BTJ n° 387
A la découverte de la haute montagne
Reportage réalisé par un groupe d’enseignants de l’ICEM du Sud-Ouest : Laurent DESPAUX,
Régine GALAN, Marcel LABARRERE, Andrée MAYLIN, Jean TALIMI, avec la
collaboration de Christian DREVET, Alain REYNAUD, Jean-François VILLEMEY,
Laurence MOLLARD, Fabienne ANGLARET et leurs classes, Marie-Isabelle
BALLESTEROS, Jean-Marie BOUTINOT, Lucien BUISSON, avec la coordination de Jean-
Pierre RADIX.
Par une belle matinée de juillet, nous sommes partis en randonnée vers le lac Noir et le glacier
du Grand Vallon. Bien équipés, emportant dans nos sacs à dos les vivres et le matériel
nécessaire, nous avons quitté la vallée au lever du soleil.
Après les dernières maisons du village, nous pénétrons dans la forêt de l’Ubac. Le sentier
s’élève au milieu des hêtres et des sapins qui cèdent plus haut la place aux épicéas, aux pins
cembro et aux mélèzes. Tout d’abord assez dense et variée, la forêt s’éclaircit peu à peu pour
se réduire bientôt à quelques rares arbres ou arbustes isolés. Nous nous trouvons dans une
« zone de transition » où la végétation survit avec difficulté.
Encore quelques lacets et nous atteignons les alpages à plus de 2 000 mètres d’altitude. Des
vaches et des chevaux paissent tranquillement. En cette saison, l’herbe y est abondante et
parsemée de fleurs, les si jolies fleurs de montagne : pensées, soldanelles, renoncules,
gentianes…
Le sentier continue vers une barre rocheuse nous arrivons après une courte mais rude
montée. Quel spectacle grandiose s’offre alors à nous ! Dans l’eau calme et limpide d’un lac,
se reflètent des pics enneigés et des crêtes déchiquetées. La lumière semble plus intense à
cette attitude : les blocs de rochers, les pentes abruptes, les éboulis se découpent sur le bleu
profond du ciel.
La haute montagne, étrange mais envoûtante, est là devant nous…
La naissance d’un glacier
En s’amoncelant dans une cuvette entourée de parois rocheuses escarpées, la neige se
transforme peu à peu, par tassement, en un épais dépôt de glace. Cette glace transparente,
d’une belle teinte bleutée, envahit bientôt complètement la cuvette, puis, prenant la forme
d’une langue glaciaire, glisse lentement vers la vallée, à raison de 50 à 400 mètres par an*.
En de nombreux endroits et en particulier quand la pente est plus raide, la surface du glacier
est « cassée » et laisse apparaître des entailles, les crevasses, parfois profondes de plusieurs
dizaines de mètres. Dans ces zones chaotiques, s’enchevêtrent d’énormes blocs de glace que
l’on appelle les séracs.
Devant lui et sur les côtés, le glacier pousse de gros blocs de rochers qui s’amassent en
formant des moraines.
Les glaciers agissent comme de formidables rabots : ils ont sculpté les paysages au cours des
millénaires.
* Cette vitesse varie selon la pente, elle est d’autant plus rapide que la pente est forte.
Un climat rude
Tu as s ans doute remarqué qu’il fait de plus en plus froid au fur et à mesure que l’on s’élève
en altitude : environ C de moins tous les 200 m. En hiver, il gèle en permanence en haute
montagne.
En haute montagne, le climat est rude, il fait froid et humide. Le temps est instable et
changeant, le vent souffle très souvent.
Les écarts de température y sont importants : des journées très chaudes sont parfois suivies de
nuits froides pendant lesquelles il peut geler, même en belle saison.
En haute montagne, il pleut et il neige fréquemment. Mais comme les fortes pentes
provoquent un ruissellement important, l’eau s’infiltre peu et, paradoxalement, le sol manque
souvent d’humidité.
A cette altitude, les changements de temps se produisent brusquement. Les tempêtes et les
orages se déclenchent rapidement, même en été. Des vents violents soufflent parfois à plus de
100 km/h.
Malgré ces difficiles conditions de vie, des plantes et des animaux parviennent à s’adapter à
l’étage alpin et même à l’étage nival.
