CCO sémiologie aux urgences Cours n°1 Prof : Dr Thomas Poussant Mercredi 04 mars 17h30 Ronéotypé par Laure CHAUFOURIER Premier examen clinique d’un patient vu aux urgences Plan I. Introduction II. Observation III. Degré d’urgence IV. Interrogatoire V. Palpation VI. Percussion VII. Auscultation VIII. Conclusion et vidéos I. Introduction Nous allons étudier l’examen clinique d’un patient aux urgences, et les particularités de cet examen par rapport à l’examen clinique que l’on peut faire en stage, au cours d’une hospitalisation classique. L’enjeu de l’examen clinique aux urgences, c’est d’évaluer le degré d’urgence. Il va falloir faire vite et savoir s’il faut prendre en charge le malade très rapidement ou si on peut se donner un peu de temps. Les temps de l’examen clinique sont les mêmes qu’au cours d’un examen classique : - L’observation L’interrogatoire La palpation La percussion L’auscultation Nous allons étudier successivement chacun de ces temps. II. L’observation L’observation a été placée en premier car c’est un temps essentiel lorsqu’un patient arrive aux urgences. Le sujet vient pour un problème bien défini qu’il va falloir préciser. La première impression que l’on a du patient, sur la façon dont il se tient, est ce qu’il est capable de déambuler par exemple est extrêmement importante. On regarde : La position du malade : déambulant, debout, assis, semi-assis, couché à plat. Cela va donner des informations sur l’état du patient. Par exemple, un patient qui se plaint d’une dyspnée et qui ne peut pas s’allonger, qui est obliger de rester assis, on parle d’orthopnée et ça évoque une insuffisance cardiaque gauche. L’insuffisance cardiaque gauche donne un œdème du poumon. Quand le ventricule gauche ne marche pas le sang va s’accumuler en amont c’est à dire dans le poumon. La pression dans les capillaires pulmonaires va augmenter, elle va devenir supérieure à la pression dans les alvéoles et l’eau va passer des vaisseaux dans les alvéoles. C’est l’œdème pulmonaire. Les sujets vont mieux quand ils sont assis car quand ils sont assis les jambes pendantes le sang va se redistribuer vers le ventre et vers les jambes. Le sang ne va plus congestionner le poumon, le sujet sera soulagé. Un sujet assis qui n’arrive pas à se relever souffre d’une hypotension orthostatique. Un malade qui ne peut pas se lever est forcément un malade plus grave qu’un malade qui se tient debout. - On regarde si le patient est conscient ou pas. Pour cela on utilise le score de Glasgow. Ce score utilise 3 dimensions : les yeux (sur 4), la voix (sur 5) et la motricité (sur 6) Ce score a été au départ créé pour les traumatismes crâniens mais est utilisé par extension pour tous les troubles de la conscience et de la vigilance. Pour coter un score de Glasgow on regarde si le sujet parle, s’il répond et ouvre les yeux à la stimulation sonore et à la douleur. Ce score est coté de 3 à 15. On regarde ensuite comment le malade respire. On mesure sa fréquence respiratoire (il faut donc avoir une montre avec soi !), on regarde l’amplitude respiratoire. Un sujet qui a des mouvements respiratoires asymétriques, c'est-à-dire un hémithorax qui ne bouge pas, ca peut être un épanchement pleural. Quand on a un pneumothorax le poumon ne peut pas se gonfler, le poumon est complètement rétracté, l’hémi-thorax ne bouge donc pas. Quand on demande au patient de faire une pause respiratoire, le thorax est asymétrique, le coté du pneumothorax est plus soulevé. En effet l’expiration est un phénomène passif, normalement la cage thoracique diminue de volume car le poumon se rétracte. Ici le poumon est déjà rétracté, la cage thoracique va donc avoir tendance à s’expandre. Le poumon ne ramène plus la paroi vers le corps. On a donc une asymétrie de l’ampliation thoracique, à l’inspiration on a hémi-thorax plus volumineux du coté atteint. Quand on regarde la peau on peut regarder : La cyanose : coloration bleue des téguments qu’on trouve au niveau des extrémités (lèvres, ongles, lobe de l’oreille). Cette coloration est liée à la présence de plus de 5g/L d’hémoglobine réduite. Par contre quand on a un sujet