LES MERMET DE LORRAINE
LA SAVOIE, TERRE DE NOS ANCÊTRES
Des articles déjà parus dans notre journal ont
évoqué l’origine certaine de nos ancêtres sur les terres de
Savoie. Le présent article a donc pour but de mieux faire
connaître cette région. La Savoie historique est aujourd’hui
divisée entre les départements de la Savoie ( 73, chef lieu
Chambéry), la Haute Savoie (74, chef lieu Annecy) et l’Ain
(01, chef lieu Bourg en Bresse). Chambéry fut longtemps le
centre des princes de Savoie qui régnèrent tout d’abord sur
la Savoie elle me puis sur le Piémont, la Sardaigne et
devinrent rois d’Italie de 1861 à 1946. La Savoie fut
rattachée définitivement à la France en 1860 en même temps
que le comté de Nice.
De par sa position géographique, à cheval sur les
versants français et italiens des Alpes, la Savoie fut de tout
temps très convoitée par ses puissants voisins et fut le
théâtre de guerres d’invasions avec son lot de souffrances.
DES ORIGINES
Au temps de la Gaule, dès le 6ème siècle avant JC, la
puissante tribu celte, les Allobroges, occupe le pays entre le
Rhône et l’Isère. En 218 avt JC, les Allobroges participent à
l’expédition du général carthaginois, Hannibal, contre
Romme mais le franchissement des Alpes coûte à l’armée
carthaginoise la moit de ses soldats. Ce n’est qu’en 121
AVT JC que les Romains parviendront non sans peine à
soumettre l’Allobrogie qu’ils rattacheront à la « province
Narbonnaise, mais la région alpestre ne fut définitivement
pacifiée que sous Auguste dans les premières années du 1er
siècle avt JC. C’est l’époque de la paix romaine (paxa
romana).
LA SAVOIE, TERRE ROMAINE
L’influence romaine s’est manifestée de quatre manières :
- mise en valeur agricole des parties basses
- création de voies routières extraordinaires avec deux
grands axes : Grenoble (Cularo) Genève (Genabum) et
Vienne (Vienna) Milan (Mediolanum) ; les principales
voies passaient par les cols.
- création de petites villes comme Aix (Aquae), Annecy
(Boutae)…
- introduction de la civilisation et de la langue latine puis du
Christianisme.
C’est en 380 après JC, qu’apparaît dans l’œuvre d’un
historien latin le nom de « Sapaudia », pour désigner
l’ancien territoire des Allobroges ; Sapaudia, (pays des
sapins), d’où serait dérivé le nom de Savoie.
LA FEODALITE
Le 5ème siècle de notre ère va connaître un
bouleversement politique et sociologique profond avec
la disparition de la civilisation romaine et son empire
suite aux invasions des peuples vivant au nord de
l’Europe (dits Barbares), en majorité germaniques, eux
même fuyant les peuplades asiatiques « turquo-
mongoles » venus de l’est, nommés les Huns dont la
réputation de terreur est légendaire. Les peuples
germaniques dont les Francs et les Burgondes, pénètrent
dans l’Empire Romain aux environs de 375 puis leur
progression aboutit à la prise de Rome en 410.
En 443, les Burgondes venus du Rhin, dont le
royaume fut envahi et détruit en 437 par les Huns,
migrent et s’installent en Sapaudia avec la permission
des Romains et l’aide du général romain Actius. Les
Burgondes fondèrent un nouveau royaume qui peu à
peu s’étendit des vallées du Rhône jusqu’aux Cévennes
et la Méditerranée. Moins d’un siècle plus tard, les
Francs, à l’origine des Mérovingiens et Carolingiens,
soumettent les Burgondes. Cette époque voit la montée
en puissance du christianisme avec la fondation des
grandes Abbayes bénédictines et des diocèses, autorité
morale et spirituelle dans cette période de chaos et
autorité sur laquelle s’appuiera la nouvelle dynastie
carolingienne. L’empire de Charlemagne, s’étend sur la
presque totalité de l’Europe mais la mésentente de ses
petits fils aboutira à sa division en 3 parties (traité de
Verdun en 843). Après cette division, la Savoie et les
pays de l’Ain, font partie du royaume de Lothaire qui
s’étend de l’Italie à la mer du nord en passant par les
Alpes, la Lorraine et le Luxembourg. La dislocation de
l’empire carolingien se précipite avec des invasions de
nouvelles ethnies : les Vikings par le nord et l’ouest, les
Hongrois à l’est et les Sarrasins au sud. Des razzias
sarrasines désolent la région l’Eglise représente la
seule autorité établie. La faiblesse de la monarchie face
à ces invasions conduit les grands propriétaires à se
défendre eux même : Comtes, Evêques, Abbés
entourent leur demeure, leur cité ou leur Abbaye de
fossés, de talus ou de palissades de bois. Les petits
propriétaires se plaçaient sous la protection des grands
auxquels, en échange, ils juraient fidélité ; vit le jour à
la fin du 9ème siècle, toute un hiérarchie de seigneurs et
de vassaux qui progressivement se mirent à battre
monnaie, lever les impôts, faire la guerre et rendre
justice : c’est la naissance de la féodalité avec un
enchevêtrement de fiefs sous le nom de Duchés,
Comtés, Vicomtés, Marquisats, Domaines….
