Contexte - Institut canadien pour les innovations en photonique (ICIP)

PHOTONS
Automne 2003
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Contexte
La biophotonique
La biophotonique, c’est-à-dire l’application de la
science et de la technologie de la photonique aux
sciences de la vie, est un domaine en plein essor
dont les retombées en médecine clinique, en
biologie et en biotechnologie sont nombreuses et
variées. Des travaux sont déjà en cours pour
améliorer la détection précoce et le traitement du
cancer, pour augmenter la résolution en
microscopie, pour imager de la façon la moins
invasive possible les fonctions tissulaires et pour
guider les médecins lors de chirurgies et de
traitements. Les recherches permettent aussi de
mettre au point des instruments qui sondent les
gènes dans les cellules et qui repèrent la
présence de produits chimiques dangereux ou
d’agents pathogènes dans l’environnement.
L’ICIP joue un rôle de premier plan en favorisant
le développement de la biophotonique au Canada
grâce à son réseau national de chercheurs et à
son programme de formation. Ce programme a
d’ailleurs permis la tenue dans la région d’Ottawa
en novembre 2003 d’un colloque appelé
BioLIGHT dont un des buts était d’aider les
physiciens à s’intéresser au domaine des
sciences de la santé.
Le présent numéro contient quatre articles sur la
biophotonique. Une équipe de chercheurs basée
à Toronto, Hamilton et Sherbrooke rend compte
d’un projet visant à utiliser des impulsions
lumineuses extrêmement brèves (chacune d’une
durée approximative d’un milliardième de
seconde) dans le but d’activer des médicaments
servant à des traitements photodynamiques. Il
s’agit d’une méthode innovatrice qui peut être
appliquée à plusieurs affections dont les maladies
de la rétine qui causent la cécité (Two- photon
excitation photodynamic therapy). En utilisant des
impulsions ultrabrèves au lieu d’une source
lumineuse en continu, les scientifiques atteignent
la cible de l’activation du médicament avec
beaucoup plus de précision épargnant ainsi des
dommages aux tissus normaux adjacents. Il s’agit
d’une technique médicale qui n’aurait jamais vu le
jour sans le développement de lasers
ultrarapides, qui à la base avaient été conçus
pour des applications en industrie et en
télécommunications. Voilà donc un exemple du
potentiel que l’ICIP reconnaît en biophotonique.
Un groupe à Toronto et à Hamilton, en
collaboration avec une université au Brésil,
présente une technique optique, la
bioluminescence, qui sert à examiner les
phénomènes qui se produisent dans les tissus à
la suite d’un traitement photodynamique
(Bioluminescence imaging of tumour growth and
photodynamic treatment response). Le gène
responsable de la lumière se dégageant d’une
luciole est inséré dans les cellules d’une tumeur
au cerveau dans un seul animal de laboratoire
provoquant ainsi l’illumination de cette dernière.
Les scientifiques peuvent par la suite en obtenir
une image de façon non invasive au moyen d’une
caméra ultrasensible. Leur recherche démontre
que la bioluminescence offre la possibilité de
suivre la croissance de la tumeur au cerveau, sa
réaction au traitement photodynamique, puis la
reprise de sa croissance à la suite d’un traitement
sous-curatif. Avec les méthodes conventionnelles,
il aurait fallu utiliser plusieurs animaux de
laboratoire et en sacrifier entre cinq et dix à
chaque étape de l’étude.