qui saigne, la cyanose sera très tardive. Un sujet qui a 7g d’hémoglobine, si on attend qu’il cyanose sera déjà mort. En revanche un insuffisant respiratoire qui a une polyglobulie aura une cyanose précoce. - La pâleur : on la regarde au niveau des conjonctives. Les principales causes de pâleur sont l’anémie et le malaise vagal. Au cours d’un malaise vagal il y a une chute du débit cardiaque, avec une redistribution des débits aux organes nobles comme le cœur, le poumon, le rein, au détriment des territoires cutanés, on aura donc une pâleur. - Les marbrures ou livedo. C’est un signe de choc. C’est lié à la vasoconstriction. Un état de choc c’est lorsque le système cardiovasculaire et respiratoire n’est pas capable de fournir suffisamment d’oxygène aux tissus. On voit donc apparaitre des défaillances d’organes.les autres signes cutanés de choc sont la froideur cutanée et l’augmentation du temps de recoloration cutanée. Le temps de recoloration cutanée se regarde en pinçant l’ongle entre les 2 doigts et on attend que ça se recolore. Normalement ça se recolore en moins de 3secondes. III. Les signes de gravité L’enjeu des urgences est de répondre à la question est ce que le patient est grave ? Est-ce que je dois m’en occuper tout de suite ou peut-il attendre un peu ? Les items à vérifier sont : A : Airways : les voies aériennes supérieures. C’est essentiel : en effet si on a un corps étranger dans la trachée, le patient ne va pas tenir très longtemps. B : breathing : respiration normale ? on va rechercher la fréquence respiratoire, les signes vus précédemment, mais aussi les signes d’hypercapnie : sueurs, confusion, HTA, tachycardie, marbrures. L’hypercapnie donne une acidose respiratoire qui donne une activation sympathique qui explique ces signes. Quand l’hypercapnie est sévère on a un retentissement neurologique, c’est l’encéphalopathie hypercapnique. On parle de bradypnée quand FR<12/min Les étiologies de bradypnée sont l’alcalose métabolique, l’intoxication aux morphiniques et plus généralement tous les comas. Normalement la respiration se divise en ¼ du temps inspiration et ¾ du temps expiration. S’il y a un obstacle sur les voies aériennes supèrieures on a une dyspnée inspiratoire, l’inspiration est allongée. On a un cornage, c’est un tirage des sterno-cléido-mastoïdiens, avec un creusement au niveau des creux sus claviculaires. On parle de tachypnée quand la FR est augmentée La polypnée c’est une augmentation de la FR avec une ampliation thoracique importante. En cas d’état de choc hypovolémique on a une polypnée. Cela va permettre d’augmenter le retour du sang du secteur périphérique vers le secteur central c'està-dire vers le cœur. L’asthme donne une tachypnée. Dans l’asthme on a une dyspnée expiratoire avec des râles sibilants. On évalue la gravité d’une crise d’asthme en faisant parler les gens. Pour évaluer la gravité d’une détresse respiratoire on demande au malade de compter sans reprendre son souffle. Normalement on peut compter au moins jusqu’à 6. Si le malade ne peut pas compter plus que 1 il est dans un état extrêmement grave. C : Circulation. On lui prend les pouls. On doit prendre un pouls central (c'est-àdire fémoral ou carotidien) D : Disability. le malade est-il conscient ? Ces étapes prennent peu de temps et permettent d’évaluer le degré d’urgence. Une défaillance d’un de ces 4 points est une urgence vitale à traiter très rapidement +++ IV. Interrogatoire Aux urgences, le patient vient généralement avec des plaintes qu’il va falloir caractériser. Il va falloir cibler ce que l’on cherche en fonction de ce que dit le patient. C’est un temps essentiel car c’est à partir de ce que nous dit le malade qu’on va construire le schéma diagnostique et thérapeutique. Cela va orienter l’examen clinique. On conduit l’examen clinique de manière à avancer dans le diagnostique. D’abord on va se rendre compte si le malade est cohérent ou pas, s’il est capable de parler, s’il a une désorientation temporo-spatiale… il va surtout nous expliquer pourquoi il est venu aux urgences. Si le malade vient pour une douleur thoracique on va lui demander : - Le mode d’installation, le début de la douleur - S’il en a déjà eu ou pas - Les FDR cardio-vasculaires : tabac, dyslipidémies, HTA (prise d’anti hypertenseurs) diabète, antécédents familiaux… On va retracer l’histoire de la maladie RECENTE+++. On n’a pas le temps de retracer tous les antécédents. Il faut savoir cibler les questions. Il est par exemple important de connaitre le statut du patient par rapport au VIH pour les éventuels gestes. Avec la liste des médicaments on peut connaitre les pathologies chroniques. On recherche les antécédents : – HIV – Intoxication aiguë et/ou chronique – Cardio-vasculaire – Autres organes V. Palpation On palpe les pouls carotidiens, huméraux et fémoraux. La palpation des pouls permet de rechercher leur présence ou absence, la fréquence cardiaque et la régularité du rythme cardiaque (important chez quelqu’un qui vient pour une douleur thoracique) Si on a une asymétrie des pouls avec un pouls radial gauche moins bien perçu qu’à droite cela évoque une dissection aortique. Pour confirmer la sensation qu’un pouls est moins fort que l’autre, on prendre la pression artérielle. On va rechercher une différence entre les 2 bras, pour parler d’asymétrie, il faut qu’il y ait une différence de 30 mmHg de la pression artérielle systolique entre les 2 bras. Douleur thoracique+asymétrie du pouls = c’est une dissection aortique, c’est une urgence, la mortalité est de 1% toutes les heures ! On palpe l’abdomen. On recherche une défense, une contracture. La contracture est le signe d’une péritonite. C’est une urgence. On palpe les 9 cadrans, on recherche si les gens ont mal et on essaie de localiser la douleur. On va compléter l’examen en palpant le foie, la rate et les reins. Un foie mesure normalement 12cm. On repère le bord supérieur par la percussion et pour palper le bord inférieur on passe les doigts sous le grill costal en se mettant à la gauche du malade et en lui demandant d’inspirer. On peut également utiliser un stéthoscope on gratte avec le doigt l’abdomen et quand on entend un frottement, c’est qu’on arrive au bord inférieur. On regarde le bord inférieur et le bord supérieur et on mesure la taille du foie. En cas d’hémorragie digestive, on recherche un gros foie qui peut être un foie de cirrhose, associé à une ascite et à une circulation veineuse collatérale qui est un signe d’hypertension portale. Une circulation veineuse collatérale thoracique est un signe d’obstruction de la veine cave supérieure. En cas de cirrhose le bord inférieur du foie est dur et tranchant. La rate n’est palpable qu’en cas de splénomégalie. On fait bouger les 4 membres VI. Percussion La percussion est peu utile en urgence sauf en cas : De pneumothorax, la percussion sera alors tympanique aux apex D’épanchement liquidien dans la plèvre, la percussion sera alors mate aux bases Chez un sujet qui vient pour des douleurs abdominales et chez qui on suspecte un ulcère perforé, on recherche un tympanisme pré-hépatique qui témoigne du passage d’air dans le péritoine. On a un tympanisme au dessus du bord supérieur du foie. VII. Auscultation L’auscultation doit être systématique, on ausculte les poumons, on ausculte le cœur à la recherche de souffles et de bruits surajoutés. On ausculte également les 3 axes artériels : les carotides, les artères fémorales et l’aorte abdominale. On recherche un souffle témoin d’une sténose. En revanche une absence de souffle ne signifie pas une absence de sténose! Pour entendre un souffle il faut qu’il y ait un flux turbulent et donc un certain degré de sténose. (60 à 70% de réduction du flux). De même une sténose sub-occlusive ne donnera pas forcément de souffle. L’anévrysme peut également donner un souffle. Un anévrysme est une dilatation d’un vaisseau. Une dissection est un hématome dans la paroi du vaisseau. Cela donne une réduction du calibre. On ausculte également les bruits hydro-aériques (BHA). Une absence de BHA signe une occlusion, un infarctus mésentérique ou une péritonite. Globalement cela signe un arrêt du transit et donc une occlusion. Les autres signes d’occlusion à rechercher sont l’arrêt des matières