Congrès Marx International V - Section Économie – Paris-Sorbonne et Nanterre – octobre 2007
disparaître, et où accumulation et reproduction seraient réconciliées ; dans le deuxième,
seulement, toutes les revendications et les luttes antilibérales sont potentiellement porteuses
d’une dynamique anticapitaliste, : l’espace n’existe quasiment plus pour des politiques de type
réformiste, keynésien, que le capitalisme de la phase précédente (« fordiste ») aurait pu
intégrer provisoirement dans sa rationalité. Toutes les mesures antilibérales – et même les
mesures en apparence les plus « réformistes » ou « keynésiennes » - apparaissent comme une
remise en cause du système et de la domination absolue de la logique de profit : augmentation
des salaires, réduction du temps de travail, limitation de la précarité ou du droit divin du
patronat à licencier etc. c’est vrai aussi au niveau international : cf. la levée de bouclier contre
une mesure aussi peu révolutionnaire en apparence que la taxe Tobin la remise ne cause du
fonctionnement de l’OMC, etc. ; Le remise en cause de la loi du profit et de la généralisation
de la régulation marchande peut aboutir par elle-même, sinon toujours à la remise en cause
consciente, du moins à des incursions significatives dans la propriété privée des moyens de
production, à condition que certaines perspectives stratégiques soient éclaircies.
De là en effet découle le deuxième débat
2) Deuxième débat :
Si on fait le diagnostic, sur la base de la réponse à la question précédente, que la tendance à la
marchandisation absolue constitue la caractéristique dominante de ce capitalisme total, en
extension et en profondeur (marchandisation de tous les aspects de la vie humaine), la
perspective stratégique sur laquelle débouche sa remise en cause ne va pas de soi, et peut
dessiner des contours forts différents voire opposés en termes de modèle de société.
En effet, “ le monde n’est pas une marchandise ”, “ un autre monde est possible” sont des
mots d’ordre dont la dont la dynamique et de la puissance unificatrice dépassent la diversité et
l’hétérogénéité du mouvement altermondialiste. Mais ils en contiennent aussi toutes les
ambiguïtés et les contradictions potentielles.
D’un côté en effet, on l’a vu, ces deux phrases confèrent à la contestation de la
mondialisation libérale sa portée anticapitaliste globale : la satisfaction des besoins de la
majorité de la population, la préservation des biens communs de l’humanité, des services
publics, doivent de façon inconditionnelle, passer avant les objectifs de profit et les lois de la
marchandise.
Mais d’un autre côté, comme perspective de lutte, la “ démarchandisation du monde ”, de
même que l’ “ autre monde possible ”, peuvent revêtir bien des visages. Cet objectif
débouche en effet sur la remise au premier plan la valeur d’usage des biens produits,
l’orientation de la production vers la satisfaction directe des besoins, la remise en cause des
liens sociaux dépersonnalisants du marché : ces programmes peuvent se mettre en oeuvre de
deux façons, fondamentalement contradictoires entre elles en termes d’émancipation humaine
et notamment d’émancipation des femmes, aboutissant à deux grandes catégories de projets
de société aux antipodes l’un de l’autre.
Le premier projet vise à arracher pied à pied toutes les dimensions de la vie humaine aux rets
de la marchandise : cela signifie un combat pour la défense et l’extension des service publics,
d’une protection sociale collective, des domaines de la gratuité, des biens communs de
l’humanité, de la production de biens et services utiles en fonction des besoins, bref de toute
la sphère de l’appropriation sociale. La perspective est alors une construction collective
consciente qui constitue un au-delà du marché. Or le caractère extrême de la logique néo-
libérale de la phase actuelle du capitalisme, décrite ci-dessus, a deux corollaires : le premier,
c’est que cette perspective, à l’arrivée, ne peut se dessiner de façon cohérente que comme un
au-delà du capitalisme ; le second, c’est que certaines de ses lignes de forces sont présentes
dans la société actuelle, à l ‘opposé d’une quelconque « compromis » qu ne dispose d’aucun
espace, dans les conquêtes du mouvement ouvrier que le capitalisme contemporain n’a de