La région connut les vicissitudes des partages
successoraux des rois francs carolingiens et passa
successivement du royaume de Provence à celui de
Bourgogne transjuranne avant d’être rattachée en 1032
au Saint Empire Romain Germanique. Cette époque voit
l’émergence des princes de Savoie et le Comte de
Maurienne , Humbert aux Blanches Mains, qui soutient
l’Empereur germanique, reçoit en 1034 le titre de
Comte de Savoie « portier des Alpes ». Cette famille va
régner jusqu’en 1946.
LA MAISON DE SAVOIE
Du seigneur féodal Humbert aux Blanches Mains
(début 11ème siècle) au dernier Roi d’Italie, Humbert 2,
fils de Victor Emmanuel 3 qui abdiqua en 1946, neuf
siècles de pouvoir ont fait de la Maison de Savoie la
plus ancienne maison souveraine d’Europe.
Ces princes surent profiter de leur maîtrise sur les cols
franco-italiens pour asseoir leur pouvoir. Ce rôle de
« portier des Alpes » offrit un pouvoir considérable aux
Comtes de Savoie qui en usèrent sans modération en
nouant alternativement des alliances avec leurs
différents voisins, ce qui leur permirent d’étendre
progressivement leur autorité sur des territoires voisins
de la Savoie proprement dite (la Bresse, le Bugey, le
Genevois, le pays de Gex, Nice). Signe du succès de
cette politique, en 1416, le Comté de Savoie sous
Amédée 8 est érigé en Duché par l’Empereur
germanique Sigismond de Luxembourg. En 1429,
Amédée 8 réunit le Comté du Piémont à la Savoie. Les
Princes de Savoie ont fait de Chambéry leur capitale et
leur Cour rivalisait alors par son faste avec celle des
plus grands souverains européens. (château à visiter)
Au milieu du 15ème siècle, la Savoie est un Etat qui
s’étend de la Bresse au lac majeur en Lombardie, du
pays de Vaud (nord du lac Leman en Suisse) à Nice.
La position clé de la Savoie en fit une région convoitée
ce qui explique son histoire mouvementée qui n’est
qu’une succession d’occupation par la France ou par
l’Espagne et de Traités la rendant à ses souverains. La
Maison de France et la Maison d’Autriche (Habsbourg
d’Espagne) convoitaient l’une et l’autre en effet la
possession des cols alpins entre la Méditerranée et la
Lombardie.
En 1536, François 1er envahit la Savoie qui demeurera
23 ans sous tutelle française jusqu’en 1559 (traité de
Cateau Cambrésis) où le Duc Emmanuel-Philibert de
Savoie recouvre ses domaines ; il transfère néanmoins
sa capitale à Turin, Chambéry étant jugée trop exposée
aux troupes françaises. Ce transfert marquera
l’orientation croissante de la Maison de Savoie vers
l’Italie.
En 1600-1601, sous Henri 4, la France envahit et
occupe de nouveau la Savoie qui aboutit au traité de
Lyon du 17 janvier 1601, la Savoie perd
définitivement la Bresse, le Bugey et le Pays de Gex
(voir article dans notre précédent journal relatant cet
événement).
Au 17ème siècle, la Savoie est encore occupée à 3
reprises par les soldats de Louis 13 et Louis 14. En 1720
le Duc de Savoie se voit attribuer la Sardaigne et
devient Roi de Sardaigne, étape essentielle dans ses
ambitions italiennes pour une couronne royale ; l’Italie
n’était alors qu’une mosaïque de petits Etats que leurs
rivalités ne cessaient d’affaiblir alors que grandissait
l’Etat savoisien appelé monarchie Sarde.
De 1742 à 1748, la Savoie est occupée par les
Espagnols alliés à la France dans la guerre de
succession d’Autriche. En 1792, les armées
révolutionnaires françaises occupèrent la Savoie qui
devient le département du Mont Blanc. A la chute de
l’Empire Napoléonien, le traité de Paris de 1815 restitue
la Savoie au roi Victor Emmanuel 1er. Le pays rentre
dans l’ère du « Buon governo », ordre moral dont les
mesquineries indisposent la population et les savoyards
lassés se tournent vers la France.
LE RATTACHEMENT A LA FRANCE
En 1858, lors de l’entrevue secrète de Plombières,
Napoléon 3 et le Comte de Cavour (Ministre de Victor
Emmanuel 2) décidaient qu’en échange de l’aide
française contre l’occupation autrichienne en Italie, il
serait cédé à la France la Savoie et Nice qui
deviendraient des zones neutres et à condition que les
populations y consentissent. Lors du plébiscite du 22
avril 1860, une majorité écrasante de « oui » demande le
rattachement de la Savoie à la France (130 533 oui et
235 contre).
