C'est du moins l'esprit premier de cette initiative qui doit être encouragée si l'on ne fait pas en sorte de la dévier
de son sens originel. Or, c'est à quoi aboutiront les réactions à l'emporte-pièce ci-dessus signalées.
En effet, qu'on le veuille ou non, la Tunisie est un pays dont la religion est l'islam; c'est la Constitution qui le
dit. Aussi, on ne peut se désintéresser du l'islam et de l'usage dévergondé que certains en font.
Par conséquent, il appartient à toutes les consciences honnêtes de rappeler que l'islam n'est pas qu'un culte et
qu'il est possible et même impératif de révolutionner son étude en revenant au riche legs de notre culture dont
l'audace, y compris dans le domaine strictement religieux, surprendrait plus d'un religieux aujourd'hui supposé
modéré.
Bien évidemment, pour être utile, l'accord en question doit confier les cours non pas à des imams, mais au
personnel de l'Éducation nationale ou même de l'Université; et on ne compte pas mal de brillants humanistes
spécialistes de la civilisation islamique.
Car c'est de la culture de l'islam qu'il s'agira en premier et non de culte qui n'est qu'affaire privée en islam pur,
n'ayant point à investir le domaine public. C'est la saine interprétation de l'islam qui l'impose.
Sortir de la confusion des valeurs
Doit-on rappeler ici que la confusion actuelle entre domaine privé et domaine public a défiguré l'islam qui fut
une foi des lumières en l'amenant aux turpitudes actuelles, le transformant en religion obscurantiste ? Souhaite-
t-on un islam daéchien en Tunisie ?
Pourtant, certains se croient autorisés, de bonne ou de mauvaise foi, de mélanger les deux domaines au
prétexte que l'islam est à la fois une religion et une culture. Or, justement, c'est l'islam lui-même qui fait la
distinction que nous rappelons, réservant la foi au domaine privé — où nul n'a le droit d'intervenir dans le
rapport direct entre Dieu et sa créature —, et le domaine public où la religion n'a pas droit de cité, étant
réservée à l'au-delà.
Ceux qui font un tel mélange embrouillent notre foi, créant une terrible confusion axiologique; ce faisant ils ne
relèvent pas de l'islam authentique, car ils y créent une église et une synagogue qui n'ont nulle place en islam
vrai. Qu'ils révisent donc leurs fondamentaux !
Au final, si l'on veille éthiquement à assurer des cours de qualité scientifique tout en les encadrant par des
activités culturelles de nature à éveiller l'esprit et le corps, on ne fera qu'honorer l'islam des origines qui est un
véritable art de vivre, magnifiant l'esprit libre dans un corps sain.
C'est cela l'islam, du moins l'islam tunisien qui a toujours été original, puisant non seulement dans une tradition
pour l'essentiel soufie, mais aussi dans le meilleur de la raison humaine, étant rationaliste et œcuménique.
Et c'est bien cet islam qu'il nous faut cultiver pour l'honorer en même temps que la Tunisie en ces temps de
turpitudes généralisées.