Version du 4 juin 2015 NOTES POUR UN PROJET D’ALLOCUTION DE LA MINISTRE DES RELATIONS INTERNATIONALES ET DE LA FRANCOPHONIE, MADAME CHRISTINE ST-PIERRE DANS LE CADRE DU FORUM ÉCONOMIQUE INTERNATIONAL DES AMÉRIQUES UNE STRATÉGIE ÉCONOMIQUE POUR LA FRANCOPHONIE Montréal, le 9 juin 2015 Monsieur le Ministre du Développement international et de la Francophonie du Canada, Monsieur le Directeur de la Francophonie économique à l’OIF, Monsieur le Directeur de cabinet du président de la Banque ouestafricaine de développement, Monsieur le Directeur des Études et des Prévisions financières du ministère de l’Économie et des Finances du Maroc, Monsieur le Consultant principal de CITC-Investment & Trade Consultants, Monsieur le Président de la Bourse des valeurs du Cameroun, et Secrétaire général de la Fédération des Associations professionnelles des établissements de crédit de la CEMAC, Madame la Présidente-Directrice générale de Développement international Desjardins, Mesdames, Messieurs, chers amis, Le XVe Sommet de la Francophonie, tenu en novembre dernier à Dakar, est à marquer d’une pierre blanche à plusieurs égards, dont l’adoption d’une Stratégie économique pour la Francophonie n’est pas le moindre. 1 Voilà que pour la première fois, collectivement, les États et gouvernements membres de l’Organisation internationale de la Francophonie s’entendent pour favoriser un développement économique, équitable et durable, de l’espace francophone. Cette orientation s’inscrit dans un environnement qui change. L’Afrique, qui rassemble une majorité des pays francophones, se classe au deuxième rang des continents pour le rythme de croissance économique. L’Afrique récolte le dividende, comme avant elle l’Europe, l’Amérique et l’Asie, de l’effet conjugué d’un grand nombre de jeunes adultes et de la baisse de la natalité dans certains des pays africains les plus avancés, comme le Sénégal. 2 Toutefois, les enjeux de santé, de sécurité alimentaire, d’éducation, de formation, d’emploi, d’industrialisation et de compétitivité restent extrêmement importants, et plusieurs populations africaines demeurent parmi les plus vulnérables aux chocs économiques ou environnementaux. La gouvernance démocratique demeure également une préoccupation dans certains pays. Il n’y a pas une, mais bien des Afriques, contraintes d’agir sur tous les fronts à la fois. Aussi, tout partenaire est-il le bienvenu, dans un rapport mutuellement bénéfique. Or, la Francophonie est précisément un espace qui permet ce genre de partenariat. Beaucoup de nos forces sont complémentaires et le potentiel de développement qui en découle pourrait être proprement étonnant. L’adoption de la Stratégie économique pour la Francophonie vise un développement axé sur la création d'emplois pour les jeunes et les femmes et reconnaît le rôle complémentaire des entreprises traditionnelles et d’économie sociale. 3 La Stratégie économique pour la Francophonie a deux axes : elle promeut une économie centrée sur l’individu et renforce l’espace économique francophone en favorisant un espace d’échanges, de coopération et de solidarité. La stratégie vise l’insertion des jeunes et des femmes, la mobilité des entrepreneurs, la circulation de l’innovation, la consolidation des réseaux d’institutions, de professionnels et d’entrepreneurs, l’intégration et la coopération régionale. Le Gouvernement du Québec souhaite donner une impulsion à la mise en œuvre de la stratégie en se donnant des orientations autour de cinq thèmes : le développement des affaires, les femmes, les jeunes, la formation professionnelle et technique et, enfin, l’économie sociale. Ainsi, nous encourageons nos entreprises et nos institutions à dynamiser leurs échanges, leurs investissements et leurs partenariats avec les pays de l’Afrique francophone. 4 Et nous les encourageons à le faire de manière responsable, en prenant en compte les effets de leurs activités sur l’environnement dans lequel ils viennent s’insérer. Les entrepreneurs et les gens d’affaires ont en effet un devoir de responsabilité à l’endroit de leur environnement, de leur communauté, de leurs employés. Leur rôle dans la cohésion sociale est réel et doit être reconnu. La responsabilité sociale des entreprises doit s’incarner dans leurs activités réelles. Elle doit faciliter la participation des populations locales, pour une croissance plus inclusive. Elle doit faire appel à la concertation avec les autorités publiques, en toute transparence. Les entreprises québécoises à l’étranger sont des « ambassadrices ». Elles sont une carte de visite du Québec. Elles en façonnent l’image et la réputation. 5 Nos activités internationales doivent donc se faire dans le plus grand respect de nos partenaires nationaux et locaux. Sur le long terme, cette responsabilité sociale est susceptible d’assurer une plus grande compétitivité des entreprises qui feront le choix stratégique de s’investir dans une telle démarche. Par ailleurs, les actions du Québec se réaliseront en concordance avec la Politique économique du Québec, notamment en regard des exportations de biens et de services pour une meilleure prospérité du Québec, et elles favoriseront la mise en œuvre de la Stratégie économique pour la Francophonie. Nous comptons donc poursuivre les missions économiques et l’organisation d’événements de réseautage. 