Ainsi la famille de Savoie perdait le berceau de sa
dynastie. Néanmoins, les Princes de Savoie
continueront pour la plupart à se faire inhumer dans leur
nécropole qui se trouve à ’Abbaye de Hautecombe sur
les bords du lac du Bourget.
La région est alors partagée en deux départements : la
Savoie et la Haute Savoie.
Dès 1860 les savoyards durent déchanter :
l’administration précédente s’était toujours efforcée de
tenir compte de la diversité des composantes du
royaume, bien loin des exigences centralisatrices
françaises. Les préfets nommés en 1860 étaient
étrangers à la Savoie ; les relations entre les savoyards
et les fonctionnaires français furent détestables. Après la
défaite française de 1870 une opposition savoyarde voit
le jour et conteste le plébiscite de 1860 ; un fort courant
sécessionniste naît en Savoie du Nord.
1914-1918 : la neutralité de la Savoie n’est pas
respectée par la France ; la participation de la
population à la 1ère guerre mondiale entraîne la
disparition de plus de 43 000 savoyards sur une
population totale de 500 000 habitants soit 8,5% de la
population. En 1919 le traité de Versailles supprime
officiellement la neutralité de la Savoie. En 1932 la
Cour Internationale de justice de La Haye condamne la
France et l’invite à rétablir la zone neutre conformément
aux traités antérieurs, ce qu’elle ne fera pas.
Un mouvement régionaliste existe encore aujourd’hui
en Savoie mais demeure marginal. Depuis 1994 existe
la ligue savoisienne qui réclame l’indépendance
complète prétextant que le traité de 1860 n’a pas été
respecté par la France et est donc caduc. Les
indépendantistes de la ligue savoisienne ont obtenu aux
élections régionales de 1998, 6,1% des voix.
Fait paradoxal, bien que dernière acquisition territoriale
française, la Savoie fut en quelque sorte l’un des
berceaux de la langue française. C’est à Annecy que fut
crée la première Académie en 1606 qui devait servir de
modèle à Richelieu pour l’Académie française. Les
instigateurs de l’Académie d’Annecy appelée
« florimontane » étaient Honoré d’Urfé, Antoine Favre
et enfin St François de Sales (1567-1622) le grand
homme de la Savoie qui domina toute la vie religieuse
du pays. Cette académie siège toujours à Annecy. Les
savoyards n’ont jamais parlé italien mais ils ont eu un
dialecte très ancien, le franco-provencal qui a été parlé
(non écrit) jusqu’à la seconde guerre mondiale. Un
grand nombre de toponymes viennent des patois
locaux : ainsi beaucoup de noms se terminent par « oz »
ou « az ». Il s’agit d’une transcription phonétique ; cette
finale signifie que le A et le O sont atones comme si le
mot se terminait par un e muet (exemple Clusaz se dit
Cluse) le Z n’est jamais prononcé.
QUELQUES SAVOYARDS ILLUSTRES :
François de Sales : (1567-1622) : Humaniste, évêque de
Genève en résidence à Annecy. Auteur de
« l’introduction à la vie dévote »
Les frères de Maistre : Joseph (1753-1821) et Xavier
(1763-1852) : philosophes adversaires de la révolution
et théoriciens de la monarchie absolue.
Claude Mermet (1550 - ?) Il naquit à Saint Rambert en
Bugey. Poète et auteur de différents ouvrages sur
l’orthographe française et différents traités comme
«Traité de consolation aux maris » . Un article lui sera
consacré dans un prochain journal.
Monge : (1746-1818) , mathématicien
Berthollet : (1748-1822), chimiste
LA SAVOIE D’AUJOURD’HUI
La Savoie est une région de montagne longtemps
consacrée exclusivement à l’élevage (d’où une belle
tradition d’industries fromagères avec le gruyère de
Beaufort, le Reblochon, la Tome, le fromage
d’Abondance, le Persillé, le Bleu de Termignon etc…)
et à l’exploitation forestière. L’époque contemporaine
apporta les usines électriques, les barrages (la houille
blanche) et enfin le tourisme ; cette économie
contemporaine a préservé la région de l’avenir incertain
dont un exode rural intensif la menaçait. Le tourisme est
la première activité économique de la Savoie.
La Savoie est une région de lacs (le Leman, le lac
d’Annecy, celui du Bourget et celui d’Aiguebelette) et
de sources thermales parmi les plus célèbres de France
(Evian, St Gervais, Aix les Bains, Challes les Eaux,
Marlioz, la Lèchère, Brides).
La Savoie est un traditionnel lieu de passage entre la
France, la Suisse et l’Italie avec deux grands cols
connus depuis l’antiquité : le petit St Bernard et le Mont
Cenis, renforcés et doublés par trois grands tunnels,
celui du Mont Blanc achevé en 1965 et les deux tunnels
routiers du Mont Cenis et ferroviaire de Fréjus.
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