Feuillus et résineux
Selon l’orientation de la pente par rapport au soleil, la forêt est plus ou moins dense. L’ubac,
moins exposé au soleil, donc plus humide, est en général plus boisé que l’adret exposé au sud
et abrité du vent.
Selon l’altitude, les espèces varient.
De 900 à 1 600 m, on rencontre surtout le hêtre et le sapin, un feuillu* et un résineux** qui
aiment tous les deux l’ombre et l’humidité mais craignent le grand froid.
De 1 600 à 2 200 m, le hêtre a complètement disparu, laissant la place aux résineux qui sont
des arbres plus résistants au froid que les feuillus. A cette altitude, les forêts se composent de
mélèzes, de pins à crochets, d’épicéas et de pins cembro, également appelés arolles. Tous ces
conifères*** portent des aiguilles qui leur permettent de conserver l’humidité en limitant
l’évaporation.
De 2 200 à 3 000 m, les conditions climatiques très difficiles ne permettent pas aux arbres de
se développer normalement : le vent, le froid et le poids de la neige en hiver gênent leur
croissance ; leurs ramures se tordent. Seuls quelques arbres comme les pins cembro arrivent à
survivre. Ils donnent parfois l’impression de « ramper » au ras du sol ! L’étage alpin est
essentiellement le domaine des étendues herbeuses et des landes abondent les buissons de
rhododendrons.
* Un feuillu est un arbre qui porte des feuilles, contrairement aux conifères résineux qui portent des aiguilles.
** Les résineux produisent une matière visqueuse et collante appelée résine.
*** Les conifères portent des cônes. La pomme de pin est un cône.
Les plantes alpines
Pour survivre dans un milieu hostile, les plantes alpines* présentent quelques caractéristiques.
Elles sont en général de petite taille, ce qui leur permet de mieux résister aux effets du vent.
Elles possèdent un réseau de longues racines grâce auxquelles elles pompent l’humidité d’un
sol souvent sec et friable. Pour se protéger du gel et du dessèchement de l’air, certaines
espèces, comme l’edelweiss, portent un épais duvet, d’autres ont leurs feuilles recouvertes
d’une très fine couche cireuse.
En hiver, la neige joue un rôle protecteur. Elle constitue un excellent isolant qui permet à la
température du sol de ne pas descendre trop au-dessous de C : bulbes et racines peuvent
ainsi continuer à vivre au ralenti.
La pelouse alpine est surtout composée de graminées et de carex**. L’herbe y est plus courte
que dans les vallées : elle ne peut pas être fauchée. Au printemps, la neige à peine fondue,
campanules, gentianes et trèfles envahissent l’alpage.
Les plantes des falaises et des rochers de haute altitude se présentent sous forme de
coussinets : elles peuvent ainsi mieux s’agripper aux moindres anfractuosités de la roche.
C’est le cas des potentilles, des saxifrages, des androsaces, des silènes acaules***.
Les fleurs alpines sont souvent des espèces protégées dont la cueillette est limitée ou interdite.
A l’étage nival, subsistent essentiellement des lichens**** qui semblent faire corps avec le
rocher où ils affrontent des conditions extrêmes.
* Bien que dites « alpines », ces plantes se retrouvent dans tous les massifs montagneux du monde, chaque fois
que le climat présente les mêmes caractéristiques.
** Carex : plante à feuilles coupantes, à fleurs en épis et à fruits en capsule, qui pousse en touffes.
*** Acaule : mot d’origine latine signifiant « sans tige ».
**** Lichens : associations de champignons et d’algues.
Les animaux
Comme les plantes, les animaux doivent surmonter de nombreuses difficultés en haute
montagne : froid très vif la nuit et en hiver, brièveté du cycle de vie, relief accidenté, air
moins riche en oxygène…
Leur morphologie* et leur comportement sont adaptés à ces conditions difficiles.
La morphologie
La plupart des êtres vivants au-dessus de 3 000 m ont des poumons plus larges, du sang plus
épais et en plus grande quantité, un cœur plus gros, un corps plus trapu avec des extrémités
plus petites.
On constate que les mammifères ont une fourrure plus épaisse. Chez les oiseaux, le duvet est
plus fourni et les plumes sont plus nombreuses. En hiver, le pelage des lièvres, des hermines
et des lagopèdes devient blanc, les rendant ainsi invisibles aussi bien pour leurs proies que
pour leurs prédateurs.