Toujours dans le domaine du cancer, un projet
multidisciplinaire (Optical transillumination
spectroscopy for breast cancer risk assessment)
qui a été démarré avec l’appui de l’ICIP a mené à
un programme plus vaste financé par plusieurs
pays. Dans le cadre de ce projet, on étudie
comment la lumière traverse le sein à différentes
longueurs d’onde. Une corrélation est ensuite
établie entre les données recueillies et la densité
du sein telle que mesurée par mammographie par
rayons X. Les risques de développer un cancer du
sein sont reconnus être plus élevés chez la
femme dont la mammographie démontre une plus
grande densité. Par ce projet, les chercheurs
tentent d’établir que la lumière visible ou la
lumière qui se situe dans le proche infrarouge et
qui ne produit pas d’ionisation est en mesure de
fournir le même type d’information au sujet du
risque que le font les radiographies susceptibles
d’ioniser les atomes dans les tissus et qui sont par
le fait même plus dangereuses. L’information
obtenue ouvrirait la voie à un meilleur dépistage
des femmes à haut risque qui pourraient par la
suite être suivies plus étroitement ou traitées plus
rapidement dans le but de diminuer le risque. Bien
que relativement simple, la technologie
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photonique utilisée dans cette recherche pourrait
avoir un impact considérable.
Une collaboration entre biophysiciens et
ingénieurs en optique fait l’objet d’un article
intitulé Biophotonics tools for single-cell molecular
analysis: A lab-on-a-chip platform. Ces
scientifiques tentent de mettre au point un
nouveau système de laboratoire sur puce qui
permettrait de recueillir des données génétiques
et moléculaires à partir des cellules. Dans le
cadre de leurs travaux, des microcanaux sont
fabriqués dans le verre ou le plastique où peuvent
circuler des fluides. Une cellule est placée dans la
«puce » puis ouverte par laser. Son contenu
identifié au moyen de colorants fluorescents est
ensuite inséré dans les canaux par faisceau
optique. Puisque les divers éléments du contenu
cellulaire se déplacent à des vitesses différentes
dans les canaux, leur « signature » fluorescente
est repérée par une autre source lumineuse qui
sert de détecteur. Ce projet utilise toute une
panoplie d’instruments et de techniques
photoniques pour construire le dispositif de
mesure intégré, pour manipuler les cellules et
pour réaliser les mesures. En bout de ligne, le
projet du laboratoire sur puce permettra
d’effectuer des analyses unicellulaires de pointe à
faible coût.
Ces projets illustrent bien comment par leur
polyvalence, l’instrumentation et la technologie de
la photonique offrent de nouvelles possibilités à la
biologie et à la médecine. Les projets en
biophotonique au sein de l’ICIP évolueront avec le
nombre de scientifiques qui embrasseront ce
domaine et qui se distingueront tant au Canada
qu’à l’étranger.
Les nanostructures
La nanotechnologie concerne des objets dont les
dimensions sont inférieures à un millionième de
mètre, donc inférieures à la longueur d’une onde
lumineuse utilisée en vision ou en
télécommunications. La photonique et la
nanotechnologie se rejoignent au chapitre de la
génération et de la détection de la lumière. En
contrôlant avec soin les nanostructures présentes
dans les cristaux semiconducteurs, il est possible
de mettre au point des dispositifs
optoélectroniques d’une très grande efficacité aux
propriétés avancées.
Des chercheurs à la Simon Fraser University et à
la University of Toronto ont collaboré dans le but
de développer des techniques pour la fabrication
et la caractérisation cristallographique détaillée de
colonnes de GaAs (Microstructural
characterization of GaAs nanowires grown by
molecular-beam epitaxy). Ces colonnes
microscopiques sont 20 millions de fois plus
petites que les colonnes du Parthénon. À partir de
points catalyseurs formés par une couche d’or
ultramince, elles se développent en monocristaux
quasi-parfaits d’arséniure de gallium.
Les propriétés détaillées de ces cristaux doivent
être étudiées afin d’en déterminer le potentiel
d’utilisation dans les dispositifs laser et
optoélectroniques quantiques. On a eu recours
aux techniques de pointe de microscopie
électronique à transmission en place à la Simon
Fraser University pour cartographier, une couche
atomique à la fois, telles des rangées de briques,
la structure cristalline de façon à repérer les
quelques défauts et les changements de
planimétrie qui pourraient se présenter. Tout
comme les défauts d’uniformité dans les rangées
de briques d’un mur peuvent en affaiblir la
structure, les défauts planimétriques des cristaux
peuvent entraîner des changements dans les
propriétés optiques et électriques de ces cristaux.
