cousins les Muscadins, les Bucks ou les Incroyables ne furent que des
curiosités de l'Histoire de la Mode.
Les clichés sont tenaces et la foule ignorante continue de dépecer le dandy
de sa véritable originalité, de son essence, pour n'en garder que le pâle reflet
maquillé. C'est sur ce malentendu que furent sacrés dandy, ces dernières
années, tel sportif ou chanteur vulgaire ayant accepté de jouer les efféminés-
sandwiches pour quelque marque internationale. Et s'il n'avait été
disgracié, nul doute que le pâle et médiocre David Martinon aurait reçu ce
titre d'un journaliste de la presse illustrée comme prime à la jeunesse
ambitieuse et bourgeoise. Enfin, même chez de plus sérieux la confusion
règne et le dandy est alors un gentleman ou un honnête jeune homme à
coupé sport et à cigares.
Considéré dans sa seule superficialité, le dandysme est comme le satanisme
des adolescents, auxquels il manque une authentique croyance en Dieu
(préalable obligatoire à une authentique croyance et donc incantation à
Satan) : une vague agitation, éventuellement une bizarrerie. Dès lors, le club
est ouvert au premier endimanché venu. Mais ce que montre justement la
Philosophie du dandysme, et c'est là son importance, c'est que le dandysme
est, au-delà de son expression, construit sur des bases solides,
principalement de nature nietzschéenne et kierkegaardienne.
En effet, le dandy, produit du « siècle vaurien », est suspendu entre le Ciel
et la Terre, entre Dieu (mais quel Dieu puisque « nous l'avons tué ? ») et les
hommes (mais quels hommes : Homais, Nücingen, Queensberry ?).
Incapable, tant son dégoût est grand, de s'associer pleinement à l'humanité
médiocre, incapable aussi de croire véritablement en Dieu, le dandy en est
réduit à créer un entre-deux, une réconciliation de l'hédonisme épicurien et
de l'ascèse stoïcienne, une œuvre d'art totale, vivante (mais
subséquemment éphémère, c'est là sa tragédie), faite de chair et d'esprit :
lui-même.