6 En ce moment même, une délégation de plus d’une douzaine d’entreprises québécoises effectue une mission économique de nature multisectorielle en Côte d’Ivoire, avec un accent sur les infrastructures, organisée par le ministère de l’Économie, de l’Innovation et des Exportations du Québec. Une autre mission économique, organisée par ce même ministère, se déroulera dans les semaines du 15 et du 22 juin, au Cameroun et au Sénégal; elle compte, elle aussi, plus d’une dizaine d’entreprises et d’organisations québécoises. Il s’agira notamment d’offrir des services aux entreprises africaines en gestion, en formation et en génie-conseil. Nous organiserons aussi deux ou trois missions au cours des prochains mois en Afrique. Plusieurs des contrats attribués aux entreprises québécoises sont financés par les institutions financières internationales, incluant la Banque africaine de développement. 7 Enfin, dans un redéploiement de notre réseau, qui prend en compte à la fois les priorités du gouvernement et l’évolution de la géographie économique mondiale, nous avons fait le choix d’implanter une représentation à Dakar, ouverte à nos entreprises et à nos partenaires sénégalais. Par ailleurs, si la Stratégie économique met l’accent sur les femmes, c’est que ces dernières sont des créatrices de richesses et leur autonomisation économique contribue à la croissance tant des économies que des entreprises locales. Leur pleine contribution au développement économique des pays du Sud doit être favorisée, notamment par la mobilisation politique des États et gouvernements, par le renforcement de l’accès des femmes aux leviers d’influence des pouvoirs ainsi que par des activités de formation à l’entrepreneuriat, à l’économie et aux normes. Il faut favoriser l’émergence d’une génération de femmes plus conscientes de leur rôle, de leurs droits, de leurs responsabilités et de leurs capacités à contribuer à l’essor de l’Afrique francophone. 8 Au dernier Sommet de la Francophonie, j’ai été ravie de rencontrer de jeunes Sénégalaises ayant participé au volet réciprocité du programme Québec sans frontières. Et tout aussi ravie de prendre part, à Thiès, à une activité de valorisation d’un projet de formation aux métiers avicoles financé par notre Programme québécois de développement international. Ces moments forts m’ont permis de saisir toute la portée des actions menées dans ce pays par nos organismes de coopération internationale. J’ai pu constater avec fierté que ces initiatives ont un effet important sur les conditions de vie de milliers de personnes, en particulier celles des femmes. Car nous avons fait de la condition des femmes une priorité de notre solidarité. Et nous en faisons une promotion dans cet espace de solidarité qu’est la Francophonie, puisqu’il est reconnu, en effet, que réduire les inégalités de genre est un des moyens les plus efficaces de lutter contre la pauvreté. 9 On sait que l’égalité véritable ne s’incarne que lorsque les femmes accèdent à l’autonomie économique. Par ailleurs, l’accroissement démographique accentue le poids des jeunes. La Francophonie s’est ainsi dotée, lors de son XVe Sommet, d’une Stratégie jeunesse de la Francophonie, qui est complémentaire à la Stratégie économique. Le Gouvernement du Québec travaille déjà à la mise en œuvre de cette Stratégie jeunesse, ayant collaboré étroitement à l’élaboration d’un projet d’envergure avec l’OIF, qui permettra non seulement de tirer profit du partage des meilleures pratiques en matière de politiques jeunesse dans l’espace francophone, mais aussi de développer des outils pour les gouvernements membres de l’Organisation internationale de la Francophonie. Ces outils faciliteront l’élaboration et la mise en œuvre de politiques jeunesses, notamment en matière d’employabilité ou de développement de l’entrepreneuriat. 10 L’avenir de la Francophonie économique repose en grande partie sur sa jeunesse, sa capacité d’innovation et son esprit d’entreprise, alors même que les jeunes des pays du Sud rencontrent d’importants défis d’insertion socioéconomique. Les enjeux relatifs à l’éducation citoyenne et économique des jeunes, à la formation entrepreneuriale, à la mobilité et à l’accès aux moyens d’information et de communication sont au cœur de la Stratégie. La formation professionnelle et technique est une condition essentielle de durabilité des retombées de la coopération et des partenariats dans les pays du Sud. Elle contribue à la création d’emplois décents, à l’insertion socioprofessionnelle des jeunes et à l’autonomisation économique des femmes. Le Québec peut y contribuer en partageant son expertise et ses savoir-faire, en tenant compte des besoins des populations et des marchés du continent africain. 11 Sur un autre plan, l’économie sociale est un important vecteur de développement local et de vitalité territoriale. L’expertise québécoise peut être, encore là, partagée. Enfin, s’il n’existe aucun accord de libre-échange entre le Canada et des pays d’Afrique francophone, le Canada a, toutefois, conclu ou négocié des accords sur la protection des investissements étrangers avec neuf pays africains : le Bénin, l’Égypte, le Burkina Faso, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Sénégal, la Guinée et Madagascar. Nous ouvrons, en somme, un chapitre de la jeune histoire de la Francophonie, où nous allons profiter plus que jamais de nos forces respectives pour relever des défis sur plusieurs fronts et nous tailler un avenir enviable. 12 L’évolution observée dans plusieurs pays africains, tout comme les ambitions économiques de la Francophonie, nous amène à affirmer notre engagement d’une manière structurée, intégrée, cohérente et inscrite dans le long terme. Je vous remercie de votre attention. 13