5. PROJET DE RECHERCHE DETAILLE
Les trois objectifs majeurs de ce projet de thèse ancré dans la pluridisciplinarité sont i) la caractérisation de la relation
entre réchauffement climatique et alpinisme impactée par l’évolution de la haute montagne, ii) l’identification de la
place socio-économique de l’alpinisme dans le paysage alpin, et iii) la définition d’une stratégie d’actions pour
l’adaptation de sa pratique aux effets du réchauffement, centrée sur la résilience des territoires. Ce projet s’insère
pleinement dans une optique de développement durable des Alpes occidentales, en s’intéressant plus particulièrement
aux massifs du Mont Blanc et des Ecrins.
Pour répondre au premier objectif, la thèse établira un état des lieux de la relation entre réchauffement climatique et
alpinisme en lien avec l’évolution environnementale de la haute montagne. Seront ainsi étudiés :
1. les itinéraires d’accès aux refuges de haute montagne : requérant bien souvent une pratique minimale de
l’alpinisme, les accès aux refuges de haute montagne doivent s’adapter à l’évolution rapide du terrain (ajout d’échelles
pour compenser le retrait glaciaire, modifications de sections d’itinéraire pour éviter un danger, etc.). Il s’agit ici de
documenter l’évolution des itinéraires, de caractériser les processus géomorphologiques impliqués et de décrire les
mesures adaptatives mises en œuvre. Pour cela, le travail envisagé concerne (i) le recensement et la caractérisation des
refuges de haute montagne grâce à une capitalisation des résultats du projet Eco-innovation en altitude et
compléments ; (ii) l’analyse des évolutions et de la gestion des itinéraires et de leurs causes géomorphologiques à partir
d’une étude de cartes et topo-guides, de la presse spécialisée, d’entretiens semi-directifs et de caractérisation
géomorphologique ; (iii) l’étude de la fréquentation des refuges à partir des données des gestionnaires (dont le CAF,
compagnies de guides, parcs naturels, les communautés de communes, etc.).
2. les voies rocheuses : elles sont fréquemment confrontées à un double problème qui résulte de l’augmentation
de la température : l’évolution de la dangerosité et la longueur accrue des itinéraires. L’analyse de la dangerosité des
itinéraires en lien avec les instabilités rocheuses (chutes de pierre, éboulements et écroulements) imputables à la
dégradation du permafrost et/ou à la décompression post-glaciaire se réalisera par une étude de fréquentation des
itinéraires à travers leur mention dans les topo-guides, les magazines, les réseaux sociaux, les plaquettes commerciales,
et par le biais d’entretiens. Pour les itinéraires « abandonnés », il s’agira de distinguer ce qui relève de l’effet de mode,
de la perte d’intérêt en lien avec l’évolution technique, et de l’évolution géomorphologique du secteur. L’analyse de la
longueur accrue des itinéraires rocheux s’appuiera sur une quantification de l’évolution des glaciers en pied de paroi.
3. l’évolution de l’activité « randonnée glaciaire » : avec la randonnée et l’escalade, la randonnée glaciaire est une
des portes d’entrée vers l’alpinisme. Compte tenu du retrait glaciaire, la poursuite de cette activité – souvent par des
professionnels – devient de plus en plus complexe. Il conviendra d’analyser l’évolution du produit « école de glace » par
le biais d’une étude des plaquettes promotionnelles des compagnies de guides et d’entretiens. L’analyse portera
également sur les données glaciologiques disponibles.
4. l’évolution des itinéraires « Neige, glace & mixte » : bien que situés nettement plus haut en altitude que les
langues glaciaires dont l’évolution est saisissante, les arêtes, les faces et les couloirs englacés s’assèchent de plus en plus
au fil des années. Certains secteurs ont perdu leur couverture glacio-nivale permanente tandis que des itinéraires
autrefois pratiqués l’été ne se font plus qu’au printemps voire en fin d’hiver. L’analyse portera sur (1) la rétraction des
couvertures glacio-nivales (surface, conditions, épaisseur sur les arêtes) grâce à la photo-comparaison ; (2) la dynamique
des glaciers suspendus, étudiée par photo-comparaison et photogrammétrie ; (3) les incidences sur la praticabilité, les
tracés, la difficulté et la fréquentation des itinéraires, par l’étude des topo-guides, de la presse et des sites spécialisés,
ainsi que par entretiens semi-directifs.
Le deuxième objectif de la thèse est d’identifier la place socio-économique de l’alpinisme dans les Alpes occidentales et
d’effectuer un diagnostic territorial face au changement climatique. Cette place de l’alpinisme sera ainsi étudiée à
travers différents prismes :
1. Une approche socio-historique de l’alpinisme : à partir d’une synthèse bibliographique et de documents
d’archives, il s’agit de mettre en évidence les temporalités propres au développement de cette pratique dans différents
massifs (Mont-Blanc, Ecrins, Vanoise, Mont Viso…)