Comment le Transforming Growth Factor bêta 1 contrôle-t-il le développement de
maladies auto-immunes?
Comprendre comment notre système immunitaire est régulé est essentiel. Des déficiences dans cette
régulation entraîne des troubles graves, parmi eux des maladies dites auto-immunes telles que le
diabète de type I, la sclérose en plaque, les myocardites, thyroïdites, ou encore la polyarthrite
rhumatoïde. Ces maladies reposent sur un même mécanisme de base : une perte de la tolérance au
soi.
Le Transforming Growth Factor bêta (TGF-b) est une cytokine polypeptidique dont la sécrétion est
ubiquitaire. Les trois formes, TGF-bêta 1, 2 et 3 servent de régulateurs positifs et négatifs aux
programmes de différenciations et de proliférations de nombreux types cellulaires. En se liant à leur
récepteur commun, les trois isoformes du TGF-bêta induisent l’activité kinase du domaine
intracellulaire de leur récepteur TGFbêta-RII qui, en retour, phosphoryle le domaine kinase la sous-
unité TGF-bêtaRI. La phosphorylation de cette dernière facilite la régulation de gènes « Smad-
dépendants » et active d’autres voies de signalisation indépendamment des facteurs de transcription
Smad. Au sein du système immunitaire, le TGF-bêta1 est prévalant et joue un rôle crucial dans la
régulation de la réponse immunitaire. Des souris déficientes en TGF-bêta1 développent des
pathologies auto-immunes sévères, touchant différents organes (pancréas, foie, cœur), responsables
de la mort des animaux dès 4 trois semaines de vie. Du fait des effets multiples du TGF-bêta sur une
grande variété de tissus et, de la large distribution, au sein mais aussi en dehors du système
immunitaire, du récepteur au TGF-bêta, la compréhension des mécanismes cellulaires responsables
des graves troubles auto-immuns observés chez ces animaux déficients en TGF-bêta1 était très
difficile.
Julien Marie et son équipe ont entrepris de déterminer les cellules cibles de l’effet immuno-régulateur
du TGF-bêta. Les lymphocytes T sont généralement impliqués dans un grand nombre de maladies
auto-immunes. Par ailleurs, in vitro, la privation des lymphocytes T en TGF-bêta conduit à leur
prolifération. Cette population lymphocytaire est donc apparue aux chercheurs, en toute logique,
comme une cible potentielle des effets immuno-régulateurs du TGF-bêta sur le contrôle des maladies
auto-immunes. Afin d’adresser le rôle du TGF-bêta spécifiquement sur la biologie des lymphocytes T,
les chercheurs ont généré des souris dont uniquement les lymphocytes T (CD4 et CD8) sont
déficients en TGF-bêtaRII. Privés ainsi de signaux émis par le TGF-bêta les lymphocytes T
deviennent spontanément des cellules capables d’endommager de très nombreux organes comme le
pancréas, le foie, le cœur, la moelle épinière etc, conduisant à de nombreuses maladie auto-imunes
et à la mort des animaux des 4 semaines de vie. Ainsi la simple ablation de la voie de signalisation du
TGF-bêta dans les lymphocytes T induit des symptômes similaires à la privation de la cytokine elle
même, révélant l’activité régulatrice majeur du TGF-B au niveau des lymphocytes T. Si leur
développement au sein du thymus semble non ou peu affecté, en périphérie les lymphocytes T privés
de la voie de signalisation du TGF-bêta s’engage spontanément mais spécifiquement dans un
programme de différenciation cytotoxique et pro-inflammatoire (Granzyme A+ et B+, Lamp1+,
FasLHigh, IFN-ghigh, TNF-a high) à l’origine de la destruction de très nombreux organes.
Cette perte de tolérance au soi a conduit Julien Marie à analyser les compartiments des lymphocytes
T régulateurs CD4+ CD25+ (Treg) et NKT connus pour jouer un rôle majeur dans la régulation de
nombreuses maladies auto-immune. Les Treg sont caractérisés par l’expression du facteur de
transcription Foxp3 qui contrôle leur différenciation et fonction. Les cellules NKT, quant à elles,
expriment des marqueurs de cellules « natural Killer » (NK) mais également des lymphocytes T dont
un récepteur T présentant la particularité de reconnaître des antigènes lipidiques. Si le développement
thymique des Treg semble normal, aucune cellule NKT ne se développe en l’absence de signalisation
via le TGF-bêta. Par ailleurs, à la périphérie, les cellules régulatrices Foxp3+ sont quasi inexistantes.
Ainsi, le TGF bêta joue une rôle fondamental dans le développement thymique des cellules NKT et
dans la maintenance à la périphérie des Treg.
Une analyse plus fine des populations lymphocytaires T a permis aux chercheurs de révéler la
présence de cellules exprimant des marqueurs de cellules NK et un récepteur T qui, contrairement au
cellules NKT conventionnelles, reconnaît des antigènes protéiques. Par analogie, ils ont qualifié cette
population de ncNKT pour non-conventionnelle NKT. Les ncNKT représentent 20% des lymphocytes
T spléniques chez les animaux déficients en TGF-bêtaRII au niveau de leur lymphocyte T, alors que
d’ordinaire ils ne constituent que 1 à 2% des lymphocytes T. Les cellules ncNKT, semblent constituer
un stade final de différenciation lymphocytaire T, expriment de très fort niveau de cytokine pro-
inflammatoire et présentent une activité cytotoxique exacerbée contre les cellules du soi.
En contrôlant le programme de différenciation cytotoxique des lymphocytes T, et le développement de