Les gros mammifères qui vivent sur les pentes escarpées ou dans les éboulis ont des sabots
fins et durs ou plus larges et plus souples.
Le comportement
La plupart des animaux de montagne ont essentiellement une activité diurne*. Ils mettent à
profit les heures les plus chaudes de la journée pour se déplacer ou rechercher leur nourriture.
La nuit, les araignées, les cloportes, les mouches, les coléoptères, les vers et les mollusques
s’abritent sous les pierres qui ont « emmagasiné » la chaleur pendant la journée et qui ne se
refroidissent que très lentement après la tombée du jour.
Les mammifères se nourrissent abondamment en automne, ils obtiennent ainsi une épaisse
couche de graisse sous la peau qui leur sert bien sûr de réserve de nourriture mais les préserve
surtout du froid : la graisse est un excellent isolant !
Afin de retrouver un milieu de vie moins hostile, certains oiseaux, des mammifères et même
des insectes s’installent chaque hiver à des altitudes moins élevées ou sur les versants
ensoleillés des montagnes.
Des animaux ont trouvé encore d’autres solutions pour se protéger du froid : ils hivernent ou
ils hibernent.
* Diurne : qui a lieu le jour.
Un écosystème : La pelouse alpine
EAU pluie, neige,
Glace, lac d’altitude
EXEMPLE
DE CYCLE
VEGETAUX Pelouse alpine
herbe, fleurs, racines, graines
Criquet
SELS MINERAUX
Décomposeurs
Cadavres, excréments
restes de végétaux
Traquet
motteux
(oiseau)
Mouton
Marmotte
Aigle
SOLEIL
La pelouse alpine constitue un écosystème. De nombreux facteurs conditionnent son
développement : l’altitude, la température et notamment ses écarts importants, le vent, la
durée de l’enneigement, la nature du sol…
Les animaux herbivores comme la marmotte ou le criquet se nourrissent de végétaux. Les
animaux carnivores comme l’hermine ou l’aigle sont les prédateurs des herbivores ou de
carnivores d’espèces différentes. Les cadavres et les déchets servent de nourriture à d’autres
êtres vivants. L’humus se forme grâce aux végétaux morts décomposés et nourrit les plantes
ainsi que certains insectes.
Dans un écosystème, tous les êtres vivants dépendent les uns des autres et du milieu dans
lequel ils vivent. Si l’un de ces éléments est modifié, tout le système est perturbé. De cette
façon, si, pour une raison quelconque, l’herbe vient à manquer, la diminution du nombre
d’animaux herbivores peut entraîner celle des prédateurs. Mais inversement la disparition de
grands prédateurs comme le lynx ou le gypaète barbu peut engendrer une augmentation trop
importante de la population de certaines espèces herbivores.
Les éboulis rocheux ou les glaciers constituent également des écosystèmes.
Les activités des hommes
Les hommes aussi doivent s’adapter à ces difficiles conditions de vie. En haute montagne, il
n’est pas possible de pratiquer l’élevage ou l’agriculture.
L’activité pastorale*
Les troupeaux de vaches et de moutons se rendent dans les alpages dès le mois de mai et
redescendent dans les vallées au mois d’octobre. Grâce à cette transhumance**, les bêtes
profitent à la fois de la qualité de l’herbe de la haute montagne en été et de celle des prairies
des vallées pendant l’hiver.
Les bergers gardent les troupeaux sur des pâturages souvent loués par les communes ; ils
s’occupent également de la traite des vaches et des brebis. Autrefois, les fromages étaient
fabriqués sur place mais, de plus en plus, le lait est acheminé vers les laiteries de la vallée.
Les loisirs
Pour maintenir une activité économique en montagne et éviter le départ des jeunes vers les
villes, de nombreuses communes ont choisi de développer les activités sportives comme le
ski, l’escalade ou la randonnée.
Des stations de sports d’hiver ont été créées en altitude et ont modifié le visage de la
montagne. Pour accueillir des citadins toujours plus nombreux, des centres d’hébergement,
des lotissements, des chalets ont été construits… bien souvent sans tenir compte du style et de
l’implantation de l’habitat traditionnel. Des remontées mécaniques ont également été
installées sur les versants et il en résulte des déséquilibres importants des écosystèmes
naturels.
Ces transformations n’ont pas toujours profité aux communes de montagne qui se sont
endettées de manière importante et sont aujourd’hui dans une situation financière difficile.
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