et des gaz, les vomissements, les douleurs abdominales. VIII. Conclusion et vidéos : Les messages à retenir sont les particularités de l’examen clinique. Il faut bien comprendre qu’aux urgences il y a un grand flux de patients (50 ou 100 patients) et qu’il faudra essayer de détecter ceux qui ont besoin de soin urgent, et pour qui il y a une mise en jeu de leur pronostic vital. Le pronostic vital est mis en jeu quand il y a une défaillance d’une des 3 fonctions vitales que sont la respiration, la circulation et la conscience. On doit se poser la question en regardant le patient, est ce que je vois des signes de défaillance d’organe ? En cas de défaillance respiratoire par exemple on peut voir un tirage (mise en jeu des muscles respiratoires accessoires), une respiration abdominale paradoxale, une diminution de l’ampliation thoracique ou encore le signe de Hoover qui est un creusement du bas de la poitrine à l’inspiration au lieu d’un élargissement en temps normal. Face à de tels signes on sait que le patient est grave, il va bientôt s’arrêter de respirer et nécessite une prise en charge urgente. Le signe de Hoover se voit chez un sujet qui a une insuffisance respiratoire chronique, comme un sujet emphysémateux, chez qui au repos les poumons sont distendus donc le diaphragme est déjà abaissé. Normalement le diaphragme se contracte à l’inspiration et s’abaisse. Chez un insuffisant respiratoire chronique quand le diaphragme va se contracter il ne va pas pouvoir s’aplatir puisqu’il est déjà abaissé, la seule chose qu’il va pouvoir faire c’est se rétrécir. C’est ce qui donne le creusement de la partie inférieure du thorax à l’inspiration. Là le prof a passé plusieurs vidéos de malades en détresse respiratoire. Les signes de détresse respiratoire ça se voit donc la première chose à faire c’est de regarder un malade, regarder comment il respire, comment il se tient. Parmi ces vidéos il y a une femme avec une turgescence jugulaire importante témoignant d’une insuffisance cardiaque droite. Devant une insuffisance cardiaque droite aigue, associée à une polypnée on doit penser à une embolie pulmonaire. Les autres signes d’insuffisance cardiaque droite sont l’hépatomégalie, l’hépatalgie à l’effort, les œdèmes des membres inférieurs (uniquement dans les insuffisances cardiaques droites chroniques) Les autres vidéos illustraient les signes d’insuffisance respiratoire. Dédicace : Et oui, même si cette ronéo ne sera pas publiée sur papier, pourquoi se priver du plaisir de faire une dédicace ? En plus vous ne serez pas obligés de l’imprimer… Tout d’abord un grand merci à Auriana, pour tout le boulot qu’elle fait pour notre promo… A toutes celles sans qui la fac ne serait pas la même et dont je ne peux plus me passer, merci pour votre amitié: A Delphine, ma conseillère lecture attitrée, à ta bonne humeur, à ton rire si communicatif, à tous nos délires A Victo, ma compagne de train, toi qui m’a conduite pendant toutes ses années à la gare et ailleurs, merci pour ton écoute, ta bonne humeur, et tes déclarations d’amour après qqes verres ! A Noémie, ma petite P2 à la voix merveilleuse, à toutes tes petites expressions qu’on aime tant, à nos soirées entre filles A Céline, notre lyonnaise du week-end, reste à paris quand même, nous aussi on veut t’avoir près de nous ! A Esther, notre petit hérisson national ! A ton coté débrouillard, ton humour, ta bonne humeur à toute épreuve ! A Claire, à tes petits « oh bah mince de mince ! », nos fous rires en amphi, tes talents de danseuse et cuisinière (tes macarons on les aime !) A Aurore, toujours là pour faire la fête avec nous ! A Delphine T. à notre option cinéma, aux pauses muffins et à l’HDN ! A mes acolytes de stage hépato Beaujon : Baptiste, Marion, Muriel, Servane et Hélène, ainsi que nos externes. Enfin dédicace à ma famille, en particulier mes sœurs Aude et Louise que j’aime très fort. Merci pour votre soutien. A toutes mes ami(e)s qui ne sont pas à la fac A mon Kevin, sans qui je ne serais pas la même… merci pour tout le bonheur que tu m’apportes. Bonne continuation à tous et j’espère que cette ronéo vous convient !