; o fournissant des services d'appui et de traitement permettant aux personnes atteintes de participer pleinement à tous les aspects de la vie communautaire ; o assurant l'existence d'une législation qui vise à réduire les discriminations sur le lieu de travail ainsi que dans l'accès aux services sociaux et sanitaires de la collectivité. Violations des droits de la personne Les personnes qui souffrent de troubles mentaux sont plus vulnérables que les autres dans leur vie sociale et courent donc un risque relativement plus élevé de voir leurs droits fondamentaux et leurs libertés bafoués, notamment : o le droit à ne pas subir de discrimination dans l'accès aux soins, aux services sociaux, ou à l'emploi, par exemple; o le droit à la liberté, par exemple ne pas voir automatiquement sa liberté de mouvement limitée, notamment par une mise en détention; o le droit à l'intégrité, par exemple en n'étant pas soumises à des pressions physiques ou mentales indues. Dans ce domaine, on constate des violations qui consistent notamment à les traiter en ne tenant pas compte de la nécessité de demander le consentement éclairé du patient ou de la personne qui en est responsable, sans parler des abus sexuels o le droit de gérer ses propres ressources (par exemple ce droit ne devrait pas être retiré du simple fait que le patient souffre de troubles mentaux mais dépendre de sa capacité réelle à gérer ses affaires). Législation de la santé mentale — une nécessité Principes généraux de cette législation pour protéger les droits de la personne souffrant de troubles mentaux : o Respect de l'individu et de ses valeurs sociales, culturelles, ethniques, religieuses et philosophiques. o Prise en compte de tous les besoins de l'individu. Les besoins de l'individu en soins de santé et services sociaux doivent faire l'objet d'une évaluation soigneuse. Il est en particulier important de s'assurer que ses opinions (ou celles des personnes qui s'en occupent) soient prises en considération. Pour ce faire, une relation étroite doit exister entre les services de santé, du logement et les services sociaux. o Soins et traitement assurés dans le milieu le moins restrictif. Afin de respecter ce principe, la législation doit être conçue pour que les admissions hospitalières imposées ne soient que le dernier recours. Pour y arriver, il faut définir clairement les raisons de la détention, les sauvegardes au niveau de la procédure lorsqu'on fait appel au pouvoir de détention, l'obligation de faire sortir le patient lorsque les raisons de le détenir ont disparu, l'examen dans l'indépendance de la décision de détention. o Prestation des soins et traitements destinés à renforcer l'autodétermination de chaque individu et sa responsabilité personnelle. Il est essentiel de donner à chacun la possibilité de faire des choix et de prendre des décisions concernant ses soins et son traitement. La législation doit tendre à cela : le traitement ne pourra être imposé que dans des circonstances strictement délimitées et bien définies et il ne doit s'agir alors que de la possibilité la moins restrictive ; lorsque les individus sont incapables de prendre des décisions les concernant, il conviendra de chercher à connaître leurs désirs et leurs sentiments ; des informations claires sur le traitement et la détention seront facilement disponibles ; des dispositions suffisantes pour garantir le secret médical seront prises. Prestation des soins et traitements destinés à obtenir le plus haut niveau de santé et de bien-être que l'individu peut atteindre. S'ajoutant aux questions de qualité et de continuité des soins, ce principe concerne la question du « droit » au traitement. Il peut également couvrir des questions plus générales comme l'exigence que la personne soit soignée correctement dans un milieu sûr et ne soit pas soumise à des restrictions dépassant ce que sa santé, sa sécurité ou celles des autres requièrent. A cet égard, le contact entre l'individu et ses amis ou sa famille ne devrait connaître aucune limitation, sauf dans de rares situations clairement définies, et il doit y avoir en place de strictes dispositions le protégeant des abus, de l'exploitation et de la négligence. Pour plus d'informations, les journalistes peuvent prendre contact avec le Bureau du porte-parole, OMS, Genève. Tél. (41 22) 791 2599 ; télécopie: (41 22) 791 4858 ; adresse électronique : [email protected] Tous les communiqués de presse, aide-mémoire OMS et d'autres informations sur le sujet peuvent être obtenus sur Internet à la page d'accueil de l'OMS : http://www.who.int Communiqués 1998 | Communiqués 1999 | Communiqués 2000 Aide-mémoire | Bureau de l'Information | In English © WHO/OMS, 2000 | Crédits | Contact OMS