THERMODYNAMIQUE
LA THERMODYNAMIQUE est une science relativement jeune. Elle a pris naissance au
XIXe siècle sous la forme d’une discipline embrassant l’étude de toutes les transformations qui
s’accomplissent à notre échelle (phénomènes macroscopiques), c’est-à-dire aussi bien les
changements d’états physicochimiques que les changements de positions seuls envisagés en
mécanique. Elle concerne à la fois les systèmes dits ouverts , parce qu’ils peuvent échanger de
la matière et de l’énergie avec le milieu extérieur, les systèmes fermés , qui n’échangent que
de l’énergie avec le monde ambiant, et les systèmes isolés , privés de tout échange.
Elle repose sur deux propositions fondamentales. L’une, appelée premier principe de la
thermodynamique, introduit le concept d’énergie et exprime une propriété de conservation
impliquant que l’énergie, considérée sous toutes ses formes, doit rester constante au cours de
la transformation d’un système isolé. L’autre, appelée second principe , introduit le concept plus
subtil d’entropie et exprime une propriété d’évolution impliquant que, dans un système isolé,
l’entropie ne peut que croître, ou demeurer constante à l’état d’équilibre [cf. ENTROPIE].
La principale originalité du second principe repose précisément sur cette propriété
d’évolution, nécessairement associée à la direction du temps. Les travaux de L. Boltzmann
(1844-1906), en théorie des gaz, relatifs à ce même concept d’entropie, interprété du point de
vue mécanique à l’échelle moléculaire, ont permis d’assimiler la notion d’accroissement
d’entropie à l’évolution ordre X désordre qui caractérise tout système isolé. Mais, en dépit de ce
résultat dont l’influence sur le développement ultérieur de la thermodynamique fut considérable,
la conséquence la plus directe fut l’élaboration d’une discipline macroscopique autonome,
applicable aux systèmes complexes, comportant le concept d’irréversibilité , ayant son génie
propre, en accord avec celui de la mécanique mais toutefois distinct sous le rapport de ses
principes fondamentaux.
D’un point de vue historique, les deux principes trouvent leur origine dans le non-possumus
du moteur perpétuel (premier principe) et dans celui du mouvement perpétuel (second
principe). La première présentation d’une théorie complète remonte à l’œuvre de
R. J. E. Clausius (1822-1888), publiée en 1850 sous le nom de Abhandlungen über die
mecanische Wärme Theorie . L’ampleur des vues de l’auteur est manifeste dans son
interprétation du contenu des deux principes: L’énergie du monde est constante et L’entropie
du monde tend vers un maximum . Cette généralisation imagée mais audacieuse d’un système
isolé fut, par la suite, l’objet de plusieurs controverses. Après Clausius et ses contemporains
W. Thomson (lord Kelvin, 1824-1907) et E. Clapeyron (1799-1864), il faut citer l’école des
énergétistes et principalement: P. Duhem (1861-1916), H. von Helmholtz (1821-1894),
W. Ostwald (1853-1932), W. J. M. Rankine (1820-1872). Mais, en dépit de toutes ces
contributions à une doctrine de portée générale, le succès recueilli par une telle
thermodynamique strictement phénoménologique devait bientôt être limité au seul domaine des
états d’équilibre , faute d’informations plus complètes que la seule inégalité de Clausius propre
aux processus irréversibles. La contribution la plus importante a été fournie, en 1876, par
J. W. Gibbs (1839-1903) avec son Equilibrium of Heterogeneous Substances . Cette œuvre est
regardée aujourd’hui comme la base de la physicochimie. Des compléments importants ont été
apportés quelques années plus tard par Duhem.
Ce n’est qu’après 1920 que l’intérêt se porte à nouveau vers la thermodynamique des
processus hors d’équilibre, spécialement avec l’introduction, en 1922, de la notion d’affinité
chimique par T. De Donder (1872-1957) et, en 1931, des lois de réciprocité de L. Onsager sur
les coefficients phénoménologiques intervenant dans les lois de cinétique linéaire. On envisage
ici les lois unissant les courants irréversibles Ji (chaleur, diffusion...) aux forces généralisées Xi
(gradients thermiques, de potentiels...) tels qu’ils apparaissent dans l’expression bilinéaire