
                      Jeux de verbes 
                       
 
 
                      Fabienne Bergmann 
  
 Depuis le livre de la Genèse qui nous raconte l'histoire des patriarches – donc une 
suite de faits  – l'hébreu aime les verbes. Il les aime tant qu'il est très élégant d'en 
placer plusieurs dans une même phrase ou d'y répéter plusieurs fois la racine lexicale.    
La répétition, honnie en français, peut être une tournure de style des plus élégantes en 
hébreu. Dans l'hymne de Rosh Hashana דעו םלועל ךולמי 'ה ָל ָמ 'ה ,ֶל ֶמ 'ה, qui prône le 
règne de Dieu au présent, au passé et au futur pour l'éternité, le verbe   ךלמ (malakh = 
régner) revient trois fois dans la même phrase.    
Ce phénomène de répétition se poursuit à plusieurs reprises dans la suite du texte et 
c'est justement ce qui lui donne toute sa poésie : le vers  ימ דוחיב בושי יבשוי לכיחםיד  
(kol yoshvé yeshouv beyihoud meyahadim) joue sur la répétition de la racine 'ב'ש'י  − 
d'où viennent les termes résider, habitants, localité etc. − puis sur celle de   'ד'ח'י  à la 
forme verbale du piyel, דחיי (yihed =  assigner, dédier, consacrer), sur laquelle se 
forment aussi les substantifs intimité, exclusivité ou caractéristique, mais aussi des 
formes adjectives telles que particulier, singulier, ensemble ou adverbiales telles que 
précisément, particulièrement, spécialement).  
 
Un autre vers du même cantique, םידמלמ דמלב אבצ יאבוצ לכ (kol tsové tsava be lamed 
melamdim), joue d'abord sur les racines 'א'ב'צ – qui donne les mots אבצ (tsava = 
armée, mais aussi multitude ou le verbe à la forme paal qui signifie se rassembler, 
s'attrouper), puis sur la racine 'ד'מ'ל sur laquelle se forme les mots étude, 
enseignement, apprendre et enseigner. 
 
Dans la strophe suivante, on trouve la phrase  שודקמ שודק ישודק לכםישידקמ ה  (kol 
kodché kadoch mikedoucha mekadchim) où la racine 'ש'ד'ק – de laquelle découlent les 
termes : sacré, sanctifier, sanctification, inviolabilité – apparait dans quatre mots sur 
cinq.   
 
Un autre passage de la prière de Roch Hashana, le ןטק יודיו (vidouy katan), n'est qu'une 
suite de verbes, par ordre alphabétique, de aleph à tav.  
 
Ashamnou, bagadnou, gazalnou, 
dibarnou dofi. 
etc… 
אונמש .בונדג .גונלז .דיפוד ונרבי. 
הוניוע .וונעשרה .זונד .חונסמ. 
טרקש ונלפ .יער ונצע .כונבזי .לונצ. 
מונדר .ניונצא .סונרר .עוניוו. 
פונעש .צונרר .קףרוע ונישי .רונעש. 
שונתחי .תונבעי .תוניע .תונעתע.  
 
 
La traduction, évidemment, perd en concision et en "élégance":