La recherche a permis de découvrir que certaines
orientations de croissance étaient plus favorables
à la réalisation de monocristaux ne présentant
aucun défaut.
Cette même équipe s’est adjointe des collègues
de la University of Alberta pour étudier la réponse
électronique des nanofils aux impulsions
ultrarapides (Transient photoconductivity of GaAs
and AlGaAs nanowires). Dans le but de préserver
ces structures fragiles des connexions
électriques, l’équipe a détecté les électrons
générés par le dispositif en y faisant traverser une
forme d’énergie électromagnétique peu
commune. La radiation terahertzienne utilisée se
situe entre l’énergie thermique rayonnante et les
ondes radio. L’équipe a réalisé une première
mondiale en appliquant la spectroscopie
terahertzienne à la mesure de la
photoconductivité des nanocristaux induite de
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façon transitoire. Les résultats de l’expérience ont
permis d’approfondir les connaissances dans le
domaine. Plus précisément, ils ont démontré
comment les surfaces de ces fils microscopiques
influencent les mécanismes de photodétection et
autres fonctions optoélectroniques pour lesquels
ils s’avèrent si prometteurs.
La photonique non linéaire
Dans les systèmes actuels de
télécommunications les plus poussés, une seule
fibre est capable de transporter plusieurs signaux,
chacun à sa propre longueur d’onde (multiplexage
en longueur d’onde). Chaque signal peut être
récupéré à l’extrémité de la fibre et traité de façon
particulière. Certains signaux seront reçus;
d’autres se dirigeront vers une autre fibre et
seront transportés ailleurs. Avec le multiplexage
en longueur d’onde, il est impossible d’envoyer un
signal dans la fibre à la même longueur d’onde
qu’un autre signal. À l’heure actuelle, ce n’est
cependant pas pratique de changer la longueur
d’onde d’un signal optique à la recherche d’un
canal libre. Plusieurs chercheurs s’intéressent à
des méthodes qui permettront d’y arriver. Une
équipe à la McMaster University et à l’Université
d’Ottawa a mis au point une méthode tout optique
qui convertit la longueur d’onde en utilisant un
cristal qui reçoit à la fois le signal à convertir et un
signal optique de pompage d’une longueur d’onde
différente (Research and development of
PPMGLN wavelength conversion modules). À
intensité élevée, il arrive que les ondes
lumineuses ne fassent pas seulement passer au
travers l’une de l’autre, mais qu’elles
interagissent. De telles interactions non linéaires
entre deux signaux lumineux génèrent un
troisième signal qui reproduit le signal d’entrée à
une longueur d’onde différente.
Dans sa recherche, l’équipe a découvert que la
polarisation du signal d’entrée n’a aucune
incidence. Il s’agit d’une percée importante car la
polarisation ne peut être contrôlée dans les liens
de transmission par fibre.
Les interactions non linéaires peuvent également
se produire dans le verre. Grâce à des structures
fibrées spéciales qui intègrent des trous d’air, on
peut concentrer la lumière en un endroit restreint,
ce qui la rend très intense. Les fibres à gaine
trouée fabriquée à l’INO à Québec ont permis à
des chercheurs de l’Université Laval de démontrer
que des impulsions lumineuses très intenses aux
couleurs bien définies peuvent être converties en
un large éventail de couleurs simplement en
circulant dans la fibre (Supercontinuum
generation mechanism in polarization-
manintaining microstructured fibers). En
fabriquant une fibre de manière à ce que la
polarisation de la lumière influence la vitesse à
laquelle elle voyage, les chercheurs ont mis au
jour les mécanismes qui sont à la base de
l’élargissement spectral. La capacité de produire
de la lumière en « supercontinuum » présentant
un large éventail de longueurs d’onde qui sont
reliées les unes aux autres revêt un riche potentiel
pour certaines techniques d’imagerie et peut-être
même pour les systèmes de télécommunications
de pointe.
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